Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre des affaires étrangères et européennes, sur la contribution des Alliances françaises au rayonnement de la culture et de la langue françaises dans le monde, Paris le 24 janvier 2011.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : 33è colloque international de l'Alliance française à Paris le 24 janvier 2011

Texte intégral

Monsieur le Président de la Fondation de l'Alliance française,
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil d'administration,
Mesdames les Présidentes, Messieurs les Présidents des comités,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse d'accueillir chacune et chacun d'entre vous, ici, au Quai d'Orsay - où je voudrais que vous vous sentiez chez vous -, à l'occasion de votre 33ème congrès annuel.
Puisque nous sommes dans les périodes de voeux, je commencerai par m'adresser à chacune et à chacun d'entre vous pour vous adresser des voeux très chaleureux et très sincères, de santé, de réussite dans vos actions, et puis des voeux de bonheur. Je sais que tout ceci sera toujours au service de cette cause à laquelle vous êtes attachés : la cause de la langue française, de la France et de la Francophonie.
Depuis près de 130 ans, les alliances françaises contribuent à faire connaître notre langue, notre culture dans le monde entier. Sur tous les continents, les alliances françaises portent l'image de la France telle que nous l'aimons, d'une France fière de ses valeurs, de son patrimoine intellectuel et artistique, riche de ses talents, forte de son inventivité.
Partout, vous défendez «l'honneur de la pensée française», selon les termes du Général de Gaulle. L'honneur de partager un héritage culturel, forgé au fil des siècles, inscrit au plus profond de notre histoire. L'honneur de porter des valeurs universelles bien au-delà des frontières de l'hexagone. L'honneur de défendre, non pas une culture, mais des cultures, dans leur diversité, de défendre l'idée même du respect à l'égard des cultures, de défendre aussi l'éloge de la différence et de la fraternité dans la différence.
Ces missions sont plus que jamais nécessaires, à la fois au monde qui est en train de se constituer, au rayonnement de la France. C'est bien la raison pour laquelle je souhaite placer les Alliances françaises au coeur de notre politique d'influence.
Mesdames et Messieurs,
Face aux défis de la mondialisation, la France sait pouvoir compter sur le réseau des Alliances françaises.
Ces défis, quels sont-ils ? Si nous regardons bien ce qui est en train de se créer sous nos yeux, nous voyons se créer une sorte de monde multipolaire où, sur tous les continents, s'affirment des blocs démographiques, économiques, technologiques de près d'un milliard d'habitants, si nous regardons la Chine, l'Inde, l'ensemble de l'Afrique, l'Amérique du Sud.
C'est également, par rapport à cette apparition de nouveaux pôles, le défi d'un monde menacé par l'uniformisation, uniformisation culturelle, linguistique, - j'aurais peut-être du la citer en premier -, juridique.
Et puis, les défis du monde actuels, ce sont aussi les défis des nouvelles technologies qui sont en train, beaucoup plus encore qu'on peut le percevoir aujourd'hui, de transformer, je dirais même de bouleverser le rapport que nous pouvons avoir entre l'information et le support de l'information. Finalement, tout ceci nous oblige à repenser les supports de notre influence dans le monde.
Dans ce monde toujours plus complexe, la France peut s'appuyer sur les Alliances françaises pour faire entendre sa voix.
900 Alliances françaises offrent à notre action culturelle un maillage territorial unique au monde. Leur statut juridique garantit leur liberté - je sais que vous y êtes attachés -, leur dynamisme, leur indépendance.
Il y a un point qui me paraît aussi très important. Quand on est à la tête de l'administration depuis un certain temps, on se rend compte qu'il y a toujours une certaine distance. Quand l'administration dit quelque chose, il y a, nous le savons bien, une forme de réticence. L'ancrage des alliances françaises dans les sociétés civiles tisse des liens beaucoup plus étroits, beaucoup plus directs, beaucoup plus confiants avec les populations locales. Il s'agit là d'un point important de l'influence.
Nous avons un grand atout : l'engagement des hommes et des femmes ; les hommes et les femmes que vous êtes et que vous représentez. L'engagement exceptionnel des bénévoles - et c'est la fondatrice de la Fondation du bénévolat qui vous le dit, j'y suis extrêmement sensible -, l'engagement exceptionnel, aussi, de fonctionnaires, de contractuels, en faveur du dialogue des cultures, du débat d'idées, de l'enseignement de la langue française, oui ce sont là des atouts qui viennent conforter notre capacité d'influence.
Je salue tout particulièrement le travail de Jean-Pierre de Launoit, président de la Fondation, et celui de son secrétaire général, Jean-Claude Jacq. Tous les deux, je ne sais pas comment vous faites : vous vous déplacez en permanence sur les cinq continents pour encourager les équipes, vous assurer de la bonne marche des alliances et soutenir les directeurs, avec un dévouement et une énergie inlassables. Je tiens à vous en remercier tout particulièrement.
Mesdames et Messieurs,
Je crois réellement, et j'ai essayé de le dire, je l'espère d'une façon qui soit entendue par tous, les Alliances françaises sont un instrument unique au service du rayonnement culturel de la France. Je veux essayer d'en tirer toutes les conséquences pour, en même temps, faire en sorte de valoriser au mieux cette capacité d'influence. Vous le savez, une de mes ambitions majeures dans ce ministère est de développer l'influence de la France sur tous les continents.
Puisque les Alliances françaises sont au coeur de cette stratégie d'influence dynamique et modernisée, elles doivent trouver toute leur place dans notre action. Il doit y avoir, sans vouloir toucher en quoique ce soit à leur liberté et leur indépendance, une véritable interaction, une action commune au service d'une finalité commune, celle du rayonnement de la France. Alors, les Alliances françaises, aux côtés des Instituts français, en liaison avec la Francophonie, doivent trouver toute leur place.
