Texte intégral
Q - Monsieur le Ministre, craignez-vous une déstabilisation dans les Balkans ?
R - La communauté internationale a réagi de façon ferme, rapide et homogène. Tous les gouvernements de l'Union européenne, de l'Alliance atlantique et des pays de la région ont une attitude très claire : on ne peut pas laisser des groupes extrémistes créer comme ça des incidents et perpétuer une stratégie de la tension. Nous nous retrouvons tous sur le rappel de notre attachement à l'intégrité territoriale de la Macédoine, à sa stabilité et à celle de toute la région. Il y a un accord général sur la nécessité de reprendre le contrôle de la situation sur le terrain. Au sein de l'OTAN, l'accord s'est fait pour que la KFOR prenne ses responsabilités, avec le déploiement d'un contingent américain sur la frontière macédonienne, et que dans certaines zones bien précises l'armée yougoslave puisse intervenir. Il y a donc une prise de conscience, et notre réaction est la bonne.
Q - Cette nouvelle tension ne repose-t-elle pas la question du futur statut du Kosovo et de la communauté albanaise ?
R - Les problèmes doivent être traités par des moyens normaux, modernes, par le dialogue politique. Il est important de donner aux habitants du Kosovo - les albanophones mais aussi les autres - une vraie perspective politique. Le représentant spécial de l'ONU, M. Lykrup, est en train de réunir les conditions nécessaires pour que les élections générales prévues par la résolution 1244 puissent avoir lieu. C'est-à-dire bien définir les compétences de l'Assemblée qui devra gérer les affaires du Kosovo et, d'autre part, permettre que les minorités puissent voter dans des conditions correctes. L'autre élément politique important, c'est le dialogue entre les représentants du Kosovo et de Belgrade, auquel s'ajoute le dialogue entre les représentants des villageois albanais de la vallée de Presevo (Serbie) et de Belgrade.
Q - Quels rôles jouent l'Albanie et la Macédoine ?
R - Du côté de l'Albanie, l'opinion est très excitée par le soutien à la cause de la "Grande Albanie" rejointe un peu en cela par le Parlement, mais le gouvernement, lui, est très responsable. Il résiste à cette pression interne. Il est très engagé en faveur de la stabilité des frontières, y compris celles de la Macédoine. Le Premier ministre albanais l'a redit à Paris il y a quelques jours. Il faut saluer son courage. A propos de la Macédoine, les responsables ont voulu attirer l'attention de la communauté internationale sur la gravité des incidents. Ils me paraissent très conscients des deux aspects du problème. Le côté sécurité, mais aussi la dimension politique avec les communautés albanaises qui peuvent avoir des demandes légitimes à présenter qui doivent être traitées politiquement. A cet égard, tout n'est peut-être pas parfait en Macédoine mais ce pays est quand même, dans la région, un exemple de sagesse et de cohabitation réussie entre les différentes communautés.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 mars 2001)