Extraits d'un entretien de M. Laurent Wauquiez, ministre des affaires européennes, à France Info le 15 juin 2011, sur la dette de la Grèce et sur l'avenir de l'énergie nucléaire en Europe.

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Média : France Info

Texte intégral

Q - Bonjour Laurent Wauquiez.
R - Bonjour.
Q - (À propos d’une possible restructuration de la dette de la Grèce)
R - Deux choses là-dessus. D’abord il faut qu’on reste, et on peut l’être, serein. Pourquoi ? Tout le monde est sur le pont, et tout le monde est conscient de ses responsabilités. Notre responsabilité c’est de défendre l’euro, en Grèce, comme on l’a fait en Irlande, comme on l’a fait au Portugal, parce que c’est notre monnaie commune. Ce cap, tout le monde en a conscience, tous les pays de la zone euro sont conscients de leurs responsabilités.
Après, le travail se poursuit, il faut qu’il arrive jusqu’à ce qu’un accord soit dégagé, mais la ligne, la même conviction est partagée sur l’ensemble de la zone euro. La deuxième chose, qui a toujours été très claire dans la position de la France, c’est que si restructurer cela signifie qu’un pays ne rembourse pas ses dettes, ce point-là ne fera pas partie du vocabulaire de la France. Parce qu’il faut bien comprendre que ce que nous mettons en place en Grèce, ce n’est pas pour faire plaisir aux marchés financiers, c’est pour faire en sorte que la Grèce puisse rembourser ses dettes, c’est tout, ni plus, ni moins.
Q - (À propos des doutes sur la capacité de la Grèce à honorer ses échéances financières et du possible appel du secteur privé bancaire pour financer la dette grecque)
R - Non. Là encore il ne faut pas agiter les choses. Les banques françaises ont des expositions en Grèce, liées à l’économie grecque. Elles sont parfaitement publiques, il n’y a absolument rien qui soit caché, et par ailleurs le secteur bancaire français est moins exposé, par exemple, que le secteur bancaire allemand.
Donc, je crois que sur tous ces sujets, il faut du calme, de la sérénité, c’est d’ailleurs comme cela que le président de la République a piloté ce dossier, cela nous a permis d’avancer jusque là, de renforcer l’euro, puisque l’euro s’est aussi renforcé à travers cette crise, et donc je crois surtout qu’il s’agit de moments où il faut qu’on tienne bien la main sur le gouvernail, et ne pas manquer ce cap. Le cap, c’est défendre ensemble notre monnaie commune.
Q - Mais faut-il aujourd’hui que les créanciers privés mettent eux aussi la main à la poche ?
R - Je vous l’ai dit. Si restructurer signifie que le pays ne rembourse pas ses dettes, c’est non. Cela ne fait pas partie du vocabulaire français.
Q - (À propos du refus de certains élus américains de voir le FMI financer un deuxième train de mesures d’aides financières en faveur de la Grèce)
R - C’est une position qui a été exprimée par les Républicains, dans le cadre du débat politique américain qui, en ce moment, est particulièrement vigoureux. Ce n’est pas la position du FMI qui a été exprimée officiellement.
Q - Vous parliez de l’Europe et de la manière dont elle s’exprime, d’une voix ou de plusieurs, sur différents dossiers. On a vu, par exemple, qu’on avait du mal, notamment sur la question du nucléaire. Il y a eu l’Allemagne, l’Italie hier. La France doit camper sur ses positions et ne pas ouvrir de débat sur cette question-là ?
R - La France n’est pas isolée, n’oublions pas que l’Europe ce n’est pas que l’Allemagne et l’Italie. L’Angleterre a une option nucléaire par exemple.
Q - Les choses sont en train de changer, après Fukushima, quand même.
R - Oui, il y a deux pays qui ont évolué.
Q - Deux pays avec lesquels on a des accords, très concrets.
R - Oui, deux pays avec lesquels on a des accords, deux pays avec lesquels on a une coopération. Pourquoi est-ce que c’est un choix très important et sur lequel il ne faut pas qu’on fasse de démagogie ?
Trois raisons simples. Vous sortez du nucléaire, le premier impact c’est que votre énergie coûtera à peu près 80 % de plus. Aujourd’hui en Allemagne l’énergie électrique coûte deux fois plus cher qu’en France. La facture moyenne d’un couple, d’un ménage, qui se chauffe à l’énergie électrique, c’est 1400 euros, donc quand les politiques se saisissent d’un sujet parce qu’il y a eu un très grave accident lié à un tsunami sur une côte, et qui disent : «il faut que la France sorte du nucléaire», cela veut dire doubler la facture d’électricité pour les ménages.
Deuxième chose, cela veut dire une énergie plus chère pour la compétitivité de nos entreprises, donc potentiellement des destructions d’emplois.
Et enfin la troisième chose qu’il ne faut jamais oublier non plus, c’est l’environnement. Le nucléaire est l’énergie qui réchauffe le moins la planète, ceux qui disent sortir du nucléaire disent en réalité : «on assume de polluer et de réchauffer plus la planète».
Donc, je trouve que c’est un débat fondamentalement intéressant, parce qu’il met chaque politique face à ses responsabilités.
(…).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 juin 2011