Texte intégral
P. Lapousterle - Est-ce que vous n'êtes pas inquiet, ce jeudi matin, de voir comment vos alliés, qui sont indispensables à la majorité actuelle et indispensables à la survie du Gouvernement auquel vous appartenez, ont réagi à l'intervention de M. Jospin avant-hier à la télévision ?
- "On préférerait plus de solidarité, bien sûr. Je crois qu'il faut se garder, dans la majorité plurielle qui soutient le Gouvernement, de surenchères excessives. Il faut essayer de travailler ensemble, d'améliorer en particulier au niveau du parlement les textes qui sont proposés. Mais il est bien évident que cette solidarité, c'est la clé du succès du Gouvernement et puis des futures élections de 2002."
Le parti communiste qui appartient au Gouvernement dit que le compte n'y est toujours pas. Les Verts qui appartiennent aussi au Gouvernement disent que L. Jospin est trop timide. Les radicaux de gauche - vos alliés les plus fidèles - regrettent le manque de perspectives. Ils sont tous au Gouvernement, ils sont tous dans la majorité et ils critiquent tous M. Jospin. Est-ce que ce n'est pas quand même un pied dehors et un pied dedans ? Est-ce que ce n'est pas plus grave qu'on ne le croit ?
- "Il y a une tendance à montrer, dans chaque formation politique, une identité, une demande supplémentaire. L'essentiel est que la majorité existe au niveau de l'Assemblée nationale, qu'elle continue à s'affirmer, qu'elle discute parce que la gauche plurielle, c'est la discussion."
Est-ce une discussion ? Est-ce que vous n'êtes pas déçu quand même ?
- "On peut porter ce type jugement. Je pense quand même que si chacun a tendance à vouloir faire entendre sa propre musique, sa propre intonation, on ne peut gagner qu'ensemble. C'est le message que j'ai envie de dire. Chaque formation politique est en relation avec d'autres organisations, avec des milieux sociaux différents. On peut exprimer les attentes de ces milieux mais le rôle du Gouvernement, c'est aussi d'arbitrer et d'essayer de faire avancer le pays."
On vous voit ce matin dans les journaux à côté de M. Jospin à l'Assemblée nationale en train de lui parler. Est-ce que vous pensez - parce que vous êtes mieux placé que d'autres pour répondre - que la majorité tiendra toute l'année qui vient ? Est-ce que vous pensez qu'au-delà de ce qui a été dit la majorité tiendra ou est-ce qu'il y a un risque d'accident politique ?
- "J'en suis convaincu. En tout cas, il n'y a pas d'alternative à gauche. Donc, je pense que le sens du travail en commun, de ce travail que nous accomplissons dans le cas d'une législature de cinq ans l'emportera. C'est ma conviction profonde même si à certains moments, chacun essaye de donner sa propre interprétation de la situation."
C'est du bruit pour rien ?
- "Non, ce n'est pas du bruit pour rien. Après les élections municipales, chaque formation politique a fait ses comptes et a essayé de déterminer les raisons qui ont conduit à la progression ou à la régression. Aujourd'hui, nous accomplissons ce travail gouvernemental, ce travail législatif dans la perspective d'une année. C'est là-dessus que la solidarité de la majorité se confirmera."
Pour des gens qui se moquaient des divisions de la droite ! Vous n'étiez pas un peu tôt donneur de leçons ?
- " La gauche est plurielle mais il faut que l'unité l'emporte sur la différence."
Pour ce qui concerne l'élection présidentielle, est-ce que vous pensez que les hésitations publiques qu'a exprimées M. Jospin sont vraies et fondées ?
- "L. Jospin s'est exprimé comme un homme qui assume des responsabilités gouvernementales mais aussi comme un homme qui a sa liberté de décision. Il verra à ce moment-là en 2002 - il a dit que la campagne présidentielle se jouerait en quelques semaines - la décision qu'il prendra."
Vous le pensez ?
- "En tout cas, aujourd'hui il est entièrement mobilisé par sa tâche de Premier ministre."
Ce n'est pas la question que je posais.
- "Ce ne sont pas des hésitations. C'est le sentiment d'un homme qui accomplit son devoir et qui décidera au moment déterminé de s'engager."
Le Premier ministre a dit que lorsqu'il prendra sa décision, le moment venu, il le fera en fonction de différents critères, dont l'un est le souhait des Français. C'est-à-dire qu'il souhaite que les Français expriment d'une façon ou d'une autre leur volonté de le voir être candidat à la présidentielle ? Est-ce un appel au peuple ?
