Interview de M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, à RTL le 29 novembre 2011, sur le climat d'insécurité à Marseille et la réduction de l'immigration légale en France.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

JEAN-MICHEL APHATIE Victime d’une fusillade, hier matin, à Vitrolles, dans les Bouches-du-Rhône, un fonctionnaire de police lutte ce matin, contre la mort à Marseille. Marseille, encore où des malfaiteurs ont braqué un magasin, hier après-midi avec des fusils mitrailleurs. L’un de ces malfaiteurs a été tué dans un échange de tirs, avec des policiers et samedi à Cannes, c’est un bijoutier qui a été tué par des malfaiteurs. Cette vague soudaine de violence saisit l’opinion publique. La police est-elle dépassée par cette violence extrême, Claude GUEANT ?
 
CLAUDE GUEANT Non, la police n’est pas dépassée. A Marseille, de façon globale, il suffit d’interroger les élus marseillais, les habitants de Marseille, les choses, depuis quelques mois, s’améliorent très sensiblement. Le climat de sécurité revient en ville. Et les habitants ne cessent de dire leur satisfaction. Ceci dit, c’est vrai…
 
JEAN-MICHEL APHATIE On peut être étonné, par votre…
 
CLAUDE GUEANT Non, vous ne pouvez pas être étonné…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Par vos propos…
 
CLAUDE GUEANT C’est la délinquance en général. Mais un fait divers ne fait pas un climat général de sécurité dans une ville de cette importance. Alors c’est vrai, c’est vrai, j’ajoute que la police a fait quelques coups de filets très remarquables dans des milieux de grand banditisme, ces dernières semaines. Ceci dit, c’est vrai, qu’il reste à Marseille, un certain nombre de voyous qui sont puissamment armés, qui tirent pour un oui ou pour un non. Et c’est un risque auquel, il faut que la police fasse face. C’est tout à fait clair !
 
JEAN-MICHEL APHATIE Ce sont des vieilles expressions, Claude GUEANT, mais on a de nouveau l’impression du retour, d’un sentiment d’insécurité ?
 
CLAUDE GUEANT C’est vous qui le dites, Jean-Michel APHATIE. Je prétends qu’à Marseille et je vous invite à aller faire un reportage sur place. Le climat de sécurité s’améliore, c’est le sentiment qu’éprouvent les gens. Et il n’empêche que nous avons ces agressions très violentes, et il faut que nous y répondions. Ca c’est tout à fait évident. J’ajoute que de façon générale, puisque vous évoquez le climat d’insécurité, de façon indistincte, les vols à mains armées en France, sont en recul, comme ils l’étaient l’année dernière. Et en recul sensible.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Voilà, c’est ce que je disais, c’est un vieux débat. Les statistiques peuvent dire des choses et puis on peut ressentir la situation différemment.
 
CLAUDE GUEANT Oui, non, mais c’est vrai que des faits divers aussi violents que ceux qui sont survenus à Marseille, impressionnent à juste titre l’opinion et donnent le sentiment que quelque chose ne va pas. Et c’est vrai que quelque chose ne va pas. Il faut que la police fasse son travail, y compris contre ce type de banditisme.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Yves CALVI recevra dans un quart d’heure, Michel UNIK, qui est le frère jumeau du bijoutier assassiné. A Cannes, samedi, beaucoup de petits commerces, qu’il s’agisse de bijouteries, de bar-tabac, les commerces de proximité, sont aujourd’hui victimes d’agresseurs qui veulent prendre les quelques euros qui se trouvent dans la caisse. C’est un phénomène qui vous inquiète ?
 
CLAUDE GUEANT Oui, là aussi, il faut faire des distinctions. Quelques jours auparavant, à Lyon, un buraliste avait été agressé, les auteurs de l’agression, d’ailleurs ont été immédiatement arrêtés, dans le quart d’heure qui a suivi. Dans les débits de tabac, les agressions reculent très sensiblement. En revanche, dans les bijouteries, c’est vrai, que le nombre de vols à main armée, augmente, parce que le prix de l’or augmente. J’ai reçu au mois d’avril dernier les représentants de la profession. Je les recevrai à nouveau, cette semaine. Nous avons un certain nombre de mesures ensemble, pour mieux protéger, mieux alerter, lorsque quelque chose ne va pas. Mais il faut continuer à être très, très vigilant.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Il faut chercher à sécuriser spécialement les bijouteries ? Puisque vous dites que…
 
CLAUDE GUEANT Ah ! Oui, oui, oui. C’est…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Que le commerce de l’or étant ce qu’il est…
 
CLAUDE GUEANT Le prix de l’or augmente, et par conséquent, ça augmente la convoitise des voyous à l’égard des bijouteries. Et donc il faut que l’on trouve la parade. Et ces parades sont notamment dans le domaine de l’équipement, dans le domaine de l’équipement de prévention de ces commerces et ça se déploie actuellement.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Le policier, que j’évoquais ce matin, lutte toujours contre la mort à Marseille ?
 
CLAUDE GUEANT Oui, il est toujours effectivement avec un pronostic vital réservé.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et les malfaiteurs qui l’ont blessé, continuent eux…
 
CLAUDE GUEANT L’un d’entre eux a été tué par un de ses complices d’ailleurs, puisque aucune balle policière n’a été tirée dans cette affaire. Et la police judiciaire, évidemment met en place tous les moyens, a mis en place tous les moyens pour retrouver les auteurs.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Vos déclarations récentes vous placent au centre du débat politique, Claude GUEANT. Dimanche, vous avez évoqué les 200 000 immigrés qui rentrent chaque année en France, en disant : c’est trop. Et hier matin, dans un communiqué, Marine LE PEN, la présidente du Front national, vous dit merci, merci d’avoir repris ce qu’elle dit, elle-même, depuis des années, trop d’immigration. Ce merci de Marine LE PEN vous gêne-t-il, Claude GUEANT ?
 
