Déclaration de Mme Chantal Jouanno, ministre des sports, sur la gouvernance et les valeurs du sport par la mise en place d'une Assemblée du sport, Paris le 29 juin 2011.

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Circonstance : Réunion de l'Assemblée du sport à Paris le 29 juin 2011

Texte intégral


Vous savez combien j’aime le sport et surtout les sportifs. J’aime le pratiquer ; j’aime l’admirer ; j’aime honorer nos sportifs. C’est ma deuxième moitié avec l’écologie. Et une conviction profonde qu’il n’y a pas de bien être sans équilibre.
Ce qui s’est passé ces derniers mois, grâce à l’Assemblée du sport, est un immense progrès pour notre pays et pour le sport.
Vous l’avez vu, vous l’avez compris, ce dialogue est inédit ; il est inédit parce que tous les acteurs du sport sont présents ; il est inédit parce que nous sommes tombés d’accord sur les objectifs ; il est inédit parce que les engagements sont collectifs.
Nous avons hérité d’un modèle très spécifique, où l’Etat occupe une place importante à côté du mouvement sportif.
C’est ce modèle qui fait de la France l’une des plus grandes nations sportives sur la scène internationale. Nous ne reviendrons pas dessus. L’Assemblée du sport a clairement montré son efficacité pour le sport de haut niveau. Et nous l’améliorerons encore par une plus grande reconnaissance de nos championnes et nos champions. C’est ce que le Président de la République a voulu en demandant que tous nos grands sportifs bénéficient d’une retraite. Certains ont aussi évoqué un « droit à l’emploi » pour les médaillés d’or Olympiques ou Mondiaux.
Ce que je retiens surtout de l’Assemblée du Sport c’est l’ambition de replacer le sport au cœur de la société.
Mon ambition, notre ambition, est simple : la Nation sportive, la France 100 % sport.
Naturellement, vous ne ferez pas tous le 110 mètres haies. Mais il y a tellement de possibilités pour améliorer la situation, rendre la pratique du sport plus simple pour tous.
Nous devons aller beaucoup plus loin pour répondre aux aspirations des Françaises et des Français qui ont envie de faire du sport. Mais qui sont « coincés » dans des contraintes quotidiennes.
Nous devons aller beaucoup plus loin pour que les défis de la santé publique, de l’éducation ou encore de la cohésion soient aussi résolus par le sport. Quel défi quand on sait que les actifs dans les bureaux marchent moins de 300 mètres par jour !
Vous le comprenez, l’enjeu du sport est un enjeu de société. Un enjeu de société qui explique que le Président et le Premier ministre aient souhaité un ministère plein. Un enjeu de société qui explique qu’il y ait 313 propositions que naturellement nous ne pourrons pas mettre en place du jour au lendemain.
Aussi, notre réunion n’est pas une conclusion mais un commencement, le commencement de nos engagements.
1. l’Assemblée a proposé un nouveau modèle de décision pour le sport, une nouvelle gouvernance.
Cette nouvelle gouvernance sera mise en place dès septembre prochain. Pour qu’elle soit efficace et légitime, l’Assemblée du sport sera créée par décret.
Comme il a été proposé, elle sera composée d’une soixantaine de représentants de l’Etat, du mouvement sportif, des collectivités territoriales, du monde économique et naturellement de la société civile.
L’enjeu est simple : nous mettre d’accord, au moins une fois par an, sur les objectifs que nous allons poursuivre ensemble.
Une précision pour les spécialistes : l’Assemblée n’est pas un CNAPS (Conseil National des Activités Physiques et Sportives) rhabillé. Le CNPAS ne concernait que l’Etat. Avec l’Assemblée, ce sont tous les partenaires qui s’engagent.
Naturellement, parler de sport une fois par an ne suffit pas. Il y aura donc une conférence plus restreinte, de moins de 20 personnes, qui se réunira au moins une fois par trimestre pour éviter que les projets ne soient enterrés.
Les participants à la première phase de l’Assemblée du sport se sont également mis d’accord sur la nécessité d’avoir une coordination à l’échelon territorial. Beaucoup ont évoqué le niveau régional, mais les modalités ne font pas consensus. C’est donc l’un des premiers sujets dont la Conférence nationale se saisira à la rentrée prochaine.
Au-delà de ces questions d’organisation, je vous le disais la magie de l’Assemblée du sport est que nous sommes tous d’accord sur les objectifs.
2. Le premier constat commun est que le sport n’occupe pas la place qui lui revient dans la société.
Je pourrais prendre de multiples exemples. Pensez simplement à la place du sport dans les universités américaines. Pourquoi chez nous ce ne serait pas aussi un facteur d’excellence, un plus pour obtenir son diplôme.
Une « France 100 % sport », c’est un pays qui offre une solution sport pour tous. Ce sont les propositions de l’Assemblée du sport.
Une « solution sport » pour les plus jeunes. Vous avez proposé de doubler le nombre d’heures de sport pratiquées par les enfants et les jeunes. C’est un point que nous avons déjà abordé avec Luc CHATEL dans le cadre de la réflexion sur les rythmes scolaires. Mais je crois surtout qu’au-delà de l’école, les activités proposées aux « orphelins de 16heures » nous offre une vraie opportunité. Comme je l’ai dit, nous y mettons déjà 20 millions d’euros par an, via le CNDS ; nous accompagnons 240 000 élèves. Nous proposerons d’aller plus loin avec le CNDS.