- "Il a parlé d'abord du souhait de ses amis politiques, de ceux qui l'entourent, c'est une condition politique importante. Et puis aussi que dans l'opinion s'exprime un mouvement porteur."
Qu'est-ce "un mouvement porteur"?
- "Nous verrons, pour le moment c'est prématuré. C'est le souhait de L. Jospin et je pense que c'est de bon sens qu'on ne soit pas dans l'élection présidentielle dès aujourd'hui. Il y a beaucoup de travail à faire dans le pays."
Le climat social : il y a eu Danone et Marks Spencer évidement ; il y a aussi AOM et Air Liberté - les salariés d'AOM ont défilé hier à Paris ; il y a Philips au Mans dont on annonce de prochains licenciements, Moulinex et d'autres à venir soit des milliers et des milliers d'emplois dont on va annoncer la suppression. Quand, à votre avis, les textes dont ont parlé M. Jospin et Mme Guigou, ces les textes qui renforceront les difficultés à licencier pour les entreprises qui font du bénéfice seront-ils prêts ?
- "Il y a des emplois qui sont supprimés ou en passe d'être supprimés mais il y aussi une économie française qui créé des emplois. Il y a d'un côté les difficultés de certaines branches, la détresse des salariés et puis de l'autre quand même, 365 000 emplois qui devraient être créés pour cette année dans une économie qui, au cours de ces quatre ans, a pratiquement créé plus d'un million d'emplois. C'est quand même une réalité de la société française. Par rapport au licenciement, nous discutons d'un texte qui sur la modernisation sociale. Ce texte viendra au Sénat la semaine prochaine. E. Guigou annoncera mardi les dispositions qui visent à renforcer notamment les droits des comités d'entreprises en matière de licenciements. Plusieurs pistes sont à l'étude : approfondir les reclassements, renchérir le coût des licenciements, imposer de mesures de reclassement ou de réindustrialisation des sites. C'est là-dessus que nous travaillons. Donc, le rendez-vous est pour mardi à l'occasion de la première lecture au Sénat. Le texte devrait être adopté d'ici la fin juin."
La loi ne sera pas prête avant l'été ?
- "Non, parce qu'il y a toujours des délais de navettes et de discussions parlementaires."
Après l'été, au mieux peut-être même à l'automne ?
- "Non, d'ici le 30 juin. C'est notre objectif."
Cela dit, cela ne changera pas le fond des choses. Cela n'empêchera pas les entreprises de licencier ?
- "Nous sommes dans une économie de marché : les entreprises agissent en fonction des intérêts, de leurs propres capitaux et de leurs propres plans d'investissement. Mais, en même temps, il faut renforcer le pouvoir et les droits sociaux des travailleurs et de leurs représentants."
Sur la Corse : le mise en place du texte semble compliquée , il y a quinze jours de retard.
- "Non, ce ne sont pas quinze jours de retard mais simplement une organisation du travail parlementaire. On démarrera le 15 mai. Actuellement, la commission des lois examine les différents articles, essaye d'améliorer les rédactions mais l'esprit demeure. Je crois que l'objectif que nous nous sommes donnés à travers les accords Matignon qui ont été passés en juillet - c'est-à-dire de tracer les perspectives du développement..."
Est-ce qu'il est possible de faire le texte sans qu'il soit cassé par le Conseil constitutionnel ?
- "Difficile à dire à l'avance mais en tout cas, c'est l'objectif. Nous souhaitons qu'il y ait pour la Corse une perspective ouverte de développement qui prenne en compte le particularisme de la Corse."
Est-ce possible de passer entre les gouttes ?
- "Bien sûr, on va s'efforcer de le faire le plus possible. On connaît les contraintes, elles ont déjà été données par le Conseil d'Etat, mais on veut agir dans ce sens-là."
Là aussi, votre majorité n'est pas tout à fait d'accord.
- "Je pense quand même qu'il y aura une majorité parce que c'est la seule perspective à ouvrir pour la Corse."
Un mot sur la communauté urbaine de Lyon : est-ce que vous pensez - puisque le vote aura lieu demain - que la gauche peut l'emporter aussi après Lyon ou est-ce que la droite s'est mise en bonne position ?
- "La gauche a un retard : 81 voix pour la droite et 73 pour la gauche. Mais il y a des maires qui dans ces 81 voix peuvent penser qu'il faut trouver une majorité de gestion pour la communauté urbaine, surtout que ces 81 voix incluent les voix de M. Millon. Des maires plus centristes, moins politiques, peuvent penser qu'il faut faire fonctionner l'agglomération lyonnaise."
