Interview de M. Maurice Leroy, ministre de la ville à France 2 le 16 décembre 2011, sur la politique de rénovation urbaine dans les banlieues et les quartiers, la sécurité la violence et la délinquance des quartiers défavorisés.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France 2

Texte intégral


 
 
ROLAND SICARD Avant de parler de la Ville, on va revenir sur l’information concernant Jacques CHIRAC, il a été condamné à deux ans de prison avec sursis. C’est une condamnation qui tombe tard, est-ce qu’elle tombe trop tard ?
 
MAURICE LEROY Vous connaissez le vieil adage, « duralex, cedelex », je traduis, « la loi est dure, mais c’est la loi », personne n’a d’impunité, personne n’est au dessus de la loi. Alors la loi est dure, mais c’est la loi. Et évidemment 20 ans après ça fait un peu drôle comme décision de justice.
 
ROLAND SICARD Est-ce que c’est justifié ?
 
MAURICE LEROY Ecoutez, je suis ministre de la République, vous imaginez que je me mette à commenter une décision de justice « don’t act », les décisions de justice s’appliquent. Ensuite le citoyen que je suis s’interroge sur le fait qu’effectivement on puisse prendre une telle décision 20 ans après alors que Jacques CHIRAC dans l’image des Français, c’est ce qui restera au final, les a protégé, a été un chef d’Etat respecté. Moi, je n’oublie pas l’épisode d’Irak où Jacques CHIRAC a fait entendre la voix de la France avec beaucoup de courage. Voilà je lui garde cette estime.
 
ROLAND SICARD Est-ce qu’il faut changer le statut pénal du président de la République ?
 
MAURICE LEROY Ce sera sans doute à un moment donné une question, sans doute de la campagne présidentielle. Elle revient d’ailleurs comme un serpent de mer dans la vie politique cette réflexion sur le statut pénal du président de la République. C’est très compliqué parce qu’en même temps vous devez protéger le président de la République, on ne peut pas faire autrement, ce n’est pas de le mettre impuni, au dessus des lois, c’est que vous devez protéger le président de la République. Et en même temps vous ne pouvez pas faire comme ci il n’était pas un justiciable comme un autre. Mais le temps de sa mandature, il n’est pas un justiciable comme un autre, ce n’est pas possible. Ce n’est pas propre à la France, c’est dans tous les Etats.
 
ROLAND SICARD Sur un autre sujet, on a appris que la France était entrée en récession, est-ce que ça impose ce fameux troisième plan de rigueur que le gouvernement a toujours refusé jusqu’ici, si la France veut garder son triple A ?
 
MAURICE LEROY Vous savez, je regarde ce qui se passe aux Etats-Unis, les Etats- Unis ont perdu leur triple A, est-ce que ça les empêche d’aller sur les marchés financiers et de se financer, non.
 
ROLAND SICARD On a le sentiment que le gouvernement banalise cette perte.
 
MAURICE LEROY Mais le gouvernement a raison de banaliser cette perte du triple A, vous savez, moi je n’ai pas l’habitude de pratiquer la langue de bois, effectivement on a raison de banaliser cette perte. Elle s’est faite aux Etats-Unis, elle ne pose pas de difficulté. Il n’y a pas de cataclysme parce que nous perdrions le triple A. Ca ne serait pas une bonne nouvelle, soyons clair, ce ne serait pas une bonne nouvelle…
 
ROLAND SICARD Mais est-ce qu’il est virtuellement perdu ?
 
MAURICE LEROY D’abord ce n’est pas fait, attendons les choses et puis vous savez moi je suis un peu prudent sur ces agences de notation, je pense qu’il y a beaucoup de subjectivités, beaucoup de politiques aussi de la part de ces agences et je n’oublie pas d’ailleurs qu’elles avaient été très critiquées au moment de la Grèce. Donc le sujet, ce n’est pas le dictat des agences de notation, le sujet c’est que le gouvernement français tout entier derrière François FILLON et le président de la République, prenne les bonnes décisions pour protéger les Français et c’est ce que nous faisons.
 
ROLAND SICARD Je reviens à ma question, est-ce que ce triple A est virtuellement perdu ?
 
MAURICE LEROY Absolument pas, il n’y a aucune raison qu’il soit virtuellement perdu. D’ailleurs virtuellement est un bon mot s’agissant des agences de notation, et on serait inspiré parfois de nous intéresser davantage à l’économie réelle, voilà. Les chefs d’entreprise qui réalisent avec leurs salariés, qui avancent, moi en Loir et Cher, j’ai fait une super réunion cette semaine avec 250 chefs d’entreprise qui avaient beaucoup de talents, qui innovent y compris dans les petites et moyennes entreprises. Parlons aussi des réussites économiques françaises, il y en a beaucoup.
 
ROLAND SICARD Sur la politique de la ville, Nicolas SARKOZY avait parlé de plan MARSHALL des banlieues en 2007, on a l’impression qu’il est un peu passé aux oubliettes.
 
MAURICE LEROY Non, ce n’est pas que Nicolas SARKOZY, vous savez dans les campagnes électorales, ce sera d’ailleurs sans doute quelque chose qui va changer du fait de la crise dans la prochaine campagne présidentielle de 2012 et tant mieux, parce que les Français ne croient plus et ils ont bien raison, je les rejoins là dessus, les Français ne croient pas aux effets d’annonces qui sont des annonces sans effet. Le plan MARSHALL, c’était dans le programme de François BAYROU, j’en sais quelque chose, j’étais son porte-parole, c’était dans le programme de Ségolène ROYAL, tout le monde parlait de plan MARSHALL. Le plan MARSHALL, ça voulait dire simplement…
 
ROLAND SICARD Et tout le monde a eu tort y compris Nicolas SARKOZY ?
 
