Texte intégral
Q - (à propos de la règle dor)
R - Sagissant de la règle dor, il est prématuré daffirmer quil faudra modifier le texte qui a été adopté par lAssemblée nationale et par le Sénat. La Commission européenne se penchera sur le sujet. Nous ne sommes pas certains que le projet de loi organique soit conforme aux souhaits des pays signataires de laccord de Bruxelles. De plus, une demande collective, visant à fixer une date, comme lont fait les Allemands, est possible, ce qui impliquerait de revoir le texte. Cest la norme constitutionnelle qui servira de référence pour la CJE, non la loi organique. Il est donc prématuré, je le répète, de se prononcer sur la nécessité, ou non, de modifier le texte adopté en France.
Q - (à propos de la notion de loi de programmation pluriannuelle)
R - Jai eu un échange sur le sujet avec Mme Élisabeth Guigou. La loi de programmation pluriannuelle ne suffira probablement pas. La Commission fera des propositions dans le courant du mois de janvier. Il faudra, à mon sens, fixer un cadre constitutionnel à la règle dor. Sagissant du MES, il sera doté de 80 milliards deuros, la part française sélevant à 20 %, soit à 16 milliards. Largent sera probablement versé en plusieurs fois. Un collectif budgétaire sera nécessaire en janvier 2012, non tant pour le décaissement que pour adapter le cadre juridique. Ce sont les circonstances qui lexigent.
La France souhaitait cumuler le montant du FESF - 280 milliards deuros - à celui du MES, pour augmenter leffet de levier, sans oublier la part additionnelle du FMI, ce qui nous aurait permis datteindre sans difficulté les 1 000 milliards deuros prévus dans le précédent accord des chefs dÉtat et de gouvernement. Les Allemands ne lont pas souhaité : le MES disposera donc dune dotation en capital de 80 milliards deuros pour un plafond de 500 milliards, avec une contribution supplémentaire au FMI de 200 milliards deuros, sous la forme de prêts bilatéraux, afin dinciter dautres pays à contribuer, via le FMI, à leffet de levier et donc à participer à ce fonds.
Q - (à propos du plafond des 500 milliards deuros du MES)
R - Cest la raison pour laquelle nous souhaitions que le MES puisse fonctionner comme une banque. La question de la licence bancaire pour le fonds européen se pose de la même manière. La BCE a elle-même proposé de le gérer - cest important de le souligner.
Q - (à propos du rôle de la BCE)
R - Cest un geste de la part de la BCE vis-à-vis du MES en vue de lui donner de la crédibilité. La BCE aura un rôle technique de conseil auprès des dirigeants du mécanisme pour le rendre efficace sur les marchés.
Sagissant de la BCE, on saligne sur la jurisprudence de Strasbourg et laccord Monti-Merkel-Sarkozy. On laisse le soin à la Banque centrale européenne de mener sa politique en toute indépendance, sans livrer ses décisions au débat public.
Jobserve quen décidant détendre à trois ans la maturité maximale de ses opérations de liquidité, la BCE a fait un geste en direction des banques qui devrait, conformément à notre souhait, alléger la pression de manière significative. Je souhaite évidemment que les banques continuent dacheter des obligations de dette françaises.
Je me suis battu pour que la Grèce soit un élément prioritaire de la négociation. Le virus sest immiscé dans le cadre de laccord de Deauville, sous la forme de la participation du secteur privé, qui est à lorigine de la défiance progressive et profonde vis-à-vis de leuro. Les Allemands en général, le ministre allemand des finances, Wolfgang Schäuble, et la Bundesbank en particulier, souhaitaient maintenir cette implication. La bataille a été rude mais cest une vraie victoire qui permettra de rassurer les marchés sur le long terme.
Est-ce à dire que seuls les États, cest-à-dire les contribuables, participeront aux efforts ? Le message, cest que les États, quel que soit leur niveau dendettement, rembourseront leurs dettes. Les banques, du reste, participeront à ce remboursement au travers des dispositifs qui les relient aux États. Il importait avant tout de garantir aux épargnants et aux investisseurs le remboursement, à plus ou moins long terme - cinq, dix ou vingt ans - de largent quils ont placé dans la zone euro. La fin de limplication du secteur privé est le début de la renaissance dun processus vertueux de confiance.
Q - (à propos dune défaillance possible de la Grèce, du dossier Dexia, de la compatibilité de la règle dor allemande avec laccord de Bruxelles, des conditions de prêt du système bancaire aux États, de la compatibilité du calendrier de laccord avec lévolution des marchés et du lien entre FESF et MES)
R - Monsieur Bouvard, le dispositif est conçu pour éviter le scénario que vous évoquez ! Le texte se réfère au traitement traditionnel des problèmes de dette par le FMI, sur le modèle argentin.
En ce qui concerne Dexia, la Belgique, comme nous lavions fait, a notifié sa participation à la Commission européenne hier - plus tard que prévu en raison du changement de gouvernement et du drame de Liège. Le montant est de 45 milliards deuros conformément à laccord conclu. Nous attendons la réponse de la Commission.
