Déclaration de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, sur la dimension sociale dans les politiques mises en oeuvre par le FMI, la croissance économique et le progrès social, Paris le 23 février 2011.

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Circonstance : Réunion du comité de dialogue socialpour les questions européennes et internationales (CDSEI) à Paris le 23 février 2011

Texte intégral


Mesdames, Messieurs,
Nous en avons tous conscience, la crise économique mondiale ne peut pas être une simple parenthèse. Ses enseignements sont clairs : nous ne pouvons plus nous contenter de réguler la mondialisation uniquement sur le plan économique et financier. Au contraire, nous devons désormais prendre en compte la dimension sociale dans les politiques mises en oeuvre par le FMI, la Banque mondiale ou encore l’OMC, parce que ce qu’attendent les citoyens de nos pays, c’est que la mondialisation ne soit pas la loi de la jungle, c’est qu’elle ne donne pas tout au capital financier et rien au travail, c’est au contraire qu’elle permette à la fois la croissance économique et le progrès social.
Comme l’a souhaité le Président de la République devant l’OIT en 2009, le devoir de la France est de montrer la voie et de susciter le débat pour mettre les questions d’emploi et de protection sociale au coeur de la réflexion mondiale. C’est l’un des objectifs majeurs de la présidence française du G20.
Voilà pourquoi il est important pour moi d’échanger avec vous aujourd’hui dans le cadre de ce CDSEI, parce que les partenaires sociaux doivent être évidemment pleinement associés à la réunion des ministres du travail et de l’emploi du G20 qui aura lieu en septembre prochain.
I. Je vais d’abord revenir rapidement sur nos objectifs.
1. Notre premier objectif, c’est l’emploi, surtout l’emploi des jeunes et des plus vulnérables.
Les situations sont bien sûr très diverses entre les pays, mais le soutien à l’emploi constitue une priorité de notre présidence, parce que l’impact de la crise sur l’emploi s’est fait sentir dans tous les pays du G20. Le Président de la République a d’ailleurs souligné cette priorité en recevant les représentants syndicaux français et internationaux en décembre dernier.
Nous voulons insister particulièrement sur l’emploi des jeunes et des plus vulnérables : je pense, en ce qui concerne la France, aux chômeurs de longue durée pour lesquels nous avons décidé d’engager des mesures spécifiques d’aide au retour à l’emploi. Pour faire avancer ces priorités et préparer les échanges ministériels, nous avons décidé d’organiser un séminaire sur l’emploi le 7 avril prochain.
2. Notre deuxième objectif, c’est de développer un « socle de protection sociale » au niveau international.
Il ne s’agit pas d’imposer un modèle social unique, mais un socle. Ainsi, pour les pays émergents et les pays en développement, il s’agit de les inciter à tirer profit de leur croissance pour étendre leur couverture de protection sociale.
Pour les pays développés, il s’agit de renforcer l’efficacité de leur système de protection sociale tout en veillant à l’équilibre de leurs finances publiques.
Pour nourrir les échanges ministériels sur ce sujet, nous comptons sur les discussions que vous mènerez lors de la conférence internationale du travail de juin prochain sur la protection sociale. Nous comptons aussi sur le rapport du Groupe consultatif, présidé par Mme Bachelet, qui sera remis en septembre prochain avant la réunion des ministres du Travail et de l'Emploi.
3. Notre troisième objectif vise à promouvoir le respect des droits sociaux et du travail.
Comme l’a rappelé le Président de la République lors du lancement de la présidence française, la France ne se résigne pas à ce que les 8 conventions de l'OIT sur les droits fondamentaux du travail ne soient pas mises en oeuvre par tous les membres du G20, qui sont membres de l'OIT.
J’en ai bien conscience, il ne saurait être question d’harmoniser dans le détail toutes les législations du travail, mais nous pouvons par exemple travailler à promouvoir la notion de « travail décent » que l’OIT a mise à l’honneur.