Le coup de Lyon peut donc être réédité ?
- "On peut effectivement gagner. Il faut gagner 5 voix."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 19 avril 2001)
- "On préférerait plus de solidarité, bien sûr. Je crois qu'il faut se garder, dans la majorité plurielle qui soutient le Gouvernement, de surenchères excessives. Il faut essayer de travailler ensemble, d'améliorer en particulier au niveau du parlement les textes qui sont proposés. Mais il est bien évident que cette solidarité, c'est la clé du succès du Gouvernement et puis des futures élections de 2002."
Le parti communiste qui appartient au Gouvernement dit que le compte n'y est toujours pas. Les Verts qui appartiennent aussi au Gouvernement disent que L. Jospin est trop timide. Les radicaux de gauche - vos alliés les plus fidèles - regrettent le manque de perspectives. Ils sont tous au Gouvernement, ils sont tous dans la majorité et ils critiquent tous M. Jospin. Est-ce que ce n'est pas quand même un pied dehors et un pied dedans ? Est-ce que ce n'est pas plus grave qu'on ne le croit ?
- "Il y a une tendance à montrer, dans chaque formation politique, une identité, une demande supplémentaire. L'essentiel est que la majorité existe au niveau de l'Assemblée nationale, qu'elle continue à s'affirmer, qu'elle discute parce que la gauche plurielle, c'est la discussion."
Est-ce une discussion ? Est-ce que vous n'êtes pas déçu quand même ?
- "On peut porter ce type jugement. Je pense quand même que si chacun a tendance à vouloir faire entendre sa propre musique, sa propre intonation, on ne peut gagner qu'ensemble. C'est le message que j'ai envie de dire. Chaque formation politique est en relation avec d'autres organisations, avec des milieux sociaux différents. On peut exprimer les attentes de ces milieux mais le rôle du Gouvernement, c'est aussi d'arbitrer et d'essayer de faire avancer le pays."
On vous voit ce matin dans les journaux à côté de M. Jospin à l'Assemblée nationale en train de lui parler. Est-ce que vous pensez - parce que vous êtes mieux placé que d'autres pour répondre - que la majorité tiendra toute l'année qui vient ? Est-ce que vous pensez qu'au-delà de ce qui a été dit la majorité tiendra ou est-ce qu'il y a un risque d'accident politique ?
- "J'en suis convaincu. En tout cas, il n'y a pas d'alternative à gauche. Donc, je pense que le sens du travail en commun, de ce travail que nous accomplissons dans le cas d'une législature de cinq ans l'emportera. C'est ma conviction profonde même si à certains moments, chacun essaye de donner sa propre interprétation de la situation."
C'est du bruit pour rien ?
- "Non, ce n'est pas du bruit pour rien. Après les élections municipales, chaque formation politique a fait ses comptes et a essayé de déterminer les raisons qui ont conduit à la progression ou à la régression. Aujourd'hui, nous accomplissons ce travail gouvernemental, ce travail législatif dans la perspective d'une année. C'est là-dessus que la solidarité de la majorité se confirmera."
Pour des gens qui se moquaient des divisions de la droite ! Vous n'étiez pas un peu tôt donneur de leçons ?
- " La gauche est plurielle mais il faut que l'unité l'emporte sur la différence."
Pour ce qui concerne l'élection présidentielle, est-ce que vous pensez que les hésitations publiques qu'a exprimées M. Jospin sont vraies et fondées ?
- "L. Jospin s'est exprimé comme un homme qui assume des responsabilités gouvernementales mais aussi comme un homme qui a sa liberté de décision. Il verra à ce moment-là en 2002 - il a dit que la campagne présidentielle se jouerait en quelques semaines - la décision qu'il prendra."
Vous le pensez ?
- "En tout cas, aujourd'hui il est entièrement mobilisé par sa tâche de Premier ministre."
Ce n'est pas la question que je posais.
- "Ce ne sont pas des hésitations. C'est le sentiment d'un homme qui accomplit son devoir et qui décidera au moment déterminé de s'engager."
Le Premier ministre a dit que lorsqu'il prendra sa décision, le moment venu, il le fera en fonction de différents critères, dont l'un est le souhait des Français. C'est-à-dire qu'il souhaite que les Français expriment d'une façon ou d'une autre leur volonté de le voir être candidat à la présidentielle ? Est-ce un appel au peuple ?
- "Il a parlé d'abord du souhait de ses amis politiques, de ceux qui l'entourent, c'est une condition politique importante. Et puis aussi que dans l'opinion s'exprime un mouvement porteur."
