Déclaration de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, sur le plan d'action en faveur du spectacle vivant et le financement public des structures et de l'emploi dans ce secteur, Avignon le 8 juillet 2011.

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Circonstance : Présentation du plan d'action pour le spectacle vivant en Avignon le 8 juillet 2011

Texte intégral


« Je ne crois pas à une pièce ni à une mise en scène qui ne sont pas conçues avec le désir de présenter un peu plus que l’homme de chaque jour, un peu plus que ce que nos oreilles peuvent entendre, un peu plus que ce que nos yeux peuvent voir ».
Cette ambition et cette vision, qui figure dans la correspondance de Jacques Copeau, je la fais mienne, je la partage. Elle traduit le coeur même de ce que sont et de ce que devraient être les arts de la scène.
C’est pourquoi j’ai souhaité proposer un Plan d’action en faveur du spectacle vivant afin de montrer aux artistes, aux compagnies, aux professionnels la place qui est la leur dans l’action publique aujourd’hui. Le spectacle vivant constitue en effet l’un des piliers de l’action du ministère de la Culture et de la Communication. L’histoire même de ce ministère et l’histoire des politiques culturelles dans notre pays se sont construites en grande partie grâce à la pensée et à l’action de personnalités issues du théâtre : c’est d’abord Firmin Gémier, fondateur du théâtre national Populaire dans les années 20, c’est Jean Vilar, le père du Festival, l’homme du Théâtre national populaire qui invente Avignon, dont on fêtera le centenaire de la naissance en 2012, mais aussi Jeanne Laurent, après la seconde guerre mondiale, pionnière de ce que l’on appelle « la décentralisation théâtrale ».
Cette place éminente du spectacle vivant dans notre pays a dessiné un paysage original et foisonnant. Elle a suscité l’émergence d’artistes de premier plan, fait de la France un pays de référence, par la qualité de sa production chorégraphique, le prestige de ses metteurs en scène, de ses chefs d’orchestres ou solistes, par l’émergence de disciplines nouvelles telles que les arts de la rue ou le cirque contemporain, le renouveau de la marionnette, ses orchestres et opéra, ses festivals ou ses scènes de musiques actuelles.
Le spectacle vivant est parvenu à maintenir un haut niveau d’exigence artistique. Il continue à attirer des publics nombreux et diversifiés : les excellents chiffres de fréquentation nous le confirment.
Je veux féliciter les professionnels du secteur pour cette évolution positive.
Au cours des trois dernières saisons, nous avons en effet enregistré une progression significative : la fréquentation de l’ensemble des lieux de spectacle, publics et privés, a progressé de 10%, passant de 28,9 millions de spectateurs à 31,7 millions.
Une action continue et volontariste tant de l’Etat que des partenaires sociaux a été menée ces dernières années afin que le spectacle vivant soit reconnu comme un secteur économique et social à part entière. Cela s’est traduit par des avancées importantes : la négociation des conventions collectives, la professionnalisation de l’entrée dans les métiers, la mise en oeuvre d’un Accord cadre de développement de l’Emploi et des compétences (ADEC).
Le régime de l’intermittence a été préservé, vous le savez, avec la prorogation en mars dernier des annexes 8 et 10 de la convention UNEDIC jusqu’au 31 décembre 2013.
Néanmoins, chacun le sait ici, le secteur du spectacle vivant connaît depuis quelques années des difficultés structurelles. Il s’agit là d’une crise de croissance profitable pour l’ensemble du territoire national mais susceptible de créer des déséquilibres qui tiennent à plusieurs raisons :
- la stabilisation des financements publics qui pourrait menacer les marges artistiques des établissements et réduire les possibilités de développement pour les compagnies et les ensembles indépendants ;
- le manque de lisibilité des différentes interventions publiques du fait de superpositions parfois peu cohérentes ;
- les difficultés rencontrées pour diffuser les spectacles créés ;
- l’insuffisante professionnalisation du secteur qui est une source de précarité.
