Texte intégral
Jean-Michel Aphatie
Bonjour François Fillon.
François Fillon
Bonjour Jean-Michel Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Pourquoi Michèle Alliot-Marie a-t-elle dû quitter le ministère des Affaires étrangères, parce qu'elle a été victime comme elle l'écrit dans sa lettre de démission d'une cabale politique et médiatique, ou bien parce que son épisode de vacances tunisiennes a constitué une faute au regard de la morale publique ?
François Fillon
Je crois que la décision que nous avons prise hier avec le Président de la République, c'est un acte stratégique. Face à une accélération de l'histoire, qui va avoir des conséquences que nous ne sommes pas d'ailleurs aujourd'hui en mesure d'imaginer sur l'économie mondiale, sur nos pays, sur l'ordre mondial, il fallait que la voix de la France soit entendue dans le monde. Et
Jean-Michel Aphatie
Elle ne l'était plus ?
François Fillon
Michèle Alliot-Marie, qui a n'a pas commis de faute, la décision que nous avons prise ce n'est pas une décision morale, c'est une décision politique, la voix de Michèle Alliot-Marie n'était plus audible parce qu'elle faisait l'objet d'une campagne pour toutes sortes de raisons que vous avez évoquées, et que
Jean-Michel Aphatie
Campagne injuste ?
François Fillon
Je pense que cette campagne était injuste, dans la mesure où Michèle Alliot-Marie est une femme intègre, c'est un ministre qui pendant des années et des années a apporté à la République. Et je vous fais remarquer d'ailleurs que c'était l'un des ministres les plus populaires parmi les responsables politiques depuis des années et des années. Ceci étant les choses sont ce qu'elles sont, il y a une réalité, Michèle Alliot-Marie s'est trouvée mise en cause sur toute une série de sujets. Elle a essayé de se défendre, nous l'avons défendue le Président de la République et moi-même, mais rien n'y a fait. Et la polémique autour du ministre des Affaires étrangères créait une situation qui était une situation qui devenait dangereuse pour l'image de la France, pour la voix de la France, puisque c'est à travers Michèle Alliot-Marie, la diplomatie française elle-même qui était attaquée. De façon tout à fait injuste d'ailleurs, car j'espère qu'on aura l'occasion au cours de cette matinée de faire le bilan de la politique étrangère française. J'entendais Alain Duhamel parler du discours de François Mitterrand à la Knesset, on pourrait aussi parler du discours de Nicolas Sarkozy à la Knesset qui a été un grand discours qui a marqué la politique étrangère française.
Jean-Michel Aphatie
Pour rester sur Michèle Alliot-Marie, vous avez cédé, si on comprend bien votre raisonnement.
François Fillon
Il est incontestable que le Président de la République et moi-même, nous aurions préféré ne pas nous séparer de Michèle Alliot-Marie. Mais il n'y avait pas d'autre solution et Michèle Alliot-Marie l'a convenu elle-même. Deuxièmement, il fallait nommer dans ces circonstances un ministre des Affaires étrangères qui ait une grande autorité morale et une grande autorité politique. Je vous rappelle Jean-Michel Aphatie que nous avions déjà proposé avec Nicolas Sarkozy à Alain Juppé d'être ministre des Affaires étrangères en novembre. A l'époque, il ne l'avait pas souhaité pour des raisons personnelles, pour des raisons d'organisation personnelle. Nous lui avons cette semaine demandé, malgré les hésitations qui étaient les siennes, de répondre à une demande qui était une demande qui correspondait à l'intérêt national.
Jean-Michel Aphatie
Et donc il a accepté et pour évacuer ce problème, il ne souhaitait pas cumuler entre autres raisons sa fonction de ministre des Affaires étrangères avec celle de maire de Bordeaux, cela lui paraissait impossible. Allez-vous lui demander François Fillon, pour qu'il se consacre à la diplomatie française qui va requérir là évidemment beaucoup de travail pour lui, d'abandonner la mairie de Bordeaux ?
François Fillon
Non, je ne lui demanderai pas d'abandonner la mairie de Bordeaux, comme je ne le demanderai à aucun membre du gouvernement. Maintenant il est incontestable et Alain Juppé le sait et c'est la raison pour laquelle il avait souhaité il n'avait pas souhaité être ministre des affaires étrangères il est incontestable que c'est un poste qui, par les déplacements qu'il impose, fera en sorte qu'il sera moins présent à Bordeaux.
Jean-Michel Aphatie
C'est les Bordelais qui vont être contents de vous entendre François Fillon.
François Fillon
Je crois qu'en même temps, les Bordelais sont capables de comprendre que dans des circonstances historiques comme celles que nous vivons, c'est aussi un grand honneur pour la ville de Bordeaux que nous ayons demandé à son maire d'être le porte-parole de la politique étrangère de la France.
Jean-Michel Aphatie
Redoutez-vous François Fillon une arrivée massive en Europe et en France de migrants venant de pays arabes agités par les révolutions ?
