Texte intégral
Je tiens à vous remercier pour vos contributions et pour la qualité de chacune de vos interventions. Elles ont illustré avec justesse et précision le combat que vous menez tous, chaque jour, contre le fléau de lillettrisme.
Jai écouté avec attention chacune de vos prises de parole. Jai ainsi pu mesurer votre engagement et apprécier la diversité des solutions que vous avez su mettre en oeuvre pour accompagner les salariés et les demandeurs demploi.
Je le rappelle, la lutte contre lillettrisme est laffaire de tous : Etat, partenaires sociaux, entreprises, associations professionnelles, mais aussi les Régions. Leur rôle est central dans la lutte contre lillettrisme à destination des publics qui sont les plus fragilisés.
En matière de lutte contre lillettrisme, nous avons tous évidemment une responsabilité légale puisque cet objectif est une composante à part entière de la formation professionnelle tout au long de la vie. Il va de soi quun salarié qui possède la pleine maîtrise des savoirs des bases sera un salarié plus confiant, plus autonome, plus polyvalent et plus efficace pour son entreprise.
Mais nous avons surtout une responsabilité morale à légard de toutes ces personnes qui se trouvent privées de toute possibilité dévolution professionnelle et parfois même, de toute possibilité dinsertion sur le marché du travail. Derrière chaque personne en situation dillettrisme, il y a un véritable drame humain. Notre pays shonore de faire de cette question une préoccupation nationale, loin de tout clivage partisan.
Aujourdhui, ensemble, nous avons fait un pas supplémentaire pour répondre à cette double responsabilité. Mais comme je vous le disais au début de cette séance de travail, il faut aller encore plus loin.
Pour y parvenir, je veux poursuivre le plan daction volontariste que jai déjà engagé et qui sarticule autour de cinq axes principaux :
- Mieux connaitre pour mieux agir, parce que la réalité de lillettrisme reste encore largement méconnue ;
- Mieux repérer les situations dillettrisme parce que cest aux individus que nous devons nous adresser ;
- Sensibiliser le plus grand nombre dacteurs parce que nous ne serons efficaces que si nous sommes rassemblés derrière cet objectif
- Former davantage de personnes en situation dillettrisme aux compétences de base
- Et déployer un effort particulier à destination des demandeurs demplois pour favoriser leur insertion professionnelle
Il faut mieux connaitre lillettrisme pour mieux agir
Vous le savez, sur la période 2000/2005, une vaste enquête a été menée pour mieux connaître lillettrisme en France. Cette première enquête IVQ a porté sur un échantillon représentatif de 10 000 personnes âgées de 18 à 65 ans.
Aujourdhui, il est temps de relancer cette enquête pour bénéficier dinformations plus fiables et vraiment actualisées.
Je vous lannonce, une seconde enquête IVQ va donc être lancée dès cette année. Elle conservera les indicateurs de la première enquête et ses résultats seront exploités, comme en 2005, par lANLCI.
Dès la fin de lannée, on pourra donc commencer à comparer les résultats des deux enquêtes et, pour la première fois, on pourra surtout mesurer de façon précise et détaillée lévolution de lillettrisme dans notre pays.
Il faut désormais systématiser ces démarches, car mieux connaitre létendue des besoins est une condition essentielle pour briser le tabou de lillettrisme !
Je veux aussi mieux repérer les situations dillettrisme pour mieux y faire face
Pour pouvoir proposer des formations de base à des salariés, il faut avant être en mesure de repérer les personnes en situation dillettrisme.
Lillettrisme nest pas une fatalité. La formation professionnelle doit être mobilisée comme une deuxième chance de renouer avec les savoirs de base pour gagner en autonomie et en confiance. La formation est un levier pour accompagner les changements.
Ceux qui sont en situation de repérer les difficultés et dinformer, sans juger, sur les solutions qui existent, ont une responsabilité particulière et doivent donc simpliquer dans le repérage de lillettrisme.
Il faut davantage mobiliser les acteurs de terrain et en particulier les entreprises.
Pour une entreprise, un salarié formé aux compétences de base est en effet un salarié plus efficace et souvent plus motivé.
Cest pour cela que jai tenu à mettre, aujourdhui, à votre disposition un document de responsabilisation des entreprises. Les employeurs ont en effet un vrai rôle à jouer pour repérer les situations dillettrisme de leurs salariés.
