Texte intégral
Q - Que faut-il en attendre du G7 ?
R - Nous avons une préoccupation centrale qui est la croissance. Nous aurons une discussion de fond sur le ralentissement observé cet été dans le monde, et le débat sera dautant plus libre quil ny aura pas de communiqué final. Sagissant de la direction à prendre entre relance et consolidation budgétaire, certains sont partisans dune action uniforme. Pour ma part, jai tendance à rechercher ce qui est le plus adapté à la situation de chacun. Nous ferons également un point détape sur les progrès à réaliser en matière de régulation financière, sur, entre autre, le renforcement des fonds propres des banques prévus par Bale 3 et le traitement du risque systémique, la rémunération des opérateurs de marché, le trading à haute fréquence ou la régulation de la finance parallèle. Par ailleurs, je réunirai demain les représentants du Partenariat de Deauville pour faire le point du plan daction décidé à Deauville en mai dernier par les chefs dÉtat ou de gouvernement concernant laide à apporter à la Tunisie, à lÉgypte, au Maroc et à la Jordanie.
Q - Quelle est lappréciation du G7 sur la crise économique ?
R - Nous avons un diagnostic partagé sur la situation économique. Le premier constat dévidence est que les dettes souveraines pèsent considérablement sur les choix économiques de chaque pays, ce qui interpelle les investisseurs et nourrit les rumeurs les plus folles. La dégradation de la dette américaine par une agence de notation a amplifié le phénomène. Au passage, il nest pas anodin que dans les attendus, cette agence ait invoqué un fait politique -les difficultés du Congrès à se mettre daccord - pour dégrader leur note.
Q - Comment ramener la confiance ?
R - On constate parfois une certaine lassitude des observateurs vis-à-vis des réunions du G7 ou du G20. On ne saurait pourtant minimiser les progrès considérables obtenus dans la concertation internationale dans ces instances. Comment pourrait on sen passer sans retomber dans les égoïsmes nationaux et le protectionnisme, avec pour résultat encore moins de croissance et moins demplois, et une plus grande instabilité financière ? Avec du recul, lampleur des décisions prises par ces instances est considérable.
Q - Faut-il prolonger linterdiction des ventes à découvert ?
R - Jai salué cette mesure qui a été particulièrement utile pour contrer les mouvements spéculatifs, souvent assortis de fausses rumeurs qui portent atteinte au bon fonctionnement des marchés. Nous travaillons avec le commissaire européen Michel Barnier à une régulation très ambitieuse des ventes à découvert et des CDS souverains (contrats dassurance sur les dettes des États). Jai bon espoir quelle soit définitivement adoptée avant la fin de lannée.
Q - Les Anglo-Saxons critiquent la capitalisation des banques européennes. Que répondez-vous ?
R - Les prétendues discordes américano-européennes sont infondées, en tout cas au niveau des gouvernements. Une porte-parole du Trésor américain a dailleurs rappelé mercredi toute sa confiance vis-à-vis des stress tests des banques européennes. Le débat lancé sur la base dun pré-rapport du FMI qui a fuité avant même dêtre définitif na, quant à lui, aucune pertinence. Dautres institutions comme la BCE ont un tout autre regard quant à la solidité des banques européennes. Par ailleurs, nous devons lutter fermement contre le sentiment et la doctrine qui consisteraient à considérer les dettes souveraines comme des actifs toxiques dont les établissements bancaires devraient à toute force se débarrasser ! Le niveau des CDS sur certains actifs européens, par exemple, révèlent des aberrations économiques profondes. Enfin, on ne peut que déplorer les rumeurs de marché qui visent des établissements particuliers, voire des États. Cela na pas de sens alors que le G20 a pris des mesures sans précédent pour augmenter le capital des banques, avec les nouveaux ratios de Bâle III que lEurope sapprête à transposer dans son ordre juridique.
Q - La Grèce peut-elle rembourser ses dettes ?