François Fillon
Il ne faut pas que notre regard sur les révolutions arabes qui, encore une fois constituent un événement d'une dimension considérable, se limite à la question de l'immigration. Le premier sujet c'est : comment on fait pour aider ces révolutions qui sont loin d'avoir réussi, qui sont loin d'être abouties, comment on fait pour aider ces révolutions à emmener les peuples arabes vers la démocratie ? Et c'est une question immédiate parce que si par exemple la Tunisie ne donne pas rapidement l'exemple d'une transition réussie vers la démocratie, alors c'est un signal terrible qui est envoyé à tous les pays de la région avec des conséquences qui peuvent être le retour des forces les plus obscures. Et le rôle de la France c'est d'aider, c'est d'appuyer, c'est de soutenir y compris sur le plan économique et financier ces pays en marche vers la démocratie. Maintenant, on ne peut pas ignorer qu'il va y avoir des mouvements migratoires importants, d'abord dans un premier temps parce que ce sont des structures étatiques qui ont complètement disparu, et donc des pays qui sont dans une situation où aucune autorité ne s'exerce ; et deuxièmement parce qu'il y a, par exemple en Libye en ce moment, une guerre civile qui pousse naturellement des populations sur la voie de l'immigration. Et donc, nous devons avoir une réponse collective, une réponse européenne sur ce sujet, d'abord pour faire en sorte qu'il y ait moins de flux migratoires possibles, et ensuite pour accueillir les personnes qu'il faudra accueillir.
Jean-Michel Aphatie
De quels moyens disposez-vous pour éviter ces flux migratoires, on a l'impression pas grand-chose mais on se trompe peut-être.
François Fillon
Je pense que le meilleur moyen, Jean-Michel Aphatie, de les éviter, c'est d'aider la Tunisie à réussir, c'est d'aider l'Egypte à réussir, c'est faire en sorte que la situation se stabilise rapidement en Libye. C'est ça la réponse que l'Europe doit apporter, c'est la première réponse que l'Europe doit apporter. Par ailleurs naturellement, avec les autres pays européens, nous ferons preuve d'une très grande fermeté à l'égard de l'immigration illégale. Et c'est d'ailleurs dans cet esprit que nous avons décidé avec le Président de la République de confier à Claude GUEANT le ministère de l'Intérieur et de l'Immigration.
Jean-Michel Aphatie
Un mot sur la Libye, la communauté internationale a-t-elle les moyens de hâter la solution au problème que pose aujourd'hui le colonel Kadhafi à la Libye ?
François Fillon
D'abord je voudrais vous annoncer ce matin quelque chose : dans quelques heures, deux avions partiront pour Benghazi à la demande du Gouvernement français, avec des médecins, des infirmiers, du matériel médical, des médicaments. Et ce sera le début d'une opération massive de soutien humanitaire aux populations des territoires libérés. Deuxièmement, vous avez vu que la France a été en pointe dans les décisions qui ont été prises pour sanctionner le colonel Kadhafi. C'est nous qui avons demandé que le Conseil européen adopte une position commune face à ce sujet. C'est nous qui avons été à l'origine, avec la Grande Bretagne, de la résolution des Nations Unies qui a été votée à l'unanimité pendant le week-end. Et nous étudions toutes les solutions pour faire en sorte que le colonel Kadhafi comprenne qu'il doit s'en aller et qu'il doit quitter le pouvoir. Je sais qu'on évoque des solutions militaires, ces solutions font l'objet d'évaluations de la part du Gouvernement français
Jean-Michel Aphatie
Les solutions militaires font l'objet d'évaluations ?
François Fillon
Et je vous ferai remarquer J'ai entendu plusieurs membres de l'opposition ou plusieurs observateurs expliquer qu'il fallait par exemple interdire le survol du territoire libyen. C'est une option qui est étudiée, mais je veux faire remarquer deux choses : d'abord qu'elle ne peut être prise que sur la base d'une décision du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui est loin d'être acquise aujourd'hui ; et deuxièmement qu'elle ne peut l'être que dans le cadre d'une opération conjointe avec des grands pays. Personne aujourd'hui en Europe n'a les moyens tout seul de réaliser cette opération. Il faudrait donc impliquer l'Otan et je pense qu'il y a là une réflexion à avoir : est-ce que l'OTAN doit être impliqué dans une guerre civile au Sud de la méditerranée ? C'est une question qui, pour le moins, mérite d'être réfléchie avant d'être lancée.
Jean-Michel Aphatie
En tout cas, on retiendra ce que vous venez de dire, que le Gouvernement français étudie les solutions militaires au problème que pose aujourd'hui le colonel Kadhafi.
François Fillon
Toutes les solutions font l'objet, aujourd'hui, d'une étude.
Jean-Michel Aphatie
Le débat sur la place de l'islam en France, dans ce contexte compliqué, est-il vraiment une nécessité, François Fillon ?
François Fillon
Je vais vous dire, Jean-Michel Aphatie, si ce débat devait être centré sur l'islam
Jean-Michel Aphatie
Qu'est-ce qu'on vous a dit ? Débat sur la place de l'islam en France.
François Fillon
Si ce débat devait apparaître comme un débat qui, d'une manière ou d'une autre, conduit à stigmatiser les musulmans, je m'y opposerai. Je le dis très clairement, je m'y opposerai. En revanche, si le débat comme je l'ai souhaité déjà, d'ailleurs, il y a plusieurs mois est un débat qui vise à rénover le concept de laïcité, à adapter la laïcité française à une situation nouvelle, que chacun connaît, et qui est posée par le fait qu'il y a aujourd'hui une religion, l'islam, qui est beaucoup plus importante sur le sol national qu'elle ne l'a été dans le passé, alors je pense que, oui, c'est un débat qui est utile, mais seulement dans ce cadre-là. Et donc je veillerai, à la place qui est la mienne, à faire en sorte que ce débat ne dérive pas.
