Déclaration de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, sur la photographie et les relations culturelles entre la France et l'Afrique, Bamako le 1er novembre 2011.

Prononcé le 1er novembre 2011

Intervenant(s) : 

Circonstance : 9èmes rencontres de Bamako biennale africaine de la photographie à Bamako le 1er novembre 2011

Texte intégral


Madame le Premier Ministre, Monsieur le Ministre de la Culture, cher Hamane Niang, Monsieur le Gouverneur du district, Monsieur le Maire du district, Monsieur le Maire de la commune 3, Monsieur le Directeur du Musée national du Mali et Délégué général des Rencontres africaines de la photographie, cher Samuel Sidibé, Monsieur le Président de l’Institut Français, cher Xavier Darcos, Monsieur l’Ambassadeur de France, cher Christian Rouyer, Monsieur le chef de la Délégation de l’Union Européenne du Mali, Mesdames et Messieurs les représentants du corps diplomatique, Mesdames et Messieurs, Chers amis,
Quel chemin parcouru depuis 1994, quand les rencontres de Bamako étaient créées à l’initiative de l’association Afrique en Créations, avec le soutien du gouvernement malien ! Portées aujourd’hui par le ministère de la culture du Mali, en collaboration avec l’Institut français, les rencontres sont désormais soutenues par de multiples partenaires, publics comme privés ; par leur capacité fédératrice hors du commun, elles se sont affirmées comme une fenêtre essentielle sur l’univers de la photographie, pour le Mali, pour le continent africain, pour la scène mondiale de la création.
À leurs débuts, les rencontres photographiques de Bamako venaient notamment répondre au besoin de faire découvrir les expressions photographiques africaines ; aujourd’hui, ces dernières font partie intégrante du paysage global de la photographie contemporaine. Françoise Huguier et Bernard Descamps, fondateurs de cette initiative, étaient les commissaires de la première édition : l’esprit d’échange et de croisements fructueux qu’ils ont su insuffler a perduré depuis. Tous les deux ans, à Bamako, devenue le lieu symbolique de toute la création photographique d’un continent, les photographes se rencontrent et s’exposent au monde, dans une manifestation panafricaine de premier plan, qui est un moment majeur de réflexion sur les dimensions artistiques mais aussi économiques, historiques et documentaires de la création africaine.
La création photographique africaine est aujourd’hui pleinement reconnue sur la scène mondiale, dans la diversité et la singularité de ses écritures, par l’ensemble des acteurs du monde de l’art ; et les rencontres de Bamako ont contribué à cette reconnaissance. Le temps est révolu où l’on qualifiait la photographie africaine d’« émergente » : sa légitimité, en termes de richesse et de créativité, est largement établie. Seydou Keita, Felix Diallo, Malick Sidibé ; Samuel Fosso ou Mohamed Camara pour la jeune génération : autant de noms, parmi tant d’autres, qui nous permettent de prendre la mesure de cette reconnaissance. De nombreux artistes, sur tous les continents, empruntent au foisonnement inventif d’une photographie qui s’appuie sur des traditions esthétiques fortes, et qui laisse toute sa place à l’innovation. En Afrique parfois encore plus qu’ailleurs, la photographie a constitué un formidable laboratoire de pratiques artistiques en prise directe avec les questions d’actualité, avec leur contexte social et politique. Elle représente une contribution majeure et universelle à nos visions du monde, et cette neuvième édition de la Biennale en est une fois de plus le reflet.
Depuis la France, mon ministère ne cesse d’enrichir ses liens avec la création africaine. Revenons quelques années en arrière : l’exposition Magiciens de la terre, imaginée par André Magnin et Jean-Hubert Martin, qui s’était tenue en 1989 simultanément à la Grande halle de la Villette et au Centre Pompidou, aura marqué, en France, un moment très fort pour la visibilité de la création photographique africaine en France. En 2005, au Centre Pompidou, l’exposition Africa remix, entièrement consacrée à la création africaine contemporaine, aura donné une image inédite de sa spécificité et de sa diversité.
Aujourd’hui, je pense par exemple au Nigérian Okwui Enwezor, qui est en charge de la prochaine triennale de l’art à Paris en 2012 ; au Centre national des arts plastiques, qui a initié en 2009 des expositions au Cameroun, à Douala et Yaoundé ; aux œuvres inscrites sur les inventaires du fonds national d’art contemporain et qui sont exposées dans le cadre d’un partenariat avec l’Institut français ; à Photoquai, sur le quai Branly à Paris, depuis le 13 septembre jusqu’à la fin de la semaine prochaine, qui peut compter sur une contribution très nourrie des photographes africains ; à Paris Photo, évidemment, au Grand Palais dans quelques jours, où la photographie africaine sera à l’honneur cette année, avec une sélection très attendue des Rencontres de Bamako.
Cette année, les commissaires de la Biennale ont voulu porter leur propos sur la quête d’un monde durable. Qu’il s’agisse du réchauffement climatique, de l’épuisement des ressources, de la pénurie d’eau, de la déforestation, les préoccupations environnementales sont aujourd’hui au cœur des enjeux mondiaux, aux croisements du développement et de la responsabilité, de la prévention face à toutes les formes de prédations. Le langage photographique apporte pour l’occasion sa capacité unique de condenser sur un même support le témoignage, l’analyse et l’engagement.
Les photographes et vidéastes invités à Bamako témoignent, dénoncent, agissent, résistent ; les démarches documentaires ou journalistiques, la force de la métaphore, l’usage de la fiction, la variété des expressions plasticiennes, autant d’armes au service de la prise de conscience et de l’action, que Samuel Sidibé a su réunir avec tout le talent qu’on lui connaît.
À ses côtés, Michket Krifa et Laura Serani, directrices artistiques des deux précédentes éditions, ont mené à bien un travail de chef d’orchestre d’autant plus crucial que la diversité des propositions rassemblées n’étaient pas sans soulever de nombreux défis. Je tiens à les féliciter très chaleureusement, ainsi que l’ensemble des équipes qui ont contribué à l’organisation de cette neuvième édition, à la hauteur des ambitions d’un rendez-vous international majeur auquel mon ministère est fier d’être associé, au nom de l’excellence de notre coopération culturelle et de l’amitié franco-malienne.
Je vous remercie.
Source http://www.ambafrance-ml.org, le 16 novembre 2011