Texte intégral
Madame le Ministre, chère Christine Lagarde,
Monsieur le Président d'Ubifrance, cher Alain Cousin
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
[Messieurs les Députés et Sénateurs, cher Pierre Lequiller, cher Hervé de Charrette, chère Catherine Dumas, cher Michel Herbillon, cher André Ferrand, cher Christophe-André Frassa, cher Gérad Cesar,
Monsieur le Vice-Président du Conseil Régional de Basse-Normandie, cher Philippe Bonneau,
Monsieur le Conseiller de Paris, cher Eric Helard,
Monsieur le Préfet de Région, cher Patrick Stefanini,
Monsieur le Président de l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie, cher Jean-François Bernardin,
Messieurs les Présidents des Chambres Régionales de Commerce et d'Industrie,
Monsieur le Président du Comité national des Conseillers du Commerce extérieur, cher Bruno Durieux,
Monsieur le Président de l'Union des Chambres et d'Industrie à l'étranger, cher Pierre-Antoine Gailly,
Monsieur le Président de la Coface, cher François David,
Monsieur le Président Directeur général d'OSEO, cher François Drouin,
Monsieur le Directeur général d'Ubifrance, cher Christophe Lecourtier,
Mesdames et Messieurs les représentants des fédérations professionnelles et dirigeants d'entreprises,
Mesdames et Messieurs les Secrétaires généraux et Directeurs généraux d'administration centrale,
Mesdames et Messieurs les responsables d'agences publiques,
Messieurs les représentants des Conseils régionaux,
Mesdames et Messieurs les membres de l'Equipe de France de l'Export,
Mesdames et Messieurs, chers amis,]
Je sais qu'en ce début de mois de février, il est désormais trop tard pour vous adresser mes voeux de nouvelle année, mais fort heureusement il y a la Chine et le Nouvel an chinois. Comme il est beaucoup question de la Chine dans mon ministère et sans doute aussi dans votre vie professionnelle, vous qui êtes les acteurs de l'Equipe de France de l'export, je vous souhaite une excellente année ... du Lapin ! Que le Lapin nous aide à faire de 2011 une année réussie sur le plan du commerce extérieur !
Sur une note un peu plus sérieuse, les premières rencontres de l'export en 2009 et en 2010 avaient permis d'affermir le sentiment d'appartenance de chacun d'entre vous à cette entreprise commune qu'est la promotion de la marque France dans le monde. C'est cet héritage collectif là, qui doit beaucoup à l'engagement de Christine Lagarde et de ma prédécesseur, Anne-Marie Idrac, que j'entends amplifier avec vous cette année. 2011 en effet doit être l'année de la consolidation et j'espère, d'une nouvelle offensive de la France à l'export.
Mais avant d'évoquer cette offensive, de vous présenter les actions nouvelles sur lesquelles nous avons travaillé, regardons ensemble, si vous le permettez, le champ de bataille de cette guerre économique, que l'on appelle pudiquement la mondialisation.
Le commerce mondial en 2010, ce sont 14 000 milliards de dollars, concentrés autour de deux pôles principaux : l'Europe, avec 5 000 Mds et l'Asie, avec près de 4 500 Mds. A l'intérieur de ces deux pôles, deux leaders mondiaux : la Chine, première puissance exportatrice mondiale, avec près de 1 500 Mds $, et l'Allemagne, n°2, avec 1 150 Mds $.
Pour mesurer le chemin parcouru, je rappellerai avec le Premier ministre, que la Chine représentait il y a 30 ans moins de 1% du commerce mondial. Trente ans plus tard, en 2010, c'est 10%.
Mesdames et Messieurs, pour avoir consacré l'essentiel de ma vie professionnelle à la géopolitique et à la politique internationale, permettez moi de vous dire ceci : jamais, en temps de paix, le monde n'aura assisté à un tel basculement de richesses et de puissance, en une aussi brève période de temps, d'une partie de la planète à l'autre.
Tous les pays développés, je veux dire les anciens pays dominants d'hier, sans exception, ont dû abandonner une partie de leur position dominante, dans laquelle ils s'étaient installés depuis cinq siècles. Un exemple parmi d'autres : en l'espace de 5 ans seulement, entre 2004 et 2009, les 5 principaux pays européens, Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, Espagne, ont vu chuter leurs parts de marché mondial en valeur de 24,4 à 21%, exactement à due concurrence de la hausse de la présence chinoise, soit + 3,4 points.
Regardons la France, maintenant, puisque vous le savez, je viens de rendre publics les chiffres du commerce extérieur en 2010.
En apparence, la photographie est presque rassurante. La solution de facilité consisterait à insister sur les bonnes nouvelles. Oui, nous sommes encore la 5ème puissance exportatrice mondiale, la 2ème en Europe. Oui, notre commerce extérieur, après une année de crise de 2009, a rebondi en 2010 de 13,5%, quasi exactement au même rythme que les échanges mondiaux. Certes notre déficit s'est accru à 51,4 Mds euros, mais ne représente-t-il pas en gros notre facture énergétique en gaz et en pétrole, qui se monte à 48 Mds euros après une aggravation due à la hausse du prix du Brent en fin d'année ? Je pourrais m'en tenir là et insister sur d'autres bonnes nouvelles, par exemple le fait que nos grands groupes continuent à se développer et à investir et que 2010 aura été une année record en matière de grands contrats : + 38%.
Je pourrais me contenter de cet aperçu général, de cette lecture là de notre commerce extérieur et cela m'éviterait sans doute bien des inimitiés.
Mais vous permettrez à quelqu'un qui est d'abord un élu de terrain, et un élu de tradition gaulliste, de regarder la réalité en face, précisément pour préparer l'avenir.
Mesdames et Messieurs,
L'avenir nous oblige à nous comparer avec ce qui est comparable quand on est Français, c'est-à-dire nos partenaires de l'OCDE, en premier lieu nos amis allemands.
Si l'on se compare à l'Allemagne, alors on est obligés de noter qu'en face du déficit français, à 51,4 Mdseuros, l'Allemagne est en excédent à 126 Mdseuros, excédent qui contribue à tirer de 1,1% le taux de croissance du PIB qui atteint cette année le niveau record de +3,6%. Autrement dit l'écart entre la France et l'Allemagne, dont il est inutile de rappeler que le tandem qu'elles forment est le socle sur lequel repose l'ensemble de la construction européenne, atteint aujourd'hui près de 180 Mdseuros, à savoir 10 points de notre PIB ! Un tel déséquilibre est, je vous le dis tout net, préoccupant : il ne saurait perdurer sans dommage politique, j'entends, sans influer à terme sur le rapport de forces dans ce que j'appellerai la cabine de pilotage de l'Europe. Dès lors, le premier objectif que nous devrions nous fixer est de résorber les quelques 20 Mdseuros de déficit commercial hors énergie, qui constituent hélas ce qu'il faut bien appeler un solde structurel.
Au passage, cette comparaison avec l'Allemagne permet d'évacuer d'emblée nombre de faux débats, à commencer bien sûr par l'euro. Non, Mesdames et Messieurs, l'euro n'est pas la cause de nos déficits extérieurs. Les Allemands, jusqu'à preuve du contraire, vivent et exportent aussi avec la même monnaie que nous.
L'autre avantage de cette comparaison, c'est qu'elle nous permet de toucher du doigt ce que sont les véritables faiblesses de notre appareil d'exportation.
D'abord, la surdépendance de nos exportations au marché européen de l'UE à 27. Nous sommes quatre fois moins présents que les Allemands dans les BRIC, les grands émergents, avec 2% seulement de parts de marché, contre 7,5% pour nos amis allemands. Autre handicap : nos exportations dépendent d'un petit nombre de très grands groupes alors que la base exportatrice allemande est fondée sur un tissu industriel beaucoup plus large. J'y reviendrai dans quelques instants.
Vous l'aurez compris, c'est par un discours de vérité, par un constat lucide de la réalité que j'entends appréhender ma mission. Loin de toute inclination décliniste, loin de toute tentation à l'auto-flagellation, je veux au contraire partager avec vous deux convictions absolues.
En premier lieu, ce qui se joue à l'export en ce début de 21ème siècle, c'est d'abord, bien sûr, l'emploi chez nous. Chaque fois que nos exportations augmentent de 10 Mds euros, ce sont 25 000 emplois créés ou maintenus l'année qui suit. En 2010, la hausse de 47 Mds euros de nos exportations représente ainsi près de 120 000 postes nouveaux ou préservés en 2011. Au-delà la stabilité de notre modèle économique et social auquel nous sommes tant attachés. Ce qui se joue aussi, c'est la sauvegarde de notre indépendance nationale. Dans les années 1950 et 1960, lorsque le Général de Gaulle, revenu au pouvoir, a voulu redonner à la France son rang parmi les grandes nations, il lui fallut bien sûr sortir de la période coloniale, lancer à l'intérieur un programme de modernisation mais surtout doter la France, avec les Mirage IV et la force de frappe, des instruments de la puissance entre les deux supergrands de l'époque. La situation aujourd'hui est beaucoup plus complexe. Un exemple révélateur : le week-end dernier à Munich Hillary Clinton et Sergueï Lavrov ont signé un important accord de désarmement nucléaire qui n'a quasiment pas fait une ligne dans la presse. Pourtant, pendant le demi-siècle de guerre froide, un tel événement aurait mobilisé toute la planète. Aujourd'hui, tout le monde a compris que la réalité du rapport de forces ne se joue plus sur le nombre d'ogives nucléaires que l'on peut aligner dans l'air ou sous les mers. Ce qui compte ce sont les parts de marché, ce sont les excédents ou les déficits. Chine, 2 750 Mds $ de réserves en devises, Etats-Unis, 14 400 Mds $ de dette extérieure brute...
Mesdames et Messieurs,
Si on est comme moi attaché à la grandeur de la France, à la qualité de son mode de vie, à son indépendance, alors il faut que la remise en ordre de notre appareil de production, de notre industrie, de notre agriculture, de nos exportations, soit considérée comme une priorité nationale. Faute de quoi l'accumulation des déficits commerciaux et budgétaires nous conduira inéluctablement à donner les clefs de notre destin à nos créanciers.