Ces déséquilibres appellent une réponse claire et efficace de l’Etat. Je m’y suis attaché depuis mon arrivée en juillet 2009 rue de Valois. Et le plan d’action s’inscrit dans cette ambition de refondation.
Je voudrais dans un premier temps poser quelques éléments de bilan de la politique que j’ai conduite depuis 2009 :
J’ai tout d’abord sanctuarisé le budget du spectacle vivant.
Je me suis battu pour préserver un budget qui était menacé.
J’ai bénéficié en 2009 de 15 millions d’euros de mesures nouvelles.
Ensuite, j’ai obtenu du Président de la République une sanctuarisation des crédits du spectacle vivant pour la période 2011-13. Cette sanctuarisation a permis de préserver les équilibres fondamentaux du secteur. J’ai également obtenu le dégel total du budget de la culture en 2010 et 2011.
Dans ce cadre, j’ai souhaité que mon ministère procède avec l’ensemble des DRAC à un rééquilibrage des moyens. Rapprochements, projets mutualisés, cela nous permettra de redéployer 6,2 millions d’euros entre 2011 et 2013 dans les régions les moins dotées : sur les 21 DRAC métropolitaines concernées, 12 régions obtiendront ainsi des moyens supplémentaires.
En ce qui concerne le budget 2012 3,5 millions de mesures nouvelles permettront d’alimenter le plan d’action que je vais vous présenter dans un instant.
J’ai entrepris depuis 2009 de faire évoluer l’organisation des labels et des réseaux du ministère :
J’ai ainsi pris en compte trois enjeux majeurs :
- Amplifier la présence des artistes au coeur des réseaux soutenus par mon Ministère, en prenant mieux en compte l’équilibre entre les disciplines (danse, musique, théâtre, arts de la rue, marionnettes et le cirque).
- Mieux produire et mieux diffuser les spectacles créés.
- Renforcer la lisibilité des interventions de l’Etat en approfondissant une concertation stratégique avec les collectivités territoriales.
Ces trois enjeux ont fait l’objet d’une réflexion collective menée par la Direction générale de la Création artistique et les DRAC avec les élus territoriaux et les professionnels. Elle nous a conduit à l’élaboration de textes importants : la circulaire, accompagnée de dix cahiers des missions et des charges, que j’ai signée et transmise aux préfets en septembre 2010. Des textes qui pour la première fois précisent les cahiers des charges et mission des établissements soutenus par mon ministère.
Ces textes ne sont pas de simples documents abstraits, éloignés des réalités artistiques, ils contiennent en réalité des infléchissements politiques importants dans la conduite de la politique du spectacle vivant et permettent de mieux répondre aux défis qui se posent dans un territoire de la création de plus en plus ouvert, marqué par la circulation des équipes et des oeuvres. Ces textes constituent une réponse forte à l’exigence de clarification des interventions du ministère, souvent accusé de « saupoudrer » ses moyens. Cet effort de lisibilité était attendu, il est maintenant entré dans les faits. Il permettra à l’avenir une politique du spectacle vivant plus cohérente et plus efficace.
Je souhaiterais souligner rapidement les principaux éléments qu’ils ont introduits :
- Concernant la méthode retenue pour leur élaboration, j’ai souhaité la concertation la plus large avec les élus et les professionnels,
- Ces textes constituent, pour la première fois dans l’histoire du ministère, un corpus d’ensemble sur les missions des établissements labellisés. Ils précisent notamment les exigences en matière de coproduction et de partenariat, en matière de diffusion et de démocratisation culturelle et rappelle les missions pluridisciplinaires des scènes nationales.
Ces textes confortent les moyens octroyés aux structures labellisées : avec un taux d’intervention de 50% des financements publics pour les centres dramatiques nationaux (CDN), avec un niveau d’intervention plancher du ministère de 500 000 pour les scènes nationales € et une perspective identique pour les centres chorégraphiques nationaux (CCN).
Ils fixent les procédures de recrutement des directeurs. Jusqu’à présent les recrutements n’avaient pas fait l’objet de texte de référence mais s’appuyaient sur des usages.
