Interview de M. Maurice Leroy, ministre de la ville, à I-Télé le 27 avril 2011, sur le climat politique à l'UMP et la préparation de l'élection présidentielle de 2012.

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Média : Itélé

Texte intégral


 
 
GUILLAUME DURAND Bonjour évidemment aux auditeurs d’I TELE et de RADIO CLASSIQUE qui nous retrouvent simplement maintenant. Vous soutenez, on le sait depuis un certain temps, l’idée que Jean-Louis BORLOO pourrait être candidat aux présidentielles. Il semblerait que le président de la République d’ailleurs vous ait beaucoup reproché un soutien à cette candidature. Est-ce que c’est vrai ?
 
MAURICE LEROY D’abord, c’est faux, mais vous savez…
 
GUILLAUME DURAND …qu’est-ce qui est faux, que vous soutenez BORLOO ou que le président de la République...
MAURICE LEROY Non, ce qui est faux c’est ce qu’on… vous faite référence à un petit confidentiel dans LE FIGARO. Soyons précis et clairs, c’est faux. Mais vous voyez, vous m’interrogez, donc je réponds, mais je ne me suis pas amusé à faire des démentis. Si on devait s’amuser à faire des démentis, vous le savez d’ailleurs très bien, Guillaume DURAND, sur tous les confidentiels, on couvrirait tous les journaux. Donc, voilà, ça n’a pas de sens.
 
GUILLAUME DURAND Ca n’a pas de sens, mais en même temps, bon, partout, là il ne s’agit pas de confidentiel, les articles de presse qui expliquent que le président de la République, ou son entourage, font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher ou décourager Jean-Louis BORLOO.
 
MAURICE LEROY Mais attendez, ça, c’est pas illégitime. On vient d’entendre la chronique de Guillaume TABARD à l’instant sur ce qui se passe au PS. Vous avez aimé les divisions du PS, vous allez aimer les primaires, et on va les aimer pendant un moment. Ce n’est pas moi qui fais les titres « Guerre DSK/HOLLANDE », etc. Donc, nous sommes à un an des présidentielles. Il est légitime et logique, c’est pas une surprise, que dans chaque camp on affute les armes, les arguments, les projets. Et il est évident…
 
GUILLAUME DURAND …mais répondons à la question, là.
 
MAURICE LEROY Et il est évident, et il est évident que, voilà, le président de la République ne souhaite pas, c’est pas un secret ça, qu’il y ait une candidature de Jean-Louis BORLOO. C’est pas illégitime de sa part.
 
GUILLAUME DURAND Mais est-ce que cette candidature, d’après les informations et le sentiment politique que vous avez, est inéluctable ?
 
MAURICE LEROY Mais vous savez, je pense qu’il faudrait relire l’excellent ouvrage de base de René Rémond, « Les droites en France », « Les droites en France », voilà, bon. Et à droite, il y a du pluralisme, il y a de la diversité. Moi, je suis centriste, je suis centriste dans le gouvernement. Je ne suis pas à l’UMP, je suis au Nouveau centre. Et par conséquent, Hervé MORIN était dans le gouvernement, président du Nouveau centre. Nous sommes lui et moi centristes. Donc, il n’est pas illégitime que les centristes…
 
GUILLAUME DURAND … non mais, ce repassage par Sciences Po est très intéressant, mais est-ce qu’il est concis ?
 
MAURICE LEROY …non mais il est intéressant…oui, ben, parce que souvent on oublie ça.
 
GUILLAUME DURAND Non mais d’accord, on ne l’oublie pas, surtout pas ici, RADIO CLASSIQUE et I TELE. Est-ce que vous considérez que cette candidature est inéluctable ?
 
MAURICE LEROY Mais nous verrons bien. On est très loin…
 
GUILLAUME DURAND …non, non, non, non, non, non.
 