Ma deuxième conviction, c'est que précisément, la France peut avoir un tout autre destin. Elle n'est pas condamnée à accumuler les déficits et à devenir, comme l'a imaginé Michel Houellebecq dans son dernier roman, le terrain de jeu et de repos d'ingénieurs et d'ouvriers chinois fatigués qui viendraient profiter de nos restaurants et de nos monuments historiques. Nulle fatalité ne condamne la France à se vider inexorablement de son industrie, en vivant la mondialisation comme une punition, à condition de regarder la réalité en face, celle de nos faiblesses, mais aussi celle des succès de la marque France : je pense à notre industrie du luxe, je pense à l'aéronautique et à l'espace, je pense aux potentialités immenses de l'agroalimentaire et à bien d'autres encore. Nous pouvons redevenir une grande puissance économique, y compris à l'export.
Le Président de la République l'a souhaité dans ses voeux : 2011 sera une année utile. C'est exactement ce que j'entends faire dans le secteur ministériel qui est le mien. J'entends donc devant vous tirer précisément les enseignements des chiffres que j'ai présentés à la presse il y a deux jours en termes d'actions concrètes pour l'année qui nous sépare des prochaines élections.
Ces enseignements sont au nombre de trois.
En premier lieu, travailler d'arrache-pied à l'établissement de normes équitables pour le commerce international, en cohérence avec les objectifs qui sont ceux de la France pendant cette année de Présidence du G20.
En second lieu, naturellement, redoubler d'efforts dans ce que nous appelons les grands contrats, ce qui est parfois appelé au Trésor « le régalien », face à une compétition de plus en plus rude.
En troisième lieu, nous devons d'urgence renforcer la base industrielle de nos PME et de nos ETI et les aider à l'exportation de façon encore plus efficace que par le passé.
D'abord le commerce international et les normes.
Comme vous le savez, la politique commerciale commune constitue une compétence exclusive de l'Union européenne. Mon rôle est donc d'établir un dialogue régulier avec le Commissaire Karel De Gucht ainsi qu'avec mes partenaires européens pour faire émerger des positions européennes les plus conformes possibles à nos intérêts nationaux. J'irai également aux Etats-Unis prochainement pour rencontrer mes homologues et rechercher avec eux comment progresser dans les négociations internationales en cours.
C'est d'autant plus important que l'année 2011 comporte des échéances majeures sur trois plans : l'ouverture des marchés étrangers à nos entreprises, l'amélioration des conditions de concurrence dans le commerce international, et la protection des intérêts industriels européens.
Le premier objectif de la politique commerciale de l'UE doit être d'ouvrir à nos entreprises les marchés en forte croissance. Pour cela, La France soutiendra la conclusion dans l'année d'un accord ambitieux et équilibré à l'OMC sur le cycle de Doha, avec l'objectif que la fin de la négociation permette plus d'ouverture des marchés émergents en matière de services et d'industrie et ne nous conduise pas à remettre en cause nos lignes rouges, notamment agricoles.
L'ouverture des marchés passe aussi par la conclusion de nouveaux accords de libre-échange cette année entre l'Union européenne et le Canada, Singapour et l'Inde, autant d'enjeux majeurs pour nos entreprises, notamment dans l'automobile, les services, les marchés publics, les vins et spiritueux ou encore la pharmacie. La négociation avec le Mercosur est également au menu mais j'ai déjà fait valoir que nous avons là des intérêts français fondamentaux, notamment en matière agricole. Enfin, je reviens d'un déplacement en Russie dont je tire la conviction que nos entreprises ont des marges de développement considérables dans ce pays, que ce soit dans l'agroalimentaire, les infrastructures de transport, les services financiers et bien sûr, l'énergie. A cet égard, l'accession de la Russie à l'OMC constitue donc également un objectif important de notre agenda international.
Ma seconde priorité sur ce plan est de favoriser des conditions de concurrence plus équitables pour nos entreprises dans le commerce international. On aura beau faire les meilleurs efforts du monde pour augmenter notre compétitivité, tout cela sera vain si les règles du jeu ne sont pas les mêmes pour tous, si les normes commerciales ne sont pas équilibrées et équitables.
D'où l'exigence de réciprocité, rappelée avec force par le Président de la République et le Gouvernement. Au nom de quoi l'Europe ferait-elle seule le choix d'ouvrir son marché intérieur, sans exiger les mêmes contreparties de ses partenaires quant à l'ouverture de leurs propres marchés ? Je veux bien que des investisseurs asiatiques puissent financer des autoroutes en Pologne, qui plus est avec les fonds structurels européens, mais dans ce cas nos entreprises doivent pouvoir faire la même chose en Asie.
Le principe de réciprocité dans la politique extérieure de l'Union européenne, pour lequel je me suis battu pendant plus d'un an et demi lorsque j'étais en charge des Affaires européennes au Quai d'Orsay, a enfin été adopté par le Conseil européen en septembre dernier grâce au Président de la République. Il faut désormais traduire ce principe en actions concrètes, pour que nos entreprises puissent en bénéficier effectivement. J'ai déjà ouvert des contacts étroits avec les Commissaires Barnier et De Gucht pour les inciter à proposer avant l'été un nouveau règlement européen sur la réciprocité avec les pays tiers dans l'acc??s aux marchés publics. Je recommencerai en tant que de besoin. Mais de grâce, comme l'a dit le Président de la République, il est grands temps d'abandonner toute naïveté.
Dans le même ordre d'idées, n'est-il pas grand temps là aussi de reconnaître que certains grands émergents ne peuvent plus être traités comme des pays en développement au même niveau que les pays les plus pauvres de la planète. Faut-il vraiment continuer à leur accorder les mêmes préférences tarifaires, la même aide au développement qu'aux les pays les plus pauvres ? L'Europe doit se réveiller sur ce que l'on appelle dans le jargon de la politique commerciale la « différenciation », et décliner cette différenciation dans sa politique commerciale comme dans son aide publique au développement. Ceci vaut bien sûr aussi pour la France et pour la stratégie de l'AFD : les dons ou les prêts à coût budgétaire pour l'Etat et le contribuable ne devraient-ils pas être réservés aux seuls pays qui en ont vraiment besoin ? Je pose la question. Et notre aide ne devrait-elle pas être déliée seulement dans les pays les moins avancés ? Voilà un débat qui mérite d'être ouvert dès à présent.
L'Europe ne peut pas non plus rester passive face au dumping social et environnemental, face à la contrefaçon : les outils pour se faire respecter existent, n'ayons plus peur de les utiliser, lorsque nos intérêts légitimes sont en cause. Le traité ACTA sur le renforcement de la protection des droits de propriété intellectuelle est de ce point de vue un instrument important, et je plaiderai pour qu'il soit adopté par l'UE rapidement, puis étendu à d'autres pays que les 37 signataires actuels. Nous ne pouvons pas accepter que des sociétés de pays émergents usurpent les droits de sociétés françaises sur des produits industriels performants qui leur ont été livrés pour venir les commercialiser en Europe en utilisant des sociétés de droit européen comme cheval de Troie. J'ai à l'esprit des cas très précis sur lesquels je peux vous assurer que le Gouvernement continuera à se battre.
Enfin, la troisième priorité dans ce volet normatif vise à assurer que la politique commerciale européenne devienne plus protectrice des intérêts industriels européens.
L'UE doit maintenant se repenser comme un espace de production, comme une base industrielle, en favorisant le développement de ses champions industriels. Je tiens d'ailleurs ici à rendre hommage à Michel Barnier qui s'efforce, dans le cadre de ses compétences de Commissaire européen au marché intérieur, de mener une véritable politique de soutien à l'industrie européenne.
C'est essentiel, parce que nous avons en face de nous de grands pays qui se sont dotés d'une politique industrielle très performante, qui même n'hésitent pas à se doter de législations fermant leurs marchés pour protéger leurs entreprises et leur marché intérieur. Je pense ici à de grands pays asiatiques, développés et émergents, dans lesquels la part de marché des entreprises étrangères dans certains secteurs, infrastructures de transport ou secteur financier par exemple, ne dépasse pas quelques pourcents : cette fermeture des marchés leur permet ensuite de faire émerger des leaders mondiaux dans ces secteurs. Bien entendu, dire cela, ce n'est pas appeler au protectionnisme mais simplement en appeler à des règles équitables. Ce n'est pas être protectionniste que d'utiliser les règles de l'anti-dumping et de l'anti-subvention pour défendre nos industries. Au nom de quoi l'Europe serait-elle seule à renoncer aux armes que lui donnent les traités ?
De même, la question des transferts de technologie doit aussi faire l'objet d'une politique active de l'Union. Un exemple : le transfert total il y a trois ans par un industriel européen de la technologie du train à grande vitesse permet aujourd'hui à un grand pays émergent asiatique de nous concurrencer sur tous les marchés export. Peut-on continuer ainsi ? L'Europe doit promouvoir, dans le respect des règles internationales de concurrence, des transferts de technologie ponctuels assumés, réfléchis, maîtrisés. Ne sacrifions pas notre recherche et développement, notre avance technologique, donc nos emplois futurs par des transferts de technologie trop rapides, souvent sous l'effet d'une concurrence entre entreprises européennes elles-mêmes. C'est un sujet difficile, mais qui mérite une vraie réflexion au sein de l'UE.
Sur tous ces sujets, je suis heureux de constater que les idées de la France progressent. L'année 2011 sera décisive pour passer des principes qui ont de plus en plus d'écho au sein de l'UE à la mise en oeuvre concrète.
J'évoquerai enfin sur ce même chapitre normatif l'impact des nouvelles règles prudentielles de Bâle III sur le financement du crédit export. Je sais combien nos entreprises, utilisatrices d'assurance-crédit et banques, y sont sensibles. A raison. Bâle III, vous le savez tous, est un pilier de la refondation indispensable du système financier mondial. Tout le monde se souvient des prises de risques excessives qui ont amené à l'effondrement total du système bancaire en 2008. Mais sur ce sujet aussi, l'Europe doit être attentive à ce que les règles qu'elle s'applique à elle-même, parce qu'elle se veut exemplaire, n'obère pas sa capacité à financer sa propre économie, ses industries, et donc ses positions à l'export, tandis que d'autres pays ne s'astreindraient pas aux mêmes disciplines. Mesdames et Messieurs, sur ce point aussi, le Gouvernement sera très attentif.