Jean-Michel Aphatie
Il faut le rebaptiser alors. C'est le concept de laïcité en France aujourd'hui.
François Fillon
Ce n'est certainement pas un débat sur l'islam, c'est un débat sur le concept de laïcité. Vous savez qu'il y a des questions qui se posent
Jean-Michel Aphatie
On avait mal compris le Président de la République alors ?
François Fillon
Vous savez qu'il y a des questions qui se posent. La question des lieux de prière. C'est une question. Personne ne peut ignorer que la prière dans la rue c'est lié au fait qu'il n'y a pas assez de lieux de prière. Comment est-ce qu'on finance les lieux de prière ? Voilà une question qui mérite d'être posée, et qui ne doit pas être taboue. Il y a la question qui est posée de la formation des imams, c'est une question que tout le monde connaît, qui est sur la table et qui n'a pas été correctement traitée. Voilà, ce sont des questions qui doivent être posées.
Jean-Michel Aphatie
Vous l'avez dit, François Fillon, au début de cette intervention, Michèle Alliot-Marie, selon vous, a été attaquée injustement, et vous avez cédé à ces attaques. Brice Hortefeux n'a été attaqué par personne, et à la surprise de tout le monde vous l'enlevez du ministère de l'Intérieur. Pourquoi ?
François Fillon
C'est une décision qui n'a rien à voir, et qui est liée à plusieurs sujets. D'abord, il y a des défis à relever en matière de sécurité et d'immigration qui vont croissant. Et, avec le Président de la République, nous avons estimé que la personne qui était la mieux placée pour relever ces défis, c'était Claude Guéant. D'abord parce que c'est un homme qui a exercé à peu près toutes les fonctions au ministère de l'Intérieur, qui connaît parfaitement ce ministère, et qui nous a semblé être le mieux à même de conduire une nouvelle étape de la politique de sécurité et d'immigration au moment où nous estimons qu'elle est nécessaire. Et deuxièmement, mais ce n'est pas à moi de rentrer dans ce débat, le Président de la République a souhaité modifier son organisation, il appellera auprès de lui Brice Hortefeux, comme conseiller politique, dans un contexte dont chacun peut comprendre qu'il va être éminemment politique pendant les prochaines semaines et les prochains mois.
Jean-Michel Aphatie
Brice Hortefeux n'était pas capable de faire face à la nouvelle situation ?
François Fillon
Brice Hortefeux a fait un travail tout à fait remarquable, mais il sera certainement plus utile auprès du Président de la République dans les circonstances qui s'annoncent.
Jean-Michel Aphatie
Pour quelles raisons il sera plus utile auprès du Président de la République, François Fillon ?
François Fillon
Je vous laisse vous-même les deviner.
Jean-Michel Aphatie
Non non je n'ai pas un don de devin
François Fillon
Chacun voit bien qu'on avance vers des échéances politiques qui nécessitaient que le Président de la République réorganise son équipe.
Jean-Michel Aphatie
Pouvez-vous préciser votre pensée ?
François Fillon
Non, je ne la préciserai pas plus monsieur Aphatie, malgré votre insistance.
Jean-Michel Aphatie
Lue dans Le Journal du Dimanche hier, cette phrase de Nicolas Sarkozy à votre propos, François Fillon : « il se planque. Il ne me sert à rien. On ne l'entend plus. »
François Fillon
D'abord je ne crois pas du tout que le Président de la République ait prononcé ces paroles. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble cette semaine. Vous savez, depuis 4 ans que Nicolas Sarkozy m'a confié la mission de Premier ministre, j'ai entendu successivement dire que je n'étais personne, puis que je lui avais imposé ma nomination en novembre dernier, puis que j'étais un hyper Premier ministre, puis il y a quelques jours, dans un grand hebdomadaire, que j'étais en train de préparer ma candidature aux élections présidentielles contre lui. Tout ça, évidemment, n'a absolument aucun sens. La seule chose qui est vraie c'est que moi je ne parle que quand j'ai des choses à dire. Ce matin j'ai des choses à dire, Jean-Michel Aphatie, parce que nous avons pris des décisions. La semaine dernière, je n'en n'avais pas, en tout cas pas s'agissant de la presse. Et enfin, j'ai noté dans tous les commentaires que j'ai lus ces derniers jours, qu'on me reprochait de ne pas être intervenu pour répondre à Dominique Strauss-Kahn. Quelle conception de la vie publique, quelle conception du fonctionnement des institutions que d'imaginer que le Premier ministre de la République française doit polémiquer avec le Directeur général du Fonds Monétaire International !
Jean-Michel Aphatie
Il n'y a pas aujourd'hui parce que décidément les journalistes n'écrivent que des choses fausses un problème, à nouveau, entre Nicolas Sarkozy et vous ?
François Fillon
Non, je ne dis pas que les journalistes n'écrivent que des choses fausses, je pense qu'ils sont souvent mal informés, ou informés par des gens qui ont des intérêts à les informer. Les relations entre le Président de la République et moi n'ont jamais été aussi confiantes, monsieur Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Puisque vous le dites, François Fillon. L'élection présidentielle de 2012 est-elle déjà perdue pour Nicolas Sarkozy ?