Ce document, vous le trouverez sur notre site Internet (www.emploi.gouv.fr) et sur celui de lANLCI. Je souhaite quil puisse être diffusé le plus largement possible. Cest le fruit de votre travail à tous et je vous en remercie.
Je tiens aussi à sensibiliser le plus grand nombre dacteurs à la lutte contre lillettrisme
Cette sensibilisation dappuiera sur les deux outils que nous allons concrétiser aujourdhui.
Un Plan daction commun de « prévention et de lutte contre lillettrisme dans lemploi » que je vais signer dans quelques minutes avec des acteurs aussi importants que :
- lAgence Nationale de Lutte Contre lIllettrisme (ANLCI)
- l'Association Nationale des Directeurs des Ressources Humaines (ANDRH)
- le Groupement des Acteurs et Responsables de la Formation en entreprise (GARF)
- la Conférence des Grandes Ecoles (CGE)
- le Groupe Grandes Ecoles au Féminin (GEF)
- Pôle emploi
- le Conseil National des Missions locales (CNML)
- l'Assemblée Permanente des Chambres de Métiers et de l'Artisanat (APCMA)
- l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie (ACFCI)
A travers ce Plan daction, vous vous engagez à mes côtés à conjuguer vos efforts pour mener et évaluer des actions en faveur de la prévention et de la lutte contre lillettrisme.
Dans ce cadre, vous pourrez compter sur lappui technique et sur lexpertise de lANLCI, qui a déjà développé de nombreux kits pédagogiques pour mutualiser et échanger sur les bonnes pratiques.
Concrètement, la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) et le Groupe Grandes Ecoles au Féminin (GEF) vont mener des actions spécifiques de sensibilisation à destination de leurs étudiants, qui sont les dirigeants et les managers de demain.
Les directeurs des ressources humaines, les directeurs de formation, et leurs équipes effectueront également ce travail de sensibilisation à lillettrisme auprès des salariés.
* Je compte aussi beaucoup sur un deuxième outil, la Charte des bonnes pratiques qui va être signée, sous légide de mon Ministère, entre lAgence Nationale de Lutte Contre lIllettrisme (ANLCI) et vingt trois Organismes Paritaires Collecteurs Agréés (OPCA) constitue une autre étape importante dans la mobilisation des branches professionnelles qui ont inscrit la lutte contre lillettrisme dans leurs priorités daction.
Ces vingt-trois partenaires reçoivent 4,5 milliards deuros, soit 71% de la collecte totale des fonds de la formation professionnelle des entreprises.
La charte des bonnes pratiques permet de développer les actions de lutte contre lillettrisme mises en place par les OPCA au profit de leurs entreprises adhérentes, et en particulier les actions de sensibilisation. Elle engage ses signataires à mettre en place des actions innovantes et adaptées. Elle les engage aussi à accompagner davantage les salariés dans une démarche courageuse et responsable pour sortir de lillettrisme. Je vous félicite pour cet engagement quil faut poursuivre !
Très concrètement, cet engagement se traduit notamment par des actions simples de sensibilisation comme :
- inscrire les actions de lutte contre lillettrisme dans vos priorités
- sensibiliser lensemble des acteurs concernés
- développer des outils de dépistage
- et surtout, évaluer limpact des actions que vous avez financées
Je tiens donc à rendre un hommage appuyé aux vingt trois OPCA signataires de cette charte.
Cette année, au total, vous consacrez plus de 100 millions deuros pour développer des actions de lutte contre lillettrisme.
Je veux aussi que nous formions davantage de personnes en situation dillettrisme aux compétences de base
Les travaux préparatoires des groupes de travail ont insisté, à juste titre, sur le besoin de sentendre sur un cadre commun de référence à la fois simple et universel. Car pour former et répondre aux besoins des personnes en situation dillettrisme, il faut avant tout pouvoir répondre à des questions simples : Quelles sont les compétences de base requises ? Quels sont les objectifs à atteindre pour sortir une personne de lillettrisme ?
Nous faisons tous le même constat : il faut partir du quotidien du stagiaire pour construire des objectifs de progression à partir des situations concrètes quil vit, et ensuite, bâtir autour delles un programme de formation aux savoirs de base.
