Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à RMC le 27 octobre 2011, sur la crise économique, la fraude sociale et l'accès au logement social.

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CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Alors la Droite sociale, vous avez vu la droite inhumaine nous dit Christine BOUTIN tout à l’heure, parce que vous avez une proposition qui l’a fait bondir, vous proposez de réserver une partie du logement social, donc en gros des HLM aux gens qui travaillent, plutôt qu’aux chômeurs ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui alors on a fait toute une série de propositions qui sont des propositions qui ont une cohérence, c’est défendre les classes moyennes modestes qui ont été très touchées dans la crise. Ca suppose d’abord de lutter contre ce que j’appelle les profiteurs du haut, c’est pour ça qu’on propose d’interdire les stock-options. Ca suppose de fortifier les classes moyennes, c’est pour cela qu’on a proposé un plan épargne éducation pour aider les gens à investir et épargner pour les études de leurs enfants et ça suppose aussi de remettre une logique de droits et de devoirs. Or aujourd'hui moi il y a quelque chose qui me choque et je crois qui peut choquer tout le monde, c’est que dans l’accès au logement social, et écoutez vos auditeurs qui vous en parleront et qui en parlent d’ailleurs, il n’y a pas de prise en compte véritable des problématiques d’emplois et de celui qui travaille. On prend en compte dans les critères de priorité beaucoup de monde, mais celui qui travaille, le travailleur modeste, lui, il n’est pas pris en compte dans les critères de priorité d’accès au logement social. Est-ce que ça ce n’est pas un problème ? Est-ce que quand on fait du social dans ce pays, il ne faut pas aussi qu’on pense aux travailleurs modestes ?
 
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Mais alors, c’est vrai il y a beaucoup de travailleurs modestes qui se plaignent de ne pas avoir eux accès à du logement social, simplement est-ce qu’il ne faudrait pas construire plus de logements sociaux ? Qu’est-ce que vous faites des gens qui effectivement sont sans emploi, et que vous allez mettre à la rue ? On a vu tous les problèmes qu’il y avait sur le logement d’urgence aujourd'hui, on a vu les associations qui se mobilisent parce qu’elles disent qu’il n’y a pas assez de logement pour les démunis. On sait aussi que le gouvernement a changé son fusil d’épaule maintenant, Benoist APPARU qui s’occupe du logement au sein du gouvernement préfère des logements durables, pérennes plutôt que des logements d’urgence et du coup il y a plein de gens qui se retrouvent à la rue. Est-ce que vous, vous n’allez pas mettre aussi encore plus de gens à la rue avec votre proposition ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous savez au cours des cinq dernières années, il y a 500 000 personnes qui ont du refuser un emploi à cause de difficultés de logement. C’est le boulanger à Paris qui veut embaucher son apprenti, sauf que l’apprenti n’arrive pas à trouver un logement social. C’est l’infirmière qui a trois enfants et qui travaille à des moments où elle a besoin de mode de garde et qui est obligée de faire 20 kms pour aller à l’hôpital. C’est l’ouvrier de Haute Loire qui va perdre toute une partie de son salaire parce qu’il n’a pas un logement qui est à proximité de son entreprise. Donc moi ce que je dis…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Laurent WAUQUIEZ, juste une précision là-dessus, vous ne m’avez pas tellement convaincu là-dessus parce que quand quelqu’un trouve un emploi effectivement à Paris et qu’il doit se loger, vous connaissez les délais d’attente pour obtenir un logement social, même s’il a effectivement un emploi et qu’il est donc prioritaire, dans votre proposition, qu’en est-ce qu’on lui proposera son logement ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non mais aujourd'hui quelqu’un, par exemple sur les zones tendues comme les grosses agglomérations, quelqu’un qui travaille, qui a un emploi, même s’il a un petit salaire, c’est un travailleur modeste, il n’a aucune chance d’accéder à un logement social.
 
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Mais pour l’apprenti là que vous citiez, qui va travailler à Paris chez un boulanger, qui ne peut pas se loger, il ne pourra pas plus se loger demain avec votre proposition Laurent WAUQUIEZ ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Si parce qu’on a quand même un certain nombre de logements sociaux qui sont ouverts et donc dans les critères de priorité, il pourrait, lui, enfin avoir sa chance. Et l’autre chose qu’on propose, c’est que dans les nouveaux programmes de construction de logements sociaux, et là je vous rejoins tout à fait, dans cette proposition, ça suppose aussi de continuer à construire des logements sociaux, eh bien on propose dans les nouveaux programmes de constructions, d’en réserver une partie aux gens qui travaillent. Et je ne sais pas si ça c’est un scandale, peut-être que ça choque le politiquement correct de dire qu’il faut aussi penser aux travailleurs modestes, c’est quelque chose qu’on assume. Et qu’on assume avec notre groupe parce que ce qu’on porte comme conviction, c’est que quand on raisonne social en France, on ne peut pas oublier les travailleurs et les travailleurs modestes, parce qu’on a aussi un problème là-dessus. On a aussi un problème quand vous avez quelqu’un qui travaille chaque jour et qui va laisser toute une partie de son salaire à cause de difficultés de logement ou de transport. Et à mon sens le logement social doit aussi prendre ça en compte. Je n’oppose pas les travailleurs modestes et les chômeurs, je dis juste qu’il faut aussi être capable d’écouter les situations difficiles des salariés modestes qui ont des grosses difficultés de logement.
 
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Alors une question concrète d’actualité sur évidemment l’accord à Bruxelles, on a bien compris que c’est d’abord un accord pour sauver la Grèce, puisqu’on efface la moitié de l’ardoise des banques sur la Grèce, les banques vont devoir payer, faire des efforts, mais comment elles vont payer ces banques, est-ce que nous, contribuables, on va devoir d’une manière ou d’une autre, par exemple en devenant actionnaires des banques, aider les banques françaises ?
 
LAURENT WAUQUIEZ D’abord ce n’est pas un accord pour sauver la Grèce, c’est un accord pour sauver l’Europe et l’euro. Si l’euro passe au tapis, vous auriez une envolée de votre prix d’essence, vous auriez une envolée de vos taux d’emprunt, vous auriez une envolée du coût de l’achat et de la vie pour tous les Français. Donc ce n’est pas pour sauver la Grèce, c’est aussi pour nous sauver nous-mêmes et pour sauver l’euro. Et puis la deuxième chose, c’est qu’on demande effectivement aux banques de participer à l’effort, ça ne peut pas être que les Etats, ça ne peut pas être que les contribuables, il faut aussi que les banques participent. Et ça, c’est un de nos repères très forts sur la Droite sociale, on rentre dans une période où il faut qu’on fasse collectivement des efforts, mais il faut que les efforts, ils soient équitablement répartis, pas toujours les mêmes, pas toujours les classes moyennes, les classes moyennes modestes auxquelles on demande de faire tous les efforts. Là, sur le plan, sur la Grèce, les banques doivent aussi participer, ça me semble quelque chose d’équitable.
 
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN Merci beaucoup Laurent WAUQUIEZ, vous étiez aujourd'hui sur l’antenne au titre de patron du club de la Droite sociale.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement le 18 novembre 2011