Interview de M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'Etat au commerce, à l'artisanat, aux petites et moyennes entreprises, au tourisme, aux services, aux professions libérales et à la consommation, à "I-télé" le 14 novembre 2011, sur l'aggravation des difficultés pour les PME et sur les prévisions économiques.

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Média : Itélé

Texte intégral

CHRISTOPHE BARBIER Frédéric LEFEBVRE, merci d’être là, bienvenu. Les trois humanitaires français détenus au Yémen, en otages, depuis le 28 mai, ont été libérés. Les ravisseurs réclamaient 12 millions de dollars de rançon. On a payé.

FREDERIC LEFEBVRE Ecoutez, d’abord, vous me permettrez de dire la joie de notre pays, le soulagement aussi, et puis peut-être d’avoir une pensée pour ceux, les otages français qui restent aujourd'hui aux mains de ravisseurs, parce qu’il y en a, et pour le reste, je n’ai évidemment pas de...

CHRISTOPHE BARBIER Néanmoins on le sait, désormais il faut payer pour récupérer les otages.

FREDERIC LEFEBVRE Ecoutez, ce sont vos commentaires. En tout cas il y a, dans cette affaire, on est au bout d’un long chemin, difficile pour les otages et pour leur famille.

CHRISTOPHE BARBIER En Syrie, les intérêts français ont été visés, la Ligue arabe semble lâcher le pouvoir en place, est-ce qu’il n’est pas temps de passer à une phase plus dure, éventuellement, de soutenir militairement les insurgés ?

FREDERIC LEFEBVRE Alors, vous savez, d’abord, je pense que plus rien ne sera comme avant. Depuis la révolution des Jasmins en Tunisie, depuis la résistance en Libye, et je vois se dessiner, et c'est une bonne chose, y compris avec des réactions courageuses, regardez la Ligue arabe, un isolement du régime. Je souhaite, comme tous les démocrates, que ce régime finisse par entendre raison, et en même temps, la diplomatie de notre pays, qui cherche à convaincre toutes les démocraties qu’on ne peut pas laisser faire, elle doit prospérer.

CHRISTOPHE BARBIER Qu’attendez-vous de Mario MONTI, à la tête du gouvernement italien ?

FREDERIC LEFEBVRE D’abord, vous me permettrez de dire que ce grand pays, l’Italie, un pays ami, est sur la voie et évidemment j’émets tous les souhaits de réussite à ce nouveau gouvernement...

CHRISTOPHE BARBIER C'est l’homme qu’il faut, Mario MONTI.

FREDERIC LEFEBVRE Il est sur la voie, ce grand pays, de sortie de crise, et je souhaite, parce que c'est l’intérêt, évidemment, de l’Italie, c'est l’intérêt de l’Europe toute entière, c'est l’intérêt du monde tout entier, que cet homme, Mario MONTI qui est très respecté, réussisse.

CHRISTOPHE BARBIER Est-ce que nous, la France, on n’st pas sur la voie de la crise, c'est-à-dire de la perte du Triple A ?

FREDERIC LEFEBVRE Alors, encore une fois, vous avez vu d'ailleurs cette erreur commise par une agence de notations...

CHRISTOPHE BARBIER Oui, ça veut dire qu’ils se préparent à nous dégrader, c'est dans les tuyaux.

FREDERIC LEFEBVRE C'est la raison pour laquelle je fulmine sur cette erreur, parce que, d’une certaine manière, elle donne raison à tous ces défaitistes qui disent : « Regardez, c'est fait », mais c'est bien l’inverse, il y a une trajectoire depuis 4 ans, courageuse, voulue par le président de la République et avec des réformes difficiles, des réformes parfois impopulaires, je pense à la réforme des retraites, et qui pourtant, aujourd'hui nous donnes les moyens de surmonter cette crise, et je crois, contrairement à ce que vos dites, que l’on va y arriver à la surmonter cette crise, et on va y arriver parce que l’on réagit ensemble. Il y a un effort national qui a été demandé aux Français, un effort partagé, qui à la fois demande évidemment à chacun de faire des efforts, mais qui en même temps, vous l’avez vu, avec le plan qui a été annoncé par le gouvernement, veut préserver la croissance, protège la croissance.

CHRISTOPHE BARBIER Bruxelles veut plus de rigueur, Bruxelles ne croit pas à notre prévision de croissance. Que répondez-vous ?

FREDERIC LEFEBVRE Non, là, vous ne pouvez pas dire ça.

CHRISTOPHE BARBIER Bruxelles dit 0,6, pas 1 %.

FREDERIC LEFEBVRE La Commission fait une prévision, elle dit 0,6. Le consensus des prévisionnistes est plutôt autour de 1, ce qui est la prévision qui a été faite par la France. Chacun reconnaît, ça a été salué par tous, y compris par le FMI, à quel point la réaction de la France est proportionnée aux difficultés, et puis j’ajoute que la France est précautionneuse, que la France a prévu 6 milliards d’euros dans l’actuel budget, au cas où la prévision de croissance ne se réalise pas. Mais tout ce que nous allons faire, et moi, à la place qui est la mienne, vous savez, Bercy c'est une forme de tour de contrôle économique, moi je suis trois fois par semaine sur le terrain, au contact des acteurs économiques. Notre volonté elle est d’être à leurs côtés pour les soutenir dans la croissance.

CHRISTOPHE BARBIER Vous avez été nommé il y a un an pile aujourd'hui, reconnaissez que depuis un an ça s’est aggravé pour les PME, pour les artisans, pour les commerçants.