François Fillon
Ce qui compte aujourd'hui pour le Gouvernement et pour Nicolas Sarkozy, ce n'est pas 2012 c'est 2011. Non, mais je vais vous répondre
Jean-Michel Aphatie
Si je peux me permettre de vous interrompre. Vous savez, les auditeurs vous ont entendu tout à l'heure, ce que vous avez suggéré c'est bien « Nicolas Sarkozy prépare 2012. »
François Fillon
Vous savez que c'est mon souhait, je l'ai toujours dit.
Jean-Michel Aphatie
Donc 2012 c'est quand même une question importante.
François Fillon
Ce qui compte aujourd'hui c'est 2011. Pourquoi ? Ce qui compte c'est de savoir si en 2011 on va atteindre notre objectif de croissance, 2%. Il est atteignable. On a fait 1,5% l'année dernière. Les investissements des entreprises ont largement repris. La question qui se pose pour 2011 c'est, est-ce qu'on va faire baisser le chômage ? Il y a des chiffres encourageants au début de l'année, mais ces chiffres encourageants il faut maintenant les confirmer. La question qui se pose c'est, est-ce qu'on va réussir la réforme de la dépendance ? La question qui se pose c'est, est-ce qu'on va réussir la réforme de la justice en amenant des jurés populaires pour mieux associer les citoyens aux décisions des tribunaux correctionnels ? Et une fois qu'on aura fait ça, alors la question se posera du débat électoral, sur la base d'un projet, qu'on est en train d'élaborer, et sur la base d'une question qui est la crédibilité.
Jean-Michel Aphatie
Vous êtes en train d'élaborer un projet, François Fillon ?
François Fillon
On est en train d'élaborer un projet, bien entendu et la crédibilité de Nicolas Sarkozy, la crédibilité des candidats, de la majorité.
Jean-Michel Aphatie
Vous voyez les sondages, vous voyez les études d'opinion, vous voyez que ça ne va pas très fort pour Nicolas Sarkozy. Vous le voyez comme nous.
François Fillon
Je le vois comme vous, mais je n'y accorde aucune importance car les sondages ne compteront que lorsqu'on aura un candidat désigné à Gauche et qu'on sera engagé dans la campagne électorale, avec un candidat désigné à Droite. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Jean-Michel Aphatie
Vous avez de meilleurs sondages que Nicolas Sarkozy aujourd'hui, François Fillon.
François Fillon
Ce n'est pas le cas aujourd'hui, et je considère, Jean-Michel Aphatie, que l'outrance de la Gauche à l'égard du Président de la République, à un moment donné se retournera contre le Parti socialiste. J'ai entendu cette semaine un responsable socialiste dire que la France vivait un des pires moments de son histoire. J'ai entendu madame Aubry, il y a quelques semaines, comparer le Président de la République à monsieur Madoff. J'ai vu une campagne des jeunes socialistes qui compare le Président de la République à Hitler. Franchement, je pense que cette attitude est une attitude qui sera jugée très sévèrement par les Français le moment venu.
Jean-Michel Aphatie
Je croyais qu'un Premier ministre n'était pas là pour polémiquer et répondre aux opposants.
François Fillon
En l'occurrence je suis, en tant que citoyen, choqué, par cette manière d'exercer l'action politique.
Jean-Michel Aphatie
C'est dit. Alain Juppé pourrait-il être un candidat de substitution à Nicolas Sarkozy si celui-ci ne pouvait pas se présenter, François Fillon ?
François Fillon
Mais cette question ne se pose absolument pas, monsieur Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Des questions de journaliste, auxquelles vous ne réfléchissez jamais ?
François Fillon
Non, c'est une question qui ne se pose pas, parce que les relations qui sont les miennes avec Alain Juppé, les relations qui sont les miennes avec Nicolas Sarkozy, me permettent de vous dire que c'est une question qui ne se pose pas.
Jean-Michel Aphatie
Cette interview se termine, je voudrais juste revenir sur ce qui était notre début. Il est tout de même étonnant de vous entendre dire, vous qui avez une image particulière, François Fillon, celle d'un homme rigoureux, que Michèle Alliot-Marie n'a commis aucune faute lors de son déplacement en Tunisie, dont je rappelle qu'elle a utilisé un jet privé appartenant à un homme d'affaires local, qui a lui-même vendu un appartement à ses parents, et que ça a semblé, à beaucoup, tout de même énorme.
François Fillon
Non mais je comprends parfaitement la réaction qui a été celle de l'opinion publique, je pense que Michèle Alliot-Marie n'a pas su, non plus, trouver les mots pour se défendre, mais en même temps je dis aux Français que Michèle Alliot-Marie n'a pas commis de faute au sens moral en utilisant l'avion d'un ami personnel, de longue date, et que ses parents ont le droit de s'acheter un appartement en Tunisie. Ce n'est pas des fautes en tant que telles, ce ne sont pas des elle n'a pas transgressé de lois. La question est différente.
Jean-Michel Aphatie
François Fillon, qui avait des choses à dire, et qui les a dites sur RTL ce matin.
Vincent Parizot
Oui, et qui a notamment annoncé l'envoi de deux avions avec des médecins, du matériel médical, à Benghazi en Libye. Merci monsieur le Premier ministre.Source http://www.gouvernement.fr, le 1er mars 2011
Bonjour François Fillon.