Mesdames et Messieurs, j'en viens maintenant aux grands contrats.
Dans ce domaine, nos performances en 2010, je l'ai rappelé il y a quelques instants, ont été tout à fait honorables : 21 Mds euros de contrats ont été signés par nos entreprises, soit une hausse de près de 40% par rapport à 2009. Ce n'est pas négligeable. L'aéronautique, qui représente quatre des dix plus gros contrats conclus en 2010, a en particulier connu un millésime exceptionnel, avec 285 livraisons d'appareils Airbus, et un excédent commercial record de 18,1 Mds euros.
Ces bons résultats sont l'occasion de nous féliciter de la mobilisation de tous, du sommet de l'Etat jusqu'aux entreprises. Et dans cette maison, de la politique d'assurance-crédit résolument contracyclique qui a été menée en 2010 : les 20 Mdseuros de nouvelles prises en garantie par l'Etat, via la Coface, auront permis de « sauver » un nombre important de projets dont le financement par le marché n'était pas acquis, ou devenait exorbitant. Permettez-moi de citer quelques exemples : les deux mégacentrales thermiques Alstom de Medupi et Kusile en Afrique du Sud, les 8 satellites de Thalès Alenia Space pour instaurer l'Internet haut débit dans les pays les moins avancés,...
Pour autant, le moment n'est pas venu de relâcher nos efforts. L'époque des positions établies, des rentes de situation et des relations de gré à gré exclusives est définitivement révolu. Vous le savez mieux que moi. Partout, la concurrence fait rage, surtout dans les marchés les plus convoités, en Asie, en Russie, en Arabie saoudite, aux Emirats Arabes Unis. Partout, les compétiteurs auxquels nous avons affaire arrivent dans les grands appels d'offres d'internationaux avec un niveau technologique que nous aurions tort de sous-estimer, à des prix très compétitifs, et de surcroît avec des financements clefs en main. Vous le savez mieux que moi : les contrats d'aujourd'hui ne se gagnent plus sur la seule réputation d'excellence technologique ou sur la seule amitié des peuples. Nos clients d'hier sont devenus nos concurrents.
A partir de ce constat, j'entends concentrer mon action autour de trois priorités.
D'abord, contribuer à remettre de l'ordre là où c'est nécessaire dans l'organisation des filières industrielles à l'export : l'équipe de France des grands contrats ne sera victorieuse que s'il existe une équipe de France unie dans chaque grande filière, ce qui ne veut pas dire qu'il ne doit exister qu'une seule grande entreprise par filière, bien sûr ! Lorsque je constate que sur un appel d'offres dans le domaine ferroviaire, trois grandes entreprises françaises sont en compétition les unes avec les autres dans trois consortiums concurrents, j'ai parfois l'impression que toutes les leçons n'ont pas encore été tirées d'Abu Dhabi. En effet, l'une des grandes forces de nos concurrents, notamment allemands, mais également chinois ou coréens, c'est d'arriver absolument soudés face à la demande. Ce message d'unité et de cohésion de nos filières industrielles à l'export, je ne cesserai de le marteler dans mes contacts réguliers avec les entreprises, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire lors de mes premières rencontres avec les grands patrons du rail, de l'énergie, de l'aéronautique,...
Deuxième priorité, le financement. Vous le savez comme moi, la compétition sur les grands contrats se déplace de plus en plus sur le terrain financier. Sur certains projets de l'industrie spatiale, le crédit export peut permettre d'économiser l'équivalent du différentiel de change euro/dollar, qui peut lui-même représenter jusqu'à 15% du coût du produit. Dans les pays qui commencent à se doter de leurs premières centrales nucléaires, le coût du financement bancaire atteint parfois 30% du prix de revient du réacteur.
Là encore certains de nos concurrents, qui arrivent maintenant face au client non seulement avec le produit et la technologie, mais en plus avec des conditions financières extrêmement favorables, ne sont du reste pas toujours assujettis aux mêmes disciplines que nous. J'organiserai donc à la fin du mois de juin à Paris, avec Christine Lagarde, la première conférence internationale sur le financement du commerce mondial avec l'ensemble des pays du G20 et leurs agences de crédit, qui portera notamment sur ce sujet des normes d'encadrement des crédits export.
Cela dit, il nous appartient de tirer avantage des règles de l'OCDE pour expérimenter des mécanismes de financements adaptés en faveur de nos entreprises. Dès le printemps, je proposerai avec Christine Lagarde, au Premier ministre et au Président de la République, une première sélection d'au moins trois grands contrats stratégiques pour l'économie française qui bénéficieront, à titre pilote, d'un soutien financier renforcé. Ce ne sera évidemment pas sans contreparties de la part des grands groupes qui auront accès à ces mécanismes, j'y reviendrai dans un instant.
Troisième priorité, l'accompagnement institutionnel des grands contrats. Vous le savez, le Président de la République est le premier vendeur de France. Mon rôle tel que je le conçois à ses côtés est d'être à votre disposition. Pour être le plus efficace possible, j'ai demandé à chacun des grands patrons de me communiquer très précisément la liste de leurs prospects et des dates importantes en 2011, en fonction desquels j'ai commencé à bâtir mon agenda de déplacements sur l'année. La CIACI sera par ailleurs renforcée et deviendra un vecteur de dialogue entre l'Etat et les entreprises.
Mesdames et Messieurs, j'en viens enfin à mon troisième prioritaire, longtemps négligé jusqu'à la réforme réussie d'Ubifrance engagée par Christine Lagarde : je veux parler du développement international de nos PME et de nos ETI.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Nous avons en France 81 700 PME exportatrices, qui représentent 90% du nombre total d'exportateurs, mais qui représentent seulement 40% des volumes à l'export. Plus grave, le nombre d'exportateurs a diminué de 16% en 10 ans et de 1% rien qu'entre 2009 et 2010. Au total, nous avons 4,5 fois moins d'exportateurs que nos voisins allemands, et 2 fois moins que nos voisins italiens. En Allemagne, 12 entreprises sur 100 exportent, elles sont moins de 3 en France.
Il nous faut donc en priorité briser ce cercle vicieux où l'étroitesse et la sous-capitalisation des PME sont à l'origine d'un déficit d'innovation et de capacité de prospection, qui est à son tour la cause d'une présence trop faible à l'export, pourtant indispensable au développement de notre économie et de l'emploi chez nous.
Le Premier ministre vient d'y faire allusion : depuis 2007, le Gouvernement s'est largement attaqué au problème structurel de défaut de compétitivité de la France. Au-delà, cet effort est loin d'être achevé. J'en veux pour preuve la polémique récurrente sur le coût du travail en France et en Allemagne, que pour ma part, j'ai dû mal à comprendre.
Sur ce sujet, comme tous les Français, j'ai entendu ces derniers jours tout et le contraire de tout.
Polémiquer sur le point de savoir si nous sommes plus chers ou moins chers que les Allemands ne fait que retarder la prise de décisions utiles.
La réalité, pour l'avoir vérifié dans toutes les études statistiques, c'est que les coûts salariaux horaires sont supérieurs en France par rapport à l'Allemagne, dans l'industrie et les services. La réalité, c'est aussi que ce différentiel a eu tendance à s'accroître ces dernières années. On comprend d'ailleurs aisément pourquoi : pendant que le Gouvernement allemand menait courageusement sa réforme du marché du travail en 2003-2005, avec les lois Hartz, la France s'offrait les 35 heures... avec les résultats que tout le monde connaît !
Conséquence : nos PME exportatrices ont en effet dû sacrifier une partie de leurs marges pour rester compétitives sur les marchés. Elles y ont aussi laissé une part de leur capacité d'investissement, d'innovation et de prospection, donc de leur compétitivité de demain.
Ceci posé, que peut-on faire pour améliorer à l'export la présence de nos PME et de nos ETI ? La réponse est du simple bon sens : mieux analyser la demande extérieure qui existe ; et mettre en face le plus efficacement possible l'offre française qui s'exprime en régions.
Sur le premier point, la demande, et donc pour prendre une image sportive notre ligne d'avants, j'entends dire d'emblée que l'Etat va donner l'exemple.
D'abord, Ubifrance, dont je salue le travail et les dirigeants Alain Cousin et Christophe Lecourtier, et toute l'équipe de plus de 1000 collaborateurs motivés en France et à l'étranger. Sur le plan quantitatif, beaucoup a déjà été fait : 20 000 entreprises ont ainsi été accompagnées l'an dernier. Mais il est temps de passer à une seconde étape plus qualitative, en introduisant un critère de chiffre d'affaires réalisé à l'export et pas seulement de nombre d'entreprises accompagnées.
De même, j'ai souhaité que la culture du résultat soit renforcée dans le réseau des Services économiques de nos Ambassades : nous aurons avec la Direction générale du Trésor l'occasion de présenter le 1er mars prochain lors de la réunion annuelle des Chefs de Service économique des mesures en ce sens, en particulier en matière d'incitation financière et d'évaluation dite à 360 degrés par leurs équipes, leurs chefs, mais aussi de leurs partenaires, les entreprises en particulier.
En coordination étroite avec la Ministre des Affaires étrangères et européennes, un groupe de travail sera créé dans les prochains jours pour étudier le renforcement du rôle joué par nos Ambassadeurs en matière de soutien aux entreprises. L'objectif est de renforcer les liens entre le monde des diplomates et celui de l'entreprise.
Enfin, donner l'exemple du côté de l'Etat c'est accepter de mutualiser notre présence à l'étranger là où Ubifrance n'est pas présent, tant avec nos régions, quand elles sont présentes, qu'avec bien sûr les chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger.