MAURICE LEROY Non, non, mais Guillaume DURAND, mais moi je suis un politique et j’assume de faire de la politique, et c’est pas le même sujet suivant que au Parti socialiste on a la candidature de Dominique STRAUS-KAHN, de Martine AUBRY ou de François HOLLANDE. Vous voyez, moi, je ne fais pas de la politique comme ça, en l’air.
 
GUILLAUME DURAND Mais ce n’est pas la question. Je veux bien qu’on parle des socialistes dans un instant…
 
MAURICE LEROY …non mais, attendez.
 
GUILLAUME DURAND Nous parlons de Jean-Louis BORLOO.
 
MAURICE LEROY Mais, Guillaume DURAND…
 
GUILLAUME DURAND Est-ce que vous avez le sentiment…
 
MAURICE LEROY Oui, mais je parle de Jean-Louis BORLOO, et je dis c’est pas le même sujet, y compris pour Jean-Louis BORLOO, suivant qu’au PS on a comme candidat Dominique STRAUSS-KAHN, je le répète volontairement, François HOLLANDE, et Martine AUBRY.
 
GUILLAUME DURAND D’accord. Vous voulez dire qu’il va adapter son éventuelle candidature à l’éventuel candidat le mieux placé au Parti socialiste.
 
MAURICE LEROY Mais, la politique c’est aussi l’art de la situation à un moment donné. Là, nous sommes très loin. Aujourd’hui, Jean-Louis BORLOO est en situation d’être candidat. Il va quitter, avec le Parti radical, l’UMP dans deux semaines. Ce choix a été fait par son parti, c’est son droit. J’en parle librement, je ne suis pas au Parti radical, je rappelle que je suis au Nouveau centre, voilà, bon. Mais, moi, je suis attentif à une chose : nous avons besoin, quelle que soit l’issue aux présidentielles, nous avons besoin de confédérer les centres, de rassembler les centristes.
 
GUILLAUME DURAND Donc, vous êtes favorable à cette candidature à partir du moment que c’est une candidature et qui au second tour sera un soutien pour Nicolas SARKOZY.
 
MAURICE LEROY Moi, je suis favorable à cette candidature, on le verra le moment venu. Je suis déjà favorable…moi, je suis pour qu’on ne mette pas la charrue avant les boeufs. Je suis ancré dans mon Perche Vendômois et je suis pour qu’on ne mette pas la charrue avant les boeufs. Commençons par confédérer les centres. Ensuite, travaillons à un projet. Il n’y pas de candidature sans confédération des centres, et il n’y a pas de candidature sans projet.
 
GUILLAUME DURAND Vous avez du mal à…
 
MAURICE LEROY Non, mais j’ai pas du mal. Non, non, mais il y a des étapes.
 
GUILLAUME DURAND Est-ce que vous considérez que cette candidature, si elle existe, je mets ça entre parenthèses, est une bonne nouvelle pour le président de la République, alors que semble-t-il il considère, lui, le président de la République, que ce n’est pas forcément une bonne nouvelle, de votre point de vue, vous qui m’explique que l’ouvrage de René Rémond, « Les droites en France »…
 
MAURICE LEROY …non mais, d’abord, il faut commencer, et ça va être fait. Il y a plusieurs étapes à franchir. On va commencer par rassembler les centres : le Nouveau centre, l’Alliance centriste, le Parti radical, et tous ceux qui voudront se retrouver dans cette nouvelle formation de confédération des centres. Le Nouveau centre a son conseil national le 7 mai. Sans préjuger, il va sans doute en décider quasi à l’unanimité, donc c’est une bonne nouvelle.
 
GUILLAUME DURAND D’accord.
 
