Déclaration de M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique, sur les mesures prises ou à prendre pour l'égalité professionnelle entre hommes et femmes, Paris le 16 novembre 2011.

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Circonstance : Colloque de l'Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH), à Paris le 16 novembre 2011

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames les parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
C’est un réel plaisir pour moi que de vous rejoindre aujourd’hui en conclusion de vos échanges et je voudrai, en premier lieu, remercier l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) pour son invitation mais également pour avoir consacré ses travaux à la place désormais faite aux femmes au sein des instances de direction des entreprises privées.
J’ai tenu à être parmi vous pour vous dire l’engagement qui est celui du Gouvernement en faveur de l’égalité entre hommes et femmes, pour vous dire également le sens que nous entendons donner à cette égalité au sein de la Fonction publique.
Cette égalité, c’est pour beaucoup aujourd’hui un non-sujet au sens où ce serait une évidence, ce serait au fond un acquis du siècle dernier, tout aurait été dit, tout aurait été fait.
Ce n’est pas, Mesdames et Messieurs, l’idée que s’en fait le Gouvernement.
Derrière ce simple mot d’égalité, c’est un combat pour le respect du droit des femmes qu’il nous faut mener car nous savons qu’en réalité rien n’est fini.
Non, rien n’est fini lorsque demeurent entre hommes et femmes des inégalités professionnelles, qu’elles se mesurent sur le plan des rémunérations ou sur le plan de l’accès aux responsabilités.
Rien n’est fini pour toutes ces femmes qui souhaitent s’engager dans la vie publique mais qui sont encore trop souvent les oubliées des grands partis politiques. Rien n’est fini non plus, lorsqu’en dépit des avancées permises par la loi du 9 juillet 2010 sur les violences faites aux femmes, des centaines, des milliers d’entre elles continuent de craindre en silence les coups de leur conjoint.
L’égalité dont nous parlons, celle que nous avons en point de mire, c’est une égalité qui se retrouve dans les faits comme dans les consciences. C’est une égalité réelle et pas seulement théorique. C’est une égalité, Mesdames et Messieurs, qui se vérifie tant dans les organigrammes que sur les fiches de paie.
Si cette égalité est aujourd’hui en marche dans le secteur privé, c’est le fait de votre action, Mesdames et Messieurs les directeurs des ressources humaines, c’est le fait des dispositifs innovants que vous avez su mettre en place au sein de vos entreprises. C’est le fait aussi, et je veux le souligner, de l’intervention du législateur qui a su, lorsque cela était nécessaire, donner un coup d’accélérateur à l’évolution des mentalités et des pratiques. Je veux à ce titre saluer Madame la députée Marie-Jo ZIMMERMANN ainsi que Madame la sénatrice Catherine GENISSON, à l’origine chacune de lois déterminantes sur ce sujet, la loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et celle du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.
Le fait que ces deux lois aient été adoptées sous des majorités différentes n’a du reste rien de neutre. C’est la preuve que le combat pour l’égalité entre hommes et femmes peut et en réalité doit dépasser les clivages traditionnels du débat politique. C’est une lame de fond, un mouvement profond qui, pour changer les esprits se doit d’emporter l’adhésion de tous.
Cette égalité, Mesdames et Messieurs, il nous appartient désormais de l’instaurer dans la Fonction publique. Je dis bien instaurer car le constat est aujourd’hui sans appel : Si les femmes constituent 60 % de nos effectifs, elles restent extrêmement minoritaires, 13% dans les fonctions de direction et d’encadrement.
Au-delà de cette inégalité, flagrante en ce qui concerne l’accès aux postes à responsabilité, figure une autre injustice, plus discrète mais non moins choquante, je pense aux écarts de rémunération entre hommes et femmes occupant des postes comparables.
Le rapport remis en mars dernier à mon prédécesseur par Madame la députée Françoise GUEGOT nous a permis de mettre enfin des chiffres sur cette réalité : 7% d’écart entre le salaire médian des femmes et celui des hommes en ce qui concerne les emplois pourvus sur décision du Gouvernement, 5 % d’écart en ce qui concerne les administrateurs civils et in fine des écarts sensibles dans la plupart des grands corps.
Face à ce constat, l’heure ne peut plus être simplement aux discours, elle doit plus que jamais être aux actes. En ce qui me concerne, je veux être le Ministre qui aura fait avancer la place des femmes dans la Fonction publique et c’est pourquoi j’ai tenu, dès ma prise de fonctions, à ce que mon cabinet compte une spécialiste reconnue de cette question, pour veiller à ce que chacune de nos initiatives s’inscrive dans le respect de ce principe cardinal qu’est l’égalité entre hommes et femmes.
C’est d‘abord une question de crédibilité de la parole publique. Comment l’Etat, je pense ici particulièrement à l’égalité professionnelle et salariale, pourrait-il affirmer des principes à portée générale tout en en exemptant nos services publics ?
C’est une démarche qui est également empreinte de pragmatisme. Premier employeur de France, l’Etat et les collectivités publiques ont la possibilité, par leurs engagements et par leurs décisions, d’initier ou de conforter des dynamiques déjà en cours et de contribuer ainsi à faire changer les mentalités.
