Texte intégral
MAITENA BIRABEN Roselyne BACHELOT, la ministre des Solidarités et de la cohésion sociale, est linvitée politique de « La Matinale. » Elle est en charge du dossier de la dépendance et a entre les mains les pistes du financement. Le président tranchera bientôt à lheure où le patron de la Cour des comptes demande encore vingt milliards déconomies supplémentaires lannée prochaine. Et pendant ce temps, les candidats fleurissent à droite. Roselyne BACHELOT, bonjour
CAROLINE ROUX Bonjour
MAITENA BIRABEN Il est très peu habile ce tabouret, il va falloir quon fasse quelque chose
ROSELYNE BACHELOT Jespère arriver à me jucher sur votre tabouret
CAROLINE ROUX Ça va ?
MAITENA BIRABEN Bravo, vous lavez fait ! Soyez la bienvenue !
CAROLINE ROUX Et une candidate de plus à droite effectivement, Christine BOUTIN se lance dans laventure
ROSELYNE BACHELOT Comme elle létait dailleurs la dernière fois
CAROLINE ROUX Se lance dans laventure présidentielle. BORLOO, VILLEPIN, Nicolas DUPONT-AIGNAN, BOUTIN, vous-même, vous êtes candidate ?
ROSELYNE BACHELOT Non, je vous rassure.
CAROLINE ROUX Alors, plus sérieusement, est-ce que cest un risque de morcellement des forces de droite à la veille de la présidentielle, est-ce que ça vous inquiète ?
ROSELYNE BACHELOT Non, à ce moment du débat politique, je pense quil y aura de toute façon, jallais employer le mot décrémage, mais dabord, il faudra réunir les 500 signatures, ce nest pas facile, et je trouve assez sympathique de voir que dans le débat actuel, un certain nombre de personnes, qui très certainement renonceront à leur candidature souhaitent lannoncer, pour pouvoir participer au débat, cest tout à fait normal, et cest comme ça à toutes les élections présidentielles.
CAROLINE ROUX Des candidatures sympathiques. Est-ce que ça nest pas le signe que lUMP a échoué à rassembler différentes sensibilités, comme cétait le cas lors de la dernière présidentielle ?
ROSELYNE BACHELOT Il y avait déjà beaucoup de candidats qui sont déjà des candidats plus ou moins déclarés, qui étaient présents lors de la alors, même à la phase élection présidentielle, il y avait François BAYROU, il y avait Christine BOUTIN, il y avait un certain nombre de candidats qui étaient là. Donc je regarde ça avec philosophie.
CAROLINE ROUX Avec philosophie, est-ce que vous regardez avec philosophie les primaires socialistes également, on a compris que cétait un sujet pour la majorité, et on a entendu surtout hier Jean-Louis BORLOO, qui disait, lui, quil faisait confiance à la CNIL, Commission Nationale Information et Libertés, qui a donné son accord ; dans quel camp êtes-vous, Roselyne BACHELOT ?
ROSELYNE BACHELOT Alors, moi, je suis dans le camp de ceux qui sont inquiets, et je trouve que Claude GUEANT a parlé avec beaucoup de sang-froid, mais a mis chacun devant ses responsabilités. Et dune certaine façon, le Parti socialiste a reconnu quil y avait des difficultés, quil y avait un risque de fichage, puisquil a lui-même invité, cétait tout à fait extraordinaire, lUMP à venir vérifier les élections des primaires socialistes, cest quand même un peu étonnant, et deuxièmement, a convenu quil fallait détruire les fichiers immédiatement après ces élections, et sous contrôle dhuissiers, cest bien reconnaître par cette proposition quil y a un risque de fichage. Alors, le ministre de lIntérieur la dit dailleurs hier aux « Questions au gouvernement », il est en dialogue avec le Parti socialiste pour voir comment, lors de ces primaires, on peut lever avec le Parti socialiste des risques qui sont avoués par la gauche elle-même.
CAROLINE ROUX Est-ce que le but de ces mises en garde, cest que les primaires socialistes naient pas lieu ?
ROSELYNE BACHELOT Les primaires socialistes avaient lieu, elles auront lieu, cest laffaire du Parti socialiste. Il y a un risque de fichage, il est avéré, il faut y remédier.
MAITENA BIRABEN On passe à votre dossier, la dépendance.
CAROLINE ROUX Oui, on passe à la dépendance, le financement de la dépendance qui coûtera huit à dix milliards deuros supplémentaires à lhorizon 2030, alors, on a entendu beaucoup, vous-même, François FILLON, écarter plusieurs pistes de financement, les unes après les autres, donc on se dit : quelles sont les solutions qui restent pour financer un dossier coûteux pour les finances publiques ?