R - La Grèce sait ce quelle doit faire. La Troïka a adressé un message légitime au gouvernement grec pour quil mette en uvre des mesures précises quil sait engager à prendre. Si la Grèce veut bénéficier de la solidarité européenne, elle doit avoir conscience que cette aide est conditionnée à lapplication stricte du programme qui a été défini.
Q - Le FMI pourrait-il ne pas participer financièrement au second plan daide à la Grèce ?
R - LUnion européenne est dans une logique de partenariat avec le FMI. Chacun sait ce quil a à faire, et les premiers concernés sont les Grecs eux-mêmes. Le FMI est dans la Troïka. Bien évidement, la participation du Fonds constitue une condition essentielle pour les Européens.
Q - La France est le seul pays à avoir adopté laccord du 21 juillet. Nêtes vous pas agacés du peu dentrain de nos partenaires ?
R - Cet accord est la meilleure réponse que lEurope pouvait apporter pour sauver la Grèce et éviter la contagion, notamment en donnant an fonds européen de stabilité financière (FESF) tous les attributs dun fonds monétaire européen. Je me félicite que notre pays, sous limpulsion de Nicolas Sarkozy, ait été aux avant-postes pour le faire adopter et respecter ainsi la parole donnée. La France et lAllemagne ont une lourde responsabilité et seront au rendez-vous de leurs responsabilités. La décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe est dailleurs une très bonne nouvelle, car elle ouvre la voie à une ratification par le Bundestag. Cet accord, et tout cet accord, doit désormais être ratifié par lensemble des autres pays membres : il sagit dun élément décisif du rétablissement de la confiance des marchés financiers dans la zone euro. Jinvite tous les États qui doivent encore le faire voter à accélérer leur calendrier.
Q - Que pensez-vous de la Finlande, qui négocie des garanties en échange de sa participation ?
R - Je comprends que certains pays veuillent obtenir des aménagements techniques afin de satisfaire leur parlement. Le respect de la démocratie est fondamental. Mais ce processus ne doit pas transformer laccord du 21 juillet en une somme daddition de demandes de collatéral de la part de tel ou tel État. Il ne peut pas y avoir de discussions derrière le rideau une fois que celui-ci est tombé, car cela entraînerait la défiance des marchés. Une solidarité à deux vitesses est absolument inconcevable !
Q - La Banque de France annonce une activité quasiment atone au troisième trimestre, êtes-vous à laise avec votre prévision de croissance pour 2011 (à 1,75%) ?
R - Oui, même si nous sommes évidemment très dépendants de la conjoncture mondiale. Je pense surtout quil ne faut pas se laisser engluer dans le scepticisme qui nourrit la défiance. Nous sommes lucides sur la situation, le gouvernement met tout en uvre pour protéger une croissance convalescente.
Q - Entre austérité, fin des mesures de relance, arrivée de la présidentielle qui gèle les initiatives, le gouvernement est bloqué pour prendre des mesures stimulant léconomie. Comment peut-on rebondir ?
R - Tout simplement parce que la stratégie de ce gouvernement repose sur deux piliers : des économies qui remettent les finances publiques sur la bonne trajectoire, et une stratégie de croissance. Sur quoi repose-t-elle ? Dabord lÉtat providence qui active la solidarité avec les plus démunis ; ensuite un pouvoir dachat préservé qui soutient la consommation ; et enfin des investissements dans lavenir et linnovation qui créeront la croissance de demain. Nous sommes sur un chemin de crête, il faut mesurer chaque pas lun après lautre.
( )
Q - Dans le contexte dégradé de nos finances publiques, lidée des privatisations revient en force. Vous êtes contre. Pourquoi ?