Ces textes ont créé 2 nouveaux labels. J’y vois là un signe de confiance et de reconnaissance à l’égard des arts de la scène et de leur capacité d’innovation et de création :
- Les centres nationaux des arts de la rue (CNAR), qui ont donné lieu à la labellisation de 8 structures en 2010, 1 autre étant en cours de labellisation.
- Les pôles nationaux des arts du cirque (PNAC), qui ont permis de labelliser 10 établissements en 2010, 2 autres seront labellisés avant la fin de l’année.
Il s’agit de décisions politiques fortes qui accordent une reconnaissance institutionnelle à deux disciplines innovantes. Ces textes instituent également le réseau des Centres de Développement Chorégraphique (CDC) et leur cahier des charges. Ces établissements remplissent un rôle majeur dans la diffusion de la danse, de la culture chorégraphique et accomplissent un travail d’action culturelle remarquable au plus près des territoires.
Nul désengagement, nul manque d’ambition en matière artistique, mais bien l’idée d’une refondation d’ensemble de notre dispositif en matière de spectacle vivant pour le rendre plus visible et plus attractif.
J’ai par ailleurs entrepris une réflexion de fond avec les élus et les professionnels sur les thèmes suivants :
- l’action internationale,
- la collaboration entre théâtre privé et théâtre public,
- l’évolution de la politique en faveur des compagnies et ensembles indépendants.
Ces trois thèmes ont fait l’objet de groupes de travail pilotés par le Direction Générale de la Création Artistique (DGCA) de mon ministère.
Cette réflexion collective a permis de déboucher sur des pistes d’action concrètes qui ont alimenté le plan d’action que je vais vous exposer.
J’ai également renforcé le dialogue avec les collectivités territoriales
Les collectivités territoriales sont un partenaire essentiel du ministère dans le domaine du spectacle vivant. Elles financent à près de 70% les activités des institutions relevant de nos crédits déconcentrés. J’ai souhaité que les Entretiens de Valois soient déclinés à l’échelon territorial, afin d’aboutir à un diagnostic partagé avec les élus. Je me suis attaché à faire du Conseil des Collectivités territoriales pour le développement de la Culture (CCTDC), que je préside, une véritable instance de dialogue et de concertation. Ses dernières séances ont été particulièrement denses et fructueuses. J’ai également relancé les conventions entre mon ministère et les collectivités. J’y reviendrai.
Beaucoup a été dit et écrit sur les nominations. Des « torrents de papier », des invectives parfois, attirant l’attention sur quelques cas isolés. Or depuis mon arrivée rue de Valois, j’ai procédé à 40 nominations dans le secteur du spectacle vivant. Dans toutes les situations, je me suis attaché à prendre en considération l’intérêt public – la fameuse res publica - dont je suis le garant. J’ai également veillé à favoriser le pluralisme esthétique, l’équilibre entre les disciplines. J’ai aussi fait en sorte de renforcer la mixité entre les générations en faisant accéder à la direction de centres dramatiques et chorégraphiques Richard Brunel au centre dramatique national de Valence, Arnaud Meunier à Saint-Etienne, Mathieu Bauer à Montreuil, Joanny Bert tout récemment à Montluçon, Thomas Lebrun et Joan Leighton au centre chorégraphique national de Tours et à Belfort.
Même si je viens une majorité d’hommes, je tiens à préciser que je suis extrêmement attentif à ce que dans le domaine culturel, et dans celui de la création tout particulièrement, on développe et valorise la présence des créatrices dans la direction et la gouvernance des institutions culturelles ainsi que la présence de leurs oeuvres dans les programmations et les répertoires. Je ferai prochainement des propositions sur ces sujets, dans le cadre du plan interministériel pour l’égalité hommes femmes en préparation.
J’ai souhaité faire évoluer certaines structures nationales :
- J’ai décidé un rapprochement du Théâtre national de Chaillot et du Centre National de la Danse afin de les rendre complémentaires, notamment dans le domaine de la production et de l’action culturelle, afin d’améliorer le service rendu aux professionnels et aux publics.