Vous le savez, cher Pierre-Antoine Gailly : c'est déjà le cas au Maroc. Je m'adresse aux chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger : je suis tout à fait prêt à envisager d'autres destinations où pour éviter les doublons, les chambres pourront commencer à prendre en charge le soutien aux entreprises.
L'autre niveau prioritaire de mon action portera sur la France elle-même, au plus près de nos entreprises, de façon que l'offre soit la plus adaptée à la demande identifiée par Ubifrance, par l'Etat, par les chambres de commerce à l'étranger. C'est la raison pour laquelle chaque semaine, je m'efforce d'aller à la rencontre de nos entreprises, un ou deux jours en régions, un ou deux jours à l'étranger.
J'ai demandé aux services de l'Etat, les Douanes en particulier, aux chambres consulaires, à Ubifrance, à Oseo et à Coface garanties publiques de mutualiser leurs fichiers « entreprises ». Cela vous semblera peut-être anodin, mais croyez-moi ça ne l'est pas : c'est un véritable progrès, qui va permettre par exemple aux chambres de savoir qui exporte et qui ne le fait pas encore parmi les entreprises de sa région, et à Ubifrance et Oseo de connaître les entreprises à cibler pour un accompagnement personnalisé. Pour ce faire, le 1er juin prochain, une plateforme de partage de l'information sera mise en place au Ministère de l'Economie afin que tous les acteurs puissent y avoir accès. Je tiens, à ce titre, ici à remercier chaleureusement le Directeur général des Douanes, Jérôme Fournel, pour avoir bien voulu mobiliser dès ma nomination l'ensemble de ses équipes dans ce sens.
Toutes les complémentarités seront exploitées au sein de l'Etat et des établissements publics qui lui sont rattachés : avec la signature aujourd'hui, devant vous, de l'acte de rapprochement opérationnel des activités d'Ubifrance et d'Oseo International en régions, auquel vous avez assisté tout à l'heure, la mise en réseau des financements publics de l'export est en marche. Qui dit complémentarité, dit aussi synergies : Oseo, Ubifrance et la Coface me dresseront, pour le 1er avril 2011, un état des lieux des produits publics de financement à l'export proposés aux entreprises et me remettront des propositions concrètes pour rationaliser la gamme. Il y a là des marges de progression considérables que nous devons être capables d'exploiter rapidement.
De la même manière, je compte sur les Direccte, dont je salue ici la présence et dont j'entends renforcer la mission.
Mais si l'Etat donne l'exemple, j'attends beaucoup des partenaires de l'export, à commencer par vous, Mesdames et Messieurs les Présidents de Chambres de Commerce et d'Industrie. Vous savez comme moi le rôle et le statut que vous donne la loi consulaire de l'été dernier. Vous levez l'impôt et vous jouez un rôle éminent dans l'enseignement supérieur, dans la formation professionnelle et dans le développement du tissu économique de votre région. Désormais, comme je vous l'ai indiqué ce matin après de nombreux entretiens ces dernières semaines avec le Président de l'ACFCI, Jean-François Bernardin, je souhaite que nous fassions de l'export une priorité de l'action des chambres de commerce et d'industrie en métropole et en outre-mer. Donnons-nous des objectifs précis de détection en France d'entreprises à accompagner et d'introduction de ces entreprises dans le dispositif général de soutien à l'export. Je sais pouvoir compter sur vous, comme vous m'en avez assuré lors de cette matinée de travail, pour que le réseau consulaire soit cette « ligne d'arrières » efficace de notre Equipe de France de l'Export en lien direct avec notre « ligne d'avants » pilotée à l'étranger par Ubifrance.
Le champ des entreprises à prospecter est grand ouvert, comme le montrent les premières cartes de France de l'export que nous publions aujourd'hui.
Dans cette mobilisation, le rôle des Conseils régionaux est lui aussi essentiel. Je me suis longuement entretenu sur le sujet avec Alain Rousset, Président de l'ARF, avec Jean-Paul Bachy, Président du Conseil Régional Champagne-Ardenne, avec Jean-Jacques Queyranne, Président du Conseil Régional Rhône-Alpes, et avec plusieurs autres Présidents de Région, avec lesquels une réunion est d'ailleurs prévue le 16 février prochain. Les lois de décentralisation vous confient une responsabilité de premier plan dans le développement économique et international des entreprises. Je sais que beaucoup de régions sont très mobilisées à l'export. Certaines d'entre elles sont présentes à l'export, et contribuent de manière substantielle au financement des VIE. Mon appel est simple : mutualisons nos efforts et nos moyens en régions et à l'étranger. Il n'y a dans cette affaire aucun enjeu idéologique ni politique. Ce que nous devons arriver à faire, c'est construire dans chaque région de France un guichet unique ou si l'on préfère une Maison de l'Export où les partenaires travaillent ensemble au service des entreprises qui exportent ou souhaitent exporter. Un modèle existe déjà dans le Nord-Pas-de-Calais, dont nous devrions tous nous inspirer.
Ce que je souhaite, c'est que chaque primo-exportateur puisse se tourner vers la Chambre de commerce et d'industrie régionale de son ressort, qui sera son point d'entrée avec l'ensemble de l'équipe de France de l'export en région, secteur par secteur, pays par pays.
Pour ce faire, j'ai engagé la refonte du site exporter.gouv.fr, qui sera demain un véritable portail Internet de l'export consacré aux entreprises : comme en Allemagne, nos PME pourront désormais accéder en un clic à l'ensemble des soutiens export dont elles peuvent bénéficier, de même qu'aux coordonnées du guichet unique utiles dans leur région et à des informations pays fournies par la DG Trésor et Ubifrance.
Et dans le même esprit, je veux dire ma gratitude aux Conseillers du Commerce extérieur de la France, qui êtes nommés sur ma proposition par le Premier ministre. Un mot sur ce point : lors de mes rencontres en région ou à l'étranger avec les sections de CCEF et lors de mes entretiens avec le Président Bruno Durieux et le Vice-président André Ferrand, j'ai compris que beaucoup d'entre vous aspiriez à une nouvelle dynamique de ce réseau. Dans ce cadre, je vais saisir Jean-Paul Delevoye, Président du Conseil économique et social, afin qu'il nous transmette d'ici le 1er juillet prochain un rapport sur le rôle des Conseillers du Commerce Extérieur et les moyens de le renforcer dans l'intérêt bien entendu du dispositif général de soutien à l'export.
Avant de conclure, je voudrais évoquer un point là encore essentiel. Je veux parler de la mutualisation des moyens entre les entreprises elles-mêmes ou si l'on préfère le portage des PME et des ETI par les grands groupes. Là encore beaucoup d'initiatives ont été prises : l'implication du Medef, le Pacte PME International, j'ai vu évidemment Henri Lachmann et le nouveau Président Fabrice Brégier. Permettez-moi de vous dire ceci : l'une des grandes difficultés entre nous, nos compétiteurs allemands, italiens, turcs, asiatiques, c'est que, à l'export, certains ont appris à chasser en meute, d'autres non.
Nous tous avons besoin d'une vraie solidarité dans la chaîne de sous-traitance. Je vais vous parler franchement : le patriotisme économique n'est pas un gros mot. Il s'agit pour nos grands groupes, à qualité et à prix comparables, de préférer la sous-traitance française, c'est-à-dire les emplois en France. Je le demanderai à tous ceux qui viennent solliciter, ici même à Bercy, des soutiens financiers publics à l'export.
Sur ce sujet, comme sur tous les autres, l'Etat montrera la voie : je suggèrerai respectueusement au Président de la République que les délégations d'entreprises accompagnant ses déplacements ainsi que l'ensemble des voyages ministériels comprennent au moins 50% de PME. Je lui suggèrerai tout aussi respectueusement, de même qu'au Premier ministre, de visiter en priorité dans chacun de leurs déplacements les chambres de commerce françaises locales, rendant ainsi hommage aux Français qui se battent à l'étranger pour l'emploi en France et pour la marque France dans le monde.
Cet ensemble de mesures en faveur de nos PME à l'export ne serait pas complet sans la mention des volontaires internationaux en entreprises (VIE). C'est un instrument absolument essentiel Nous le savons tous : le VIE est un vrai succès, 80% des 30 000 jeunes qui en ont bénéficié ont trouvé un emploi à la sortie, ils apprennent le monde. L'éducation, la formation professionnelle sont des relais fondamentaux pour remporter la bataille de l'export. Mon objectif, c'est de doubler le plus vite possible le nombre de jeunes qui en bénéficient chaque année. Je souhaite ouvrir les VIE pas seulement aux surdiplômés, je travaille sur ce point avec mes collègues Nadine Morano et Luc Chatel pour élargir le dispositif, pour un VIE pour tous, un VIE à la portée de toutes les qualifications. Le nouveau dispositif sera annoncé et présenté à l'occasion du Grand Prix VIE que nous organiserons en juin prochain. Là encore, j'ai besoin des grands groupes pour aider au portage des VIE à l'étranger.
Mesdames et Messieurs, chers collègues,
Mon propos n'est évidemment pas de gommer 51 Mdseuros de déficit en un an seulement.
Ce que je me propose de faire avec vous, avec votre aide, en 2011, plus modestement vous l'aurez compris, c'est de remettre le navire français de l'export dans la bonne direction, de mettre en place des mesures de bon sens pour simplifier la vie de nos entreprises et faciliter leur marche à l'export, d'instaurer une culture du travail en commun : Etat/entreprises ; Etat/régions ; Etat/chambres consulaires ; petits groupes/grands groupes.
D'ici au mois de mai, nous expérimenterons dans au moins trois régions le guichet unique à l'export avec l'objectif de le généraliser dans tout le pays. Nous testerons ainsi notre capacité à mieux de détecter la demande et mieux y répondre en régions.
Je vous donne d'ores et déjà rendez-vous à tous au début de l'automne, pour un point d'étape complet sur la mise en oeuvre de ce plan.
D'ici là, je compte sur vous tous pour ce que ce projet soit un succès. Pas pour le Ministre du Commerce extérieur, pas pour le Gouvernement, mais pour nos PME, pour nos emplois.