R - Des cessions dactifs détenus par lÉtat ne sont pas à lagenda gouvernemental. Pour réduire les déficits, nous faisons des réformes de structures, pas des opérations financières ponctuelles. Je ne suis pas là pour brader les bijoux de famille.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 septembre 2011
R - Nous avons une préoccupation centrale qui est la croissance. Nous aurons une discussion de fond sur le ralentissement observé cet été dans le monde, et le débat sera dautant plus libre quil ny aura pas de communiqué final. Sagissant de la direction à prendre entre relance et consolidation budgétaire, certains sont partisans dune action uniforme. Pour ma part, jai tendance à rechercher ce qui est le plus adapté à la situation de chacun. Nous ferons également un point détape sur les progrès à réaliser en matière de régulation financière, sur, entre autre, le renforcement des fonds propres des banques prévus par Bale 3 et le traitement du risque systémique, la rémunération des opérateurs de marché, le trading à haute fréquence ou la régulation de la finance parallèle. Par ailleurs, je réunirai demain les représentants du Partenariat de Deauville pour faire le point du plan daction décidé à Deauville en mai dernier par les chefs dÉtat ou de gouvernement concernant laide à apporter à la Tunisie, à lÉgypte, au Maroc et à la Jordanie.
Q - Quelle est lappréciation du G7 sur la crise économique ?
R - Nous avons un diagnostic partagé sur la situation économique. Le premier constat dévidence est que les dettes souveraines pèsent considérablement sur les choix économiques de chaque pays, ce qui interpelle les investisseurs et nourrit les rumeurs les plus folles. La dégradation de la dette américaine par une agence de notation a amplifié le phénomène. Au passage, il nest pas anodin que dans les attendus, cette agence ait invoqué un fait politique -les difficultés du Congrès à se mettre daccord - pour dégrader leur note.
Q - Comment ramener la confiance ?
R - On constate parfois une certaine lassitude des observateurs vis-à-vis des réunions du G7 ou du G20. On ne saurait pourtant minimiser les progrès considérables obtenus dans la concertation internationale dans ces instances. Comment pourrait on sen passer sans retomber dans les égoïsmes nationaux et le protectionnisme, avec pour résultat encore moins de croissance et moins demplois, et une plus grande instabilité financière ? Avec du recul, lampleur des décisions prises par ces instances est considérable.
Q - Faut-il prolonger linterdiction des ventes à découvert ?
R - Jai salué cette mesure qui a été particulièrement utile pour contrer les mouvements spéculatifs, souvent assortis de fausses rumeurs qui portent atteinte au bon fonctionnement des marchés. Nous travaillons avec le commissaire européen Michel Barnier à une régulation très ambitieuse des ventes à découvert et des CDS souverains (contrats dassurance sur les dettes des États). Jai bon espoir quelle soit définitivement adoptée avant la fin de lannée.
Q - Les Anglo-Saxons critiquent la capitalisation des banques européennes. Que répondez-vous ?
R - Les prétendues discordes américano-européennes sont infondées, en tout cas au niveau des gouvernements. Une porte-parole du Trésor américain a dailleurs rappelé mercredi toute sa confiance vis-à-vis des stress tests des banques européennes. Le débat lancé sur la base dun pré-rapport du FMI qui a fuité avant même dêtre définitif na, quant à lui, aucune pertinence. Dautres institutions comme la BCE ont un tout autre regard quant à la solidité des banques européennes. Par ailleurs, nous devons lutter fermement contre le sentiment et la doctrine qui consisteraient à considérer les dettes souveraines comme des actifs toxiques dont les établissements bancaires devraient à toute force se débarrasser ! Le niveau des CDS sur certains actifs européens, par exemple, révèlent des aberrations économiques profondes. Enfin, on ne peut que déplorer les rumeurs de marché qui visent des établissements particuliers, voire des États. Cela na pas de sens alors que le G20 a pris des mesures sans précédent pour augmenter le capital des banques, avec les nouveaux ratios de Bâle III que lEurope sapprête à transposer dans son ordre juridique.
Q - La Grèce peut-elle rembourser ses dettes ?