- J’ai souhaité que Théâtre Ouvert, dont nous fêtons les 40 ans ici même, devienne un Centre national des Dramaturgies contemporaines, pour reconnaître la spécificité de ses missions et le rôle unique que cet établissement joue dans le paysage national en faveur des auteurs.
J’ai contribué avec résolution à la relance du chantier de la Philharmonie.
Je me suis fortement engagé pour que le Président de la République et le Maire de Paris prennent conjointement la décision de relancer une opération qui était alors arrêtée. C’est à mon sens un signal fort adressé au monde musical, en France mais aussi en Europe et dans le monde, qui manifeste l’ambition de l’Etat dans le domaine de la musique, et de l’éducation musicale, pour laquelle la Philharmonie constituera un Centre de ressources au plan national.
J’ai engagé une politique innovante et ambitieuse en faveur de l’outre-mer.
Le rapport que j’ai commandé à Michel Collardelle et mes nombreux déplacements dans ces territoires m’ont conduit à prendre la mesure de leurs richesses artistiques et culturelles, mais aussi du retard en matière d’organisation professionnelle et d’échanges avec la métropole. Plusieurs projets de labellisation sont à l’étude, parmi lesquels une Scène des musiques actuelles (SMAC) et un Centre de Développement Chorégraphique en Guyane, une scène nationale à la Réunion, une SMAC et une scène nationale bipolaire à la Guadeloupe, des conventionnements pour des compagnies dans l’ensemble des territoires, enfin un nouveau conservatoire à la Martinique.
Vous le voyez, au cours de ces deux années, je me suis attaché à réformer de façon la plus pragmatique et la plus efficace l’ensemble du système public de soutien au spectacle vivant, en m’appuyant sur un budget stabilisé, en approfondissant également la réflexion conjointe avec les collectivités territoriales.
C’est à partir de ce constat et fort de ce bilan que j’ai souhaité mieux définir les orientations générales de l’Etat, mieux affirmer ses valeurs fondamentales pour donner une nouvelle impulsion à l’organisation générale de la politique du spectacle vivant. C’est le sens de ce plan d’action organisé autour de dix mesures dont je vais vous présenter les principales priorités.
Il comporte quatre objectifs fondamentaux :
1 - Renforcer la place des artistes et de la création dans les réseaux soutenus par le ministère, par un soutien accru à la création, à l’émergence, à l’innovation et au secteur indépendant,
2 - Poursuivre la structuration de l’emploi,
3- Accroître le soutien à l’émergence et au renouvellement artistique,
4 - Développer l’action européenne et internationale, tant il est vrai que l’offre de spectacles tend à s’ouvrir à de larges horizons, au moins en Europe, tant il est vrai qu’il s’agit là d’un formidable outil de croissance et de développement pour les compagnies et les équipes artistiques.
Le dossier de presse qui vous sera remis détaille les principales dispositions des dix mesures et les financements qui s’y rapportent.
Pour l’exercice 2012, j’ai obtenu 3,5 M de mesures € nouvelles. L’ensemble du plan mobilisera 12 M€ pour la période 2011-13, en plus des 6,2 millions d’euros redéployés par les DRAC dont j’ai parlé qui y contribueront.
Enfin, les deux missions pour des financements extrabudgétaires que j’ai lancées récemment - l’une sur la filière musicale, l’autre sur le spectacle vivant - seront de nature à amplifier les principales priorités de ce plan.
1 – Le premier objectif consiste à renforcer la place de la création au sein de la politique du spectacle vivant.
Ce plan prévoit des moyens nouveaux pour le secteur indépendant, pour les ensembles musicaux, les compagnies chorégraphiques et théâtrales. 2,5 millions seront mobilisés sur 2011-13 et affectés aux DRAC. J’entends favoriser l’appui de bureaux de production aux projets artistiques afin de ne pas créer de coûts de structure inutiles.
Je souhaite également confier rapidement à l’Office National de Diffusion Artistique (ONDA) une étude sur les conditions de production et de diffusion du secteur indépendant. Nous avons besoin d’une analyse approfondie afin d’ajuster la politique du ministère en fonction des évolutions constatées.
