Texte intégral
R. Duchemin.- Bonjour Nadine Morano.
Bonjour.
Merci d'être avec nous ce matin en direct sur France Info. On va bien sûr parler des 35 heures, puisque c'est en quelque sorte le sujet du moment, certains affirment même que ce sera celui de 2012. C'est aussi votre avis ?
Que nous réfléchissions à une meilleure compétitivité de nos entreprises, que nous réfléchissions à la place du travail dans nos vies, que nous réfléchissions à travailler mieux, c'est vrai que ça fera partie du débat, parce que c'est l'essence même, d'ailleurs, de la quasi-totalité de notre temps. Donc, c'est important d'y réfléchir dans le cadre d'une mondialisation des échanges, où nous savons que tout va très vite, que le monde évolue vite, et il est nécessaire d'ouvrir les débats, oui. C'est tout le sens d'un parti politique, vous savez. Moi je voudrais vous dire ce matin que nous marchons sur nos deux jambes. D'abord le gouvernement, parce que nous avons la responsabilité d'appliquer les engagements du président de la République, Nicolas Sarkozy, au cours de sa campagne, c'est ce que nous avons fait en 2008, avec l'assouplissement des 35 heures, avec cette possibilité donnée aux salariés de travailler plus pour gagner plus, avec les heures supplémentaires défiscalisées.
Justement, puisque vous en parlez. La page des 35 heures, elle est tournée ou pas aujourd'hui ? Parce que c'est le fond du débat. Certains disent que oui, d'autres disent que non. Donc, est-ce qu'on est toujours, finalement, dans cette optique de faire partir les 35 heures ou est-ce que finalement la loi TEPA a déjà un peu vidé de son sens ces 35 heures ?
Ecoutez, moi je me réjouis d'abord que Manuel Valls arrive au même constat que nous avons fait, nous, depuis longtemps, depuis que les 35 heures ont été mises en oeuvre. Je préfère l'autocritique de Manuel Valls à la mauvaise foi de Martine Aubry ou certains socialistes. Tout simplement, nous avons annoncé, le président de la République a annoncé, qu'il assouplirait les 35 heures, nous l'avons fait.
Ça a été fait, la loi TEPA.
Nous l'avons fait, avec la loi portée par Xavier Bertrand, qui a permis à 5 millions de salariés de faire des heures supplémentaires.
Justement, Xavier Bertrand dit ce n'est pas la peine d'y revenir, ça a été fait avec la loi TEPA.
Non mais, nous avons assoupli les 35 heures. Et quand je vous dis nous marchons sur nos deux jambes, pourquoi ? Le gouvernement d'une part, a assoupli les 35 heures avec cette loi votée en 2008, qui a permis aux salariés de gagner plus parce qu'ils ont fait des heures supplémentaires, défiscalisées, je le rappelle, ils n'ont pas payé d'impôts sur ces heures supplémentaires. C'est vrai que ça a un coût aussi pour l'Etat, il faut le rappeler. Et donc, deux jambes, pourquoi ? Parce que de l'autre côté nous avons notre parti politique, l'UMP, parce que l'essence même d'un parti politique, le parti majoritaire, c'est toujours d'être en avance, de réfléchir, d'ouvrir des débats, et c'est ce que l'UMP doit porter aujourd'hui sur le travailler plus, travailler mieux, dans notre société, et regarder aussi quel est l'impact des charges, ou des allégements de charges d'ailleurs, qui pèsent sur les entreprises.
On va en parler. Alors, les Français dans tout ça, Nadine Morano, qu'est-ce qu'ils vont penser, d'après vous ? Je voudrais qu'on écoute d'abord la version du sociologue Jean Viard. Commentaire de Jean Viard : Les Français ont l'impression d'être de moins en moins protégés, et je pense que, si vous voulez, ce n'est pas malin, je dirai, pour redonner confiance à ce pays, de multiplier des « déprotections » qui au fond ont peu d'effets économiques mesurables. Et l'autre dimension si vous voulez, je pense que les 35 heures ont plutôt amélioré la vie quotidienne de nombreuses familles populaires, parce qu'il ne faut pas oublier que les 35 heures, pour les cadres, c'est souvent des petits ponts, et dans les milieux populaires c'est souvent des week-ends où on ne fait ni le ménage, ni les courses. Ça, ça beaucoup amélioré les vies des milieux, notamment ouvriers.
Dites-moi Nadine Morano, l'UMP peut se payer le luxe, après avoir touché aux retraites, de toucher à un autre acquis social, les 35 heures, aujourd'hui ?
Ecoutez, moi je ne peux pas vous laisser dire l'UMP peut-il se payer le luxe, alors que nous avons touché aux retraites. Nous avons sauvé...
Non, mais ce n'est pas risqué ?
Non non, mais attendez. Mais vous savez, Manuel Valls, maintenant, essaye de prendre ses responsabilités...
On ne parle pas de Manuel Valls, on parle des 35 heures.