François Fillon
Bonjour Jean-Michel Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Pourquoi Michèle Alliot-Marie a-t-elle dû quitter le ministère des Affaires étrangères, parce qu'elle a été victime comme elle l'écrit dans sa lettre de démission d'une cabale politique et médiatique, ou bien parce que son épisode de vacances tunisiennes a constitué une faute au regard de la morale publique ?
François Fillon
Je crois que la décision que nous avons prise hier avec le Président de la République, c'est un acte stratégique. Face à une accélération de l'histoire, qui va avoir des conséquences que nous ne sommes pas d'ailleurs aujourd'hui en mesure d'imaginer sur l'économie mondiale, sur nos pays, sur l'ordre mondial, il fallait que la voix de la France soit entendue dans le monde. Et
Jean-Michel Aphatie
Elle ne l'était plus ?
François Fillon
Michèle Alliot-Marie, qui a n'a pas commis de faute, la décision que nous avons prise ce n'est pas une décision morale, c'est une décision politique, la voix de Michèle Alliot-Marie n'était plus audible parce qu'elle faisait l'objet d'une campagne pour toutes sortes de raisons que vous avez évoquées, et que
Jean-Michel Aphatie
Campagne injuste ?
François Fillon
Je pense que cette campagne était injuste, dans la mesure où Michèle Alliot-Marie est une femme intègre, c'est un ministre qui pendant des années et des années a apporté à la République. Et je vous fais remarquer d'ailleurs que c'était l'un des ministres les plus populaires parmi les responsables politiques depuis des années et des années. Ceci étant les choses sont ce qu'elles sont, il y a une réalité, Michèle Alliot-Marie s'est trouvée mise en cause sur toute une série de sujets. Elle a essayé de se défendre, nous l'avons défendue le Président de la République et moi-même, mais rien n'y a fait. Et la polémique autour du ministre des Affaires étrangères créait une situation qui était une situation qui devenait dangereuse pour l'image de la France, pour la voix de la France, puisque c'est à travers Michèle Alliot-Marie, la diplomatie française elle-même qui était attaquée. De façon tout à fait injuste d'ailleurs, car j'espère qu'on aura l'occasion au cours de cette matinée de faire le bilan de la politique étrangère française. J'entendais Alain Duhamel parler du discours de François Mitterrand à la Knesset, on pourrait aussi parler du discours de Nicolas Sarkozy à la Knesset qui a été un grand discours qui a marqué la politique étrangère française.
Jean-Michel Aphatie
Pour rester sur Michèle Alliot-Marie, vous avez cédé, si on comprend bien votre raisonnement.
François Fillon
Il est incontestable que le Président de la République et moi-même, nous aurions préféré ne pas nous séparer de Michèle Alliot-Marie. Mais il n'y avait pas d'autre solution et Michèle Alliot-Marie l'a convenu elle-même. Deuxièmement, il fallait nommer dans ces circonstances un ministre des Affaires étrangères qui ait une grande autorité morale et une grande autorité politique. Je vous rappelle Jean-Michel Aphatie que nous avions déjà proposé avec Nicolas Sarkozy à Alain Juppé d'être ministre des Affaires étrangères en novembre. A l'époque, il ne l'avait pas souhaité pour des raisons personnelles, pour des raisons d'organisation personnelle. Nous lui avons cette semaine demandé, malgré les hésitations qui étaient les siennes, de répondre à une demande qui était une demande qui correspondait à l'intérêt national.
Jean-Michel Aphatie
Et donc il a accepté et pour évacuer ce problème, il ne souhaitait pas cumuler entre autres raisons sa fonction de ministre des Affaires étrangères avec celle de maire de Bordeaux, cela lui paraissait impossible. Allez-vous lui demander François Fillon, pour qu'il se consacre à la diplomatie française qui va requérir là évidemment beaucoup de travail pour lui, d'abandonner la mairie de Bordeaux ?
François Fillon
Non, je ne lui demanderai pas d'abandonner la mairie de Bordeaux, comme je ne le demanderai à aucun membre du gouvernement. Maintenant il est incontestable et Alain Juppé le sait et c'est la raison pour laquelle il avait souhaité il n'avait pas souhaité être ministre des affaires étrangères il est incontestable que c'est un poste qui, par les déplacements qu'il impose, fera en sorte qu'il sera moins présent à Bordeaux.
Jean-Michel Aphatie
C'est les Bordelais qui vont être contents de vous entendre François Fillon.
François Fillon
Je crois qu'en même temps, les Bordelais sont capables de comprendre que dans des circonstances historiques comme celles que nous vivons, c'est aussi un grand honneur pour la ville de Bordeaux que nous ayons demandé à son maire d'être le porte-parole de la politique étrangère de la France.
Jean-Michel Aphatie
Redoutez-vous François Fillon une arrivée massive en Europe et en France de migrants venant de pays arabes agités par les révolutions ?
