Conférence de presse de M. Robert Hue, secrétaire national du 21 février 2001, sur l'emploi et la politique de l'emploi, Paris le 21 février 2001.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Merci de votre présence à cette conférence de presse.
Elle est consacrée à vous faire connaître quelques-unes unes des grandes initiatives que prépare actuellement le Parti communiste sur les questions de l'avenir du travail humain; pour éradiquer le chômage et la précarité; pour aller vers une société de plein emploi.
Un plein emploi d'un nouveau type, à la hauteur des exigences qu'imposent les bouleversements scientifiques et technologiques de notre époque et tout particulièrement la révolution informationnelle. Un plein emploi, par conséquent, dont la recherche est inséparable d'un considérable effort en terme de formation des hommes.
Et permettez-moi de rappeler, à ce propos, ce que j'avais indiqué au printemps 1999, pendant la campagne des Européennes: nous estimons que la question de la mise en formation de l'ensemble des chômeurs est une nécessité fondamentale.
J'ajoute que ce que nous voulons vous dire aujourd'hui est en rapport étroit avec l'actualité.
Pour deux raisons.
D'abord parce que nous sommes engagés dans la construction d'un projet politique dans lequel, chacun le comprend bien, les questions du travail occuperont une place centrale. J'y reviendrai.
Ensuite, cela ne vous a certainement pas échappé, parce qu'elles constituent, dans le contexte électoral des municipales et des cantonales, une préoccupation essentielle des Français, pratiquement au même niveau que les problèmes de sécurité.
Mais sur tout cela, et sur le calendrier qui rythmera nos initiatives, nous reviendrons dans un instant. Je veux, auparavant, livrer quelques commentaires sur ce qu'inspire aux communistes la situation actuelle de l'emploi, et les attitudes respectives du Medef et du gouvernement sur cette question.
Personne ne peut contester les résultats obtenus depuis juin 1997. Certes, le nombre des chômeurs a sensiblement baissé. Mais nous savons bien que ce mouvement s'est accompagné d'une véritable envolée de la précarité, avec les conséquences qui en découlent: une fragilisation de la croissance et un accroissement des inégalités. Vous vous souvenez sans doute des déclarations très optimistes de l'été 2000, selon lesquelles la croissance était durablement garantie. Or voici que de nombreux prévisionnistes font part de leurs doutes sur les perspectives pour l'année 2001. Ils observent que l'atterrissage de l'activité américaine s'annonce plus difficile - et peut-être plus brutal - que prévu. Il en résulterait un ralentissement de l'activité en Europe et, donc, une réduction sensible du rythme des créations d'emplois dès le 1er semestre de cette année.
Je veux y insister tout particulièrement: il serait dangereux de faire l'impasse sur cette réalité; d'en minorer les effets possibles et de ne pas engager les réorientations nécessaires qu'elle appelle dans la conduite de l'action gouvernementale.
Disant cela, je ne plaide pas, naturellement, pour je ne sais quel dirigisme tatillon de l'Etat dans l'économie, dans la gestion des entreprises. En revanche, j'affirme que les responsables politiques ne peuvent pas rester passifs dans ce domaine où, par ailleurs, le Medef se montre, lui, particulièrement entreprenant.
J'avais dit, à la veille de l'été dernier, que ce dernier occupait désormais une posture véritablement politique. Les faits ont, depuis, confirmé cette appréciation. Ce qui préoccupe essentiellement MM. Seillière et Kessler ce n'est pas la défense des intérêts corporatistes des membres de leur organisation. Bien plus que cela, ce qu'ils veulent c'est créer les conditions afin de dégager complètement le terrain au libéralisme. L'affirmation de la supériorité du contrat sur la loi, comme ce fut le cas par exemple à propos de l'Unedic il y a quelques mois, n'est pas une astuce destinée à peser dans une négociation difficile: c'est un projet auquel le Medef tient particulièrement, qu'il veut inscrire dans la réalité et généraliser à toute la société.
Ce n'est pas l'objet de notre rencontre d'aujourd'hui mais il en est de même, on vient de le voir, à propos de l'avenir des retraites.
Et d'une manière générale l'ensemble de ce que le patronat appelle la "refondation sociale" vise à bouleverser de fond en comble les institutions, les acquis, les pratiques qui fondent les relations sociales dans notre pays. Au service d'un seul objectif: plier toute la société au dogme de la rentabilité financière, quel que soit le coût humain, social, économique de cette recherche effrénée.
Alors, je le répète, faut-il se contenter de fustiger de temps à autre, les prétentions du Medef ? Ou plus précisément: la gauche plurielle doit-elle dénoncer les excès, les ravages de la course à l'argent-roi en affirmant simplement qu'elle se propose -un peu, et quand elle le pourra- d'en limiter les conséquences ?
Faire ainsi ce serait laisser le champ libre au libéralisme. Au demeurant, ce qui s'est passé il y a quelques mois avec l'Unedic, et plus récemment avec la décision de recourir à l'impôt négatif est préoccupant.
En vérité, la gauche est confrontée à des choix décisifs. Ou bien elle limite son action à juguler, à réguler les excès du capitalisme, et j'ai la conviction qu'elle subira les lourdes conséquences politiques de cette médiocre ambition. Ou bien elle choisit de se placer dans une tout autre perspective, pour faire prévaloir une logique neuve, centrée sur les besoins des hommes et de la société, et elle rencontrera alors les aspirations profondes d'une majorité de notre peuple.
Vous l'avez compris: c'est cette seconde voie que choisissent sans hésiter les communistes. Et c'est à lui donner crédibilité, cohérence que nous voulons nous employer. Nous ne partons pas de rien: depuis des années nous avons accumulé les expériences et formulé de nombreuses propositions. Mais il faut faire plus, beaucoup plus qu'aujourd'hui et, surtout, il faut faire autrement.
C'est ce que nous avons décidé d'entreprendre, et nous inscrivons cet effort dans une bien plus vaste ambition que nous avons discutée fin janvier lors d'une réunion de notre conseil national: l'élaboration d'un projet communiste moderne, novateur, à la hauteur des défis du 21ème siècle. Ainsi le nouveau parti communiste que consacrera le congrès extraordinaire que nous réunirons au mois d'octobre prochain sera porteur d'un projet politique susceptible de faire grandir l'exigence de ce que j'ai appelé une "alternative populaire" au libéralisme et au social libéralisme.
C'est dire qu'il ne s'agit pas pour nous de nous positionner en "appoint" de la sociale démocratie; en "boîte à idée" pour lui permettre de gauchir une politique dont elle déciderait, seule, du contenu.
L'ambition transformatrice du nouveau parti communiste ne peut se résumer à son rôle -si utile soit-il- au sein de la majorité de gauche plurielle à laquelle il entend contribuer, et à ses efforts pour ancrer à gauche la majorité.
Voilà pourquoi, sur les questions qui nous occupent aujourd'hui, nous allons donner une ampleur et une force nouvelles à nos propositions pour une autre organisation de la société, fondée sur la satisfaction des besoins humains et non sur la logique inhumaine, prédatrice de la rentabilité financière.
J'ai dit ma conviction qu'une telle visée a de l'avenir. Le sondage réalisé par l'institut CSA et que l'Humanité publiera demain en est un témoignage. Les Françaises et les Français expriment des exigences qui appellent, de la part des responsables politiques, beaucoup d'initiatives pour se hisser à leur hauteur.
Et j'ai tout autant la conviction que ce que nous envisageons d'entreprendre dans les prochaines semaines -et que Jacques Nikonoff vous exposera dans un instant- est également très prometteur.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.pcf.fr, le 19 avril 2001)