Texte intégral
Q - Quelle place, quel rôle pour la France à lONU ?
R - Si la France a aujourdhui une politique étrangère cohérente et ambitieuse, elle le doit en grande partie à sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous naurions pas fait, par exemple, ce que nous avons fait au moment de la guerre en Irak, en Libye, en Côte dIvoire, ni même aujourdhui pour le processus de paix au Proche-Orient, si nous navions pas notre liberté de manuvre. Il ny a pas, sur toutes ces questions, dunité européenne ; le siège européen, à ce stade, na donc pas de sens.
Alors, bien sûr, il faut réformer le Conseil de sécurité parce quil nest pas à limage du monde daujourdhui. La France a fait des propositions en ce sens : nous proposons de lélargir et non pas de le rétrécir. Supprimer des postes de membres permanents na aucune chance daboutir ; le Royaume-Uni nacceptera certainement pas de renoncer à son poste.
Q - Quand vous dites : la France a besoin de sa liberté de manuvre, cela veut dire que ce droit de veto, qui pourtant na pas été utilisé depuis 89 je crois, reste essentiel.
R - Le droit de veto a une valeur dissuasive, on le sait bien. Il est rarement utilisé aujourdhui, mais il donne aux membres permanents actuels un poids tout à fait considérable.
Je le répète, il faut sélargir à dautres. La France soutient, par exemple, la candidature de lAllemagne, du Japon, du Brésil ou de lInde ; cest ce que lon appelle le groupe du G4. Nous avons fait des propositions en ce sens, pour une solution intérimaire, et jespère quà loccasion de son voyage à New York, M. Hollande pourra clarifier la position du Parti socialiste.
Q - Sur la Syrie ?
R - De toute façon, si la Russie sopposait, compte tenu du poids qui est le sien, droit de veto ou pas, nous aurions beaucoup de difficultés à monter une telle opération. Je pense quil faut tenir compte de la réalité, de la situation sur la scène internationale et agir par la persuasion plutôt que de force.
Q - Justement, vous aviez dénoncé la semaine dernière, à propos de la situation en Syrie, je vous cite : «une répression dune sauvagerie comme on nen a pas vu depuis longtemps». La France et vous-même, vous êtes en pointe des pays qui tentent de juguler, de pousser ce pouvoir syrien à la démission ; est-ce que les choses avancent ?
R - Les choses avancent lentement, malheureusement. Vous savez que jai reçu, la semaine dernière, les représentants du Conseil national syrien qui mont parlé de la situation humanitaire très difficile. Mais les choses avancent : la Ligue arabe, qui a un poids évidemment considérable - ce sont les voisins de la Syrie -, vient de prendre, il y a deux jours, un certain nombre de sanctions qui, je le pense, vont isoler encore un peu plus le régime syrien.
Les jours du régime syrien sont comptés, cest absolument évident, il est totalement isolé aujourdhui. Je reconnais que cest lent et que, malheureusement les populations en souffrent dans leur chair dans des villes comme Homs, par exemple, qui sont de véritables villes martyres. Mais la France est très présente et a souvent pris linitiative dans ce dossier.
Q - Lidée des corridors humanitaires que vous aviez proposée, notamment en lien avec la Turquie, a été rejetée par le secrétariat général de lONU ?
R - Je nai pas connaissance de cela. Ce que je sais, que cest que cette demande est formulée par le Conseil national syrien. Ce nest pas moi qui ai eu cette idée ; ce sont les membres du Conseil national syrien qui me lont demandé et ensuite nous avons demandé à nos représentants au Conseil de sécurité détudier la question. Nous avons aussi demandé à la Ligue arabe dy réfléchir. Jespère que cette idée nest pas complètement écartée parce que cest une nécessité. Nous lavons déjà fait, dans dautres circonstances, et cest la seule façon dalléger à court terme le martyre des populations.
Q - Dans un certain nombre de pays que lon associe au Printemps arabe, les élections ont eu lieu ou sont en cours. Résultat : à chaque fois, une percée des islamistes conservateurs. Quen pensez-vous ?
R - Je me réjouis de voir quil y a des élections libres. Comment soutenir le mouvement démocratique de tous ces peuples et puis ensuite soffusquer du résultat des élections ! Les élections au Maroc se sont déroulées dans de bonnes conditions, tout comme en Tunisie. Elles ont donné un résultat quil faut respecter.
Je voudrais souligner que le parti qui arrive en tête au Maroc - il est loin davoir la majorité absolue puisquil a une centaine de sièges sur environ 400 - était déjà représenté dans le précédent Parlement marocain. Cest un parti qui a, je crois, des positions modérées.