Je vous remercie pour votre attention.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 14 février 2011
Monsieur le Président d'Ubifrance, cher Alain Cousin
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
[Messieurs les Députés et Sénateurs, cher Pierre Lequiller, cher Hervé de Charrette, chère Catherine Dumas, cher Michel Herbillon, cher André Ferrand, cher Christophe-André Frassa, cher Gérad Cesar,
Monsieur le Vice-Président du Conseil Régional de Basse-Normandie, cher Philippe Bonneau,
Monsieur le Conseiller de Paris, cher Eric Helard,
Monsieur le Préfet de Région, cher Patrick Stefanini,
Monsieur le Président de l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie, cher Jean-François Bernardin,
Messieurs les Présidents des Chambres Régionales de Commerce et d'Industrie,
Monsieur le Président du Comité national des Conseillers du Commerce extérieur, cher Bruno Durieux,
Monsieur le Président de l'Union des Chambres et d'Industrie à l'étranger, cher Pierre-Antoine Gailly,
Monsieur le Président de la Coface, cher François David,
Monsieur le Président Directeur général d'OSEO, cher François Drouin,
Monsieur le Directeur général d'Ubifrance, cher Christophe Lecourtier,
Mesdames et Messieurs les représentants des fédérations professionnelles et dirigeants d'entreprises,
Mesdames et Messieurs les Secrétaires généraux et Directeurs généraux d'administration centrale,
Mesdames et Messieurs les responsables d'agences publiques,
Messieurs les représentants des Conseils régionaux,
Mesdames et Messieurs les membres de l'Equipe de France de l'Export,
Mesdames et Messieurs, chers amis,]
Je sais qu'en ce début de mois de février, il est désormais trop tard pour vous adresser mes voeux de nouvelle année, mais fort heureusement il y a la Chine et le Nouvel an chinois. Comme il est beaucoup question de la Chine dans mon ministère et sans doute aussi dans votre vie professionnelle, vous qui êtes les acteurs de l'Equipe de France de l'export, je vous souhaite une excellente année ... du Lapin ! Que le Lapin nous aide à faire de 2011 une année réussie sur le plan du commerce extérieur !
Sur une note un peu plus sérieuse, les premières rencontres de l'export en 2009 et en 2010 avaient permis d'affermir le sentiment d'appartenance de chacun d'entre vous à cette entreprise commune qu'est la promotion de la marque France dans le monde. C'est cet héritage collectif là, qui doit beaucoup à l'engagement de Christine Lagarde et de ma prédécesseur, Anne-Marie Idrac, que j'entends amplifier avec vous cette année. 2011 en effet doit être l'année de la consolidation et j'espère, d'une nouvelle offensive de la France à l'export.
Mais avant d'évoquer cette offensive, de vous présenter les actions nouvelles sur lesquelles nous avons travaillé, regardons ensemble, si vous le permettez, le champ de bataille de cette guerre économique, que l'on appelle pudiquement la mondialisation.
Le commerce mondial en 2010, ce sont 14 000 milliards de dollars, concentrés autour de deux pôles principaux : l'Europe, avec 5 000 Mds et l'Asie, avec près de 4 500 Mds. A l'intérieur de ces deux pôles, deux leaders mondiaux : la Chine, première puissance exportatrice mondiale, avec près de 1 500 Mds $, et l'Allemagne, n°2, avec 1 150 Mds $.
Pour mesurer le chemin parcouru, je rappellerai avec le Premier ministre, que la Chine représentait il y a 30 ans moins de 1% du commerce mondial. Trente ans plus tard, en 2010, c'est 10%.
Mesdames et Messieurs, pour avoir consacré l'essentiel de ma vie professionnelle à la géopolitique et à la politique internationale, permettez moi de vous dire ceci : jamais, en temps de paix, le monde n'aura assisté à un tel basculement de richesses et de puissance, en une aussi brève période de temps, d'une partie de la planète à l'autre.
Tous les pays développés, je veux dire les anciens pays dominants d'hier, sans exception, ont dû abandonner une partie de leur position dominante, dans laquelle ils s'étaient installés depuis cinq siècles. Un exemple parmi d'autres : en l'espace de 5 ans seulement, entre 2004 et 2009, les 5 principaux pays européens, Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, Espagne, ont vu chuter leurs parts de marché mondial en valeur de 24,4 à 21%, exactement à due concurrence de la hausse de la présence chinoise, soit + 3,4 points.
Regardons la France, maintenant, puisque vous le savez, je viens de rendre publics les chiffres du commerce extérieur en 2010.
En apparence, la photographie est presque rassurante. La solution de facilité consisterait à insister sur les bonnes nouvelles. Oui, nous sommes encore la 5ème puissance exportatrice mondiale, la 2ème en Europe. Oui, notre commerce extérieur, après une année de crise de 2009, a rebondi en 2010 de 13,5%, quasi exactement au même rythme que les échanges mondiaux. Certes notre déficit s'est accru à 51,4 Mds euros, mais ne représente-t-il pas en gros notre facture énergétique en gaz et en pétrole, qui se monte à 48 Mds euros après une aggravation due à la hausse du prix du Brent en fin d'année ? Je pourrais m'en tenir là et insister sur d'autres bonnes nouvelles, par exemple le fait que nos grands groupes continuent à se développer et à investir et que 2010 aura été une année record en matière de grands contrats : + 38%.
Je pourrais me contenter de cet aperçu général, de cette lecture là de notre commerce extérieur et cela m'éviterait sans doute bien des inimitiés.
Mais vous permettrez à quelqu'un qui est d'abord un élu de terrain, et un élu de tradition gaulliste, de regarder la réalité en face, précisément pour préparer l'avenir.
Mesdames et Messieurs,
L'avenir nous oblige à nous comparer avec ce qui est comparable quand on est Français, c'est-à-dire nos partenaires de l'OCDE, en premier lieu nos amis allemands.
Si l'on se compare à l'Allemagne, alors on est obligés de noter qu'en face du déficit français, à 51,4 Mdseuros, l'Allemagne est en excédent à 126 Mdseuros, excédent qui contribue à tirer de 1,1% le taux de croissance du PIB qui atteint cette année le niveau record de +3,6%. Autrement dit l'écart entre la France et l'Allemagne, dont il est inutile de rappeler que le tandem qu'elles forment est le socle sur lequel repose l'ensemble de la construction européenne, atteint aujourd'hui près de 180 Mdseuros, à savoir 10 points de notre PIB ! Un tel déséquilibre est, je vous le dis tout net, préoccupant : il ne saurait perdurer sans dommage politique, j'entends, sans influer à terme sur le rapport de forces dans ce que j'appellerai la cabine de pilotage de l'Europe. Dès lors, le premier objectif que nous devrions nous fixer est de résorber les quelques 20 Mdseuros de déficit commercial hors énergie, qui constituent hélas ce qu'il faut bien appeler un solde structurel.
Au passage, cette comparaison avec l'Allemagne permet d'évacuer d'emblée nombre de faux débats, à commencer bien sûr par l'euro. Non, Mesdames et Messieurs, l'euro n'est pas la cause de nos déficits extérieurs. Les Allemands, jusqu'à preuve du contraire, vivent et exportent aussi avec la même monnaie que nous.
L'autre avantage de cette comparaison, c'est qu'elle nous permet de toucher du doigt ce que sont les véritables faiblesses de notre appareil d'exportation.
D'abord, la surdépendance de nos exportations au marché européen de l'UE à 27. Nous sommes quatre fois moins présents que les Allemands dans les BRIC, les grands émergents, avec 2% seulement de parts de marché, contre 7,5% pour nos amis allemands. Autre handicap : nos exportations dépendent d'un petit nombre de très grands groupes alors que la base exportatrice allemande est fondée sur un tissu industriel beaucoup plus large. J'y reviendrai dans quelques instants.
Vous l'aurez compris, c'est par un discours de vérité, par un constat lucide de la réalité que j'entends appréhender ma mission. Loin de toute inclination décliniste, loin de toute tentation à l'auto-flagellation, je veux au contraire partager avec vous deux convictions absolues.
En premier lieu, ce qui se joue à l'export en ce début de 21ème siècle, c'est d'abord, bien sûr, l'emploi chez nous. Chaque fois que nos exportations augmentent de 10 Mds euros, ce sont 25 000 emplois créés ou maintenus l'année qui suit. En 2010, la hausse de 47 Mds euros de nos exportations représente ainsi près de 120 000 postes nouveaux ou préservés en 2011. Au-delà la stabilité de notre modèle économique et social auquel nous sommes tant attachés. Ce qui se joue aussi, c'est la sauvegarde de notre indépendance nationale. Dans les années 1950 et 1960, lorsque le Général de Gaulle, revenu au pouvoir, a voulu redonner à la France son rang parmi les grandes nations, il lui fallut bien sûr sortir de la période coloniale, lancer à l'intérieur un programme de modernisation mais surtout doter la France, avec les Mirage IV et la force de frappe, des instruments de la puissance entre les deux supergrands de l'époque. La situation aujourd'hui est beaucoup plus complexe. Un exemple révélateur : le week-end dernier à Munich Hillary Clinton et Sergueï Lavrov ont signé un important accord de désarmement nucléaire qui n'a quasiment pas fait une ligne dans la presse. Pourtant, pendant le demi-siècle de guerre froide, un tel événement aurait mobilisé toute la planète. Aujourd'hui, tout le monde a compris que la réalité du rapport de forces ne se joue plus sur le nombre d'ogives nucléaires que l'on peut aligner dans l'air ou sous les mers. Ce qui compte ce sont les parts de marché, ce sont les excédents ou les déficits. Chine, 2 750 Mds $ de réserves en devises, Etats-Unis, 14 400 Mds $ de dette extérieure brute...
Mesdames et Messieurs,
Si on est comme moi attaché à la grandeur de la France, à la qualité de son mode de vie, à son indépendance, alors il faut que la remise en ordre de notre appareil de production, de notre industrie, de notre agriculture, de nos exportations, soit considérée comme une priorité nationale. Faute de quoi l'accumulation des déficits commerciaux et budgétaires nous conduira inéluctablement à donner les clefs de notre destin à nos créanciers.