Un fonds de soutien à l’émergence et l’innovation sera créé dès 2012 pour soutenir des projets qui ne trouvent pas leurs places dans les dispositifs existants, en raison de leur caractère singulier ou innovant. Cette mesure se traduira par la mise en place de nouveaux crédits à hauteur de 1 millions d’euros et fonctionnera sur la base d’un appel à projets annuel.
Un soutien accru aux écritures du spectacle vivant, telles que les commandes musicales, dramatiques et chorégraphiques, sera mis en oeuvre. La place des auteurs et des compositeurs au sein des institutions sera amplifiée.
Les arts numériques occupent une place croissante dans l’évolution du langage de la création, des écritures et de la diffusion du spectacle. Je souhaite que cette place soit mieux prise en compte. La Chartreuse de Villeneuve-Lès-Avignon, centre national des écritures du spectacle, se verra confier un rôle de tête de réseau pour la création numérique, en lien avec les centres dramatiques nationaux (CDN) qui ont placé cette dimension au coeur de leurs projets artistiques.
2 – Le deuxième objectif que je me suis fixé est de poursuivre la structuration de l’emploi
L’Etat et les partenaire sociaux ont beaucoup oeuvré ensemble ces dernières années pour structurer l’emploi dans ce secteur et notamment pour accompagner les parcours professionnels des artistes : après la convention collective du spectacle vivant public, la négociation de la convention collective du théâtre privé devrait aboutir prochainement, l’entrée dans les métiers se professionnalise, grâce à l’action de la Commission paritaire nationale Emploi-Formation, grâce à la création de diplômes, à la réorganisation en cours des établissements d’enseignement supérieur et au développement des formations en alternance.
Il importe à mon sens de donner une nouvelle impulsion pour stabiliser et conforter les conditions dans lesquelles les artistes et notamment les comédiens et les danseurs exercent leurs activités. C’est pourquoi je souhaite soutenir la création de troupes permanentes au sein des Centres dramatiques nationaux (CDN) et Centres chorégraphiques nationaux (CCN). Cette mesure, qui s’adressera aux directeurs qui le souhaitent, sera dotée d’1 million d’euros. Elle aura dans un premier temps un caractère expérimental. Les projets présentés devront valoriser les atouts qui seront développés à partir de la constitution d’une troupe, que ce soit pour la constitution d’un répertoire, pour la diffusion et les reprises ou dans le domaine de l’action culturelle. Dans le même temps, les dispositifs d’aide au compagnonnage seront développés.
3 – Le troisième objectif concerne la diffusion des spectacles et la présence du spectacle vivant au coeur des territoires.
Le monde du cirque et des arts de la rue sera mieux accompagné : aux côtés du cirque traditionnel, auquel il convient de prêter une attention particulière, notre pays s’illustre par la vitalité du cirque de création. Les arts de la rue sont désormais ancrés dans notre paysage et sont porteurs d’un renouvellement des langages et des vocabulaires artistiques. L’un et l’autre sont par excellence des arts de l’itinérance. Il convenait de leur donner une reconnaissance par l’instauration de deux nouveaux labels, celui des pôles nationaux des arts du cirque et celui des Centres nationaux des arts de la rue, dont j’ai parlé précédemment. Leurs missions seront confortées et feront l’objet de moyens nouveaux à hauteur de 800 000 €.
J’ai apporté un soutien accru aux réseaux de la danse : j’ai souhaité instituer par circulaire le réseau des Centre de développement chorégraphique, qui présente chaque année environ 250 spectacles de danse et qui contribue de manière essentielle à la diffusion de la culture chorégraphique sur l’ensemble du territoire. Sa reconnaissance comme réseau aidé par le ministère s’accompagnera de 400 000 € de mesures nouvelles.