MAURICE LEROY Le Parti radical va le faire le 14 mai. Jean-Marie BOCKEL va le faire ensuite avec la Gauche moderne. Et, il restera l’Alliance centriste de Jean ARTHUIS à se déterminer. Attendez, ça, c’est une bonne nouvelle pour la politique française, le fait que les centres qui étaient éclatés et exposés se rassemblent et se réunissent. Ca, c’est déjà la première bonne nouvelle. Ensuite, la seconde bonne nouvelle, ce sera de présenter un projet aux Français. Et alors, à ce moment-là on verra.
 
GUILLAUME DURAND Donc, une candidature.
 
MAURICE LEROY Mais bien sûr, après c’est une candidature qui porte un projet. Mais, collons une tête à chaque problème. Vous savez, les Français…
 
GUILLAUME DURAND … et une candidature qui au deuxième tour appellerait à voter pour le président de la République. Vous pouvez boire un petit verre, il n’y a pas de problème.
 
MAURICE LEROY Personne ne sait à l’avance, et surtout pas… il n’y a aucun sondage, tout le monde vous le dit sur les plateaux, ça c’est vrai, il n’y a aucun sondage qui n’a donné un an à l’avance le président de la République. Demandez à Edouard BALLADUR ou à Jacques CHIRAC, et demandez à Valéry GISCARD d’ESTAING.
 
GUILLAUME DURAND J’essaie de comprendre votre sentiment profond, votre sentiment profond…
 
MAURICE LEROY Mon sentiment il est simple, mon sentiment profond c’est que…
 
GUILLAUME DURAND … il faut cette candidature au centre, car c’est elle qui permettra à Nicolas SARKOZY de gagner, c’est ça l’idée.
 
MAURICE LEROY Je pense qu’effectivement si le centre n’est pas rassemblé, confédéré, je ne vois pas comment on fait plus de 50 % au second tour vu l’état des sondages aujourd’hui.
 
GUILLAUME DURAND D’accord. Et est-ce que vous avez le sentiment, et après on clôturera parce qu’on y reviendra avec Michaël DARMON, que Jean- Louis, qui est pour l’instant le mieux placé, est-ce que son sentiment à lui c’est d’aider le président de la Répubique, ou au contraire de faire tomber le président de la République, après la déception de Matignon ?
 
MAURICE LEROY Jean-Louis BORLOO, d’abord, vous savez, la déception de Matignon, ça se soigne très vite, ça ne dure pas des années.
 
GUILLAUME DURAND Mais vous n’êtes pas lui !
 
MAURICE LEROY C’est pas une maladie incurable. Oui, mais enfin, je connais bien Jean-Louis BORLOO, vous l’invitez aussi, faites-le, et vous verrez que… il l’a montré d’ailleurs chez Arlette CHABOT il n’a pas de problème avec Matignon. Cette page est tournée.
 
GUILLAUME DURAND D’accord.
 
MAURICE LEROY Vous n’allez pas à la présidentielle parce que vous êtes vexé de ne pas avoir eu Matignon, franchement, ou alors il ne faut pas faire de la politique. C’est pas ça le sujet. Vous allez à la présidentielle si vous avez d’abord rassemblé votre famille de pensée, et si ensuite vous incarnez et si vous portez un projet, là en l’occurrence un projet qui soit humaniste, social, européen, qui tienne compte du développement durable, et Jean- Louis BORLOO est l’homme du grenelle de l’environnement. Ca lui fait plusieurs atouts pour ça..
 
GUILLAUME DURAND Donc, vous croyez à cette candidature et vous croyez à son utilité pour votre camp.
 
MAURICE LEROY Moi, je crois à l’utilité effectivement de la candidature de Jean- Louis BORLOO.
 
GUILLAUME DURAND Alors, sur le plan, justement, du programme, on attend un meeting de François HOLLANDE ce soir. Dominique STRAUSS-KAHN, tout à l’heure Guillaume TABARD le disait, est à Paris. Martine AUBRY a confié à Laurent FABIUS l’idée de rédiger, en gros, la première année de gouvernement de la gauche. On a quand même l’impression qu’ils sont extrêmement organisés, contrairement à ce qui a pu être le cas, en tout cas lors de la dernière présidentielle. Est-ce que ça ne vous inquiète pas ?
 