François Fillon
Il ne faut pas que notre regard sur les révolutions arabes qui, encore une fois constituent un événement d'une dimension considérable, se limite à la question de l'immigration. Le premier sujet c'est : comment on fait pour aider ces révolutions qui sont loin d'avoir réussi, qui sont loin d'être abouties, comment on fait pour aider ces révolutions à emmener les peuples arabes vers la démocratie ? Et c'est une question immédiate parce que si par exemple la Tunisie ne donne pas rapidement l'exemple d'une transition réussie vers la démocratie, alors c'est un signal terrible qui est envoyé à tous les pays de la région avec des conséquences qui peuvent être le retour des forces les plus obscures. Et le rôle de la France c'est d'aider, c'est d'appuyer, c'est de soutenir y compris sur le plan économique et financier ces pays en marche vers la démocratie. Maintenant, on ne peut pas ignorer qu'il va y avoir des mouvements migratoires importants, d'abord dans un premier temps parce que ce sont des structures étatiques qui ont complètement disparu, et donc des pays qui sont dans une situation où aucune autorité ne s'exerce ; et deuxièmement parce qu'il y a, par exemple en Libye en ce moment, une guerre civile qui pousse naturellement des populations sur la voie de l'immigration. Et donc, nous devons avoir une réponse collective, une réponse européenne sur ce sujet, d'abord pour faire en sorte qu'il y ait moins de flux migratoires possibles, et ensuite pour accueillir les personnes qu'il faudra accueillir.
Jean-Michel Aphatie
De quels moyens disposez-vous pour éviter ces flux migratoires, on a l'impression pas grand-chose mais on se trompe peut-être.
François Fillon
Je pense que le meilleur moyen, Jean-Michel Aphatie, de les éviter, c'est d'aider la Tunisie à réussir, c'est d'aider l'Egypte à réussir, c'est faire en sorte que la situation se stabilise rapidement en Libye. C'est ça la réponse que l'Europe doit apporter, c'est la première réponse que l'Europe doit apporter. Par ailleurs naturellement, avec les autres pays européens, nous ferons preuve d'une très grande fermeté à l'égard de l'immigration illégale. Et c'est d'ailleurs dans cet esprit que nous avons décidé avec le Président de la République de confier à Claude GUEANT le ministère de l'Intérieur et de l'Immigration.
Jean-Michel Aphatie
Un mot sur la Libye, la communauté internationale a-t-elle les moyens de hâter la solution au problème que pose aujourd'hui le colonel Kadhafi à la Libye ?
François Fillon
D'abord je voudrais vous annoncer ce matin quelque chose : dans quelques heures, deux avions partiront pour Benghazi à la demande du Gouvernement français, avec des médecins, des infirmiers, du matériel médical, des médicaments. Et ce sera le début d'une opération massive de soutien humanitaire aux populations des territoires libérés. Deuxièmement, vous avez vu que la France a été en pointe dans les décisions qui ont été prises pour sanctionner le colonel Kadhafi. C'est nous qui avons demandé que le Conseil européen adopte une position commune face à ce sujet. C'est nous qui avons été à l'origine, avec la Grande Bretagne, de la résolution des Nations Unies qui a été votée à l'unanimité pendant le week-end. Et nous étudions toutes les solutions pour faire en sorte que le colonel Kadhafi comprenne qu'il doit s'en aller et qu'il doit quitter le pouvoir. Je sais qu'on évoque des solutions militaires, ces solutions font l'objet d'évaluations de la part du Gouvernement français
Jean-Michel Aphatie
Les solutions militaires font l'objet d'évaluations ?
François Fillon
Et je vous ferai remarquer J'ai entendu plusieurs membres de l'opposition ou plusieurs observateurs expliquer qu'il fallait par exemple interdire le survol du territoire libyen. C'est une option qui est étudiée, mais je veux faire remarquer deux choses : d'abord qu'elle ne peut être prise que sur la base d'une décision du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui est loin d'être acquise aujourd'hui ; et deuxièmement qu'elle ne peut l'être que dans le cadre d'une opération conjointe avec des grands pays. Personne aujourd'hui en Europe n'a les moyens tout seul de réaliser cette opération. Il faudrait donc impliquer l'Otan et je pense qu'il y a là une réflexion à avoir : est-ce que l'OTAN doit être impliqué dans une guerre civile au Sud de la méditerranée ? C'est une question qui, pour le moins, mérite d'être réfléchie avant d'être lancée.
Jean-Michel Aphatie
En tout cas, on retiendra ce que vous venez de dire, que le Gouvernement français étudie les solutions militaires au problème que pose aujourd'hui le colonel Kadhafi.
François Fillon
Toutes les solutions font l'objet, aujourd'hui, d'une étude.
Jean-Michel Aphatie
Le débat sur la place de l'islam en France, dans ce contexte compliqué, est-il vraiment une nécessité, François Fillon ?
François Fillon
Je vais vous dire, Jean-Michel Aphatie, si ce débat devait être centré sur l'islam
Jean-Michel Aphatie
Qu'est-ce qu'on vous a dit ? Débat sur la place de l'islam en France.
François Fillon
Si ce débat devait apparaître comme un débat qui, d'une manière ou d'une autre, conduit à stigmatiser les musulmans, je m'y opposerai. Je le dis très clairement, je m'y opposerai. En revanche, si le débat comme je l'ai souhaité déjà, d'ailleurs, il y a plusieurs mois est un débat qui vise à rénover le concept de laïcité, à adapter la laïcité française à une situation nouvelle, que chacun connaît, et qui est posée par le fait qu'il y a aujourd'hui une religion, l'islam, qui est beaucoup plus importante sur le sol national qu'elle ne l'a été dans le passé, alors je pense que, oui, c'est un débat qui est utile, mais seulement dans ce cadre-là. Et donc je veillerai, à la place qui est la mienne, à faire en sorte que ce débat ne dérive pas.
