Texte intégral
Merci dêtre avec nous. Nous allons regarder avant de parler éducation nationale, nous allons parler sondages, mais je vais commencer par la Libye, parce que cest quand même le plus important ce qui se passe de lautre côté de la Méditerranée. Alors, « cest moi ou Al Qaïda » a dit Kadhafi. Est-ce que vous le croyez, franchement ?
Non ! Vous savez, le ministre des Affaires étrangères a été très clair sur ce sujet, nous sommes très préoccupés par rapport à ce qui se passe en Libye. Il y a une réaction absolument dramatique de la part de Kadhafi vis-à-vis de sa population, on la vu encore hier, via les images qui sont dramatiques, quand on voit quon est prêt à tirer sur la population, à tirer sur la foule. Donc, face à ça, la France a une position commune avec lensemble des pays développés, tout en disant que nous ne privilégions pas une intervention sur place, mais nous sommes extrêmement vigilants sur ce qui se passe là-bas.
Oui, donc, il ment Kadhafi lorsquil dit « cest moi ou Al Qaïda ».
Oui, parce que, vous savez, A. Juppé a dit quelque chose de très juste hier, quand il était au Caire, il a dit, « peut-être nous sommes-nous laissés un peu intoxiquer en pensant que il ny avait pas dautre alternative que ces régime face aux extrémismes ». Et je pense que cest une réflexion intéressante. Cest vrai que pendant des années nous avons travaillé avec des régimes qui nétaient pas forcément des démocraties, mais qui étaient nos interlocuteurs.
Qui nétaient pas des démocraties.
Et nous avons travaillé avec eux pensant que cétait la solution face aux extrémismes. Eh bien, peut-être quil y avait dautres alternatives, et je crois quon doit toujours sinterroger...
...cest-à-dire que lOccident sest peut-être trompé ?
Je crois quon avait des interlocuteurs, donc cétait un peu une solution de facilité de travailler avec eux. Ensuite, cest vrai quon doit toujours se poser les bonnes questions, se mettre à la place des autres. Et en tout cas, le vent de démocratie qui souffle est évidemment très positif.
Revenons en France, ce sondage qui donne M. Le Pen en tête au premier tour de la présidentielle devant M. Aubry et N. Sarkozy ex-aequo vous paraît-il crédible, sincèrement ?
Crédible, pas vraiment. Je vais vous dire, il faut rester calme. Moi, jentends beaucoup de commentaires immédiats, « ça y est »...
...beaucoup démotion dans la classe politique.
Oui, beaucoup démotion, restons calmes.
Chez les journalistes, chez les éditorialistes.
Voilà, chez les sondeurs eux-mêmes.
Chez les sondeurs même, oui.
Restons calmes ! Vous savez, lélection présidentielle cest dans treize mois, il va se passer beaucoup de choses, vous aurez à commenter tous les matins, un sondage de ce type. Donc, nous, responsables politiques, nous devons rester calmes, prendre du recul. Vous savez, un sondage cest une photographie, cest un instantané. Et je crois que cest S. Pérès qui disait, « les sondages cest un peu comme le parfum, il faut les sentir mais il ne faut pas les boire », cest-à-dire que cest une photographie instantanée, mais ce nest pas le film de lélection présidentielle de 2012. Il faut prendre du recul. Maintenant, ce sondage, je crois quil faut le prendre aussi comme un aiguillon, il faut le reconnaître, et je crois quil nous engage à deux responsabilités, finalement. Dabord, continuer jusquau dernier jour à travailler au service des Français, résoudre les problèmes des gens. Si il y a plus de gens quhier qui se reconnaissent aujourdhui peut-être dans M. Le Pen, cest peut-être, et cest sans doute parce quil y a de graves inquiétudes, il y a de la douleur, et il y a de notre part nécessité de répondre aux problème quotidiens des gens. Et puis, deuxième responsabilité, le moment venu de préparer lélection présidentielle dans les meilleures conditions, cest-à-dire les conditions, à mon sens, cest mon point de vue personnel, de rassemblement derrière notre candidat, N. Sarkozy.
Nous allons en parler, tiens, de rassemblement. Mais nêtes-vous pas étonné quon sétonne ? Je veux dire par là, que si N. Sarkozy était en tête de ce sondage, ou si D. Strauss-Kahn était en tête, personne ne commenterait le sondage. Personne !
Oui, mais ce qui fait débat cest évidemment que M. Le Pen puisse être en tête, mais surtout ce qui fait débat cest la méthodologie. Et dailleurs, vous avez tout à lheure interviewé J.-P. Sueur, que je connais bien, et qui a à mon sens très bien répondu en expliquant que les gens ne savent pas forcément, cest la technique de sondage, mais le score du Front national dans les sondages est toujours corrigé, cest-à-dire que ça nest pas le score déclaré par ceux qui sont interrogés.
Donc, ce nest pas vrai ?