MAURICE LEROY Ecoutez, d’abord…
 
GUILLAUME DURAND …ils n’ont pas décidé le candidat, mais pour le reste ils ont un programme.
 
MAURICE LEROY Oui, très bien…oui, enfin, on en reparlera du programme, franchement.
 
GUILLAUME DURAND Ah, il est là, reconnaissez !
 
MAURICE LEROY Oui, enfin, il est là, ça, on le connaît. On en parlera d’ailleurs le moment venu : bonjour l’archaïsme. Franchement, c’est bien de faire des meetings chez Jacques DELORS, à Clichy, effectivement dans les Hauts de Seine, mais enfin le pauvre Jacques DELORS il doit être mal par rapport au programme du Parti socialiste, franchement.
 
GUILLAUME DURAND Qui est le plus dangereux pour le président de la République : François HOLLANDE ou Dominique STRAUSS-KAHN ? Et quel celui, d’après vous, qui va sortir de cette compétition des primaires, puisque dans « Parole d’affranchi » vous mettez en avant la liberté de votre parole et votre expérience justement de la politique ?
 
MAURICE LEROY Oui, tout à fait. Eh ben, je pense, et de loin, que le plus dangereux c’est François HOLLANDE, parce que d’abord c’est le seul qui a travaillé au Parti socialiste assez sérieusement. Je me souviens d’avoir présidé les séances de l’Assemblée nationale à mon entrée au gouvernement, et dans la loi de finances, je ne partageais pas son opinion, mais enfin il avait des propositions. Et puis, autour de lui, Michel SAPIN, un certain nombre d’autres travaillent. C’est le seul qui travaille. Ca n’a rien à voir avec le projet socialiste. Donc, je pense qu’effectivement il ne faut pas sous-estimer l’adversaire. Dominique STRAUSS-KAHN, regardez les déclarations de Benoît HAMON encore aujourd’hui, qui le flingue, c’est vraiment « Les tontons flingueurs » au Parti socialiste.
 
GUILLAUME DURAND Non mais, il est quand même le mieux placé pour l’instant dans l’opinion.
 
MAURICE LEROY Oui, il est le mieux placé dans l’opinion, c’est pour ça que le PS n’en veut pas, sans doute.
 
GUILLAUME DURAND Nous sommes avec Michaël DARMON. Michaël, bonjour.
 
MICHAËL DARMON Bonjour.
 
GUILLAUME DURAND Dans votre livre, il est question de votre itinéraire personnel. Il est aussi question d’un tacle appuyé à François BAYROU. On en revient à la bataille des centres. Mais c’est Michaël qui va choisir le terrain où il veut démarrer, par lequel i veut démarrer.
 
MICHAËL DARMON Eh bien, justement, on va également sur ce terrain-là puisque vous êtes en parole d’affranchi. Nicolas SARKOZY n’arrête pas de dire que la société française se positionne à droite. Alors, pourquoi le centre et en quoi le centre pourrait-il être une solution pour les problèmes de la France aujourd’hui ?
 
MAURICE LEROY Parce que il n’y a pas une élection présidentielle, en France, Michaël DARMON vous le savez bien d’ailleurs, et Guillaume DURAND aussi le sait, il n’y a pas une élection présidentielle qui se soit gagnée à droite toute ou à gauche toute. La campagne du second tour, curieusement, elle est toujours au centre. C’est d’ailleurs pas vrai qu’aux Etats-Unis…euh, c’est pas vrai qu’en France, demandez-aux Etats-Unis, à Barack OBAMA, il a gagné aussi au centre, voilà.
 