Jean-Michel Aphatie
Il faut le rebaptiser alors. C'est le concept de laïcité en France aujourd'hui.
François Fillon
Ce n'est certainement pas un débat sur l'islam, c'est un débat sur le concept de laïcité. Vous savez qu'il y a des questions qui se posent
Jean-Michel Aphatie
On avait mal compris le Président de la République alors ?
François Fillon
Vous savez qu'il y a des questions qui se posent. La question des lieux de prière. C'est une question. Personne ne peut ignorer que la prière dans la rue c'est lié au fait qu'il n'y a pas assez de lieux de prière. Comment est-ce qu'on finance les lieux de prière ? Voilà une question qui mérite d'être posée, et qui ne doit pas être taboue. Il y a la question qui est posée de la formation des imams, c'est une question que tout le monde connaît, qui est sur la table et qui n'a pas été correctement traitée. Voilà, ce sont des questions qui doivent être posées.
Jean-Michel Aphatie
Vous l'avez dit, François Fillon, au début de cette intervention, Michèle Alliot-Marie, selon vous, a été attaquée injustement, et vous avez cédé à ces attaques. Brice Hortefeux n'a été attaqué par personne, et à la surprise de tout le monde vous l'enlevez du ministère de l'Intérieur. Pourquoi ?
François Fillon
C'est une décision qui n'a rien à voir, et qui est liée à plusieurs sujets. D'abord, il y a des défis à relever en matière de sécurité et d'immigration qui vont croissant. Et, avec le Président de la République, nous avons estimé que la personne qui était la mieux placée pour relever ces défis, c'était Claude Guéant. D'abord parce que c'est un homme qui a exercé à peu près toutes les fonctions au ministère de l'Intérieur, qui connaît parfaitement ce ministère, et qui nous a semblé être le mieux à même de conduire une nouvelle étape de la politique de sécurité et d'immigration au moment où nous estimons qu'elle est nécessaire. Et deuxièmement, mais ce n'est pas à moi de rentrer dans ce débat, le Président de la République a souhaité modifier son organisation, il appellera auprès de lui Brice Hortefeux, comme conseiller politique, dans un contexte dont chacun peut comprendre qu'il va être éminemment politique pendant les prochaines semaines et les prochains mois.
Jean-Michel Aphatie
Brice Hortefeux n'était pas capable de faire face à la nouvelle situation ?
François Fillon
Brice Hortefeux a fait un travail tout à fait remarquable, mais il sera certainement plus utile auprès du Président de la République dans les circonstances qui s'annoncent.
Jean-Michel Aphatie
Pour quelles raisons il sera plus utile auprès du Président de la République, François Fillon ?
François Fillon
Je vous laisse vous-même les deviner.
Jean-Michel Aphatie
Non non je n'ai pas un don de devin
François Fillon
Chacun voit bien qu'on avance vers des échéances politiques qui nécessitaient que le Président de la République réorganise son équipe.
Jean-Michel Aphatie
Pouvez-vous préciser votre pensée ?
François Fillon
Non, je ne la préciserai pas plus monsieur Aphatie, malgré votre insistance.
Jean-Michel Aphatie
Lue dans Le Journal du Dimanche hier, cette phrase de Nicolas Sarkozy à votre propos, François Fillon : « il se planque. Il ne me sert à rien. On ne l'entend plus. »
François Fillon
D'abord je ne crois pas du tout que le Président de la République ait prononcé ces paroles. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble cette semaine. Vous savez, depuis 4 ans que Nicolas Sarkozy m'a confié la mission de Premier ministre, j'ai entendu successivement dire que je n'étais personne, puis que je lui avais imposé ma nomination en novembre dernier, puis que j'étais un hyper Premier ministre, puis il y a quelques jours, dans un grand hebdomadaire, que j'étais en train de préparer ma candidature aux élections présidentielles contre lui. Tout ça, évidemment, n'a absolument aucun sens. La seule chose qui est vraie c'est que moi je ne parle que quand j'ai des choses à dire. Ce matin j'ai des choses à dire, Jean-Michel Aphatie, parce que nous avons pris des décisions. La semaine dernière, je n'en n'avais pas, en tout cas pas s'agissant de la presse. Et enfin, j'ai noté dans tous les commentaires que j'ai lus ces derniers jours, qu'on me reprochait de ne pas être intervenu pour répondre à Dominique Strauss-Kahn. Quelle conception de la vie publique, quelle conception du fonctionnement des institutions que d'imaginer que le Premier ministre de la République française doit polémiquer avec le Directeur général du Fonds Monétaire International !
Jean-Michel Aphatie
Il n'y a pas aujourd'hui parce que décidément les journalistes n'écrivent que des choses fausses un problème, à nouveau, entre Nicolas Sarkozy et vous ?
François Fillon
Non, je ne dis pas que les journalistes n'écrivent que des choses fausses, je pense qu'ils sont souvent mal informés, ou informés par des gens qui ont des intérêts à les informer. Les relations entre le Président de la République et moi n'ont jamais été aussi confiantes, monsieur Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Puisque vous le dites, François Fillon. L'élection présidentielle de 2012 est-elle déjà perdue pour Nicolas Sarkozy ?