Qu'est-ce "un mouvement porteur"?
- "Nous verrons, pour le moment c'est prématuré. C'est le souhait de L. Jospin et je pense que c'est de bon sens qu'on ne soit pas dans l'élection présidentielle dès aujourd'hui. Il y a beaucoup de travail à faire dans le pays."
Le climat social : il y a eu Danone et Marks Spencer évidement ; il y a aussi AOM et Air Liberté - les salariés d'AOM ont défilé hier à Paris ; il y a Philips au Mans dont on annonce de prochains licenciements, Moulinex et d'autres à venir soit des milliers et des milliers d'emplois dont on va annoncer la suppression. Quand, à votre avis, les textes dont ont parlé M. Jospin et Mme Guigou, ces les textes qui renforceront les difficultés à licencier pour les entreprises qui font du bénéfice seront-ils prêts ?
- "Il y a des emplois qui sont supprimés ou en passe d'être supprimés mais il y aussi une économie française qui créé des emplois. Il y a d'un côté les difficultés de certaines branches, la détresse des salariés et puis de l'autre quand même, 365 000 emplois qui devraient être créés pour cette année dans une économie qui, au cours de ces quatre ans, a pratiquement créé plus d'un million d'emplois. C'est quand même une réalité de la société française. Par rapport au licenciement, nous discutons d'un texte qui sur la modernisation sociale. Ce texte viendra au Sénat la semaine prochaine. E. Guigou annoncera mardi les dispositions qui visent à renforcer notamment les droits des comités d'entreprises en matière de licenciements. Plusieurs pistes sont à l'étude : approfondir les reclassements, renchérir le coût des licenciements, imposer de mesures de reclassement ou de réindustrialisation des sites. C'est là-dessus que nous travaillons. Donc, le rendez-vous est pour mardi à l'occasion de la première lecture au Sénat. Le texte devrait être adopté d'ici la fin juin."
La loi ne sera pas prête avant l'été ?
- "Non, parce qu'il y a toujours des délais de navettes et de discussions parlementaires."
Après l'été, au mieux peut-être même à l'automne ?
- "Non, d'ici le 30 juin. C'est notre objectif."
Cela dit, cela ne changera pas le fond des choses. Cela n'empêchera pas les entreprises de licencier ?
- "Nous sommes dans une économie de marché : les entreprises agissent en fonction des intérêts, de leurs propres capitaux et de leurs propres plans d'investissement. Mais, en même temps, il faut renforcer le pouvoir et les droits sociaux des travailleurs et de leurs représentants."
Sur la Corse : le mise en place du texte semble compliquée , il y a quinze jours de retard.
- "Non, ce ne sont pas quinze jours de retard mais simplement une organisation du travail parlementaire. On démarrera le 15 mai. Actuellement, la commission des lois examine les différents articles, essaye d'améliorer les rédactions mais l'esprit demeure. Je crois que l'objectif que nous nous sommes donnés à travers les accords Matignon qui ont été passés en juillet - c'est-à-dire de tracer les perspectives du développement..."
Est-ce qu'il est possible de faire le texte sans qu'il soit cassé par le Conseil constitutionnel ?
- "Difficile à dire à l'avance mais en tout cas, c'est l'objectif. Nous souhaitons qu'il y ait pour la Corse une perspective ouverte de développement qui prenne en compte le particularisme de la Corse."
Est-ce possible de passer entre les gouttes ?
- "Bien sûr, on va s'efforcer de le faire le plus possible. On connaît les contraintes, elles ont déjà été données par le Conseil d'Etat, mais on veut agir dans ce sens-là."
Là aussi, votre majorité n'est pas tout à fait d'accord.
- "Je pense quand même qu'il y aura une majorité parce que c'est la seule perspective à ouvrir pour la Corse."
Un mot sur la communauté urbaine de Lyon : est-ce que vous pensez - puisque le vote aura lieu demain - que la gauche peut l'emporter aussi après Lyon ou est-ce que la droite s'est mise en bonne position ?
- "La gauche a un retard : 81 voix pour la droite et 73 pour la gauche. Mais il y a des maires qui dans ces 81 voix peuvent penser qu'il faut trouver une majorité de gestion pour la communauté urbaine, surtout que ces 81 voix incluent les voix de M. Millon. Des maires plus centristes, moins politiques, peuvent penser qu'il faut faire fonctionner l'agglomération lyonnaise."
Le coup de Lyon peut donc être réédité ?
- "On peut effectivement gagner. Il faut gagner 5 voix."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 19 avril 2001)