MICHAËL DARMON Oui, mais Nicolas SARKOZY…
 
MAURICE LEROY Donc, les campagnes présidentielles se gagnent toujours, toujours au centre. C’est d’ailleurs marrant cette affaire…
 
MICHAËL DARMON …sauf si il est conseillé par quelqu’un, en l’occurrence Patrick BUISSON, qui lui a dit, « c’est très bien, Marine LE PEN monte, elle fabrique du report au deuxième tour, elle fabrique des voix pour… »…
 
MAURICE LEROY …mais Patrick BUISSON n’a pas toujours raison.
 
MICHAËL DARMON Il a l’air d’être assez, voilà, attentif, Nicolas SARKOZY, à ce genre d’explication.
 
MAURICE LEROY Oh, ça, je n’en sais rien. Ca, c’est ce qu’on lit, ça signifie pas que ce soit vrai, voilà. Moi, les choses sont claires, je trouve cette affaire plaisante. On badine toujours avec le centre, « ça n’existe pas, ça ressemble à rien, c’est centre mou », etc., mais enfin curieusement on l’a fait à gauche toute dans les meetings, d’ailleurs Mitterrand avait une célèbre formule pour ça, il disait, « Les congrès du PS se gagnent à gauche », voilà, avec le cynisme qu’on lui connaît il disait cela. Et puis, après, ça se recentrait. Donc, le centre ça existe. Ca correspond d’ailleurs à la majorité des Français, finalement. Les Français ils veulent quoi ? Ils veulent du libéralisme mais régulé, voilà. Ils veulent conjuguer le libéralisme et le social. Donc, c’est tout à fait centriste.
 
MICHAËL DARMON C’est un peu ce qu’a fait Nicolas SARKOZY depuis le début de son mandat.
 
MAURICE LEROY Eh bien, vous voyez bien, je ne vous dis pas le contraire.
 
MICHAËL DARMON Donc, en quoi le centre est-il utile alors ?
 
MAURICE LEROY Oui, mais, enfin c’est ce qu’il a fait, effectivement. Et vous voyez donc bien que ça existe. Ben, parce que les Français choisissent toujours l’original à la copie, on devrait s’en souvenir. C’est pas vrai que pour le Front national, c’est vrai aussi pour d’autres idées.
 
MICHAËL DARMON Alors, parole d’affranchi toujours, Jean-Louis BORLOO, vous ne craigniez pas une aventure solitaire, une nouvelle aventure solitaire de Jean-Louis BORLOO qui a l’habitude au dernier moment de partir et de changer de camp ?
 
MAURICE LEROY Oui, ça, c’est ce que disent ses détracteurs.
 
MICHAËL DARMON Non, c’est ce qui s’est passé. Il était…vous l’avez bien connu aux côtés de François BAYROU, et on l’a retrouvé chez Nicolas SARKOZY.
 
MAURICE LEROY Vous savez, il faut arrêter un peu avec Jean-Louis BORLOO.
 
MICHAËL DARMON Non mais, il n’y a pas ce risque-là ?
 
MAURICE LEROY Non mais, je vais vous répondre.
 
MICHAËL DARMON Oui.
 
MAURICE LEROY D’abord, Jean-Louis BORLOO c’est un gros travailleur. Vous croyez qu’il aurait fait, et je sais de quoi je parle, la rénovation urbaine dans les quartiers sensibles qui est qualifiée…
 
MICHAËL DARMON …non, ça c’est…
 
MAURICE LEROY Laissez-moi vous répondre ! Qui est qualifiée par tous les maires…
 
MICHAËL DARMON Parole d’affranchi, on se demande de quoi, là, Maurice LEROY. Répondez à la question !
 
MAURICE LEROY Interrogez les maires, même de gauche, ils vous diront que la rénovation urbaine ça fonctionne.
 
MICHAËL DARMON Non mais, la question n’est pas celle-là.
 
MAURICE LEROY Et ça, c’est BORLOO. La cohésion sociale, le grenelle de l’environnement, donc Jean-Louis BORLOO d’abord c’est un grand travailleur, un gros travailleur.
 