MAURICE LEROY Mais vous savez non, personne n’a eu tort de dire, qu’est-ce que ça voulait dire le plan MARSHALL ? C’est une image qui voulait dire, il faut mettre le paquet pour la ville. Ca a été fait, Roland SICARD, grâce à l’action de Jean-Louis BORLOO, la rénovation urbaine, c’est 42 milliards d’euros dans les quartiers et cela se voit. Je suis en déplacement ministériel sur le terrain chaque semaine, car les Français attendent de leurs ministres qu’ils se retroussent les manches tous ensemble et qu’ils travaillent. Viendra le temps de la campagne, mais nous sommes dans le temps toujours du travail. Eh bien la rénovation urbaine, ça marche. Comme par exemple, ministre de la Ville, je fais en sorte que les associations qui créent le lien social sur le terrain dans les quartiers populaires, quand elles perçoivent leur crédit d’Etat, ça ne sert plus comme il y a 20 ans à payer à la banque les agios d’année « N – 1 » eh bien là on fait avancer les choses dans le bon sens. Et puis il y a beaucoup de talents dans les quartiers. Avant-hier j’étais avec 12 000 jeunes diplômés avec l’association nationale « nos quartiers ont des talents » et franchement ça faisait du bien, d’ailleurs si un peu dans nos médias on pouvait voir ces réussites avant les fêtes de Noël, ça ne ferait pas de mal à notre moral à tous.
 
ROLAND SICARD Et pourtant on a le sentiment que la violence augmente dans les banlieues ?
 
MAURICE LEROY Non, c’est tout le, pardon c’est tout le contraire, le rapport que m’a remis la préfet Bernadette MALGORN qui est l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, démontre et je m’en réjouis que l’action de Claude GUEANT, ministre de l’Intérieur est efficace dans les quartiers populaires.
 
ROLAND SICARD Et les braquages, les fusillades, ça augmente.
 
MAURICE LEROY Oui mais ça c’est de la délinquance, ce n’est pas les quartiers, braquage, ce n’est pas le quartier populaire, il n’y est pour rien le quartier populaire, il subit ça ; donc ça ce sont des actes de délinquance, ça n’a rien à voir avec les quartiers populaires. Ca se peut se faire dans les beaux quartiers comme dans les quartiers populaires. Ca, ça relève de la délinquance et de la politique de sécurité que mène très bien Claude GUEANT.
 
ROLAND SICARD Sur la politique, vous êtes issu du Nouveau Centre, le Nouveau Centre a un candidat, Hervé MORIN, vous ne le soutenez pas, bizarre.
 
MAURICE LEROY Oui, parce que pour le moment le Nouveau Centre n’a pas de candidat. Hervé MORIN s’est autoproclamé seul pour le moment candidat. C’est son droit, c’est un candidat légitime. Je pense simplement que je ne suis pas le seul à le penser, avec François SAUVADET, André SANTINI, Jean-Christophe LAGARDE, Christian BLANC, Valérie LETARD, beaucoup de députés et de sénateurs et de dirigeants, de militants aussi, nous considérons que cette candidature est inopportune face à la crise.
 
ROLAND SICARD Vous voterez pour Nicolas SARKOZY ?
 
MAURICE LEROY Vous savez moi je vais me battre en 2012 personnellement dans cette élection pour faire en sorte que l’on ait de l’équité sociale et territoriale. L’équité sociale pour moi par exemple, c’est que l’on conditionne, je vais vous donner un exemple concret, que l’on conditionne les ressources des familles pour l’attribution des allocations familiales. Quand la dépense publique est ce qu’elle est, quand l’argent public est rare, on doit faire mieux et plus juste. Et puis équité territoriale, je suis d’un département qui sait pertinemment, dans le Loir et Cher, et c’est le cas de beaucoup de départements français, qu’on a besoin de faire attention à l’équilibre des services publics. Donc je vais me battre pour l’équité sociale et territoriale en 2012.
 
ROLAND SICARD Je disais que vous êtes Nouveau Centre, l’ancien Centre qui c’est ? C’est François BAYROU ?
 
MAURICE LEROY C’est… immanquablement François BAYROU représente le Centre. J’ai des désaccords avec François BAYROU, mais il est clair que François BAYROU est perçu comme le candidat du Centre, c’est clair. Et vous savez…
 
ROLAND SICARD Mais l’ancien.
 
MAURICE LEROY Oui bien sûr. Oui, c’est la troisième fois qu’il est candidat donc nous verrons bien. Vous savez, moi je crois beaucoup en ces temps de crise à l’union nationale, je pense qu’on a besoin de rassembler, droite, gauche et centre pour travailler à protéger les Français, préserver l’Europe, parce que c’est l’Europe qui protège les Français. Donc voilà moi je crois beaucoup à l’union nationale et je me battrai pour que ces conditions puissent être réunies. Vous savez l’économie, elle n’est ni de droite, ni de gauche, elle est efficace ou pas et on agit avec François FILLON et Nicolas SARKOZY, on le démontre tous les jours.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 20 décembre 2011