Entretien de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères et européennes, avec la presse le 29 août 2011 à Villacoublay, sur la relation franco-allemande et la Conférence des Amis de la Libye organisée à Paris pour aider à la reconstruction de ce pays.

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Q - Alain Juppé vous avez dit tout à l'heure, «la relation franco-allemande est en pleine forme», qu'est-ce que cela veut dire ?
R - Cela veut dire ce que cela veut dire de manière très explicite. On nous dit toujours que les choses sont difficiles entre la France et l'Allemagne. Elles n'ont jamais été simples. Les intérêts de nos deux pays ne sont pas spontanément convergents. En revanche, ce qui est en pleine forme c'est la volonté politique de faire en sorte que cette relation fonctionne bien, que les échanges soient nombreux et que l'on arrive, à partir de points de vue parfois divergents, à des positions communes. Et cela, nous en avons apporté la démonstration pendant tout l'été, cela marche bien.
Q - Cela veut dire que Nicolas Sarkozy et Angela Merkel se comprennent maintenant ?
R - Oui, ils se comprennent. J'ai eu l'occasion de rencontrer la chancelière et j'ai vu que sur la plupart des grands sujets que nous avons rapidement évoqués, d'abord bien sûr la réponse à la crise financière mondiale et européenne, mais aussi des questions comme le processus de paix au Proche-Orient, il y a des points de vue tout à fait proches, pour ne pas dire communs, entre la France et l'Allemagne.
Q - Jeudi, une réunion importante sur la Libye a lieu à Paris. Est-ce qu'on peut désormais dire que la Libye est un pays en paix ?
R - Non, c'est un pays encore en transition. Il reste des poches de résistance. La ville de Syrte est toujours contrôlée par les forces de Kadhafi. Donc, il y a encore des progrès à faire. Nous avons franchi une étape très significative, le Conseil national de transition contrôle l'immense majorité du pays, mais il faut construire la paix. Elle n'est pas encore tout à fait à l'œuvre.
Q - C'est peut-être la période la plus difficile finalement ?
R - C'est une période difficile. C'est la raison pour laquelle la France a souhaité, à l'initiative du président Sarkozy, associer le plus grand nombre possible de partenaires, non seulement ceux qui nous ont accompagnés pendant la phase disons militaire de l'opération, c'était le Groupe de contact, et aussi d'autres comme la Russie ou la Chine qui sont invités à Paris le 1er septembre pour cette nouvelle conférence dite Conférence des Amis de la Libye. Ce que nous attendons d'abord du Conseil national de transition, c'est qu'il nous explique ce qu'il va faire maintenant, quelle est sa feuille de route politique, comment il va construire la démocratie en Libye : une nouvelle Constitution, des élections... Et ensuite il faut reconstruire aussi économiquement ce pays qui dispose de richesses potentielles considérables mais qui a été ruiné par quarante-deux ans de dictature.
Q - Et nous, qu'avons-nous à proposer ? Sur quel plan allons-nous aider plus particulièrement ? La sécurité ?
R - La France est prête à aider, avec l'Union européenne et avec les Nations unies. Nous sommes également prêts à participer à la construction de l'État de droit, à aider à organiser des élections dans un pays qui n'en a pas connues depuis quarante-deux ans. La sécurité intérieure aussi. La France a une forte capacité de formation dans ce domaine. Nous sommes donc prêts à répondre aux demandes des Libyens.
Q - Est-il possible de reconstruire la Libye tant que Kadhafi n'aura pas été retrouvé ?
R - Comme je l'ai dit, tant que Kadhafi n'aura pas été neutralisé, un risque de violence subsiste. C'est la raison pour laquelle les forces du Conseil national de transition s'emploient à le retrouver. Mais ce n'est pas une raison pour attendre, d'où cette initiative du 1er septembre qui marquera je l'espère une date importante et qui sera suivie par d'autres réunions de mise en œuvre.
Q - On ne sait pas du tout où il se trouve à l'heure actuelle ?
R – Non.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 31 août 2011