Une « solution sport » pour les adultes, quel que soit leur état de santé. Dans ce cadre, la prescription médicale d’activités physiques et sportives est un axe intéressant, notamment pour les adultes. Elle a d’ailleurs été préconisée par la Haute Autorité de Santé, dans le cadre du développement des thérapeutiques non médicamenteuses. C’est un point que le Ministre de la santé est prêt à étudier, mais il faut commencer évidemment par en chiffrer les bénéfices et les coûts.
Une « solution sport » pour tous, c’est aussi la pratique des personnes en situation de handicap. Je suis totalement en accord avec la préconisation d’ouvrir beaucoup plus les fédérations et les clubs dits valides. Nous avons multiplié par 7 le nombre d’associations sportives aptes à recevoir des personnes en situation de handicap depuis 2003. Et, aujourd’hui, 112 000 personnes en situation de handicap sont affiliées à des fédérations dites valides. Nous allons poursuivre dans cette voie.
Il y a tant de choses à faire pour faire faire du sport aux Français. Je pense à la création d’un chèque sport, sur le modèle du ticket restaurant, qui serait un vrai plus pour les salariés. Je pense à la licence d’exploration qui évitera aux parents le casse tête des enfants qui « zappent ». Ces mesures reposent bien évidemment sur les premiers concernés : les entreprises et le mouvement sportif qui souhaitent des études préalables. Nous les y aiderons.
Mais, une « solution pour tous », c’est évidemment une « solution partout ». De nombreuses préconisations rejoignent l’action que je mène en matière d’équipements de proximité ou de développement de la pratique féminine. Néanmoins, l’Assemblée apporte une idée nouvelle qui est l’optimisation de l’utilisation des équipements sportifs scolaires ou militaires. Sachez que Luc CHATEL trouve cette préconisation très pertinente. En France et notamment sur la région parisienne cela représente près de 4000 équipements qui pourraient être ouverts le soir ou le week-end ;
Vous le voyez, j’ai déjà sollicité mes collègues du Gouvernement. Nous allons à présent engager un dialogue interministériel plus approfondi et surtout travailler avec les autres acteurs de l’Assemblée pour évaluer finement certaines propositions.
Vous le voyez aussi, nous sommes tous d’accord pour reconnaître le rôle sociétal du sport.
Aussi, comme vous l’avez proposé, je compléterai le code du sport pour mieux marquer l’apport essentiel du sport en matière d’éducation, d’intégration, de vie sociale et de santé.
Et comme vous l’avez proposé, pour clairement chiffrer les bénéfices du sport, je me suis rapprochée de Bercy pour mettre en place d’un « compte satellite du sport ». Ce compte permettrait de ne plus considérer le sport comme une simple dépense budgétaire, mais comme une réponse à nos problèmes de société.
3. Enfin, vous avez tous insisté sur la nécessité de défendre, et surtout de mettre en avant les valeurs du sport.
Quelle activité représente le mieux la méritocratie, le respect et surtout la diversité que le sport ? Le sport est un bijou que nous devons préserver des spéculateurs, des querelleurs ou des réseaux malveillants. Vous avez pointé plusieurs sujets.
Le dopage reste une préoccupation majeure. Je souscris à la proposition de généraliser le passeport biologique et je la porterai auprès de l’AMA.
La corruption est une menace à venir, notamment avec le marché des paris sportifs en ligne. J’ai engagé un grand plan de prévention de la corruption, qui reprend les propositions du président de l’ARJEL. Et la France est membre de référence des groupes de travail internationaux, notamment au sein du CIO.
Les dérives financières sont une menace. J’ai toujours soutenu Michel PLATINI et son principe de fair-play financier. J’ai fait acter ce principe dans la résolution du Conseil des ministres européens. Nous avons également acté, dans la proposition de loi sur l’éthique du sport, la possibilité pour les fédérations de plafonner la rémunération des agents sportifs en deçà de 10%.
Enfin, si nous voulons que les Français fassent du sport et aiment le sport, il faut leur montrer du sport. Vous l’avez tous souligné, les médias ont un rôle crucial. Plus de sport à la télévision, pas pour rester devant la télévision bien sûr, mais pour faire du sport. J’ai fait des propositions très précises au Ministre de la culture, Frédéric MITTERAND qui négocie actuellement le contrat d’objectifs et de moyens de France Télévision. Dans ce contexte, je lui ai par exemple proposé de fixer des indicateurs précis en matière de nombre de compétitions féminines retransmises, de diversité des disciplines ou encore de promotion des valeurs du sport.
Mesdames et Messieurs,
Vous le voyez, 313 propositions pour le sport, c’est tout un programme politique avec un grand P.
C’est un programme commun, partagé, consensuel. L’Etat a sa part de responsabilité, il a toujours prise et il la prend plus que jamais.
C’est une nouvelle page qui s’ouvre, un nouveau modèle sportif, avec une seule ambition, une « France 100 % sport ».
source http://www.sports.gouv.fr, le 30 juin 2011