Ma deuxième conviction, c'est que précisément, la France peut avoir un tout autre destin. Elle n'est pas condamnée à accumuler les déficits et à devenir, comme l'a imaginé Michel Houellebecq dans son dernier roman, le terrain de jeu et de repos d'ingénieurs et d'ouvriers chinois fatigués qui viendraient profiter de nos restaurants et de nos monuments historiques. Nulle fatalité ne condamne la France à se vider inexorablement de son industrie, en vivant la mondialisation comme une punition, à condition de regarder la réalité en face, celle de nos faiblesses, mais aussi celle des succès de la marque France : je pense à notre industrie du luxe, je pense à l'aéronautique et à l'espace, je pense aux potentialités immenses de l'agroalimentaire et à bien d'autres encore. Nous pouvons redevenir une grande puissance économique, y compris à l'export.
Le Président de la République l'a souhaité dans ses voeux : 2011 sera une année utile. C'est exactement ce que j'entends faire dans le secteur ministériel qui est le mien. J'entends donc devant vous tirer précisément les enseignements des chiffres que j'ai présentés à la presse il y a deux jours en termes d'actions concrètes pour l'année qui nous sépare des prochaines élections.
Ces enseignements sont au nombre de trois.
En premier lieu, travailler d'arrache-pied à l'établissement de normes équitables pour le commerce international, en cohérence avec les objectifs qui sont ceux de la France pendant cette année de Présidence du G20.
En second lieu, naturellement, redoubler d'efforts dans ce que nous appelons les grands contrats, ce qui est parfois appelé au Trésor « le régalien », face à une compétition de plus en plus rude.
En troisième lieu, nous devons d'urgence renforcer la base industrielle de nos PME et de nos ETI et les aider à l'exportation de façon encore plus efficace que par le passé.
D'abord le commerce international et les normes.
Comme vous le savez, la politique commerciale commune constitue une compétence exclusive de l'Union européenne. Mon rôle est donc d'établir un dialogue régulier avec le Commissaire Karel De Gucht ainsi qu'avec mes partenaires européens pour faire émerger des positions européennes les plus conformes possibles à nos intérêts nationaux. J'irai également aux Etats-Unis prochainement pour rencontrer mes homologues et rechercher avec eux comment progresser dans les négociations internationales en cours.
C'est d'autant plus important que l'année 2011 comporte des échéances majeures sur trois plans : l'ouverture des marchés étrangers à nos entreprises, l'amélioration des conditions de concurrence dans le commerce international, et la protection des intérêts industriels européens.
Le premier objectif de la politique commerciale de l'UE doit être d'ouvrir à nos entreprises les marchés en forte croissance. Pour cela, La France soutiendra la conclusion dans l'année d'un accord ambitieux et équilibré à l'OMC sur le cycle de Doha, avec l'objectif que la fin de la négociation permette plus d'ouverture des marchés émergents en matière de services et d'industrie et ne nous conduise pas à remettre en cause nos lignes rouges, notamment agricoles.
L'ouverture des marchés passe aussi par la conclusion de nouveaux accords de libre-échange cette année entre l'Union européenne et le Canada, Singapour et l'Inde, autant d'enjeux majeurs pour nos entreprises, notamment dans l'automobile, les services, les marchés publics, les vins et spiritueux ou encore la pharmacie. La négociation avec le Mercosur est également au menu mais j'ai déjà fait valoir que nous avons là des intérêts français fondamentaux, notamment en matière agricole. Enfin, je reviens d'un déplacement en Russie dont je tire la conviction que nos entreprises ont des marges de développement considérables dans ce pays, que ce soit dans l'agroalimentaire, les infrastructures de transport, les services financiers et bien sûr, l'énergie. A cet égard, l'accession de la Russie à l'OMC constitue donc également un objectif important de notre agenda international.
Ma seconde priorité sur ce plan est de favoriser des conditions de concurrence plus équitables pour nos entreprises dans le commerce international. On aura beau faire les meilleurs efforts du monde pour augmenter notre compétitivité, tout cela sera vain si les règles du jeu ne sont pas les mêmes pour tous, si les normes commerciales ne sont pas équilibrées et équitables.
D'où l'exigence de réciprocité, rappelée avec force par le Président de la République et le Gouvernement. Au nom de quoi l'Europe ferait-elle seule le choix d'ouvrir son marché intérieur, sans exiger les mêmes contreparties de ses partenaires quant à l'ouverture de leurs propres marchés ? Je veux bien que des investisseurs asiatiques puissent financer des autoroutes en Pologne, qui plus est avec les fonds structurels européens, mais dans ce cas nos entreprises doivent pouvoir faire la même chose en Asie.
Le principe de réciprocité dans la politique extérieure de l'Union européenne, pour lequel je me suis battu pendant plus d'un an et demi lorsque j'étais en charge des Affaires européennes au Quai d'Orsay, a enfin été adopté par le Conseil européen en septembre dernier grâce au Président de la République. Il faut désormais traduire ce principe en actions concrètes, pour que nos entreprises puissent en bénéficier effectivement. J'ai déjà ouvert des contacts étroits avec les Commissaires Barnier et De Gucht pour les inciter à proposer avant l'été un nouveau règlement européen sur la réciprocité avec les pays tiers dans l'acc??s aux marchés publics. Je recommencerai en tant que de besoin. Mais de grâce, comme l'a dit le Président de la République, il est grands temps d'abandonner toute naïveté.
Dans le même ordre d'idées, n'est-il pas grand temps là aussi de reconnaître que certains grands émergents ne peuvent plus être traités comme des pays en développement au même niveau que les pays les plus pauvres de la planète. Faut-il vraiment continuer à leur accorder les mêmes préférences tarifaires, la même aide au développement qu'aux les pays les plus pauvres ? L'Europe doit se réveiller sur ce que l'on appelle dans le jargon de la politique commerciale la « différenciation », et décliner cette différenciation dans sa politique commerciale comme dans son aide publique au développement. Ceci vaut bien sûr aussi pour la France et pour la stratégie de l'AFD : les dons ou les prêts à coût budgétaire pour l'Etat et le contribuable ne devraient-ils pas être réservés aux seuls pays qui en ont vraiment besoin ? Je pose la question. Et notre aide ne devrait-elle pas être déliée seulement dans les pays les moins avancés ? Voilà un débat qui mérite d'être ouvert dès à présent.
L'Europe ne peut pas non plus rester passive face au dumping social et environnemental, face à la contrefaçon : les outils pour se faire respecter existent, n'ayons plus peur de les utiliser, lorsque nos intérêts légitimes sont en cause. Le traité ACTA sur le renforcement de la protection des droits de propriété intellectuelle est de ce point de vue un instrument important, et je plaiderai pour qu'il soit adopté par l'UE rapidement, puis étendu à d'autres pays que les 37 signataires actuels. Nous ne pouvons pas accepter que des sociétés de pays émergents usurpent les droits de sociétés françaises sur des produits industriels performants qui leur ont été livrés pour venir les commercialiser en Europe en utilisant des sociétés de droit européen comme cheval de Troie. J'ai à l'esprit des cas très précis sur lesquels je peux vous assurer que le Gouvernement continuera à se battre.
Enfin, la troisième priorité dans ce volet normatif vise à assurer que la politique commerciale européenne devienne plus protectrice des intérêts industriels européens.
L'UE doit maintenant se repenser comme un espace de production, comme une base industrielle, en favorisant le développement de ses champions industriels. Je tiens d'ailleurs ici à rendre hommage à Michel Barnier qui s'efforce, dans le cadre de ses compétences de Commissaire européen au marché intérieur, de mener une véritable politique de soutien à l'industrie européenne.
C'est essentiel, parce que nous avons en face de nous de grands pays qui se sont dotés d'une politique industrielle très performante, qui même n'hésitent pas à se doter de législations fermant leurs marchés pour protéger leurs entreprises et leur marché intérieur. Je pense ici à de grands pays asiatiques, développés et émergents, dans lesquels la part de marché des entreprises étrangères dans certains secteurs, infrastructures de transport ou secteur financier par exemple, ne dépasse pas quelques pourcents : cette fermeture des marchés leur permet ensuite de faire émerger des leaders mondiaux dans ces secteurs. Bien entendu, dire cela, ce n'est pas appeler au protectionnisme mais simplement en appeler à des règles équitables. Ce n'est pas être protectionniste que d'utiliser les règles de l'anti-dumping et de l'anti-subvention pour défendre nos industries. Au nom de quoi l'Europe serait-elle seule à renoncer aux armes que lui donnent les traités ?
De même, la question des transferts de technologie doit aussi faire l'objet d'une politique active de l'Union. Un exemple : le transfert total il y a trois ans par un industriel européen de la technologie du train à grande vitesse permet aujourd'hui à un grand pays émergent asiatique de nous concurrencer sur tous les marchés export. Peut-on continuer ainsi ? L'Europe doit promouvoir, dans le respect des règles internationales de concurrence, des transferts de technologie ponctuels assumés, réfléchis, maîtrisés. Ne sacrifions pas notre recherche et développement, notre avance technologique, donc nos emplois futurs par des transferts de technologie trop rapides, souvent sous l'effet d'une concurrence entre entreprises européennes elles-mêmes. C'est un sujet difficile, mais qui mérite une vraie réflexion au sein de l'UE.
Sur tous ces sujets, je suis heureux de constater que les idées de la France progressent. L'année 2011 sera décisive pour passer des principes qui ont de plus en plus d'écho au sein de l'UE à la mise en oeuvre concrète.
J'évoquerai enfin sur ce même chapitre normatif l'impact des nouvelles règles prudentielles de Bâle III sur le financement du crédit export. Je sais combien nos entreprises, utilisatrices d'assurance-crédit et banques, y sont sensibles. A raison. Bâle III, vous le savez tous, est un pilier de la refondation indispensable du système financier mondial. Tout le monde se souvient des prises de risques excessives qui ont amené à l'effondrement total du système bancaire en 2008. Mais sur ce sujet aussi, l'Europe doit être attentive à ce que les règles qu'elle s'applique à elle-même, parce qu'elle se veut exemplaire, n'obère pas sa capacité à financer sa propre économie, ses industries, et donc ses positions à l'export, tandis que d'autres pays ne s'astreindraient pas aux mêmes disciplines. Mesdames et Messieurs, sur ce point aussi, le Gouvernement sera très attentif.