MICHAËL DARMON … ce n’était pas la question.
 
MAURICE LEROY C’est un homme qui a des projets et des idées, voilà. Et c’est pas un homme qui zigzague. Et puis, il y a une différence majeure entre Jean- Louis BORLOO et François BAYROU par exemple, c’est que ce n’est pas un solitaire justement, c’est un homme qui travaille en équipe, voilà. Et ça, ça change.
 
MICHAËL DARMON Alors, il a trois problèmes : il a Dominique de VILLEPIN, si il veut être candidat ; il a François BAYROU justement ; et il a Nicolas HULOT. Alors, comment régler ces problèmes ?
 
MAURICE LEROY Eh bien, écoutez, on va coller une tête à chaque problème, on va les prendre dans l’ordre.
 
MICHAËL DARMON Alors, Dominique de VILLEPIN.
 
MAURICE LEROY Dominique de VILLEPIN, je date, je signe, vous me le ressortirez si je me suis planté, je suis intimement convaincu que au final Dominique de VILLEPIN ne sera pas candidat à l’élection présidentielle.
 
MICHAËL DARMON D’accord. François BAYROU ?
 
MAURICE LEROY Je pense la même chose de Nicolas HULOT, et d’ailleurs les enquêtes d’opinion montrent qu’un capital de sympathie ça ne se traduit pas forcément électoralement. Les Français aiment beaucoup Nicolas HULOT, ils ne le voient pas à l’Elysée. Donc, ça va se régler aussi tout naturellement. Vous savez, on est à un an. Et enfin, quant à François BAYROU, là c’est plus politique, effectivement. Si enquête d’opinion après enquête d’opinion il se confirme, ce qui est en train de se présenter, c’est la troisième enquête d’opinion, je parle cette fois sous votre contrôle, qui démontre que Jean-Louis BORLOO est vécu par les Français comme incarnant mieux le centre et le centrisme que François BAYROU. François BAYROU est un homme au final responsable. S’il voit qu’il est effectivement loin derrière Jean-Louis BORLOO et que il peut parfaitement avoir le danger de ne pas faire les 5 % - qui permettent le remboursement d’une campagne électorale présidentielle…
 
MICHAËL DARMON Donc ?
 
MAURICE LEROY Eh bien, je pense que au final François BAYROU ne sera peut-être pas candidat. Vous savez, ce serait la troisième fois. Pour les Français, c’est plus le moment François BAYROU, voilà. Je ne dirai pas du mal, ni quoi, ni rien, ce n’est plus le moment. MICHAËL DARMON Et vous, rapidement ?
 
MAURICE LEROY C’est plus le moment.
 
GUILLAUME DURAND Mais vous en dites du mal dans le livre.
 
MICHAËL DARMON Non, je ne dis pas du mal, je rétablis un fait avéré, confirmé par Ségolène ROYAL, qu’évidemment François BAYROU démentira, il l’a déjà fait.
 
GUILLAUME DURAND Il s’agit de l’accord de 2007.
 
MAURICE LEROY Oui, bien sûr.
 
GUILLAUME DURAND C’est-à-dire qu’il y aurait eu un accord, Ségolène ROYAL vous l’aurait dit.
 
MAURICE LEROY Oui, tout à fait.
 
GUILLAUME DURAND Selon lequel celui qui arriverait en tête nommerait l’autre Premier ministre.
 
MAURICE LEROY Eh bien, voilà ! Eh bien, voilà ! Oui, oui, ça été confirmé…
 
GUILLAUME DURAND …mais François BAYROU dit partout que cet accord n’a jamais eu lieu.
 
MAURICE LEROY Oui, mais ça c’est ce qu’il dit, c’est pas parce qu’il le dit qu’il dit la vérité, voilà.
 