FREDERIC LEFEBVRE Ecoutez, ce n'est pas le sujet de un an, la crise elle est là depuis 2008, elle est multiforme cette crise, souvenez-vous LEHMAN BROTHERS, regardez les évènements de l’été, du mois d’août. Les acteurs économiques, vous savez, ils ont parfaitement compris, parce qu’ils sont dans la réalité, qu’il faut se retrousser les manches, ce sont des battants contre la crise, y compris tous ces artisans, petits entrepreneurs que je vois au quotidien, ainsi que les patrons de PME, et on doit être à leurs côtés. J’ai décidé un plan ambitieux, par exemple, de soutien à l’innovation dans les services, avec la mobilisation de 7 millions d’euros, sur OSEO, avec un grand prix national de l’innovation, avec un pôle de compétitivité destiné et réservé sur cette question et services. J’ai mis en place un numéro bleu azur, soutien TPE, PME, pour les entreprises qui rencontreraient des difficultés de crédits ou de démarches administratives. Il faut être à leurs côtés, il faut être dans l’offensive, à leurs côtés.

CHRISTOPHE BARBIER Pendant ce temps-là, la gauche va déposer au Sénat un texte encadrant plus sévèrement le travail du dimanche. Vous êtes d’accord pour discuter sur ce point ?

FREDERIC LEFEBVRE Ah, mais je suis parfaitement d’accord, discuter sur le travail le dimanche, mais moi je considère au contraire que c'est une des réformes sur lesquelles nous n’avons pas été assez loin. Quand par exemple je suis invité à Paris, aux Abbesses, par les petits commerçants, les bouchers, les charcutiers, qui me disent : « On a un problème, on est dans une zone touristique, les baux, le bail que l’on paie chaque mois, le prix augmente et on m’empêche de travailler le dimanche, donc je ne peux plus le payer...

CHRISTOPHE BARBIER Vous ne cèderez pas là-dessus.

FREDERIC LEFEBVRE ... c'est un petit commerçant qui me dit ça.

CHRISTOPHE BARBIER Jean-François COPE a demandé à François HOLLANDE de rompre les négociations avec Les Verts, au nom de l’intérêt national, sur l’EPR de Flamanville. Mais, de quoi se mêle-t-il ? Les Verts ont le droit de discuter avec les socialistes.

FREDERIC LEFEBVRE Ah, mais écoutez, chacun peut discuter de ce qu’il veut, mais je crois que ce qu’a dit Jean-François COPE, et il a raison, il a rappelé que le nucléaire, et d’ailleurs Michel ROCARD vient de dire la même chose, voyez, ce n'est pas une affaire de droite ou de gauche, le nucléaire c’est un investissement considérable, fait par notre pays, c'est l’indépendance énergétique de la France, c'est...

CHRISTOPHE BARBIER Et HOLLANDE braderait l’indépendance énergétique ?

FREDERIC LEFEBVRE ... c'est une électricité deux fois moins chère, en France, que dans la plupart des pays comparables, et donc évidemment, on ne brade pas l’intérêt national.

CHRISTOPHE BARBIER « HOLLANDE, Babar roi des éléphants », comme le dit Luc CHATEL, ce n'est pas un peu céder aux attaques personnelles, qui devaient être bannies de la campagne ?

FREDERIC LEFEBVRE Ecoutez, si vous me demandez ce que je pense de François HOLLANDE, moi je vais vous dire d’abord, que François HOLLANDE il a été responsable du Parti socialiste, il a un parcours politique, il est le candidat du PS, et à ce titre, moi, j’ai le plus grand respect pour François HOLLANDE.

CHRISTOPHE BARBIER Il est présidentiable, il est apte à la fonction.

FREDERIC LEFEBVRE Ecoutez, c'est un homme, en tout cas, qui a un parcours politique, il a sans doute des choses à prouver sur le courage, sur la capacité de décider, sur l’expérience, tout simplement, mais il y a peut-être aussi, et je vais vous dire, il y a quelque chose qui m’a un peu choqué, des erreurs de tempo. Regardez ce 11 novembre, qui a été un moment de communion nationale, intergénérationnelle avec une douleur partagée, des familles qui ont perdu des jeunes, sur le théâtre de la guerre, en Afghanistan...

CHRISTOPHE BARBIER Il était là HOLLANDE, il a fait une cérémonie.

FREDERIC LEFEBVRE .... avec des enfants qui étaient là, eh bien je crois qu’il y a eu quelques mots déplacés ce jour-là.

CHRISTOPHE BARBIER Nicolas SARKOZY remonte dans les sondages. C’est bon signe ? Ça veut dire qu’il faut que les autres ne se présentent pas, MORIN, VILLEPIN, tout ça ? Pour vous c'est...

FREDERIC LEFEBVRE Vous savez, moi, je n’ai jamais beaucoup regardé les sondages, y compris quand ils baissaient, je ne les regarde pas beaucoup plus quand ils montent. Ils ont cette tendance, les sondages, à démoraliser quand ils sont bas et à démobiliser quand ils sont hauts. Donc, ce qui compte aujourd'hui, comme hier d'ailleurs, et surtout demain, c'est de travailler, c'est d’agir. C'est ça qu’attendent nos compatriotes.

CHRISTOPHE BARBIER Frédéric LEFEBVRE, merci, bonne journée.

FREDERIC LEFEBVRE C’est moi qui vous remercie.

NELLY DAYNAC Et merci à vous Christophe, évidemment vous venez à 08h16 exactement pour « L’humeur du jour ».

Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 14 novembre 2011