Non non, mais parce qu'il fait preuve de lucidité. Aujourd'hui, nous, nous avons sauvé le système des retraites, et d'ailleurs Manuel Valls avait eu une position, aussi, un peu plus équilibrée que certains de ses collègues du parti socialiste. Nous avons aujourd'hui, je vous le dis, nous avons sauvé le système des retraites. Aujourd'hui il fallait assurer avec 32 milliards d'euros de déficit, de payer le mois prochain, le mois prochain, la pension...
Oui, enfin il faudra le revoir quand même en 2013, n'oublions pas.
Non non, mais attendez. La réforme des retraites, il faut toujours la remettre sur le métier. Pourquoi ?
Comme les 35 heures finalement. Comme la durée du temps de travail.
Mais ça c'est légitime. Vous croyez qu'une fois qu'on a mis en place des réformes, alors que le monde évolue, que la société évolue, tout devrait rester figé, on devrait rester dans l'immobilisme ? Mais c'est complètement utopique de raisonner comme ça. Le système des retraites il faut toujours le remettre sur le métier parce qu'il doit évoluer en fonction, d'abord des actifs que nous avons, en fonction de l'évolution démographique, c'est-à-dire du vieillissement de la population, donc c'est vrai qu'au fur et à mesure il faut toujours remettre cette réforme sur le métier. Ceux qui disent qu'il faut faire une réforme sur 30 ans, vous mettent, parce qu'on ne sait pas quelle sera la situation sur 30 ans. En revanche, là, réfléchir maintenant, à une meilleure compétitivité de nos entreprises, eh bien il est légitime de le faire et d'ouvrir les débats. Il n'y a pas de tabou chez nous.
Alors justement, les entreprises on va en parler. L'apprentissage notamment, puisque c'est votre domaine Nadine Morano. Il y a un sondage publié ce matin dans La Tribune qui nous apprend que 7 chefs d'entreprise sur 10 comptent réduire cette année le recours à l'apprentissage. Vous pouvez, vous, les convaincre aujourd'hui du contraire ? Ça veut dire que ça ne fonctionne pas, que le message passe mal ?
Je pense que dans notre pays il faut une véritable révolution culturelle, je vous le dis. Avec le taux de chômage que nous avons des jeunes, 24%, ici en France, 10% seulement en Allemagne, qui a mis depuis des dizaines d'années en oeuvre ce qu'on appelle la formation duale, c'est-à-dire la formation par alternance. Dans notre pays, en France, on a trop dévalorisé les formations par alternance et l'apprentissage. C'est une grave erreur, je vous le dis. Donc, mon premier message ce sera la valorisation de l'apprentissage, parce qu'on voit très bien que des jeunes qui ont choisi la formation par alternance et l'apprentissage, ont beaucoup plus de chances d'entrer sur le marché de l'emploi, que les autres. Donc, mon objectif ce sera cette valorisation. Nous avons mis en place des dispositifs d'aides, évidemment, nous regarderons les aides, nous allons les évaluer pour voir celles qui ont mieux fonctionné, et je pense par exemple à un dispositif très particulier comme les développeurs de l'apprentissage, c'est-à-dire une sorte d'ambassadeurs qui vont à la rencontre des entreprises, et qui marche très très bien. Grâce à eux, nous avons signé plus de 10 000 contrats d'apprentissage, c'est important de le dire, donc nous allons continuer, et si le président de la République et le Premier ministre ont décidé d'y consacrer un ministère, c'est parce que je compte bien mener cette révolution culturelle dans notre pays et faire prendre conscience, à la fois aux entreprises, aux parents et aux jeunes, que la formation par apprentissage peut leur permettre une véritable progression sociale. On peut commencer par l'apprentissage, on peut devenir ingénieur, on peut terminer chef d'entreprise, et on a tout l'avenir devant soi avec l'apprentissage.
Il nous reste une petite minute Nadine Morano. Vous savez que l'organigramme du parti est en pleine refonte, c'est Jean-François Copé qui dirige tout ça. Il a dit qu'il y aurait moins de ministres, vous n'en serez pas, a priori ?
Mais, il revient à Jean-François Copé, puisque le président de la République lui a confié cette charge, de constituer son équipe. Je crois que...
Vous souhaitez en être ou pas ?
A la différence du Parti socialiste nous formons une famille unie et rassemblée, respectueuse de nos diversités. Et ça c'est important, parce que quand vous regardez la diversité disparate du Parti socialiste, elle est directement incompatible avec un projet pour la France, ce qui ne sera pas notre cas.
Diversité, ce n'est pas un mot, finalement chez vous, diversité disparate, à l'UMP ?
Non, parce que c'est ce qui a fait notre force...
Vous, vous êtes unis et différents.
C'est ce qui a fait notre force. Vous savez, les libéraux, les gaullistes, les centristes, c'est ce qui a fait la force de l'UMP et je crois que c'est ce que nous envient beaucoup les socialistes. Eh bien, cette force, nous continuerons à la faire progresser, à être rassemblés, à nous respecter dans nos diversités et à essayer de construire un projet crédible et ambitieux pour 2012, pour faire gagner Nicolas Sarkozy.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 10 janvier 2011