Mesdames et Messieurs, j'en viens maintenant aux grands contrats.
Dans ce domaine, nos performances en 2010, je l'ai rappelé il y a quelques instants, ont été tout à fait honorables : 21 Mds euros de contrats ont été signés par nos entreprises, soit une hausse de près de 40% par rapport à 2009. Ce n'est pas négligeable. L'aéronautique, qui représente quatre des dix plus gros contrats conclus en 2010, a en particulier connu un millésime exceptionnel, avec 285 livraisons d'appareils Airbus, et un excédent commercial record de 18,1 Mds euros.
Ces bons résultats sont l'occasion de nous féliciter de la mobilisation de tous, du sommet de l'Etat jusqu'aux entreprises. Et dans cette maison, de la politique d'assurance-crédit résolument contracyclique qui a été menée en 2010 : les 20 Mdseuros de nouvelles prises en garantie par l'Etat, via la Coface, auront permis de « sauver » un nombre important de projets dont le financement par le marché n'était pas acquis, ou devenait exorbitant. Permettez-moi de citer quelques exemples : les deux mégacentrales thermiques Alstom de Medupi et Kusile en Afrique du Sud, les 8 satellites de Thalès Alenia Space pour instaurer l'Internet haut débit dans les pays les moins avancés,...
Pour autant, le moment n'est pas venu de relâcher nos efforts. L'époque des positions établies, des rentes de situation et des relations de gré à gré exclusives est définitivement révolu. Vous le savez mieux que moi. Partout, la concurrence fait rage, surtout dans les marchés les plus convoités, en Asie, en Russie, en Arabie saoudite, aux Emirats Arabes Unis. Partout, les compétiteurs auxquels nous avons affaire arrivent dans les grands appels d'offres d'internationaux avec un niveau technologique que nous aurions tort de sous-estimer, à des prix très compétitifs, et de surcroît avec des financements clefs en main. Vous le savez mieux que moi : les contrats d'aujourd'hui ne se gagnent plus sur la seule réputation d'excellence technologique ou sur la seule amitié des peuples. Nos clients d'hier sont devenus nos concurrents.
A partir de ce constat, j'entends concentrer mon action autour de trois priorités.
D'abord, contribuer à remettre de l'ordre là où c'est nécessaire dans l'organisation des filières industrielles à l'export : l'équipe de France des grands contrats ne sera victorieuse que s'il existe une équipe de France unie dans chaque grande filière, ce qui ne veut pas dire qu'il ne doit exister qu'une seule grande entreprise par filière, bien sûr ! Lorsque je constate que sur un appel d'offres dans le domaine ferroviaire, trois grandes entreprises françaises sont en compétition les unes avec les autres dans trois consortiums concurrents, j'ai parfois l'impression que toutes les leçons n'ont pas encore été tirées d'Abu Dhabi. En effet, l'une des grandes forces de nos concurrents, notamment allemands, mais également chinois ou coréens, c'est d'arriver absolument soudés face à la demande. Ce message d'unité et de cohésion de nos filières industrielles à l'export, je ne cesserai de le marteler dans mes contacts réguliers avec les entreprises, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire lors de mes premières rencontres avec les grands patrons du rail, de l'énergie, de l'aéronautique,...
Deuxième priorité, le financement. Vous le savez comme moi, la compétition sur les grands contrats se déplace de plus en plus sur le terrain financier. Sur certains projets de l'industrie spatiale, le crédit export peut permettre d'économiser l'équivalent du différentiel de change euro/dollar, qui peut lui-même représenter jusqu'à 15% du coût du produit. Dans les pays qui commencent à se doter de leurs premières centrales nucléaires, le coût du financement bancaire atteint parfois 30% du prix de revient du réacteur.
Là encore certains de nos concurrents, qui arrivent maintenant face au client non seulement avec le produit et la technologie, mais en plus avec des conditions financières extrêmement favorables, ne sont du reste pas toujours assujettis aux mêmes disciplines que nous. J'organiserai donc à la fin du mois de juin à Paris, avec Christine Lagarde, la première conférence internationale sur le financement du commerce mondial avec l'ensemble des pays du G20 et leurs agences de crédit, qui portera notamment sur ce sujet des normes d'encadrement des crédits export.
Cela dit, il nous appartient de tirer avantage des règles de l'OCDE pour expérimenter des mécanismes de financements adaptés en faveur de nos entreprises. Dès le printemps, je proposerai avec Christine Lagarde, au Premier ministre et au Président de la République, une première sélection d'au moins trois grands contrats stratégiques pour l'économie française qui bénéficieront, à titre pilote, d'un soutien financier renforcé. Ce ne sera évidemment pas sans contreparties de la part des grands groupes qui auront accès à ces mécanismes, j'y reviendrai dans un instant.
Troisième priorité, l'accompagnement institutionnel des grands contrats. Vous le savez, le Président de la République est le premier vendeur de France. Mon rôle tel que je le conçois à ses côtés est d'être à votre disposition. Pour être le plus efficace possible, j'ai demandé à chacun des grands patrons de me communiquer très précisément la liste de leurs prospects et des dates importantes en 2011, en fonction desquels j'ai commencé à bâtir mon agenda de déplacements sur l'année. La CIACI sera par ailleurs renforcée et deviendra un vecteur de dialogue entre l'Etat et les entreprises.
Mesdames et Messieurs, j'en viens enfin à mon troisième prioritaire, longtemps négligé jusqu'à la réforme réussie d'Ubifrance engagée par Christine Lagarde : je veux parler du développement international de nos PME et de nos ETI.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Nous avons en France 81 700 PME exportatrices, qui représentent 90% du nombre total d'exportateurs, mais qui représentent seulement 40% des volumes à l'export. Plus grave, le nombre d'exportateurs a diminué de 16% en 10 ans et de 1% rien qu'entre 2009 et 2010. Au total, nous avons 4,5 fois moins d'exportateurs que nos voisins allemands, et 2 fois moins que nos voisins italiens. En Allemagne, 12 entreprises sur 100 exportent, elles sont moins de 3 en France.
Il nous faut donc en priorité briser ce cercle vicieux où l'étroitesse et la sous-capitalisation des PME sont à l'origine d'un déficit d'innovation et de capacité de prospection, qui est à son tour la cause d'une présence trop faible à l'export, pourtant indispensable au développement de notre économie et de l'emploi chez nous.
Le Premier ministre vient d'y faire allusion : depuis 2007, le Gouvernement s'est largement attaqué au problème structurel de défaut de compétitivité de la France. Au-delà, cet effort est loin d'être achevé. J'en veux pour preuve la polémique récurrente sur le coût du travail en France et en Allemagne, que pour ma part, j'ai dû mal à comprendre.
Sur ce sujet, comme tous les Français, j'ai entendu ces derniers jours tout et le contraire de tout.
Polémiquer sur le point de savoir si nous sommes plus chers ou moins chers que les Allemands ne fait que retarder la prise de décisions utiles.
La réalité, pour l'avoir vérifié dans toutes les études statistiques, c'est que les coûts salariaux horaires sont supérieurs en France par rapport à l'Allemagne, dans l'industrie et les services. La réalité, c'est aussi que ce différentiel a eu tendance à s'accroître ces dernières années. On comprend d'ailleurs aisément pourquoi : pendant que le Gouvernement allemand menait courageusement sa réforme du marché du travail en 2003-2005, avec les lois Hartz, la France s'offrait les 35 heures... avec les résultats que tout le monde connaît !
Conséquence : nos PME exportatrices ont en effet dû sacrifier une partie de leurs marges pour rester compétitives sur les marchés. Elles y ont aussi laissé une part de leur capacité d'investissement, d'innovation et de prospection, donc de leur compétitivité de demain.
Ceci posé, que peut-on faire pour améliorer à l'export la présence de nos PME et de nos ETI ? La réponse est du simple bon sens : mieux analyser la demande extérieure qui existe ; et mettre en face le plus efficacement possible l'offre française qui s'exprime en régions.
Sur le premier point, la demande, et donc pour prendre une image sportive notre ligne d'avants, j'entends dire d'emblée que l'Etat va donner l'exemple.
D'abord, Ubifrance, dont je salue le travail et les dirigeants Alain Cousin et Christophe Lecourtier, et toute l'équipe de plus de 1000 collaborateurs motivés en France et à l'étranger. Sur le plan quantitatif, beaucoup a déjà été fait : 20 000 entreprises ont ainsi été accompagnées l'an dernier. Mais il est temps de passer à une seconde étape plus qualitative, en introduisant un critère de chiffre d'affaires réalisé à l'export et pas seulement de nombre d'entreprises accompagnées.
De même, j'ai souhaité que la culture du résultat soit renforcée dans le réseau des Services économiques de nos Ambassades : nous aurons avec la Direction générale du Trésor l'occasion de présenter le 1er mars prochain lors de la réunion annuelle des Chefs de Service économique des mesures en ce sens, en particulier en matière d'incitation financière et d'évaluation dite à 360 degrés par leurs équipes, leurs chefs, mais aussi de leurs partenaires, les entreprises en particulier.
En coordination étroite avec la Ministre des Affaires étrangères et européennes, un groupe de travail sera créé dans les prochains jours pour étudier le renforcement du rôle joué par nos Ambassadeurs en matière de soutien aux entreprises. L'objectif est de renforcer les liens entre le monde des diplomates et celui de l'entreprise.
Enfin, donner l'exemple du côté de l'Etat c'est accepter de mutualiser notre présence à l'étranger là où Ubifrance n'est pas présent, tant avec nos régions, quand elles sont présentes, qu'avec bien sûr les chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger.