CLAUDE GUEANT Marine LE PEN a ses propres thèses. Ce ne sont pas du tout les miennes. En matière d’immigration, je me souviens que voici, quelques jours, elle a proposé que la France n’accepte plus que 10 000 immigrés légaux par an. Ce qui signifie qu’on ne pourrait plus accueillir d’étudiants, qu’on ne pourrait accueillir les demandeurs d’asile, c’est tout à fait, évidemment, impossible et ce n’est pas du tout, le point de vue qui est le mien. Voici, déjà plusieurs mois, j’ai proposé que l’on réduise de 10 %, le nombre d’immigrés légaux en France, sur la durée d’une année. Donc que l’on passe de 200 000 à 180 000. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous souhaitons, je souhaite que la France reste un pays unitaire. Un pays qui obéisse, quels que soient les habitants qui sont concernés à une loi commune. Je refuse les communautarismes, je ne veux pas que se développent des communautés, qui vivent selon des références qui ne sont pas celles de la République française. Il faut que la France reste un lieu d’accueil, de brassage, dans lequel une règle de vie commune soit respectée par tous. Et il faut donc que les personnes qui sont admises sur notre sol, venant de l’étranger d’intègrent à la société française. Et c’est plus facile de s’intégrer si on est un peu moins nombreux, que si on est plus nombreux. C’est tout simple !
 
JEAN-MICHEL APHATIE Mais quand vous dites, c’est trop ! Pour les immigrés qui rentrent en France. Les subtilités de votre raison ne passent pas, vous connaissez les codes de la communication politique ?
 
CLAUDE GUEANT Mais vous me donnez l’occasion de préciser les choses. C’est une vraie vision de la société française que je développe. Je dis qu’il faut une meilleure maîtrise des flux migratoires et que pour que l’intégration se fasse, ce qui est de l’intérêt des Français, ce qui est l’intérêt des personnes que nous accueillons, il faut qu’il y ait moins d’immigrés accueillis chaque année. C’est extrêmement simple. Il faut qu’eux fassent l’effort de s’intégrer, nous, que nous fassions l’effort de nous intégrer, tout cela pour que nous ayons une société harmonieuse, c’est tout simple.
 
JEAN-MICHEL APHATIE LIBERATION, ce matin, vous stigmatise, Claude GUEANT.
 
CLAUDE GUEANT Oui, j’ai vu ça, oui, oui.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Une photo « GUEANT, la voix de LE PEN. »
 
CLAUDE GUEANT Oui, j’ai vu ça.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Comment avez-vous réagi en le voyant ?
 
CLAUDE GUEANT Ecoutez, j’ai tendance à considérer que LIBERATION ne sait plus quoi faire pour retrouver les lecteurs qu’il a perdus. Parce que vraiment, je n’ai rien à voir, avec le Front national, rien de commun avec le Front national. Et je dois dire qu’il y a bien sûr, beaucoup de Français qui sont en attente, en matière de sécurité, en matière de maîtrise de l’immigration. Mon devoir de ministre de l’Intérieur, c’est de répondre à ces préoccupations, d’y répondre d’une façon républicaine. Et c’est ce qui me différencie fondamentalement du Front national.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Vous souffrez de l’image qui est la vôtre aujourd’hui, dans le débat politique français, Claude GUEANT ? Par exemple, Benoît HAMON, hier : « monsieur GUEANT s’ébroue sur le terrain du Front national en permanence, et il ne s’ébroue plus que sur ce terrain-là. »
 
CLAUDE GUEANT Monsieur HAMON devrait être plus attentif. Parce qu’il pourrait observer aussi, ce que je fais en matière de sécurité, par exemple. Je suis à peu près certain que cette année, pour la 9ème année consécutive, la délinquance va reculer dans notre pays. C’est quelque chose qui compte. Dans le domaine de l’immigration, il pourrait observer les efforts que nous faisons pour la meilleure intégration des gens, des gens mieux intégrés, sont des gens plus heureux, qui ont plus de chance de réussir dans notre société, qui donne plus de chance à leurs enfants aussi. Alors monsieur HAMON, tombe dans…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Vous souffrez d’être stigmatisé aussi ?
 
CLAUDE GUEANT Ca ne me fait pas plaisir, bien évidemment. Mais l’excès condamne les propos par lui-même.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Vous parlez beaucoup d’immigration, vous n’en parlez pas trop Claude GUEANT ?
 
CLAUDE GUEANT J’en parle parce que c’est mon travail. Et c’est un sujet qui préoccupe beaucoup les Français. Moi, je vais beaucoup sur le terrain, j’y suis au moins trois fois par semaine, et toujours j’observe que quels que soient les milieux que je rencontre, les Français sont très préoccupés par cette affaire-là. Ils attendent…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Quand vous voyez le niveau de Marine LE PEN…
 
CLAUDE GUEANT Ils attendent que nous apportions des réponses à leurs préoccupations. Et le devoir d’un gouvernement, c’est d’apporter des réponses et je pense que tout le monde devrait être content, y compris les socialistes, y compris monsieur HAMON, qu’un parti républicain puisse ré-intéresser la population, plutôt que de laisser notre peuple aller vers le Front national, un parti qui n’est pas républicain.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Mais d’après les sondages, il y va quand même !
 
CLAUDE GUEANT Il n’augmente pas.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 2 décembre 2011