L’Etat doit être exemplaire et dans la place qu’elle fait aux femmes, la Fonction publique, se doit elle aussi d’être exemplaire. C’est la voie dans laquelle s’est engagé le Gouvernement et je voudrai insister sur plusieurs axes particulièrement représentatifs des mesures que nous entendons porter au cours des prochains mois, et qui feront l’objet d’une négociation avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs.
Notre premier objectif consiste à améliorer la collecte de données nécessaires à l’identification de politiques d’égalité professionnelle efficaces.
Le bilan social de chaque ministère, collectivité territoriale ou établissement relevant de la fonction publique hospitalière devrait à l’avenir obligatoirement comprendre un volet relatif à l’égalité professionnelle, afin d’ouvrir la possibilité à des échanges sur ces questions avec les partenaires sociaux.
Parallèlement nous voulons rendre également obligatoire le fait de présenter, à intervalle régulier, des rapports sur la situation respective des femmes et des hommes dans chacune des trois fonctions publiques, Fonction publique d’Etat, Fonction publique territoriale et Fonction publique hospitalière. Le futur Conseil commun de la Fonction publique, qui associera des représentants des employeurs et des salariés de chaque Fonction publique sera ainsi un lieu d’échange privilégié sur la place faite aux femmes dans la fonction publique.
Nous ne nous limiterons cependant pas aux constats et pour que les choses changent vraiment nous entendons également avancer sur l’une des causes les plus fondamentales de l’inégalité professionnelle, la difficulté plus grande pour les femmes que pour les hommes à concilier vie privée et vie professionnelle, une difficulté particulièrement manifeste en ce qui concerne les congés parentaux.
En effet, si le congé parental est mobilisable tant par les hommes que par les femmes, dans les faits, parentalité et prise en charge des temps familiaux pèsent encore essentiellement sur les femmes.
Cette situation implique pour les femmes des préjudices de carrière qui ne sont plus acceptables. La naissance d’un enfant doit cesser de pénaliser professionnellement sa mère. Notre ambition, c’est donc de neutraliser les effets sur la carrière des congés parentaux. Nous proposerons que le congé parental soit désormais considéré comme un temps de service effectif au cours de la première année pour que l’avancement ne se fasse plus à 50% mais bien à 100% nous allongerons cette disposition de six mois supplémentaires si les deux parents prennent ce congé.
Nous favoriserons également, dans la même logique, l’implication des pères dans cette étape essentielle de la vie qu’est la naissance d’un enfant en modifiant les règles du congé paternité. En effet, si la prise du congé de paternité de 11 jours tend à se développer, on constate une certaine frilosité des pères à le demander alors même qu’ils y ont droit.
L’enjeu est de taille. Il s’agit en effet de faire évoluer les mentalités et de faire progresser l’implication des pères dans la prise en charge des enfants, afin notamment de rééquilibrer une situation qui pénalise encore en premier lieu la carrière des femmes. C’est pourquoi nous proposerons à la négociation d’ouvrir aux pères la possibilité de fractionner ce congé et d’utiliser ces 11 jours auxquels ils ont droit de manière plus échelonnée dans le temps.
Au-delà, il importe de ne pas se limiter aux causes mais d’agir également sur les conséquences de ces inégalités, c’est-à-dire le trop faible nombre de femmes occupant des postes à responsabilité dans la Fonction publique.
Nous souhaitons ainsi étendre, sur le modèle de ce qui a déjà été réalisé dans la Fonction publique d’Etat, la place des femmes dans les jurys de recrutement de la Fonction publique territoriale comme de la Fonction publique hospitalière.
Nous voulons également que les femmes soient demain mieux représentées qu’aujourd’hui au sein des instances décisionnaires des établissements publics et cela aussi bien au niveau local que national.
De manière générale, nous entendons stimuler l’accession de femmes à des postes à responsabilité. Plusieurs propositions sont actuellement à l’étude et feront l’objet de discussions avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs. Le dialogue social est essentiel sur un tel sujet car, c’est une évidence, nous ne pourrons agir que par la mobilisation de tous, employeurs et syndicats, autour d’objectifs communs.
Après le temps du dialogue viendra le temps du débat parlementaire. Le projet de loi visant à lutter contre la précarité et les discriminations dans la fonction publique, que j’ai présenté en Conseil des Ministres le 7 septembre dernier, sera examiné par le Sénat au cours des toutes prochaines semaines. Il appartiendra donc au Parlement de se saisir à cette occasion du débat qui nous réunit aujourd’hui pour que nous allions plus loin et que nous avancions, ensemble, sur la question de l’égalité professionnelle dans la Fonction publique. En ce qui me concerne, c’est un débat que j’aborderai sans tabous.
Mesdames Messieurs, vous le voyez, notre ambition pour la parité ne se limite pas aux discours, elle est forte et profonde et c’est pourquoi j’attends beaucoup, Mesdames les parlementaires, du débat que nous aurons à l’Assemblée nationale et au Sénat.
En matière d’égalité entre hommes et femmes, l’Etat se doit de mener une action exemplaire et résolue. Il le fait et il continuera de le faire. Mais en éprouvant sur le terrain, dans le cadre de vos fonctions, des solutions innovantes et en identifiant des bonnes pratiques, vous êtes les vraies ambassadrices et ambassadeurs de cette cause à laquelle nous tenons tant.
Je vous remercie.
Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 18 novembre 2011