Vous le savez, cher Pierre-Antoine Gailly : c'est déjà le cas au Maroc. Je m'adresse aux chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger : je suis tout à fait prêt à envisager d'autres destinations où pour éviter les doublons, les chambres pourront commencer à prendre en charge le soutien aux entreprises.
L'autre niveau prioritaire de mon action portera sur la France elle-même, au plus près de nos entreprises, de façon que l'offre soit la plus adaptée à la demande identifiée par Ubifrance, par l'Etat, par les chambres de commerce à l'étranger. C'est la raison pour laquelle chaque semaine, je m'efforce d'aller à la rencontre de nos entreprises, un ou deux jours en régions, un ou deux jours à l'étranger.
J'ai demandé aux services de l'Etat, les Douanes en particulier, aux chambres consulaires, à Ubifrance, à Oseo et à Coface garanties publiques de mutualiser leurs fichiers « entreprises ». Cela vous semblera peut-être anodin, mais croyez-moi ça ne l'est pas : c'est un véritable progrès, qui va permettre par exemple aux chambres de savoir qui exporte et qui ne le fait pas encore parmi les entreprises de sa région, et à Ubifrance et Oseo de connaître les entreprises à cibler pour un accompagnement personnalisé. Pour ce faire, le 1er juin prochain, une plateforme de partage de l'information sera mise en place au Ministère de l'Economie afin que tous les acteurs puissent y avoir accès. Je tiens, à ce titre, ici à remercier chaleureusement le Directeur général des Douanes, Jérôme Fournel, pour avoir bien voulu mobiliser dès ma nomination l'ensemble de ses équipes dans ce sens.
Toutes les complémentarités seront exploitées au sein de l'Etat et des établissements publics qui lui sont rattachés : avec la signature aujourd'hui, devant vous, de l'acte de rapprochement opérationnel des activités d'Ubifrance et d'Oseo International en régions, auquel vous avez assisté tout à l'heure, la mise en réseau des financements publics de l'export est en marche. Qui dit complémentarité, dit aussi synergies : Oseo, Ubifrance et la Coface me dresseront, pour le 1er avril 2011, un état des lieux des produits publics de financement à l'export proposés aux entreprises et me remettront des propositions concrètes pour rationaliser la gamme. Il y a là des marges de progression considérables que nous devons être capables d'exploiter rapidement.
De la même manière, je compte sur les Direccte, dont je salue ici la présence et dont j'entends renforcer la mission.
Mais si l'Etat donne l'exemple, j'attends beaucoup des partenaires de l'export, à commencer par vous, Mesdames et Messieurs les Présidents de Chambres de Commerce et d'Industrie. Vous savez comme moi le rôle et le statut que vous donne la loi consulaire de l'été dernier. Vous levez l'impôt et vous jouez un rôle éminent dans l'enseignement supérieur, dans la formation professionnelle et dans le développement du tissu économique de votre région. Désormais, comme je vous l'ai indiqué ce matin après de nombreux entretiens ces dernières semaines avec le Président de l'ACFCI, Jean-François Bernardin, je souhaite que nous fassions de l'export une priorité de l'action des chambres de commerce et d'industrie en métropole et en outre-mer. Donnons-nous des objectifs précis de détection en France d'entreprises à accompagner et d'introduction de ces entreprises dans le dispositif général de soutien à l'export. Je sais pouvoir compter sur vous, comme vous m'en avez assuré lors de cette matinée de travail, pour que le réseau consulaire soit cette « ligne d'arrières » efficace de notre Equipe de France de l'Export en lien direct avec notre « ligne d'avants » pilotée à l'étranger par Ubifrance.
Le champ des entreprises à prospecter est grand ouvert, comme le montrent les premières cartes de France de l'export que nous publions aujourd'hui.
Dans cette mobilisation, le rôle des Conseils régionaux est lui aussi essentiel. Je me suis longuement entretenu sur le sujet avec Alain Rousset, Président de l'ARF, avec Jean-Paul Bachy, Président du Conseil Régional Champagne-Ardenne, avec Jean-Jacques Queyranne, Président du Conseil Régional Rhône-Alpes, et avec plusieurs autres Présidents de Région, avec lesquels une réunion est d'ailleurs prévue le 16 février prochain. Les lois de décentralisation vous confient une responsabilité de premier plan dans le développement économique et international des entreprises. Je sais que beaucoup de régions sont très mobilisées à l'export. Certaines d'entre elles sont présentes à l'export, et contribuent de manière substantielle au financement des VIE. Mon appel est simple : mutualisons nos efforts et nos moyens en régions et à l'étranger. Il n'y a dans cette affaire aucun enjeu idéologique ni politique. Ce que nous devons arriver à faire, c'est construire dans chaque région de France un guichet unique ou si l'on préfère une Maison de l'Export où les partenaires travaillent ensemble au service des entreprises qui exportent ou souhaitent exporter. Un modèle existe déjà dans le Nord-Pas-de-Calais, dont nous devrions tous nous inspirer.
Ce que je souhaite, c'est que chaque primo-exportateur puisse se tourner vers la Chambre de commerce et d'industrie régionale de son ressort, qui sera son point d'entrée avec l'ensemble de l'équipe de France de l'export en région, secteur par secteur, pays par pays.
Pour ce faire, j'ai engagé la refonte du site exporter.gouv.fr, qui sera demain un véritable portail Internet de l'export consacré aux entreprises : comme en Allemagne, nos PME pourront désormais accéder en un clic à l'ensemble des soutiens export dont elles peuvent bénéficier, de même qu'aux coordonnées du guichet unique utiles dans leur région et à des informations pays fournies par la DG Trésor et Ubifrance.
Et dans le même esprit, je veux dire ma gratitude aux Conseillers du Commerce extérieur de la France, qui êtes nommés sur ma proposition par le Premier ministre. Un mot sur ce point : lors de mes rencontres en région ou à l'étranger avec les sections de CCEF et lors de mes entretiens avec le Président Bruno Durieux et le Vice-président André Ferrand, j'ai compris que beaucoup d'entre vous aspiriez à une nouvelle dynamique de ce réseau. Dans ce cadre, je vais saisir Jean-Paul Delevoye, Président du Conseil économique et social, afin qu'il nous transmette d'ici le 1er juillet prochain un rapport sur le rôle des Conseillers du Commerce Extérieur et les moyens de le renforcer dans l'intérêt bien entendu du dispositif général de soutien à l'export.
Avant de conclure, je voudrais évoquer un point là encore essentiel. Je veux parler de la mutualisation des moyens entre les entreprises elles-mêmes ou si l'on préfère le portage des PME et des ETI par les grands groupes. Là encore beaucoup d'initiatives ont été prises : l'implication du Medef, le Pacte PME International, j'ai vu évidemment Henri Lachmann et le nouveau Président Fabrice Brégier. Permettez-moi de vous dire ceci : l'une des grandes difficultés entre nous, nos compétiteurs allemands, italiens, turcs, asiatiques, c'est que, à l'export, certains ont appris à chasser en meute, d'autres non.
Nous tous avons besoin d'une vraie solidarité dans la chaîne de sous-traitance. Je vais vous parler franchement : le patriotisme économique n'est pas un gros mot. Il s'agit pour nos grands groupes, à qualité et à prix comparables, de préférer la sous-traitance française, c'est-à-dire les emplois en France. Je le demanderai à tous ceux qui viennent solliciter, ici même à Bercy, des soutiens financiers publics à l'export.
Sur ce sujet, comme sur tous les autres, l'Etat montrera la voie : je suggèrerai respectueusement au Président de la République que les délégations d'entreprises accompagnant ses déplacements ainsi que l'ensemble des voyages ministériels comprennent au moins 50% de PME. Je lui suggèrerai tout aussi respectueusement, de même qu'au Premier ministre, de visiter en priorité dans chacun de leurs déplacements les chambres de commerce françaises locales, rendant ainsi hommage aux Français qui se battent à l'étranger pour l'emploi en France et pour la marque France dans le monde.
Cet ensemble de mesures en faveur de nos PME à l'export ne serait pas complet sans la mention des volontaires internationaux en entreprises (VIE). C'est un instrument absolument essentiel Nous le savons tous : le VIE est un vrai succès, 80% des 30 000 jeunes qui en ont bénéficié ont trouvé un emploi à la sortie, ils apprennent le monde. L'éducation, la formation professionnelle sont des relais fondamentaux pour remporter la bataille de l'export. Mon objectif, c'est de doubler le plus vite possible le nombre de jeunes qui en bénéficient chaque année. Je souhaite ouvrir les VIE pas seulement aux surdiplômés, je travaille sur ce point avec mes collègues Nadine Morano et Luc Chatel pour élargir le dispositif, pour un VIE pour tous, un VIE à la portée de toutes les qualifications. Le nouveau dispositif sera annoncé et présenté à l'occasion du Grand Prix VIE que nous organiserons en juin prochain. Là encore, j'ai besoin des grands groupes pour aider au portage des VIE à l'étranger.
Mesdames et Messieurs, chers collègues,
Mon propos n'est évidemment pas de gommer 51 Mdseuros de déficit en un an seulement.
Ce que je me propose de faire avec vous, avec votre aide, en 2011, plus modestement vous l'aurez compris, c'est de remettre le navire français de l'export dans la bonne direction, de mettre en place des mesures de bon sens pour simplifier la vie de nos entreprises et faciliter leur marche à l'export, d'instaurer une culture du travail en commun : Etat/entreprises ; Etat/régions ; Etat/chambres consulaires ; petits groupes/grands groupes.
D'ici au mois de mai, nous expérimenterons dans au moins trois régions le guichet unique à l'export avec l'objectif de le généraliser dans tout le pays. Nous testerons ainsi notre capacité à mieux de détecter la demande et mieux y répondre en régions.
Je vous donne d'ores et déjà rendez-vous à tous au début de l'automne, pour un point d'étape complet sur la mise en oeuvre de ce plan.
D'ici là, je compte sur vous tous pour ce que ce projet soit un succès. Pas pour le Ministre du Commerce extérieur, pas pour le Gouvernement, mais pour nos PME, pour nos emplois.
Je vous remercie pour votre attention.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 14 février 2011