Extraits d'un entretien de M. Jean Leonetti, ministre des affaires européennes, avec Europe 1 le 4 novembre 2011, sur la situation de la Zone euro.

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Média : Europe 1

Texte intégral


Q - Jean Leonetti, vous êtes ministre des Affaires européennes, pouvez-vous nous dire s’il y aura un référendum en Grèce, le 4 décembre ?
R - Je crois qu’il faut le demander aux Grecs.
Q - D’autre part, pensez-vous que Georges Papandréou sera toujours Premier ministre ce soir ?
R - S’agissant de cette question, seul le Parlement grec est en mesure d’y répondre.
Q - Souhaitez-vous que M. Papandréou soit toujours Premier ministre ce soir ?
R - La situation évolue si rapidement et si souvent en Grèce sur la conduite à tenir, qu’il vaut mieux s’en tenir à ce que fait l’Europe. L’Europe a une attitude stable, le président de la République et Angela Merkel l’ont rappelé.
Il y a un plan européen, c’est le seul plan possible pour sauver la Grèce qui a une dette abyssale. Les européens souhaitent tous que la Grèce demeure dans la zone euro.
Il appartient aux Grecs de prendre leurs responsabilités. J’ai entendu que M. Papandréou, avec beaucoup de sagesse, vient de dire que la seule façon de rester dans l’euro, c’est de mettre en œuvre le plan européen.
Q - Diriez-vous que M. Papandréou est à la hauteur des évènements ?
R - Il ne m’appartient pas de porter un jugement sur la capacité de M. Papandréou à faire face à la situation…
Q - Vous êtes ministre des Affaires européennes, vous suivez ce dossier…
R - Parce que je suis ministre français des Affaires européennes, je considère que les problèmes français doivent être réglés en France et que les problèmes grecs doivent être réglés en Grèce.
En revanche, je le redis à la Grèce, à M. Papandréou, comme l’a d’ailleurs déjà fait le président de la République, qu’à un moment donné il faut prendre ses responsabilités et je crois que M. Papandréou les a prises et qu’il a bien compris que toute renégociation du plan du plan est impossible, qu’il s’agit là du seul plan pour sauver la Grèce de la dette, et lui permettre ainsi de rester dans la zone euro.
Q - Jean Leonetti, la situation politique en Grèce vous parait-elle claire ?
R - La position européenne est claire, c’est ce qui est important. Dix-sept chefs d’État et de gouvernement ont décidé un plan de sauvetage de la Grèce pour un montant de 230 milliards d’euros. Il appartient désormais aux Grecs qui vivent dans une démocratie de se déterminer : soit ils adoptent le plan européen et la Grèce pourra se maintenir dans la zone l’euro, soit ils le rejettent et la Grèce s’en trouvera de fait exclue.
Q - Qui dirige la Grèce aujourd’hui ? Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ?
R - Je présenterais différemment cette interrogation, en demandant «qui dirige l’Europe, qui a le leadership en Europe ?», et je répondrais que c’est indubitablement Nicolas Sarkozy et Angela Merkel.
Q - Vous avez créé la surprise, hier matin, en affirmant que l’on peut se passer de la Grèce dans la zone euro. Mais le problème est que la Commission européenne a affirmé hier le contraire !
R - Il ne me semble pas que ce soit là le problème. Il s’agit de savoir si la zone euro disparaîtrait au cas où la Grèce sortirait de la zone euro. Je réitère mes propos antérieurs, à savoir que la zone euro ne disparaîtrait pas en cas de départ de la Grèce.
Q - La Commission européenne affirme qu’un tel départ est de toute façon inenvisageable. Elle précise même : pas de sortie de la zone euro, sans sortie complète de l’Union européenne. Cela veut-il dire que pour la Grèce, quitter la zone euro, c’est pour elle aussi sortir de l’Union européenne ?
R - C’est tout à fait ce que j’ai dit. Pour la Grèce, refuser ce plan, c’est de facto quitter la zone euro et par conséquent l’Union européenne.
Q - Cette possibilité est donc envisagée à l’Élysée, au gouvernement, au ministère des Affaires étrangères et européennes ?
R - Nous avons demandé aux Grecs de prendre leurs responsabilités et ils vont les prendre. Ce qui est à craindre quand on entend dire que la Grèce envisage de sortir de l’euro et de l’Union européenne, c’est l’effet de contamination possible à l’Italie, puis à l’Espagne.
Pour éviter cette issue nous avons aussi mis en place des pare-feux, notamment en renforçant le Fonds européen de Stabilité financière en en portant le plafond à 1 000 milliards d’euros.
Mais nous avons aussi demandé aux banques de se recapitaliser. Je dis donc simplement que si la Grèce sort de la zone euro…
Q - Mais est-ce que vous l’envisagez ?
R - Cette issue est envisagée parce qu’eux-mêmes l’envisagent. Le cas échéant l’Europe et l’euro resteraient stables.
Q - Jean Leonetti, pourquoi n’avoir pas envisagé plus tôt cette solution, puisque comme vous l’affirmez, la zone euro resterait stable ? Nous aurions peut-être évité une crise interminable…
R - Il n’est pas souhaitable que la Grèce sorte de la zone euro. Simplement, si la Grèce envisageait d’en sortir - ce n’est plus le cas - nous étions obligé de réfléchir aux conséquences. Cette issue a donc été envisagée à deux reprises. Elle a été envisagée sur le plan financier, je viens de vous l’expliquer en vous précisant que la sortie de la Grèce de la zone euro ne déstabiliserait pas la zone euro…
Q - À très court terme…
R - Permettez-moi de compléter mon propos! La Grèce nous a laissé entendre qu’elle pourrait peut-être sortir de la zone euro. Ce n’est pas l’Union européenne qui l’affirme mais la Grèce, même si la sortie de la Grèce de la zone euro représentera un coût exorbitant pour les Grecs.
Q - Jean Leonetti, vous venez de dire que cette issue ne déstabiliserait pas la zone euro. Comment pouvez-vous en avoir la certitude ?
R - Tout simplement parce que nous venons de voter un plan qui restructure la dette grecque, qui augmente ce que nous pouvons appeler le Fonds monétaire européen, et qui procède enfin à une recapitalisation des banques, éliminant par conséquent l’effet de contagion du problème grec à d’autres pays…
Q - L’Espagne, l’Italie…
R - Nous avons mis en place des pare-feux, et nous détenons donc les éléments qui permettent d’éviter cette contagion.
Q - Pas de risque de défiance généralisée, de crise européenne ?
R - Je souhaite que la Grèce reste dans la zone euro ainsi que dans l’Union européenne, la Grèce sera ainsi sauvée, tout comme l’Irlande d’ailleurs l’a été, parce que cette dernière a tout simplement reçu le même soutien, et observe la même discipline que celle prévue par le plan européen pour la Grèce.
Aujourd’hui, l’Irlande reprend pied, dans quelques temps, la Grèce reprendra aussi pied, grâce à l’aide des pays membres de la zone euro, grâce à l’aide de l’Union européenne. La zone euro et l’Union européenne s’en trouveront ainsi stabilisées.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 novembre 2011