Cela suppose, bien entendu, je ne vais pas dire le contraire parce qu'il faut aussi être concret, un soutien de l'Etat. Ce soutien vous est acquis.
La convention triennale signée le 1er octobre dernier avec la Fondation Alliance française renforce et pérennise les liens entre le ministère et votre fondation.
En 2010, 40 millions d'euros ont été accordés à 445 alliances conventionnées dans 121 pays, soit en subventions, soit en mise à dispositions de personnels. J'ai obtenu, non sans mal, le maintien de cette aide pour 2011, dans la situation budgétaire générale.
Au-delà de cela, il est évident que permettre que les Alliances jouent leur plein rôle, suppose aussi un effort renouvelé de modernisation.
Trois priorités guident notre action.
D'abord, une meilleure coordination de nos efforts. Je vois beaucoup de gens passionnés par la défense de la langue et de la culture, mais qui sont dans des organismes différents ; il peut y avoir de la concurrence et de la perte d'énergie. Ce que je souhaite, c'est qu'il puisse y avoir une véritable synergie. Je pense que l'Institut français va nous permettre d'assurer une meilleure coordination des efforts de tous.
Sous l'autorité de Xavier Darcos, l'Institut est en charge de la promotion de la langue française à l'étranger, de la formation des professeurs, de la promotion du débat d'idées, des savoirs et de la culture scientifique, mais aussi de la formation des agents du réseau.
Cet Institut est au service des Alliances françaises dans le monde. Je vous encourage à répondre aux appels à projet qu'il va formuler dans tous les domaines : arts de la scène, arts visuels, débat d'idées, culture scientifique, soutien aux médiathèques, langue française. C'est ce que vous faites. Valorisez-le en répondant aux appels à projets.
Je vous invite aussi à solliciter les services de l'Institut dont vous pouvez avoir besoin. Je connais un certain nombre d'Alliances françaises que j'ai eu, au cours de mes ministères précédents l'occasion de visiter, sur beaucoup de continents, notamment sur le continent américain. Je pense effectivement qu'il y a parfois des actions qui peuvent être menées, en s'appuyant par exemple sur le cinéma. Sollicitez donc les services de l'Institut pour la diffusion du cinéma français ou du cinéma africain, puisque nous sommes dans le cadre de la francophonie, avec la Cinémathèque africaine. Il y a là des actions qui peuvent vous donner les moyens de démultiplier un certain nombre d'animations.
La deuxième priorité, c'est de poursuivre la professionnalisation
L'enseignement du français langue étrangère s'inscrit, vous le savez, dans un contexte très concurrentiel.
Développer une offre innovante pour attirer de nouveaux étudiants, valoriser la maîtrise du français comme un atout professionnel - je veux insister auprès des entreprises françaises, je leur ai déjà dis et je vais les réunir pour qu'elles sachent prendre cet aspect en compte -, faire du français une langue d'expertise, un capital culturel et technique, auprès des étudiants, salariés des grandes entreprises, cadres des institutions publiques, demeurent nos objectifs, auxquels vous avez à participer.
Je salue les efforts accomplis en ce sens et je peux vous dire que le ministère s'engage à vous aider à consolider et développer les partenariats nécessaires à notre action.
La troisième priorité, c'est le développement des nouvelles technologies. Je vous le disais tout à l'heure, dans l'évolution du monde actuel les nouvelles technologies jouent un rôle formidable. Là aussi, des efforts ont été faits et loin de moi l'idée de nier ce qui a été fait avant moi ; il faut toujours travailler sur le socle que l'on trouve car cela permet de se développer sans perdre de temps. Je pense néanmoins que nous pouvons aller plus loin, car le monde progresse autour de nous et il faut que nous aussi nous progressions.
Les cours de langue assurent bien sûr aux alliances leur autonomie financière. Ils en font aussi les vitrines de l'attractivité et de la capacité d'innovation de notre pays pour les 500.000 étudiants qu'elles accueillent.
Nous devons veiller à associer l'image de notre langue à celle de l'expertise et de la technologie. Il est très important dans la mentalité des personnes qui viennent que le français ne soit pas perçu comme une langue de l'histoire, mais comme une langue qui correspond au monde qui se créé.
Les tableaux blancs interactifs, les tablettes numériques ainsi que le recours systématique à Internet modernisent la classe de langue et contribuent à l'image de notre pays. Ce que je vous propose, c'est, ensemble, de faire preuve à la fois de la plus grande détermination et de la plus grande créativité. C'est le travail que vous faites sur le terrain, en même temps que la réflexion que nous pouvons mener, qui peuvent nous permettre d'être efficace et d'avancer.
Je vous ai dis tout à l'heure que je formais des voeux très chaleureux à l'égard de chacune et de chacun d'entre vous, à la fois pour votre vie personnelle et pour votre travail. Vous me permettrez de former également des voeux pour notre action commune au service du français, de notre langue, de notre culture, de nos principes et de nos valeurs, au service de la France.
Je forme de hautes ambitions pour notre politique d'influence. La France n'entend pas être le spectateur passif de la mondialisation. Nous n'avons pas à choisir entre la naïveté et la résignation. Nous n'avons pas à renoncer à la grandeur de la France.
Cette valeur de la France, vous la portez, chacune et chacun d'entre vous, à travers votre action au quotidien. Vous la portez à travers votre détermination. Vous la portez à travers votre action pour les autres. C'est en étant généreux avec les autres que nous sommes à la hauteur de ce que représente notre pays. Je crois que, ensemble, nous pourrons agir, pas simplement pour nous faire plaisir, pas simplement pour notre mission, nous agirons parce que nous sommes fiers d'être français et que nous sommes fiers de la France.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 janvier 2011