Déclaration de Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, sur les choix gouvernementaux pour faire face à la crise économique (redressement des finances publiques et réformes structurelles de l'Etat, Aix-en-Provence le 10 juillet 2011.

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Circonstance : Rendez-vous économiques d'Aix-en-Provence, le 10 juillet 2011

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
C’est un plaisir et un honneur d’être ici, avec vous, pour ces rencontres économiques d’Aix-en-Provence, devenues désormais aussi incontournables que le Festival d’art lyrique lui-même. Et c’est pour moi un privilège que de pouvoir m’exprimer devant vous ce matin - et de le faire aux côtés de deux des plus fins connaisseurs de la stratégie économique et budgétaire.
Au coeur de nos débats, il y a la sortie de crise – une sortie de crise qui est largement déterminée par la manière dont nous avons réagi au plus fort de la récession et c’est pourquoi je me permettrai de vous en dire d’abord un mot.
1. Nos choix économiques ont permis à la France de mieux résister à la crise :
Face à la crise, les décisions françaises ont été très claires : nous avons pris toutes les mesures pour limiter autant que possible le choc et accélérer la reprise.
• Nous avons fait le choix de laisser jouer largement les stabilisateurs automatiques, avec des recettes en baisse de plus de 20 % et des dépenses sociales en nette hausse.
• Nous avons engagé une politique déterminée de soutien à l’activité, avec un plan de relance particulièrement tourné vers l’investissement de long terme.
• Nous avons aidé nos entreprises à faire face au ralentissement brutal de l’économie. Je pense notamment aux différentes mesures que nous avons prises pour soutenir leur trésorerie, qu’il s’agisse du remboursement anticipé du crédit impôt recherche, de la mensualisation du remboursement des crédits de TVA ou bien encore du report en arrière des déficits. Mais je pense aussi aux aides destinées aux PME et je veux notamment saluer le rôle majeur qu’a joué Oséo pour les accompagner et les soutenir.
• Nous avons conduit une politique sociale particulièrement active pour protéger les Français et préserver leur pouvoir d’achat : en 2009, je vous le rappelle, nous avons notamment supprimé les deux premiers tiers provisionnels pour les ménages imposables à la première tranche de l’impôt sur le revenu et nous avons versé une prime de solidarité active pour les titulaires du RSA.
Cette action pragmatique et déterminée a été largement saluée par l’ensemble des observateurs, et notamment par le Fonds monétaire international. Elle a permis à l’économie française de mieux résister à la crise, puisqu’en 2009, l’ampleur de la récession a été quasiment deux fois moindre en France que chez certains de nos voisins européens (-2,6 %, contre -4,7% en Allemagne et -4,9 % au Royaume-Uni).
2. Les deux piliers de la sortie de crise : redressement des finances publiques et réformes structurelles pour augmenter la croissance potentielle :
C’est sur ces bases que nous avons construit notre stratégie de sortie de crise, qui repose sur deux piliers : tout d’abord, le redressement de nos finances publiques, qui est une priorité absolue ; et la poursuite des réformes structurelles qui permettront d’augmenter notre croissance potentielle.
Maîtriser les dépenses publiques tout en accompagnant la reprise, voilà l’équilibre qui fonde aujourd’hui notre politique.
A. Redresser nos finances publiques en nous fixant des règles claires et contraignantes :
Maintenant que nous sortons de la crise, le moment est plus que jamais venu de poursuivre la réduction de nos déficits, qui avaient atteint 7,1 % du PIB en 2010.
Et je veux être très claire sur ce point : oui, nous avons du faire face au choc économique le plus violent que nous ayons connu depuis l’après-guerre et oui, il est naturel que celui-ci ait dégradé nos grands équilibres budgétaires. Mais nous ne pouvons pas imputer nos déficits à la seule crise : voilà maintenant près de 35 ans que nous avons plus voté un seul budget équilibré. L’enjeu, aujourd’hui, c’est de rompre définitivement avec cette habitude française de toujours remettre à plus tard la maîtrise des dépenses publiques.
Et pour y parvenir, nous nous sommes donné des règles, pour nous contraindre à être vertueux et à l’être sur la durée.