J’ai annoncé au Festival de Bourges un plan en faveur des Scènes de Musiques Actuelles (SMAC) : ces établissements ont prouvé depuis leur création dans les années 90 leur rôle essentiel dans la promotion du pluralisme musical, dans leur soutien aux nouveaux talents et dans leur remarquable travail d’action culturelle. Les SMAC constituent un des outils dont nous disposons pour faire face à la concentration dans le secteur de la musique et pour faire vivre une authentique diversité culturelle.
Ce plan SMAC, qui s’étalera sur cinq ans, bénéficiera de 2,4 M€ d’ici à 2013. Il permettra d’atteindre le nombre de 100 SMAC à l’horizon 2015 et de faire accéder au financement-plancher de 75 000 € ceux de ces établissements qui n’en bénéficient pas encore. J’ai souhaité conforter le réseau des 70 scènes nationales. Leur rôle en faveur de la diffusion et de la sensibilisation des populations est, chacun le sait, essentiel.
Ainsi, j’ai décidé dès 2010 de relever le plancher de financement de mon ministère qui s’élèvera désormais à 500 000 . € 17 scènes nationales seront mise à niveau dans les 3 ans qui viennent. J’ai pour ce faire mobilisé une mesure nouvelle de 2,6 M€ pour 2011-13.
J’ai décidé de créer 4 nouvelles scènes nationales, en favorisant des structures multipolaires, travaillant au plus près des publics :
- trois scènes nationales multipolaires : Toulon (en rapprochant Châteauvallon et le Théâtre Liberté), la scène nationale de l’Oise (rapprochant Compiègne et Beauvais puis, à terme, Creil) et les Scènes du Jura.
- L’archipel de Perpignan et son beau projet méditerranéen.
Les scènes nationales sont aujourd’hui invitées à élargir leur action avec les acteurs de l’action culturelle présents sur leur territoire. En étroite concertation avec les collectivités territoriale, j’ai procédé à des nominations de directeurs, afin de renforcer la mixité disciplinaire au sein du réseau. Nous avons donc de plus en plus de scènes nationales dirigés par des personnalités issues du monde de la musique ou de la danse et ce dans la perspective de rééquilibrage des disciplines que j’ai soulignée.
Je souhaite que soient développés des programmes régionaux pilotés par les DRAC. Ils n’ont pas vocation à créer un label supplémentaire, mais permettront aux communes périurbaines et rurales de s’intégrer dans un réseau régional. Tel est le sens de la réflexion que nous menons sur les scènes conventionnées, les théâtres de villes et de la réforme en cours des critères d’intervention qui guident le travail des comités d’experts. Je porte d’ailleurs un regard attentif sur l’expérience des « scènes de territoires » conduite en Bretagne. C’est peut être un exemple à méditer, un modèle à expertiser dans la mesure où il assure une présence artistique pérenne, où il permet de développer un réseau de diffusion efficace, où il favorise l’émergence de partenariats pour les projets d’éducation artistique.
Enfin, j’ai demandé aux établissements publics nationaux d’amplifier leur action territoriale et de développer des partenariats avec les collectivités territoriales, que ce soit le Centre National de la Danse, le Centre national des Variétés, ou la Cité de la Musique. Ces nouveaux partenariats permettront de mieux prendre en compte les besoins en région et de développer de nouveaux projets aussi bien en matière de patrimoine du spectacle vivant que d’action culturelle.
4 – Le quatrième objectif concerne la présence européenne et internationale.
Les spectacles français sont bien présents à l’étranger mais ils doivent être mieux diffusés, comme nous l’a montré une récente étude de l’Office National de Diffusion Artistique (ONDA). Il est nécessaire d’amplifier cette tendance encourageante. Je vais ainsi accroître le nombre de bureaux spécialisés à l’étranger, sur le modèle des bureaux de Berlin et de Londres, qui ont montré leur efficacité.
Il s’agit de créer des réseaux de diffusion et de coproduction internationaux à même d’accompagner les structures dans les projets qu’elles présentent à la Commission européenne. Ce dispositif complètera utilement l’action du nouvel Institut Français.
Six nouveaux bureaux seront ainsi créés dans les trois ans qui viennent, en lien avec mon collègue Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères et européennes. Mon ministère apportera 550 000 € complémentaires pour renforcer ce dispositif.
