Entretien de M. Jean Leonetti, ministre des affaires européennes, dans le journal serbe "Politika" du 7 octobre 2011, sur la perspective d'une adhésion de la Serbie à l'Union européenne.

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Média : Politika

Texte intégral

Q - Vous venez en Serbie en tant que ministre des Affaires européennes, pouvez vous faire un pronostic ou établir un diagnostic sur la date éventuelle de l’entrée de la Serbie dans l’Union européenne ?
R - La Serbie sera membre à part entière de l’Union européenne, c’est une certitude. La question ne se pose même pas. Mais les questions de date comptent bien moins que la qualité du processus. Le calendrier dépend avant tout de la capacité de votre pays à remplir les critères que chaque candidat à l’entrée dans l’Union européenne doit respecter afin d’être prêt à affronter les défis de l’adhésion : un ensemble de normes juridiques, économiques et politiques, à mettre en œuvre pleinement. Ce processus est long mais nécessaire. Vous avez déjà accompli des efforts très conséquents sur la voie européenne Il reste de nombreux efforts à faire, notamment en termes de coopération régionale et plus particulièrement s’agissant de vos relations avec le Kosovo. À cet égard, une reprise du dialogue sous l’égide de l’Union européenne avec Pristina, l’obtention de premiers résultats concrets dans ce cadre seront un élément essentiel d’appréciation des progrès réalisés dans ce domaine.
En effet, à chaque étape du processus de rapprochement européen de la Serbie, il reviendra aux 27 États membres de décider, collectivement, le passage à l’étape suivante. Vous devez nous aider à vous aider : quelles que soient les décisions prises ou non cet automne, la France restera à vos côtés pour vous aider à avancer sur cette voie.
Q - Les jeunes de ce pays qui ont grandi dans l’isolement et sous les sanctions, ont la frustration d’avoir été privés. Il s’agit peut-être d’un malentendu, mais ici, les gens croient qu’à chaque fois de nouvelles conditions sont retrouvées et posées à la Serbie sur son chemin vers l’Union européenne ?
R - Je comprends l’impatience des jeunes Serbes à pouvoir profiter pleinement de tous les avantages qu’offre l’appartenance à l’Union européenne. N’oublions pas pour autant que l’intégration à l’Union européenne est un processus long et que la jeune génération bénéficie déjà d’un certain nombre d’avantages procurés par la participation de la Serbie à des programmes européens, comme Erasmus destiné aux étudiants, ou par la décision de l’Union européenne de libéraliser le régime des visas de court séjour. Tout comme dans les actuels États membres, il est important de bien communiquer sur l’Europe vis-à-vis de la population. C’est la responsabilité du gouvernement d’être pédagogue et de souligner d’ores et déjà les apports de l’intégration européenne et d’expliquer qu’entrer dans l’Union européenne est un processus complexe qui crée, non seulement des droits mais aussi des responsabilités pour le pays candidat.
Q - La Serbie doit-elle répondre à des conditions qui n’étaient pas mises aux autres pays candidats ?
R - Dans le processus de l’intégration européenne, il faut respecter des régler et accepter des compromis. De ce point de vue-là, la Serbie est soumise au même traitement que ses voisins.
Q - Que va-t-il se passer pour la Serbie le 12 octobre et en décembre ?
R - Le 12 octobre, la Commission européenne va rendre ses rapports de progrès sur l’état d’avancement des pays sur la voie de l’intégration. Il s’agit de rapports annuels importants qui donneront une bonne vue d’ensemble sur les progrès qui ont été réalisés par chaque pays, y compris par la Serbie. Sur la base de ce document et de tout autre progrès que la Serbie pourra enregistrer d’ici-là, le Conseil des chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne décidera en décembre des éventuelles prochaines étapes s’agissant notamment de la Serbie. L’Union européenne ne dresse évidemment pas de barricades sur la voie de l’intégration européenne de la Serbie mais accompagne le processus de transformation et de préparation à l’adhésion en précisant ce qui est attendu et en assistant en proposant son assistance dans les réformes. Elle dispose pour cette aide d’un instrument ad hoc, l’instrument d’aide à la pré-adhésion (IPA) doté d’un montant de 1,3 milliards d’euros pour la Serbie pour la période 2007-2013. Ceci est une somme extrêmement importante qui témoigne de l’effort de l’Union européenne et des citoyens européens en direction de votre pays. La balle est dans votre camp.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 octobre 2011