4. Enfin nous devons améliorer la coordination entre les différentes organisations internationales.
Cette coordination est essentielle pour renforcer la cohérence entre les politiques sociales, d’une part, et les politiques économiques, financières et de développement, d’autre part. Ainsi, à notre initiative, le Directeur général du BIT, M. Somavia, participe désormais aux sommets du G20.
Il ne s’agit pas d’introduire une conditionnalité sociale mais d’avancer de manière pragmatique pour améliorer les conditions de vie et les conditions de travail des citoyens. Vous avez travaillé sous l’égide de Gilles de Robien, que je remercie, avec les principaux ministères concernés, Travail-Emploi, Economie-Finances, Affaires étrangères. Nous allons poursuivre cette réflexion lors de la conférence de haut niveau qui aura lieu en mai prochain pour préparer le débat ministériel.
II. Voilà pour nos objectifs, j’en viens maintenant à notre calendrier.
Vous serez consultés à tous les niveaux de la préparation du G20 travail-emploi jusqu’à la réunion ministérielle. Nous vous avons remis un calendrier qui détaille les événements qui auront lieu jusqu’à la réunion ministérielle.
Je pense en particulier à trois rendez- vous :
1. Comme je l’ai évoqué, vous serez invités à participer à un séminaire sur l’emploi avec des experts et des fonctionnaires de haut niveau du G20, le 7 avril prochain à Paris. Nous nous appuierons sur les orientations du « Pacte mondial pour l’emploi » adopté par la CIT de juin 2009 pour réfléchir, par exemple, aux moyens de mieux prendre en compte l’emploi dans les objectifs des politiques macroéconomiques.
2. Nous allons ensuite organiser à Paris, le 23 mai prochain, une conférence de haut niveau sur la cohérence dont j’ai parlé tout à l’heure.
C’est l’une des propositions que vous aviez faites fin 2009-début 2010 lors des concertations animées par Gilles de Robien. Vous serez là aussi des acteurs de ce temps fort pour la préparation de notre réunion ministérielle.
3. Naturellement, il y aura d’autres rendez-vous à d’autres niveaux comme le Sommet des chefs d'entreprise (Business Summit, B20). L’idée d’un Sommet social (S20) a aussi été évoquée après les échanges entre les organisations syndicales et le Président de la République. J’attends bien sûr que vous nous en disiez plus sur ces deux évènements lors du tour de table qui va suivre.
III. Enfin un mot sur notre méthode : nous allons associer tous les pays, européens et non européens, à l’ensemble de nos priorités du G20 travail-emploi.
Nous allons, avec Gilles de Robien et le BIT, susciter des débats autour des thèmes de la Présidence française du G20 lors du prochain conseil d’administration du BIT et de la conférence internationale du travail.
Je vais bien entendu m’entretenir avec mes homologues européens. J’ai déjà eu l’occasion de le faire avec le ministre britannique de l’emploi. Je rencontrerai prochainement mon homologue allemande. Nous avons prévu une deuxième réunion conjointe entre partenaires sociaux français et allemands au premier semestre 2011.
Nous comptons aussi nous appuyer sur le relais de nos pays partenaires ailleurs dans le monde. Le BIT et l’OCDE seront associés à la préparation de l’ensemble de nos manifestations et nous solliciterons aussi ponctuellement le FMI ou la Banque mondiale.
Je voudrais aussi rappeler que la France a conclu avec le BIT, en août 2010, un nouvel accord de coopération quadriennal pour appuyer la réflexion du BIT sur les sujets qui nous occupent dans le cadre de ce G20.
Mesdames, Messieurs,
Quel monde voulons-nous ? C’est la question que nous allons nous poser tout au long de ce G20. Voilà pourquoi nous avons besoin de votre expérience et de vos contributions, afin que les objectifs du G20 en matière sociale puissent devenir une réalité concrète pour les citoyens de nos pays.
Je vous invite donc maintenant à me faire part, très librement, de vos propositions et de vos analyses. Si vous en êtes d’accord, étant donné le format quelque peu exceptionnel de ce CDSEI, je souhaite donner d’abord la parole à nos hôtes étrangers, avant d’écouter les partenaires sociaux français.
Je vous remercie.
Source http://www.emploi.gouv.fr, le 22 juin 2011