MICHAËL DARMON Bon, et vous alors, c’est le vote utile au premier tour ? Si Jean- Louis BORLOO est candidat, vous votez qui ?
 
MAURICE LEROY Vous me réinviterez à ce moment-là.
 
MICHAËL DARMON Non mais, c’est une autre question importante ?
 
MAURICE LEROY Non mais moi je suis ministre de la République, j’ai été nommé par le président de la République et par François FILLON, moi je suis loyal, et 30 on ne me fera pas dire tant que je serai ministre, on ne me fera pas dire de petites phrases et de choses sur le sujet.
 
MICHAËL DARMON Ce n’est pas une petite phrase, c’est un positionnement important, au premier tour vous avez deux candidats de coeur…
 
MAURICE LEROY …eh bien, on a du temps, c’est dans un an, on en reparlera.
 
MICHAËL DARMON Parole d’affranchi, vous dites quoi ce matin ?
 
MAURICE LEROY Ben, parole d’affranchi, vous me réinviterez effectivement à ce moment-là, et je vous donnerai ma réponse.
 
GUILLAUME DURAND Petite question sur votre itinéraire, qui est au coeur de ce livre : comment peut-on naître rue Saint Opportune, à Paris, dans une famille d’antifranquistes et devenir ministre de Nicolas SARKOZY ? A priori, les antifranquistes seraient plutôt à gauche aujourd’hui.
 
MAURICE LEROY Mais écoutez, ça, c’est…franchement, je suis très surpris de votre question.
 
GUILLAUME DURAND Non mais, c’est une question.
 
MAURICE LEROY Oui, j’ai bien compris.
 
GUILLAUME DURAND Vous-même vous mettez ce paradoxe au coeur de votre carrière politique.
 
MAURICE LEROY Non, non, c’est pas par rapport à Nicolas SARKOZY que je mets ce paradoxe. GUILLAUME DURAND Non mais, par rapport à l’itinéraire de la famille.
 
MAURICE LEROY Vous savez, alors je vais vous parler très très franchement.
 
GUILLAUME DURAND Mais rapidement…
 
MAURICE LEROY Ce livre me tient évidemment très à coeur, comme vous l’imaginez. Vous savez, j’ai été secrétaire général du groupe communiste au Sénat, voilà, je ne vais pas vous faire la langue de bois.
 
GUILLAUME DURAND Oui, on s’en souvient.
 
MICHAËL DARMON Et, j’ai donc beaucoup pratiqué les couloirs, etc. Et vous savez, quand vous avez été secrétaire général du groupe communiste au Sénat, comme moi, et que vous ne vous racontez pas d’histoire, et que vous ne racontez pas aux gens, eh bien les trucs ils ne clivent pas droite/gauche comme on le voit parfois sur les plateaux. Et donc, c’est assez curieux parce que vous vous apercevez qu’un homme dit de droite comme Jacques CHIRAC était vachement sympa, populaire, ne se tordait pas le bras pour dire bonjour aux huissiers. Et comme je suis élégant, je ne dirais pas ceux qui, premier ministres, vécus comme des gens soi-disant de gauche, sociaux, etc. avaient du mal à faire ça. Eh ben, on n’a pas la même vison de la vie politique française.
 
GUILLAUME DURAND C’est la contemplation de la politique qui a poussé Maurice LEROY à évoluer.
 
MICHAËL DARMON Non, ce sont les faits. Et puis, attendez, les choses évoluent. Vous avez remarqué qu’il y a un mur qui est tombé à Berlin, vous avez remarqué qu’il y a eu beaucoup de choses qui se sont passées à l’Est, et dont on pourrait parler, etc. Oui, c’est les faits, c’est la réalité. Ca s’appelle le pragmatisme.
 
GUILLAUME DURAND Merci Maurice LEROY. Le livre s’appelle « Parole d’affranchi ».
 
Source : Premier ministre,  Service d’Information du Gouvernement, le 28 avril 2011