Pour y parvenir, jai tenu à ce quun référentiel commun soit établi. Maintenant, il faut le diffuser le plus largement possible car il offre des repères pour décrire la situation de travail. Il dresse la liste des activités types qui permettent de préciser et de classer ce que le salarié doit faire. Il rappelle également les dix compétences clés qui sont attendues pour sortir de lillettrisme.
Former plus, mais aussi former mieux : telle doit être notre priorité daction à tous. Vous avez, nous avons, une responsabilité particulière vis-à-vis des personnes en situation dillettrisme, car ces difficultés, souvent vécues dans la honte et dans le secret, sont sources de souffrance. Pour elles, oser aller voir quelquun pour dire quelles rencontrent des problèmes, accepter de suivre une formation sont des décisions cruciales qui engagent toute leur personne. Je demande à lensemble des organismes de formation, ainsi quà la Fédération de la formation professionnelle, dêtre tout particulièrement vigilante sur la qualité des programmes à destination des personnes en situation dillettrisme. Nous navons pas le droit de les décevoir, encore moins celui de les tromper.
Il nous faut enfin déployer un effort particulier à destination des demandeurs demplois pour favoriser leur insertion professionnelle
Nous lavons rappelé plusieurs fois cet après-midi, lillettrisme est un frein considérable à linsertion professionnelle car il rend beaucoup plus difficile les possibilités de reconversion et les démarches de recherche demploi.
Pour les 15% des demandeurs demploi en situation dillettrisme, la formation est donc linstrument incontournable pour permettre un retour à lemploi réussi.
Cest pourquoi, je compte lancer deux chantiers majeurs pour améliorer laccès au programme « Compétences clés » des demandeurs demploi les plus touchés par lillettrisme.
1er chantier : il faut augmenter le nombre de conseillers formés à lidentification des situations dillettrisme
Je me félicite que Pôle emploi et le CNML (Conseil national des missions locales) signent, aujourdhui, le Plan daction commun de « prévention et de lutte contre lillettrisme dans lemploi ». Je les invite, à cet égard, à engager rapidement les travaux nécessaires, avec tous les acteurs concernés, notamment lUNML (Union nationale des Missions locales) pour former davantage de conseillers.
Pôle emploi a également annoncé quun module de sensibilisation à la détection des situations dillettrisme soit intégré dès cette année aux formations initiales et au catalogue des formations continues des conseillers. Cest une étape cruciale dans la sensibilisation des acteurs de terrain qui vient dêtre franchie.
2e chantier : Le programme compétences clé doit cibler en premier lieu les publics les plus en difficulté
Dans tout le pays, 41% des formations dispensées dans le cadre du programme « Compétences clés » bénéficient aux personnes en situation dillettrisme. Il y a cependant de profondes disparités selon les territoires : 73% en Guadeloupe contre 17% pour le Limousin par exemple.
Dans les prochaines semaines, je vais donc transmettre des instructions aux DIRECCTE pour que le programme « Compétences clés » bénéficie davantage aux demandeurs demploi les plus touchés par lillettrisme.
Cette journée de travail et déchanges est une première étape. Et je veux, une nouvelle fois, vous remercier pour la qualité de vos témoignages et de votre engagement à mes côtés pour briser le tabou de lillettrisme.
Nous devons à présent veiller à ce que notre mobilisation commune se poursuive et, surtout, se concrétise sur le terrain en matière de formation des personnes en situation dillettrisme.
Cest pourquoi, jai voulu confier à lANLCI un rôle particulier pour poursuivre cet effort dans le temps. LANLCI va ainsi jouer un rôle danimateur de réseau pour continuer à faire vivre le travail de cette journée.
A ma demande, Marie-Thérèse GEFFROY me fera donc très régulièrement part de lavancée des différents chantiers que nous avons identifiés ensemble et commencés à mettre en oeuvre.
Je demande également que mes services me fassent une remontée dinformation tous les trois mois pour suivre en région, au plus près des territoires et des personnes, les progrès dans cette lutte.
Je suivrai notamment avec un intérêt particulier la concrétisation et le suivi des engagements de chacun, car lillettrisme est un mal insidieux qui mérite dêtre combattu au quotidien et avec la plus grande fermeté.
Je vous remercie.
Source http://www.emploi.gouv.fr, le 13 avril 2011