• Et nous avons commencé dès 2007, en nous fixant un principe, celui de ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux parmi les agents de l’Etat. Nous en voyons aujourd’hui les résultats : pour la première fois, en 2012, les dépenses de personnels de l’Etat vont baisser.
• Nous nous sommes également fixés depuis 2007 des normes de dépense extrêmement strictes, que nous avons respectées à la lettre : désormais, d’une année sur l’autre, les dépenses de l’Etat sont stabilisées en valeur or charge de la dette et pensions et en volume avec la dette et les pensions.
• De même, nous avons fait du respect de l’objectif national de dépenses d’assurance-maladie une priorité. Et là aussi, pour la première fois depuis sa création en 1997, nous allons tenir cet objectif.
• J’ajoute que nous avons pris des engagements très clairs auprès de nos partenaires européens sur notre trajectoire de réduction des déficits : d’ici 2013, nous repasserons sous la barre des 3 % du PIB et nous reviendrons à 2 % dès 2014. Ces engagements, la France les tiendra, quoi qu’il arrive. Et nous sommes en bonne voie, puisque nous avons d’ores et déjà pris de l’avance sur notre calendrier, avec un déficit 2011 qui devrait s’établir à 5,7 % du PIB à la fin de l’année.
La France a donc clairement rompu avec la facilité budgétaire, en se donnant des règles strictes qui renforcent encore sa crédibilité. Et le projet de loi constitutionnelle que j’aurais l’honneur de présenter demain au Sénat en offre une nouvelle preuve : pour la première fois, notre pays devrait graver dans le marbre l’obligation, pour tout Gouvernement, de réduire les déficits pour revenir à l’équilibre et de dire quand et comment. C’est la règle d’or qui marquera, nous le souhaitons, un moment fort d’union nationale, comme ce fut le cas en Allemagne.
B. Poursuivre les réformes structurelles, qui augmenteront la croissance potentielle :
Le deuxième pilier de notre politique économique, ce sont les réformes que nous avons engagées depuis 2007 et qui vont augmenter notre croissance potentielle.
• La France était un grand pays de science. Elle est en train de devenir aussi un grand pays d’innovation. Avec la refondation des universités autour de l’autonomie, avec le triplement du crédit impôt recherche et avec la réorganisation de notre recherche, nous avons fait tomber le mur de Berlin qui séparait la recherche publique de la recherche privée. Et le plan d’investissements d’avenir nous a permis d’aller plus loin dans cette voie, en favorisant encore les partenariats qui les unissent.
Les résultats sont là : en 5 ans, le nombre de laboratoires mixtes public-privé a été multiplié par deux. Et nos organismes de recherche ont eux aussi pris le tournant de la valorisation et de l’innovation, avec des brevets publics déposés en hausse de plus de 30 % en 2009 comme en 2010.
Je veux enfin le souligner, grâce au CIR, la France est devenue le pays le plus attractif pour l’innovation. Nous sommes en train de rattraper notre retard et les entreprises étrangères sont de plus en plus nombreuses à choisir la France pour installer leurs centres de recherche et développement (71 nouveaux projets d’installation en 2011).
Tout l’enjeu aujourd’hui, c’est de continuer dans cette voie. Et pour cela, il faut de la stabilité fiscale, car c’est elle qui nous permettra de tirer durablement parti de nos nouveaux atouts et de doper ainsi la croissance par l’innovation.
• Deuxième objectif majeur de notre politique économique : améliorer le fonctionnement du marché du travail. C’est la raison pour laquelle, vous le savez, nous avons rapproché l’ANPE et l’UNEDIC. Cela faisait des années que l’on en parlait. Eh bien, nous l’avons fait, en créant Pôle emploi. Et cela a permis non seulement de simplifier toutes les formalités que devaient remplir les demandeurs d’emploi, mais également de leur proposer un accompagnement personnalisé plus efficace.
Notre but, c’est en effet de favoriser le retour rapide à l’emploi. Et c’est pour cette raison que nous avons créé le RSA : pour lutter contre ces fameuses trappes à inactivité, repérées par les économistes depuis longtemps déjà, sans que personne n’ait jamais jusqu’ici apporté de réponse convaincante. Eh bien désormais, avec le RSA, le travail paie toujours plus que l’assistance et cela dès la première heure : là encore, il s’agit d’une vraie révolution.
