Déclaration de Mme Chantal Jouanno, ministre des sports, sur les partenariats entre l'Etat et les acteurs du développement du sport, notamment l'intercommunalité et les services territoriaux de l'Etat et des communes, Paris le 14 mars 2011.

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Circonstance : Rencontre avec les adjoints aux sports des villes de plus de 30 000 habitants adhérents de l'ANDES à Paris le 14 mars 2011

Texte intégral


Je suis très heureuse de vous accueillir dans ces murs et je tenais à remercier très sincèrement Jacques THOUROUDE, président de l’ANDES, d’avoir bien voulu organiser cette réunion conjointement avec le ministère. Je peux vous dire que j’ai beaucoup de satisfaction à travailler avec Jacques, qui est un homme de coeur et d’engagement. Je salue également Denis MERVILLE, qui représente ici l’Association des maires de France que nous avons souhaité associer à l’évènement.
Cette rencontre collective avec les élus du sport marque une étape dans la construction d’un partenariat stable entre l’Etat et les acteurs majeurs du développement du sport que sont les communes et leurs groupements. Je ne conçois pas en effet que l’Etat puisse mener sa politique dans l’ignorance de leurs initiatives, de leurs difficultés, de leurs succès et de leurs attentes. J’emploie à dessein le terme de partenariat. Je n’ai pas la moindre velléité de remettre en question, sous couvert de concertation, les acquis de la décentralisation en me mêlant de la définition des politiques sportives des collectivités locales. Celles-ci ont fait la preuve de leur maturité et de leur efficacité pour ouvrir la pratique sportive à l’ensemble de nos concitoyens et leur offrir une distraction saine en soutenant les équipes et les sportifs participant aux compétitions nationales ou régionales. C’est leur responsabilité, elles s’en acquittent parfaitement. Mais je veux explorer avec vous les conditions d’une collaboration utile à l’intérêt général entre les deux principaux responsables des politiques publiques du sport. Dire cela, ce n’est pas méconnaître l’importance du rôle des départements et des régions, dont la loi de réforme des collectivités territoriales a préservé la capacité d’intervention.
Je sais que vous discutez actuellement avec l’AMF, l’ADF et l’ARF pour appréhender les conséquences de la réforme territoriale. L’Etat vous fait confiance pour éclaircir les compétences de chacun et sera en soutien s’il advenait que la concertation ne débouche pas.
Il est cependant un sujet qui me tient particulièrement à coeur et dont je tiens à vous parler, c’est l’intercommunalité en matière sportive. Cette intercommunalité me parait une nécessité absolue, aujourd’hui, pour définir les orientations des politiques locales d’équipements et de soutien à la pratique sportive. C’est à l’échelle de l’intercommunalité que doivent être conduites toutes les démarches de type « schéma directeur » parce que c’est le territoire pertinent pour construire une offre complète et équilibrée de pratique sportive. Dans ce paysage stabilisé il n’est peut-être pas inutile de rappeler que l’Etat ne se désengage pas. Le montant total des moyens affectés au sport par l’Etat, budget général et FNDS réunis, était de 480 millions d’euros en 2000. Il s’élevait à 805 millions d’euros en 2010 et sera de 869 millions en 2011. Les missions des communes et de l’Etat sont essentielles et complémentaires et c’est à cette complémentarité qu’il faut donner tout son sens.
L’enjeu pour l’Etat est d’arriver à réunir un fonds commun de connaissance et d’expertise dans lequel l’ensemble des intervenants publics et privés pourront puiser pour rendre leur action plus juste et plus économe.
I. L’Etat doit développer l’expertise lui permettant de répondre à ses missions régaliennes.
La production législative et réglementaire en matière sportive doit être le fruit d’une analyse aussi approfondie que possible et se garder de la pression des intérêts particuliers ou des effets d’annonces.
A/ Plusieurs réflexions ont par conséquent été engagées : sur le sens de la délégation délivrée aux fédérations sportives, ou sur les dispositions qui peuvent améliorer la compétitivité de la France dans l’obtention des organisations de grands événements sportifs.
B/ C’est l’expertise également qui doit nous permettre de maîtriser la production des normes. Je connais votre préoccupation sur ce sujet qui a de fortes incidences sur les finances locales. Vous avez le sentiment d’être à la merci de fédérations qui disposent d’un pouvoir unilatéral, dont elles n’usent pas toujours avec tempérance. La question n’est pas, cependant, d’instituer un illusoire contre-pouvoir d’avis donné à la commission consultative d’édiction des normes (CCEN). Ce serait sans effet sur la parution de règlements fédéraux applicables aux équipements sportifs accueillant des compétitions nationales et internationales.
L’efficacité, c’est la loi qui la procure en limitant strictement ces édictions aux seules exigences de la compétition sur le terrain et de la mise en sécurité des joueurs, excluant donc tout motif d’ordre commercial. C’est aussi la qualité de la concertation instituée avec les fédérations dans le cadre de la préparation d’un passage devant la commission d’examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs (CERFRES) pour les équipements que ce soit à vocation nationale ou locale. C’est par les remarques qu’autorise leur connaissance précise de la discipline sportive et des équipements sportifs que mes services obtiennent avec les élus des révisions effectives des projets des fédérations
J’ai la volonté que cette expertise soit renforcée et son exercice guidé par une vigilance accrue sur les conséquences financières des projets présentés. Les élus locaux auront tout loisir d’en vérifier la réalité puisque j’ai proposé au Premier Ministre, qui a accepté, que la composition de la CERFRES soit élargie à deux élus supplémentaires, désignés par le comité des finances locales. J’ai également obtenu qu’un rapport annuel sur les avis de la commission soit présenté par le directeur des sports devant la CCEN.
