Déclaration de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères et européennes, lors de la conférence de presse conjointe avec Mme Tawakkul Karman, Prix Nobel de la Paix, sur le soutien de la France au processus de transition politique au Yemen et aux sanctions des crimes commis par le régime en Syrie, Paris le 7 novembre 2011.

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Circonstance : Visite en France de Mme Tawakkul Karman, Prix Nobel de la Paix, à Paris le 7 novembre 2011

Texte intégral

Mme Karman est animée par une ardente conviction pour le combat qu’elle mène en faveur des libertés et de la jeunesse de son pays, le Yémen. J’ai assuré Mme Karman que la France, comme elle l’a fait à l’occasion des Printemps arabes, est aux côtés de cette jeunesse qui se bat pour ses libertés fondamentales et pour construire un État de droit.
Ce combat est difficile, nous le savons, mais la France s’engagera pour faire en sorte que la situation actuelle, caractérisée à nouveau par la violence et des tueries inacceptables puisse cesser le plus vite possible. Nous avons soutenu et voté, bien entendu, la résolution 2014 du Conseil de sécurité qui a été adoptée à l’unanimité et qui enjoint aux autorités yéménites d’engager rapidement et sans délai le processus de transition politique. Cette résolution prévoit la mise en place d’une Commission d’enquêtes qui indiquera quelles sont les mesures à prendre pour lutter contre les crimes qui ont été commis. J’ai également indiqué à Mme Karman que j’étais prêt à discuter avec mes collègues européens des mesures à prendre pour faire respecter ces résolutions. J’ai également dit à Mme Karman que notre action serait d’autant plus efficace que l’opposition yéménite se fédérerait et s’organiserait.
Nous avons aussi parlé des valeurs que nous partageons, des valeurs de démocratie, d’État de droit et j’ai été heureux d’entendre Mme Karman évoquer les grands principes républicains auxquels nous sommes attachés en France : la liberté, l’égalité, la fraternité et, en particulier, la dignité de la femme.
Dans un monde où les raisons d’inquiétude et de pessimisme sont nombreuses, cela fait chaud au cœur de rencontrer une personne comme Mme Karman.
Q - Qu’avez-vous répondu à Mme Karman concernant le gel des avoirs du président yéménite et de la soumission de son dossier à la CPI ? Et concernant la Syrie, l’opposition syrienne dans la ville de Homs a réclamé une protection internationale. Comment avez-vous l’intention de traiter cette demande ?
R - Sur les demandes de Mme Karman, j’ai déjà répondu dans mon propos. Pour nous, la résolution 2014 ouvre la voie à une commission d’enquêtes qui établira s’il y a lieu de poursuivre les crimes qui pourraient être soumis à la Justice internationale ; nous y sommes tout à fait ouverts.
S’agissant des sanctions, j’ai indiqué que nous en débattrions avec nos collègues européens. Nous avons pris des sanctions successives, comme vous le savez, sur la Syrie, et je pense que le gel des avoirs du pouvoir au Yémen pourrait être effectivement étudié dans de brefs délais. Nous allons regarder cela puisque nous nous réunissons à Bruxelles lundi prochain.
En ce qui concerne la Syrie, vous connaissez tout à fait nos positions. Nous pensons que le comportement du régime est absolument inacceptable, que l’on ne peut pas lui faire confiance en réalité et que son acceptation du plan de la Ligue arabe a été marquée, dans les heures qui ont suivi, par des nouvelles répressions et de nouveaux massacres.
Nous déployons notre action dans trois directions :
Resserrer notre concertation avec les pays de la région, les pays arabes, la Turquie.
En second lieu, resserrer nos liens avec l’opposition syrienne qui s’organise et avec laquelle nous avons des relations suivies.
En troisième lieu, il faut poursuivre notre action au Conseil de sécurité. J’en ai parlé moi-même à Cannes avec certains membres du Conseil de sécurité, comme le Brésil, et nous avons bien évidemment entendu les appels qui ont été lancés par l’opposition syrienne.
Nous regarderons donc cela en étroite liaison avec l’ensemble de nos partenaires au Conseil de sécurité.
Q - (question en anglais concernant la Grèce)
R - Là on change de territoire, on repasse au nord de la Méditerranée. Vous savez ce qui s’est passé à Cannes. Ce que nous avons dit au gouvernement grec est très clair, c’est à vous de décider la manière dont vous voulez consulter le peuple grec. Nous ne nous sommes jamais opposés à un référendum en Grèce. Nous avons simplement dit que si la Grèce veut bénéficier de l’aide européenne, elle doit respecter les engagements qu’elle a pris et, notamment, mettre en œuvre le plan de sauvegarde sur lequel elle s’est engagée.
Les choses ont évolué dans la bonne direction. Aujourd’hui, l’unité nationale semble se constituer en Grèce, ce qui est un point positif. Des élections auront sans doute lieu mais ce qui est important, c’est que le plan de sauvetage de la Grèce soit ratifié le plus vite possible.
Q - Jusqu’à aujourd’hui, les sanctions n’ont rien donné : Israël menace d’attaquer l’Iran. Que pouvons-nous faire ?
R - Je me suis déjà exprimé à plusieurs reprises hier sur ce point ainsi que ce matin. Vous connaissez notre position. Nous considérons que l’Iran doit abandonner le programme nucléaire qu’il développe et qui a des fins très vraisemblablement militaires. Nous attendons le prochain rapport de l’AIEA qui sera déposé demain. J’ai dit qu’il fallait tout faire pour éviter ce qu’aurait d’irréparable une intervention militaire.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 novembre 2011