Cest pas que cest pas vrai, cest que cest une technique de sondage, moi je nai pas à mexprimer sur le sujet, je ne suis pas un spécialiste, mais cest le constat. Donc, là, la question cest de savoir si ils ont corrigé au-delà du raisonnable, et donc si le résultat est cohérent. Moi, jai entendu quand même ce matin un certain nombre de critiques, il parait, y compris de grands spécialistes des sondages, qui rappellent dailleurs que le sondeur en question est celui qui mettait J.-P. Chevènement à 14 % en 2002, et F. Bayrou à 25 en 2007, voilà. Mais, peu importe, si vous voulez, il faut prendre du recul et rester calme.
Alors, justement, prenons du recul. Le Sénat à lunanimité a voté un texte pour rendre les sondages plus transparents. Et lAssemblée nationale ne la pas inscrit à lordre du jour pour linstant. Le gouvernement nous dit, « mais non, il ny a pas durgence ». Il y a urgence pour vous ?
Je crois que cest un bon texte, et dailleurs la majorité la voté.
Oui, tout le monde la voté.
Et il a été défendu par deux sénateurs, lun socialiste, lautre membre de lUMP. Alors, maintenant, vous savez, on a simplement une chose qui se présente à nous, cest que nous avons un encombrement législatif. Je crois, de mémoire, quil y a 44 ou 45 textes, lois ou propositions de lois...
...il y a trop de lois alors ?
... qui sont en attente dans ce quon appelle la navette, qui ont été votés par une chambre et pas encore votés par lautre, dans un délai, un an de travail parlementaire très contraint. Donc, il y a un moment où il va falloir faire des choix, il va falloir peut-être regarder comment on organise le temps parlementaire, mais ce nest pas à moi de le faire, cest au ministre des Relations avec le Parlement.
Nest-ce pas plus urgent, par exemple, que la déchéance de nationalité, que lélargissement de la déchéance de nationalité, L. Chatel ?
Mais tout est urgent !
Tout est urgent, oui.
Tout est urgent, et le rôle du gouvernement cest de regarder comment dans le délai qui reste jusquà la fin de la législature nous sommes capables de respecter nos engagements, cest-à-dire daller au bout du programme présidentiel de N. Sarkozy, et puis de répondre à des urgences ici ou là, comme celle que vous venez dévoquer à travers la proposition de loi sur les sondages.
Vous êtes favorable à lélargissement de la déchéance de la nationalité ?
Oui, moi, jy suis favorable.
Vous y êtes favorable.
Jy suis favorable parce que ça peut correspondre à une évolution qui est nécessaire par rapport aux formes de violences que lon rencontre aujourdhui.
Discussion demain à lAssemblée nationale sur ce texte. Donc, vous soutenez, là, la position du gouvernement.
Bien sûr, jy suis favorable.
Vous y êtes favorable.
Oui, je lai toujours dit.
Et le gouvernement maintiendra cette demande délargissement ?
A ma connaissance, oui, voilà. Je ne suis pas le ministre en charge du dossier, qui le défendrait au Parlement, mais...
...non mais, vous suivez attentivement.
Ça correspond à un engagement du président de la République dans son discours de Grenoble lété dernier.
Malgré lopposition des centristes et lopposition de certains UMP.
Oui, mais il y a des débats au sein de la majorité, cest pas la première fois, mais le gouvernement présentera cette disposition.
Bien. Je voudrais revenir sur ce fameux sondage avec des propos tenus par quelquun que vous connaissez bien, D. de Villepin. Je le cite, « Le résultat de ce sondage est lexpression dune colère devant la non prise en compte des préoccupations quotidiennes des Français. Cest dabord la sanction dune politique qui na pas de résultat, et cest la sanction de labandon de la question sociale au profit de la question identitaire ».
Je trouve ses paroles très sévères. Très sévères parce que toute laction du gouvernement depuis deux ans et demi a consisté dabord à répondre à la crise, cest-à-dire à être capable dendiguer très en amont...
...mais pour linstant les Français ne sentent pas la réponse, L. Chatel, pardon, mais...
Peut-être, je peux vous prendre à témoin, je suis venu plusieurs fois dans votre émission, souvent.
Oui, ça fait bien longtemps que vous nétiez pas venu, mais là je suis content de vous accueillir.
Oui, je viens quand vous minvitez.
Je vous invite, oui, très bien.
Depuis le début de la crise, jai été le porte-parole du gouvernement, ministre de lIndustrie, jai rappelé que la crise serait longue et jai rappelé quil y a souvent un décalage entre laction que nous menons au niveau économique et la perception sociale par les Français. Cest-à-dire que finalement la période la plus difficile cest le moment où nous avons pris sans doute les bonnes décisions au niveau économique pour endiguer les difficultés et pour inversera la tendance, et dailleurs la croissance repart dans notre pays, mais ça nest pas la perception quen ont les Français. Et sur le terrain, on le voit, je suis élu local, je suis maire de Chaumont, je veux dire on voit bien que les gens ont des difficultés et le rôle du gouvernement cest dêtre à leurs côtés. Donc, je trouve ce commentaire très sévère parce quil ne reflète pas la réalité de laction du gouvernement.
Commentaire très sévère dun homme qui sera reçu, qui est reçu en ce moment même par N. Sarkozy, D. de Villepin.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 10 mars 2011