Entretien de M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants, dans "Sud Ouest" du 10 novembre 2011, sur l'intervention militaire en Libye, le retrait graduel des troupes françaises d'Afghanistan et sur l'actualisation du Livre blanc de la défense.

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Média : Sud Ouest

Texte intégral

Q - Vous venez aujourd’hui à Mont-de-Marsan pour évoquer l’intervention militaire en Libye. Quel bilan pouvez-vous dresser de l’opération Harmattan ?
R - Les opérations en Libye démontrent que nous bénéficions d’une armée bien équipée, bien entraînée et dotée d’une doctrine d’emploi éprouvée et claire. Nos militaires, que j’ai visités plusieurs fois, ont été formidables et très professionnels. Notre intervention de la première heure en soutien au CNT va permettre demain de faire émerger un régime légitime, respectueux des droits fondamentaux de sa population. Je retiens également que la pleine réintégration de la France dans la structure militaire intégrée de l’Otan nous a permis de peser sur la conduite des opérations.
Q - D’un point de vue militaire, quels enseignements en retirez-vous ?
R - Force est de constater que nous avons atteint nos objectifs rapidement, sans troupes au sol, sans déplorer de morts, et pratiquement sans dommages collatéraux. Ce bilan est exemplaire. Notre intervention permet en outre à la France de valider un certain nombre de choix capacitaires et doctrinaux.
La pertinence d’un avion polyvalent, le Rafale, l’aptitude des hélicoptères de l’armée de terre, et particulièrement le Tigre, à s’engager à partir d’un bâtiment à la mer, comptent parmi les nombreux enseignements que les armées tirent de cette opération.
Q - Les hommes et les matériels ont été très sollicités. Quelles vont être les conséquences de cet engagement ?
R - Ni les hommes ni les équipements n’ont réellement constitué de limites à notre engagement. En revanche, il est certain que nous abordons maintenant une phase de régénération de nos forces, au cours de laquelle les unités vont devoir fournir un effort supplémentaire de formation des jeunes pilotes et d’entraînement des équipages. L’engagement en Libye ne représente en effet que l’un des types d’engagement possibles. Il peut y en avoir d’autres, dans des contextes différents, et il importe de s’y préparer. Par ailleurs, nous avons tiré des opérations un certain nombre de leçons, en termes d’entraînement et d’équipement et nous allons chercher à en tirer profit.
Q - À combien estimez-vous le surcoût de cette opération et comment va-t-il être pris en charge ?
R - Le surcoût de l’opération Harmattan est évalué à ce jour à 350 millions d’euros. Il sera couvert intégralement par la réserve de précaution interministérielle et finalisé dans le cadre du collectif de fin d’année.
Q - Les militaires français ont commencé à quitter l’Afghanistan. L’objectif annoncé par Nicolas Sarkozy sera-t-il atteint en 2012 ?
R - En concertation avec nos alliés, le président de la République a annoncé le retour de 1.000 soldats d’ici la fin 2012, soit le quart de nos effectifs. Ce processus, qui correspond au début du transfert de la responsabilité de sécurité aux forces afghanes, a commencé fin octobre avec le retrait de 200 légionnaires. 200 suivront avant Noël. Ce rythme est en adéquation avec les objectifs du président.
Q - Vous devez revenir prochainement à Bordeaux pour parler de la réforme lancée par votre prédécesseur. La révision du Livre Blanc va-t-elle déboucher sur une nouvelle réforme ?
R - Lorsque le Livre Blanc sera actualisé, comme il est prévu qu’il le soit en 2012, des inflexions dans notre politique de défense et de sécurité pourraient être proposées, sans que cela ne se traduise nécessairement par des réformes. D’une manière plus générale, la réforme très importante que les armées conduisent actuellement, et qui ne trouve pas d’équivalent depuis, sans doute, le XIXème siècle, devra d’abord être menée à son terme avant que l’on ne se prononce sur de nouvelles adaptations, et c’est là mon souci premier.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 novembre 2011