François Fillon
Ce qui compte aujourd'hui pour le Gouvernement et pour Nicolas Sarkozy, ce n'est pas 2012 c'est 2011. Non, mais je vais vous répondre
Jean-Michel Aphatie
Si je peux me permettre de vous interrompre. Vous savez, les auditeurs vous ont entendu tout à l'heure, ce que vous avez suggéré c'est bien « Nicolas Sarkozy prépare 2012. »
François Fillon
Vous savez que c'est mon souhait, je l'ai toujours dit.
Jean-Michel Aphatie
Donc 2012 c'est quand même une question importante.
François Fillon
Ce qui compte aujourd'hui c'est 2011. Pourquoi ? Ce qui compte c'est de savoir si en 2011 on va atteindre notre objectif de croissance, 2%. Il est atteignable. On a fait 1,5% l'année dernière. Les investissements des entreprises ont largement repris. La question qui se pose pour 2011 c'est, est-ce qu'on va faire baisser le chômage ? Il y a des chiffres encourageants au début de l'année, mais ces chiffres encourageants il faut maintenant les confirmer. La question qui se pose c'est, est-ce qu'on va réussir la réforme de la dépendance ? La question qui se pose c'est, est-ce qu'on va réussir la réforme de la justice en amenant des jurés populaires pour mieux associer les citoyens aux décisions des tribunaux correctionnels ? Et une fois qu'on aura fait ça, alors la question se posera du débat électoral, sur la base d'un projet, qu'on est en train d'élaborer, et sur la base d'une question qui est la crédibilité.
Jean-Michel Aphatie
Vous êtes en train d'élaborer un projet, François Fillon ?
François Fillon
On est en train d'élaborer un projet, bien entendu et la crédibilité de Nicolas Sarkozy, la crédibilité des candidats, de la majorité.
Jean-Michel Aphatie
Vous voyez les sondages, vous voyez les études d'opinion, vous voyez que ça ne va pas très fort pour Nicolas Sarkozy. Vous le voyez comme nous.
François Fillon
Je le vois comme vous, mais je n'y accorde aucune importance car les sondages ne compteront que lorsqu'on aura un candidat désigné à Gauche et qu'on sera engagé dans la campagne électorale, avec un candidat désigné à Droite. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Jean-Michel Aphatie
Vous avez de meilleurs sondages que Nicolas Sarkozy aujourd'hui, François Fillon.
François Fillon
Ce n'est pas le cas aujourd'hui, et je considère, Jean-Michel Aphatie, que l'outrance de la Gauche à l'égard du Président de la République, à un moment donné se retournera contre le Parti socialiste. J'ai entendu cette semaine un responsable socialiste dire que la France vivait un des pires moments de son histoire. J'ai entendu madame Aubry, il y a quelques semaines, comparer le Président de la République à monsieur Madoff. J'ai vu une campagne des jeunes socialistes qui compare le Président de la République à Hitler. Franchement, je pense que cette attitude est une attitude qui sera jugée très sévèrement par les Français le moment venu.
Jean-Michel Aphatie
Je croyais qu'un Premier ministre n'était pas là pour polémiquer et répondre aux opposants.
François Fillon
En l'occurrence je suis, en tant que citoyen, choqué, par cette manière d'exercer l'action politique.
Jean-Michel Aphatie
C'est dit. Alain Juppé pourrait-il être un candidat de substitution à Nicolas Sarkozy si celui-ci ne pouvait pas se présenter, François Fillon ?
François Fillon
Mais cette question ne se pose absolument pas, monsieur Aphatie.
Jean-Michel Aphatie
Des questions de journaliste, auxquelles vous ne réfléchissez jamais ?
François Fillon
Non, c'est une question qui ne se pose pas, parce que les relations qui sont les miennes avec Alain Juppé, les relations qui sont les miennes avec Nicolas Sarkozy, me permettent de vous dire que c'est une question qui ne se pose pas.
Jean-Michel Aphatie
Cette interview se termine, je voudrais juste revenir sur ce qui était notre début. Il est tout de même étonnant de vous entendre dire, vous qui avez une image particulière, François Fillon, celle d'un homme rigoureux, que Michèle Alliot-Marie n'a commis aucune faute lors de son déplacement en Tunisie, dont je rappelle qu'elle a utilisé un jet privé appartenant à un homme d'affaires local, qui a lui-même vendu un appartement à ses parents, et que ça a semblé, à beaucoup, tout de même énorme.
François Fillon
Non mais je comprends parfaitement la réaction qui a été celle de l'opinion publique, je pense que Michèle Alliot-Marie n'a pas su, non plus, trouver les mots pour se défendre, mais en même temps je dis aux Français que Michèle Alliot-Marie n'a pas commis de faute au sens moral en utilisant l'avion d'un ami personnel, de longue date, et que ses parents ont le droit de s'acheter un appartement en Tunisie. Ce n'est pas des fautes en tant que telles, ce ne sont pas des elle n'a pas transgressé de lois. La question est différente.
Jean-Michel Aphatie
François Fillon, qui avait des choses à dire, et qui les a dites sur RTL ce matin.
Vincent Parizot
Oui, et qui a notamment annoncé l'envoi de deux avions avec des médecins, du matériel médical, à Benghazi en Libye. Merci monsieur le Premier ministre.Source http://www.gouvernement.fr, le 1er mars 2011