ROSELYNE BACHELOT Dabord, il faut dire les choses, on ne parle pas dabord du financement, il faut voir à quels problèmes les Français sont confrontés. Moi, jen ai rencontré plusieurs dizaines de milliers dans des débats extrêmement denses, extrêmement riches, ils nous disent que le reste à charge des personnes très gravement dépendantes est trop élevé pour les familles, en particulier, les familles modestes, ils nous disent que les services à domicile ont des difficultés, ils nous disent quon a besoin de structures intermédiaires
CAROLINE ROUX Ça, cétait le point de départ du débat, Roselyne BACHELOT, on sait quil y a un problème
ROSELYNE BACHELOT Voilà, non, mais il fallait quantifier
CAROLINE ROUX Maintenant, cest comment le régler
ROSELYNE BACHELOT Il fallait quantifier le besoin, et pour ces besoins nouveaux, il faut un certain argent, quon va mettre sur la table lors des lois de financement de la Sécurité sociale de la fin de lannée, et puis, il y a des échéances qui sont plus lointaines, les chiffres que vous évoquez sont des chiffres
CAROLINE ROUX Pour 2030, effectivement
ROSELYNE BACHELOT Pour 2025-2030. On a donc le temps de sy préparer. Alors, les pistes, elles sont de trois types, le Premier ministre a écarté lhypothèse dune augmentation massive et généralisée de la CSG. Cest une cotisation qui pèse sur les revenus, sur lensemble des revenus. Il na pas exclu pour linstant un alignement de la CSG des retraités sur les actifs, vous savez
CAROLINE ROUX Cest intéressant ce point-là, ça veut dire que
MAITENA BIRABEN Les plus basses
CAROLINE ROUX On ferait participer les retraités au financement de la dépendance
ROSELYNE BACHELOT Je ne dis pas que cest la piste qui va être retenue
CAROLINE ROUX Non, vous nous dites quelle nest pas exclue.
ROSELYNE BACHELOT Elle nest pas exclue à ce stade du débat. Vous savez quil y a un taux de CSG pour les retraités, pour certains retraités, à 6,6, alors que le taux des actifs est à 7,5. Première piste
CAROLINE ROUX On poursuit.
ROSELYNE BACHELOT Deuxième piste : une taxation du patrimoine, cest lhypothèse retenue par le conseil économique, social et environnemental. 1% de taxation sur le patrimoine, 1,5 milliard deuros, et puis troisième piste, la journée de solidarité ou plutôt la contribution de solidarité pour lautonomie, qui rapporte actuellement 2,3 milliards, mais qui ne touche pas les professions indépendantes et les retraités. Donc on pourrait
CAROLINE ROUX Donc lidée, ça serait de faire une deuxième journée de solidarité
ROSELYNE BACHELOT Non, alors, jirai plus loin, cest dabord lalignement, là aussi, de cette journée, de cette contribution de solidarité pour lautonomie, ça rapporterait presque un milliard, et enfin, une deuxième journée de solidarité, donc ces trois pistes sont
CAROLINE ROUX Alors, ça, ce sont les pistes laquelle a votre préférence, Roselyne BACHELOT ?
ROSELYNE BACHELOT Ah, je ne me prononce pas, pour linstant
CAROLINE ROUX Vous navez pas le droit, jai essayé
ROSELYNE BACHELOT Cétait bien tenté
CAROLINE ROUX Oui, bon, voilà, cest lidée. Est-ce que vous allez, sur la philosophie générale du financement justement, est-ce que vous allez faire plus pour les foyers qui ont le moins ?
ROSELYNE BACHELOT Oui, cest exactement ce que nous voulons faire, cest-à-dire, on voit bien que pour les personnes très gravement dépendantes, ce ne sont pas les familles très modestes qui sont entièrement prises en charge par des mécanismes de protection sociale, ce sont ces familles moyennes, modestes, vous savez, ces gens qui vous disent : on a juste un petit peu trop dargent pour toucher des aides, et pourtant, on ny arrive pas, parce que le reste à charge moyen en établissement ou à domicile, pour des personnes très dépendantes, cest presque 1.500 euros par mois. Vous savez, cest très, très lourd vu le niveau moyen des retraites dans notre pays.
CAROLINE ROUX Donc ça veut dire que vous allez mettre à contribution les familles qui ont le plus ?
ROSELYNE BACHELOT Nous allons avoir un socle de solidarités, qui va évidemment mettre tout le monde à contribution, mais certains recevront plus daides, ceux qui en ont le plus besoin.
CAROLINE ROUX Alors, Maïtena parlait tout à lheure dune interview dans LE MONDE de Didier MIGAUD, qui a alerté sur létat des finances publiques une nouvelle fois. Est-ce que cette mesure dont on nous a dit, il y a quelque temps, que cétait une réforme majeure du quinquennat sera indolore pour les finances publiques ?
ROSELYNE BACHELOT Il faudra faire un effort, bien entendu, cest une dépense nouvelle, bien sûr.