Nous avons aussi mené une politique fiscale tournée vers la compétitivité : suppression de la taxe professionnelle, de l’IFA pour les petites entreprises…
3. Depuis quatre ans, nous avons remis la France en mouvement :
Ces réformes, elles sont au coeur de notre politique économique. Mais je crois qu’elles vont encore au-delà, en dessinant le visage d’une France plus forte, d’une France qui surmonte un à un ses blocages et qui reprend confiance en elle.
Il y a 4 ans encore, tout le monde se demandait si la France était irréformable. Aujourd’hui, la réponse ne fait plus de doute : Nicolas Sarkozy a réconcilié les Français avec la réforme.
• Et je pense par exemple à la réforme de l’Etat, qui a longtemps été le grand échec français. Car cette réforme, vous le savez, elle devait commencer par Bercy et elle a buté d’emblée sur un obstacle : je pense bien sûr à la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique. C’était en l’an 2000 : et depuis, plus rien n’avait bougé.
Eh bien, ce rapprochement nous l’avons fait, en créant la direction générale des finances publiques. Et si nous y sommes parvenus, c’est que nous avons pris le temps de la concertation et du dialogue avec à la clef plus de 10 000 suppressions d’emploi aux impôts en quelques années. Nous avons fait la pédagogie de la réforme, en replaçant toujours au coeur de notre action une valeur cardinale, celle du service rendu aux Français. Le résultat, c’est que désormais, tous les contribuables ont accès à un guichet fiscal unique et que nous rendons ainsi un meilleur service à un meilleur coût.
C’est dans ce même but que nous avons simplifié comme jamais l’organisation de l’Etat, avec 10 % de directions centrales en moins et un réseau territorial profondément repensé. Et nous avons ainsi rendu les services publics plus accessibles et plus performants, en multipliant les formalités qui peuvent être accomplies en ligne et en réduisant leurs délais de traitement.
• La réforme de l’Etat, tout comme celle des retraites ou des universités, le prouvent : nous avons trouvé la bonne méthode pour réformer, une méthode qui réunit trois ingrédients-clefs : un discours de vérité, tout d’abord, avec des engagements portés au plus niveau de l’Etat ; un dialogue permanent avec les acteurs des réformes, ensuite, pour les associer à des transformations dont ils sont les garants et les bénéficiaires – et je pense notamment au principe posé par le Président de la République, qui a demandé que la moitié des gains de productivité liés au non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux reviennent pour 50 % aux agents de l’Etat ; et puis enfin, troisième ingrédient, la détermination et la continuité dans l’action.
C’est ainsi que nous sommes parvenus à porter les réformes dans la durée. Et, plus profondément encore, à convaincre : ces réformes, les Français les attendaient et ils savaient qu’on ne pouvait plus se permettre de les différer. Et je pense notamment à la réforme des retraites : nous vivons plus longtemps et nous vivons mieux. Si nous voulons préserver notre système de retraite par répartition, nous devons donc travailler plus longtemps. C’est une évidence et les Français l’ont parfaitement compris.
Et à mes yeux, cela montre une chose : les grandes réformes que nous avons menées, au fond, elles dépassent les clivages politiques. Et elles ont tout pour faire consensus.
Nous allons bientôt entrer dans une année électorale. Et je ne souhaite qu’une chose : c’est que la maitrise des dépenses publiques, la réduction des déficits, l’autonomie des universités ou la priorité donnée à l’innovation ne soient pas remises en cause par calcul politique. Ce ne sont pas des enjeux de campagne : ce sont des réformes qui garantissent notre avenir et qui remettent notre pays en mouvement. En cette période de sortie de crise, elles sont notre meilleur atout.
Alors, ne brisons pas cet élan, ne sacrifions pas l’intérêt général : ces réformes, elles doivent être préservées. Parce qu’elles sont d’utilité publique, tout simplement.
Je vous remercie.
Source http://www.budget.gouv.fr, le 27 juillet 2011