Déclaration de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères et européennes, sur les enjeux et les défis pour la diplomatie française des changements opérés dans le monde, Paris le 1er septembre 2011.

Prononcé le 1er septembre 2011

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion de la XIXè conférence des ambassadeurs du 31 août au 2 septembre 2011 à Paris : allocution d'ouverture d'Alain Juppé le 1er

Texte intégral

Messieurs les Ministres,
Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs les Directeurs,
Au cours des derniers mois, j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup d’entre vous, lors de mes déplacements fréquents à l’étranger, lors d’entretiens à Paris ou encore à travers vos correspondances, que je lis toujours avec intérêt.
Permettez-moi aujourd’hui de vous dire en quelques mots le plaisir que j’ai de vous accueillir tous, ici, au Quai d’Orsay, en présence du Premier ministre, à l’occasion de cette réunion traditionnelle que j’ai créée il y a 18 ans pour vous permettre de vous retrouver au moins une fois dans l’année, vous qui, aux quatre coins du monde, contribuez à l’action et au rayonnement de notre pays. Ce sont en effet la cohérence, l’unité et la capacité d’agir ensemble qui font la force de notre diplomatie - j’aurai l’occasion d’y revenir plus longuement devant vous demain.
Cette année, face aux bouleversements sans précédent que connaissent les équilibres du monde, nous avons souhaité intituler notre rencontre : «la diplomatie dans un monde en mouvement : la France, acteur du changement».
Au cours de nos échanges qui seront nombreux, nous aurons ainsi l’occasion d’aborder les principaux enjeux et les grands défis auxquels notre diplomatie est confrontée.
Les «printemps arabes», d’abord. Je l’ai dit le 16 avril dernier lors du colloque que nous avions organisé grâce à l’hospitalité de Dominique Baudis à l’Institut du monde arabe : les révolutions au sud de la Méditerranée nous conduisent à changer notre regard sur cette région du monde et à inventer une nouvelle manière de pratiquer la diplomatie. Droits de l’Homme, soutien aux réformes démocratiques et économiques, mais aussi maîtrise de l’immigration, ou encore conséquences de l’intervention de la communauté internationale en Libye… dans tous les domaines, nous devons tirer les leçons des mutations en cours, comme vous avez commencé à le faire à l’Institut du Monde Arabe.
Deuxième enjeu : la crise de l’euro et l’avenir de l’Union européenne. La crise des dettes souveraines nous a conduits à mettre en place des instruments novateurs. Nous devons poursuivre nos efforts afin d’aider l’Europe à sortir renforcée de cette phase difficile en nous appuyant bien sûr sur la relation privilégiée que nous avons avec l’Allemagne que j’ai eu encore l’occasion de vérifier lundi dernier lors de la Conférence des ambassadeurs allemands, qui a été créée sur le modèle de la Conférence française.
Troisième enjeu : la gouvernance mondiale. Dans la perspective du Sommet de Cannes, mais aussi à la veille d’échéances majeures dans le domaine du développement durable, nous nous interrogerons sur les jalons que nous devons poser pour contribuer à l’émergence d’un monde plus structuré, mieux régulé, sur la base de valeurs partagées.
Quatrième enjeu : le soutien au continent africain, qui est aujourd’hui confronté à des défis majeurs, alimentaire, démocratique, économique ou encore de sécurité. Ces défis, l’évolution de nos outils de coopération et d’aide au développement est un atout majeur pour nous aider à les relever. Nous avons déjà fait beaucoup en ce sens mais, nous le savons, l’aide au développement est un domaine dans lequel nous devons faire toujours davantage.
Cinquième enjeu : la sécurité de nos compatriotes partout dans le monde. Qu’il s’agisse de la situation en Afghanistan, de la crise iranienne ou des actions que nous menons face à la menace terroriste au Sahel, nos échanges seront l’occasion de faire le point et de tracer des perspectives dans ce domaine qui est au cœur des missions de notre ministère.
Enfin, ils nous donneront l’occasion de réfléchir sur les mutations profondes de notre outil diplomatique, qui lui permettent d’être aujourd’hui l’un des plus modernes et des plus performants au monde. Diplomatie scientifique et numérique, réforme du réseau culturel, nouveaux opérateurs, consolidation des moyens et des effectifs : dans un contexte budgétaire contraint, et personne n’échappera à cette contrainte, c’est grâce aux efforts de rationalisation que nous consentons que notre ministère retrouve aujourd’hui la place qui est la sienne dans le paysage français et international.
Tous ces enjeux, tous ces défis, c’est grâce à votre regard, à votre expertise et à vos suggestions que nous pourrons les relever ensemble. N’hésitez pas à confronter vos points de vue et vos idées. Exprimez-vous librement. «C’est au choc des idées que jaillit la lumière». Je voudrais vous rendre bien attentifs à la chance que vous avez, quel plus beau métier aujourd’hui que celui de diplomate dans un monde qui bouge, qui change et se transforme avec plein de promesses et beaucoup de risques.
Je vous fais confiance et vous souhaite à tous des travaux fructueux.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 septembre 2011