CAROLINE ROUX De quel niveau, un effort, quest-ce que ça veut dire, cest parce que Didier MIGAUD, il rappelle des chiffres qui sont assez inquiétants, il dit quil faut encore vingt milliards déconomies lannée prochaine, pour faire plaisir aux agences de notation
ROSELYNE BACHELOT Oui, bien sûr, on va les faire, on va les faire, mais il y aura des recettes nouvelles qui permettront daffronter des dépenses nouvelles dans le cadre de la dépendance.
CAROLINE ROUX Cest Nicolas SARKOZY qui tranchera
ROSELYNE BACHELOT Cest Nicolas SARKOZY qui tranchera dabord sur le niveau de ce que nous financerons, et sur les moyens de le financer.
CAROLINE ROUX On a eu le sentiment que cette réforme avait été revue à la baisse, au début, on nous parlait de la création dune cinquième branche de la Sécurité sociale
ROSELYNE BACHELOT Ça, cest autre chose
CAROLINE ROUX Est-ce que
ROSELYNE BACHELOT Attendez
CAROLINE ROUX Juste sur cette notion-là, il y a autant dambitions aujourdhui quil y en avait lorsque le président de la République a annoncé cette grande réforme ?
ROSELYNE BACHELOT Il a parlé dabord, pas dune cinquième branche, il a parlé dune cinquième protection, mais il y aura des textes de gouvernance, bien entendu, cest très important lorganisation de cela. Vous mavez questionnée sur la dépense, jy réponds, mais effectivement, il y a des questions de gouvernance, et puis, il y a aussi toutes sortes de sujets qui seront abordés à court et à moyen termes, la question du logement, des métiers, de la prévention, très important la prévention, parce que ça peut être aussi une occasion de moindres coûts.
MAITENA BIRABEN On va passer au « Jaime/Jaime pas », vous allez nous dire si vous aimez ou si vous naimez pas découvrir dans LE CANARD ENCHAÎNE que SERVIER a financé des activités promues par Philippe DOUSTE-BLAZY, alors ministre de la santé ?
ROSELYNE BACHELOT Alors, oui, je naime pas.
CAROLINE ROUX Vous étiez au courant de cette affaire, révélée par LE CANARD ENCHAÎNE ?
ROSELYNE BACHELOT Ah non, non, non, je nétais pas au courant.
CAROLINE ROUX Vous-même, lorsque vous étiez ministre de la Santé, vous navez jamais fait financer des opérations, quelles quelles soient, par des laboratoires pharmaceutiques ?
ROSELYNE BACHELOT Ah, jamais, jamais, jamais.
CAROLINE ROUX « Jaime/Jaime pas » supprimer les visiteurs médicaux comme le préconise le rapport de lIGAS ?
ROSELYNE BACHELOT Il y a de bons visiteurs médicaux, il y a de la visite médicale de qualité, qui correspond à une charte éthique, et puis, il y a de la mauvaise visite médicale, donc je naime pas la mauvaise visite médicale.
CAROLINE ROUX Ça veut dire que cest une mesure que vous trouvez trop radicale sans doute ?
ROSELYNE BACHELOT Ecoutez, le ministre de la Santé en jugera, que la visite médicale soit plus encadrée, quelle soit plus vérifiée me parait une bonne démarche. Le ministre de la Santé en décidera. En tout cas, il y a des avis qui sont en ce moment collectés par le ministre de la Santé dans le cadre de la rénovation de la filière du médicament, le rapport de lIGAS est un des éléments, il y a dautres éléments, les commissions denquête (sic) les missions dinformation parlementaires sur ce sujet, il y a des avis très divergents, le ministre prendra les décisions qui conviennent.
MAITENA BIRABEN Vous aimez, vous naimez pas 13,4 millions de Français qui ont déjà fumé du cannabis ?
ROSELYNE BACHELOT Ah, je naime pas.
MAITENA BIRABEN Vous semblez sur la ligne parfaitement stricte de linterdiction totale ?
ROSELYNE BACHELOT Ah oui, ça, alors absolument
MAITENA BIRABEN Et vous y restez
ROSELYNE BACHELOT Je suis professionnelle de santé, ancienne ministre de la Santé, je nimagine absolument pas la légalisation du cannabis, et je trouve cette démarche étonnante au niveau de la santé publique.
CAROLINE ROUX « Jaime/Jaime pas » le : « tout sauf FILLON à Paris » !
MAITENA BIRABEN De quoi parle-t-on ! Mais quest-ce que cest ?!
ROSELYNE BACHELOT Moi, jaime tout avec FILLON.
CAROLINE ROUX On ne veut pas savoir
MAITENA BIRABEN Caroline, je vous en prie ! Franchement ! Merci beaucoup Roselyne BACHELOT, davoir été avec nous.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 7 juillet 2011