R - La Grèce sait ce quelle doit faire. La Troïka a adressé un message légitime au gouvernement grec pour quil mette en uvre des mesures précises quil sait engager à prendre. Si la Grèce veut bénéficier de la solidarité européenne, elle doit avoir conscience que cette aide est conditionnée à lapplication stricte du programme qui a été défini.
Q - Le FMI pourrait-il ne pas participer financièrement au second plan daide à la Grèce ?
R - LUnion européenne est dans une logique de partenariat avec le FMI. Chacun sait ce quil a à faire, et les premiers concernés sont les Grecs eux-mêmes. Le FMI est dans la Troïka. Bien évidement, la participation du Fonds constitue une condition essentielle pour les Européens.
Q - La France est le seul pays à avoir adopté laccord du 21 juillet. Nêtes vous pas agacés du peu dentrain de nos partenaires ?
R - Cet accord est la meilleure réponse que lEurope pouvait apporter pour sauver la Grèce et éviter la contagion, notamment en donnant an fonds européen de stabilité financière (FESF) tous les attributs dun fonds monétaire européen. Je me félicite que notre pays, sous limpulsion de Nicolas Sarkozy, ait été aux avant-postes pour le faire adopter et respecter ainsi la parole donnée. La France et lAllemagne ont une lourde responsabilité et seront au rendez-vous de leurs responsabilités. La décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe est dailleurs une très bonne nouvelle, car elle ouvre la voie à une ratification par le Bundestag. Cet accord, et tout cet accord, doit désormais être ratifié par lensemble des autres pays membres : il sagit dun élément décisif du rétablissement de la confiance des marchés financiers dans la zone euro. Jinvite tous les États qui doivent encore le faire voter à accélérer leur calendrier.
Q - Que pensez-vous de la Finlande, qui négocie des garanties en échange de sa participation ?
R - Je comprends que certains pays veuillent obtenir des aménagements techniques afin de satisfaire leur parlement. Le respect de la démocratie est fondamental. Mais ce processus ne doit pas transformer laccord du 21 juillet en une somme daddition de demandes de collatéral de la part de tel ou tel État. Il ne peut pas y avoir de discussions derrière le rideau une fois que celui-ci est tombé, car cela entraînerait la défiance des marchés. Une solidarité à deux vitesses est absolument inconcevable !
Q - La Banque de France annonce une activité quasiment atone au troisième trimestre, êtes-vous à laise avec votre prévision de croissance pour 2011 (à 1,75%) ?
R - Oui, même si nous sommes évidemment très dépendants de la conjoncture mondiale. Je pense surtout quil ne faut pas se laisser engluer dans le scepticisme qui nourrit la défiance. Nous sommes lucides sur la situation, le gouvernement met tout en uvre pour protéger une croissance convalescente.
Q - Entre austérité, fin des mesures de relance, arrivée de la présidentielle qui gèle les initiatives, le gouvernement est bloqué pour prendre des mesures stimulant léconomie. Comment peut-on rebondir ?
R - Tout simplement parce que la stratégie de ce gouvernement repose sur deux piliers : des économies qui remettent les finances publiques sur la bonne trajectoire, et une stratégie de croissance. Sur quoi repose-t-elle ? Dabord lÉtat providence qui active la solidarité avec les plus démunis ; ensuite un pouvoir dachat préservé qui soutient la consommation ; et enfin des investissements dans lavenir et linnovation qui créeront la croissance de demain. Nous sommes sur un chemin de crête, il faut mesurer chaque pas lun après lautre.
( )
Q - Dans le contexte dégradé de nos finances publiques, lidée des privatisations revient en force. Vous êtes contre. Pourquoi ?
R - Des cessions dactifs détenus par lÉtat ne sont pas à lagenda gouvernemental. Pour réduire les déficits, nous faisons des réformes de structures, pas des opérations financières ponctuelles. Je ne suis pas là pour brader les bijoux de famille.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 septembre 2011