J’ai par ailleurs décidé d’encourager la création de pôles européens de production et de diffusion sur le territoire français.
Il ne s’agit pas d’un nouveau label. Ces pôles fourniront un cadre souple tout au long de la durée d’exploitation d’un projet, pour les institutions culturelles désirant se regrouper afin de mutualiser leurs moyens de production et de gestion. Ce type de structure permettra d’encourager les coproductions en Europe : elles sont déjà importantes et devraient à terme jouer un rôle de plus en plus important dans l’économie du spectacle vivant. Un dialogue fructueux s’est amorcé avec les collectivités territoriales ; une étude a été lancée avec elles. Une enveloppe de 400 000 euros est réservée pour la préfiguration des premiers projets retenus.
Ce dispositif sera complété par un fond d’aide à la reprise en vue de soutenir la diffusion à l’étranger. C’est là l’une des pistes qui sera explorée par la mission sur le financement du spectacle vivant.
La mise en oeuvre de ce plan interviendra, je l’ai déjà souligné, dans le cadre d’une concertation approfondie avec les collectivités territoriales, déjà engagée. Les collectivités sont un acteur essentiel de la vie culturelle de notre pays et un moteur pour le développement culturel des territoires.
A l’échelle d’un territoire, nous devons déterminer ensemble les enjeux et les moyens. A l’échelle d’un territoire, nous devons agir ensemble de manière plus concertée et plus coordonnée sur l’ensemble des domaines du spectacle vivant – création, enseignements artistiques, diffusion. Ces projets communs seront désormais l’objet de conventions triennales. La première a été signée en mai dernier avec les collectivités de la région Languedoc-Roussillon et plusieurs sont actuellement en préparation.
État et Collectivités territoriales, nous sommes tous aujourd’hui confrontés à un contexte budgétaire contraint. Pour autant, cette pause dans la croissance des moyens ne s’est nullement traduit par une réduction des ambitions.
Je vous ai présenté mon projet et mon ambition pour le spectacle vivant.
Sa formidable vitalité s’exprime tant par l’engagement des artistes que par le développement des publics : je veux l’accompagner, je veux l’appuyer, je veux la renforcer. Elle est une chance pour la vie artistique et économique de notre pays, elle est une chance pour la vie démocratique, elle est une chance enfin pour affronter le monde, parfois indéchiffrable et complexe, du XXIe siècle. Pour comprendre ce monde avec les yeux de l’artiste, avec la puissance rayonnante et la liberté indomptable de celui qui se promène sur « la crête du monde », bien loin du bruissement quotidien, bien loin des simulacres et des images standardisées qui nous assaillent chaque jour. Ce regard est plus que jamais précieux, ce regard est plus que jamais indispensable. Jacques Copeau (1879-1949), homme de théâtre, homme dédié à son art jusqu’au moindre de ses souffles, homme qui invitait à inventer de « nouvelles frontières » et à refonder en profondeur le grand vaisseau du théâtre, ne disait pas autre chose : « A la campagne ! A la campagne ! Oui à la campagne, face à un vrai public, ouvert, généreux ! Nos idées vont s’éclaircir au grand soleil ».
C’est dans cet esprit d’ouverture, d’innovation et de proposition que j’entends agir dans les mois qui viennent : au service des artistes et des structures qui les accompagnent, au service de tous les publics et de ce bonheur qui nous envahit, quelle que soit notre condition, quel que soit notre imaginaire, lorsque la lumière s’éteint et que la scène s’ouvre devant nos yeux, riche de surprises et pleine d’espérances. Car c’est tout l’humain qui se révèle dans l’expérience de la scène, dans ce miroir, qui est aussi un lieu de vie, dans ce rassemblement ponctuel de femmes et d’hommes qui est parfois une confrontation, parfois une communion, mais toujours un échange. Voilà ce que je souhaitais vous dire. Je vous remercie de votre attention et me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.
Source http://www.culture.gouv.fr, le 29 juillet 2011