J’ai par ailleurs demandé à mes services de veiller à ce qu’il n’y ait pas la moindre confusion entre les règles, qui sont obligatoires, et les recommandations, qui sont facultatives. Les exigences contractuelles formulées par les ligues sportives professionnelles devront faire l’objet d’une attention particulière. Leur incidence financière devrait être supportée par les clubs professionnels, mais elle retombe trop souvent sur les communes. Ce devrait cependant être de moins en moins le cas avec l’évolution du modèle économique du sport professionnel.
II. La fonction d’expertise doit également venir éclairer les responsables sportifs, publics, associatifs et économiques dans la conduite de leur politique de développement des pratiques sportives.
C’est toute la question de la fonction d’Etat stratège. Cette fonction est un complément utile à votre expérience de terrain nourrie de vos nombreux contacts avec les administrés.
Elle a été un peu délaissée par l’Etat dans le passé récent. J’entends par conséquent la restaurer, d’autant que la RGPP nous conduit à le faire.
A/ Je m’y emploie en m’adressant, par exemple, directement aux clubs et associations sportives de notre pays. Mon message est simple. Leur mission est essentielle. Ils donnent à nos jeunes une éducation sportive. Ils permettent à beaucoup d’adultes de pratiquer un sport tout au long de leur vie. Ils sont un puissant agent de transmission des valeurs républicaines qui assurent notre cohésion sociale : création de lien social, apprentissage de la démocratie, éducation au respect de soi, des autres et du monde. C’est pour cela que j’ai introduit dans les directives d’emploi des crédits du CNDS le principe de civi-conditionnalité. Les aides seront désormais soumises à la présentation du projet de club, au sein duquel seront clairement identifiés les volets éducatif et éthique. Il intègrera à terme une charte éthique. Afin d’accompagner cette démarche un vadémécum, à l’élaboration duquel l’ANDES a participé, vient d’être mis à la disposition des clubs et des services déconcentrés.
B/ Je m’y emploie également en affinant la connaissance que nous avons de l’offre sportive du pays. Nous disposerons dès le mois d’avril d’un atlas des équipements sportifs qui nous permettra de mieux identifier les territoires déficitaires. J’ai voulu que cet instrument de macroanalyse soit complété par des collaborations volontaires dans la réalisation de diagnostics territoriaux approfondis au niveau local avec une méthodologie à laquelle je souhaite vous associer. On observe en effet que ce qui peut être qualifié d’explosion de la pratique sportive a bien évidemment des incidences sur la conception des équipements, leur maillage et leur usage. Les déterminants d’analyse des diagnostics pour lesquels je souhaite un travail conjoint doivent intégrer ces évolutions lourdes. J’ai demandé aux nouvelles directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) de vous proposer ces réalisations de diagnostics.
C/ Je sais par ailleurs les élus du sport très mobilisés sur les enjeux du développement durable. Les Assises nationale et territoriales du sport et du développement durable conduites en 2010 avec l’ensemble des acteurs concernés ont démontré la volonté des collectivités locales en la matière et révélé qu’elles portaient ou accompagnaient de nombreuses démarches innovantes. Nous disposons à présent d’une forte expérience qui doit nous permettre d’élaborer une stratégie partagée de développement durable pour le sport. Je présenterai début avril cette stratégie avec Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, la Ministre chargée du développement durable, et je déclinerai une dizaine d’actions prioritaires sur lesquelles j’entends mobiliser pleinement l’ensemble des services du ministère des sports.
III. Enfin, je tiens à ce que les services territoriaux de l’Etat et les communes ou leurs groupements renouent avec un type de partenariat plus global portant sur l’organisation des loisirs éducatifs des jeunes. Le message que je veux vous délivrer comme Ministre des Sports, c’est que beaucoup de fées se penchent sur le berceau de nos enfants pour les guider vers un état d’adulte socialisé et épanoui. Ces fées ce sont les parents, l’école et toutes les oeuvres éducatives qui constituent ce que j’appelle le tiers temps éducatif. La réflexion sur les rythmes scolaires engagée par mon collègue Luc Chatel rouvre la voie d’un partenariat intelligent entre ces trois grandes catégories d’acteurs éducatifs. Elle donne aux communes et leurs groupements une responsabilité spécifique, celle de l’articulation des trois temps et des modes de collaboration entre les acteurs. Elle crée les conditions de la conduite d’une politique globale de l’offre éducative locale.
Ce sont là quelques exemples des sujets sur lesquels l’Etat, les collectivités territoriales et le mouvement sportif peuvent comparer leurs visions propres et mutualiser leurs connaissances. J’ai souhaité que soit institué et formalisé un cadre d’échange entre l’ensemble des acteurs du sport. Ce cadre c’est l’assemblée du sport que j’installerai le 29 mars prochain. Je réponds à une attente exprimée par le mouvement sportif, mais je crois, également par les collectivités territoriales. Les représentants des acteurs économiques sont conviés à cette assemblée. Et j’ai voulu que la société civile y soit également représentée à travers des associations et autres organismes qui expriment la variété des identités et des préoccupations qui la forment. Nous parlerons de tout, du développement des pratiques sportives, du sport de haut niveau, de l’éthique et de la santé des sportifs, de la gouvernance du sport, de l’économie du sport, de l’emploi et de la formation. Nous aurons également l’occasion de réfléchir au mode de concertation à promouvoir à l’échelle régionale, dans l’esprit des initiatives déjà prises à certains endroits. Il me paraissait utile que je vous fasse connaître mon état d’esprit et mon ambition. Mais il est tout aussi important pour moi de vous écouter pour comprendre la nature de vos préoccupations et de vos attentes. Merci de votre attention.
Source http://www.sports.gouv.fr, le 17 mars 2011