On ne peut pas partir du principe que tout parti qui se réfère à lIslam doit être stigmatisé ; je pense que ce serait une erreur historique. Il faut, au contraire, parler avec ceux qui ne franchissent pas les lignes rouges qui sont les nôtres : à savoir le respect précisément des élections, de lÉtat de droit, des droits de lHomme et des droits de la femme.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 novembre 2011
R - Si la France a aujourdhui une politique étrangère cohérente et ambitieuse, elle le doit en grande partie à sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous naurions pas fait, par exemple, ce que nous avons fait au moment de la guerre en Irak, en Libye, en Côte dIvoire, ni même aujourdhui pour le processus de paix au Proche-Orient, si nous navions pas notre liberté de manuvre. Il ny a pas, sur toutes ces questions, dunité européenne ; le siège européen, à ce stade, na donc pas de sens.
Alors, bien sûr, il faut réformer le Conseil de sécurité parce quil nest pas à limage du monde daujourdhui. La France a fait des propositions en ce sens : nous proposons de lélargir et non pas de le rétrécir. Supprimer des postes de membres permanents na aucune chance daboutir ; le Royaume-Uni nacceptera certainement pas de renoncer à son poste.
Q - Quand vous dites : la France a besoin de sa liberté de manuvre, cela veut dire que ce droit de veto, qui pourtant na pas été utilisé depuis 89 je crois, reste essentiel.
R - Le droit de veto a une valeur dissuasive, on le sait bien. Il est rarement utilisé aujourdhui, mais il donne aux membres permanents actuels un poids tout à fait considérable.
Je le répète, il faut sélargir à dautres. La France soutient, par exemple, la candidature de lAllemagne, du Japon, du Brésil ou de lInde ; cest ce que lon appelle le groupe du G4. Nous avons fait des propositions en ce sens, pour une solution intérimaire, et jespère quà loccasion de son voyage à New York, M. Hollande pourra clarifier la position du Parti socialiste.
Q - Sur la Syrie ?
R - De toute façon, si la Russie sopposait, compte tenu du poids qui est le sien, droit de veto ou pas, nous aurions beaucoup de difficultés à monter une telle opération. Je pense quil faut tenir compte de la réalité, de la situation sur la scène internationale et agir par la persuasion plutôt que de force.
Q - Justement, vous aviez dénoncé la semaine dernière, à propos de la situation en Syrie, je vous cite : «une répression dune sauvagerie comme on nen a pas vu depuis longtemps». La France et vous-même, vous êtes en pointe des pays qui tentent de juguler, de pousser ce pouvoir syrien à la démission ; est-ce que les choses avancent ?
R - Les choses avancent lentement, malheureusement. Vous savez que jai reçu, la semaine dernière, les représentants du Conseil national syrien qui mont parlé de la situation humanitaire très difficile. Mais les choses avancent : la Ligue arabe, qui a un poids évidemment considérable - ce sont les voisins de la Syrie -, vient de prendre, il y a deux jours, un certain nombre de sanctions qui, je le pense, vont isoler encore un peu plus le régime syrien.
Les jours du régime syrien sont comptés, cest absolument évident, il est totalement isolé aujourdhui. Je reconnais que cest lent et que, malheureusement les populations en souffrent dans leur chair dans des villes comme Homs, par exemple, qui sont de véritables villes martyres. Mais la France est très présente et a souvent pris linitiative dans ce dossier.
Q - Lidée des corridors humanitaires que vous aviez proposée, notamment en lien avec la Turquie, a été rejetée par le secrétariat général de lONU ?
R - Je nai pas connaissance de cela. Ce que je sais, que cest que cette demande est formulée par le Conseil national syrien. Ce nest pas moi qui ai eu cette idée ; ce sont les membres du Conseil national syrien qui me lont demandé et ensuite nous avons demandé à nos représentants au Conseil de sécurité détudier la question. Nous avons aussi demandé à la Ligue arabe dy réfléchir. Jespère que cette idée nest pas complètement écartée parce que cest une nécessité. Nous lavons déjà fait, dans dautres circonstances, et cest la seule façon dalléger à court terme le martyre des populations.
Q - Dans un certain nombre de pays que lon associe au Printemps arabe, les élections ont eu lieu ou sont en cours. Résultat : à chaque fois, une percée des islamistes conservateurs. Quen pensez-vous ?
R - Je me réjouis de voir quil y a des élections libres. Comment soutenir le mouvement démocratique de tous ces peuples et puis ensuite soffusquer du résultat des élections ! Les élections au Maroc se sont déroulées dans de bonnes conditions, tout comme en Tunisie. Elles ont donné un résultat quil faut respecter.
Je voudrais souligner que le parti qui arrive en tête au Maroc - il est loin davoir la majorité absolue puisquil a une centaine de sièges sur environ 400 - était déjà représenté dans le précédent Parlement marocain. Cest un parti qui a, je crois, des positions modérées.
On ne peut pas partir du principe que tout parti qui se réfère à lIslam doit être stigmatisé ; je pense que ce serait une erreur historique. Il faut, au contraire, parler avec ceux qui ne franchissent pas les lignes rouges qui sont les nôtres : à savoir le respect précisément des élections, de lÉtat de droit, des droits de lHomme et des droits de la femme.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 novembre 2011