Monsieur Eckert, la règle dor allemande est sans doute la plus conforme à ce que peut souhaiter la Commission puisquelle chiffre le déficit structurel autorisé et est assortie dun calendrier. En outre, cest une norme de niveau constitutionnel.
La BCE ouvre des liquidités à trois ans en prêtant à 1 %, mais noublions pas que ce faible taux est compensé par dimportants dépôts de collatéral. Les banques ne dégageront donc certainement pas 1,5 ou 2 % de marge. Il sagit simplement de leur permettre de fonctionner, de racheter des dettes dÉtat et de jouer leur rôle institutionnel. En outre, la BCE prête à court terme alors que les banques prêtent à long terme. Lessentiel est que les banques puissent faire leur travail au cours des trois ans à venir, mais ce ne sera pas gratuit !
( ) Monsieur Chartier, je lai dit, le MES ne sajoutera pas au FESF comme nous le souhaitions, mais va sy substituer le moment venu. Le FESF était temporaire, le MES sera permanent.
Q - (à propos des montants financiers engagés dans les fonds)
R - Le montant correspond à leffet de levier, qui varierait entre 3 et 5 selon lévolution escomptée des marchés, sur une base de 280 milliards deuros. Ira-t-on assez loin avec un potentiel de 500 milliards ? Il faudrait atteindre au moins 1 000 milliards deuros, mais tout dépendra de létat des marchés. Les ressources additionnelles de 200 milliards deuros du FMI viendront prendre le relais des 500 milliards deuros de capacité initiale et nous espérons que lapport de fonds souverains, voire de fonds privés, renforcera leffet de levier.
Q - (à propos dun engagement de 1 000 milliards deuros et de la participation éventuelle de la Chine)
R - Par effet de levier, non par dotation en capital.
Q - (à propos du rôle du Parlement dans les choix budgétaires présents et à venir)
R - En effet, les nouvelles dispositions vont entraîner dimportantes modifications. Je précise que le contrôle ne portera pas sur les choix budgétaires, mais sur la trajectoire ; nous en avions longuement parlé à propos de la règle dor. Cela étant, le gouvernement va être obligé de travailler différemment. Nous devrions donc créer un groupe de travail commun pour déterminer ensemble - Bercy et la commission des Finances - la méthode la plus efficace de préparation du budget. Peut-être cela passera-t-il par une association en amont. En tout cas, on ne pourra en rester au statu quo. Il suffit de voir la peine que nous avons eue à avancer assez vite en Conseil des ministres pour vous permettre de travailler ne serait-ce que quinze jours sur le texte ! Surtout juste après lété : le Parlement européen, qui siège en session unique, sera tenté de nous demander à tout moment où nous en sommes, ce que ne pourra faire le Parlement français. Nous devrons commencer à réfléchir à la méthode dès la rentrée des vacances de Noël, car ensuite, tout va aller très vite. Cela nous permettra dadresser un message collectif sur le rôle de la représentation nationale dans le nouveau dispositif de surveillance budgétaire.
Q - (à propos du contrôle supranational des choix budgétaires nationaux)
R - Cest ce quauraient voulu les Allemands, qui souhaitaient confier à la Cour de justice européenne la surveillance des budgets et de léquilibre. Nous avons obtenu laccord des Vingt-Six pour limiter le contrôle de la Cour à la transposition de la règle dor. Il est désormais entendu que la France nentend pas dépasser cette ligne rouge.
Cela étant, la Commission entre déjà dans le détail des mesures. Elle ne dit jamais aux États ce quils doivent faire ou ne pas faire, mais les prévient quand ce quils proposent ne lui paraît pas compatible avec ses expertises, ses analyses et ses prévisions de croissance. À nous de revoir alors notre copie. Mais la tentation de pousser le contrôle plus loin sera grande. Voilà pourquoi je serais heureux den parler avec vous en janvier, après le collectif. Nous allons vers la convergence. Il faut donc sentendre sur la méthode, le calendrier et les objectifs.
Q - (à propos du degré de souveraineté conservé)
R - Par définition, la convergence limite les choix de politique publique en matière budgétaire. Rappelons quen Allemagne, le taux de limpôt sur les sociétés, au sujet duquel M. Schäuble et moi-même présenterons le 23 janvier nos propositions, est de 14 % pour la part fédérale, de 30 % en comptant les Länder. Encore la comparaison est-elle ici à notre avantage, ce qui nest pas le cas dans tous les domaines.
( )
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 décembre 2011
R - Sagissant de la règle dor, il est prématuré daffirmer quil faudra modifier le texte qui a été adopté par lAssemblée nationale et par le Sénat. La Commission européenne se penchera sur le sujet. Nous ne sommes pas certains que le projet de loi organique soit conforme aux souhaits des pays signataires de laccord de Bruxelles. De plus, une demande collective, visant à fixer une date, comme lont fait les Allemands, est possible, ce qui impliquerait de revoir le texte. Cest la norme constitutionnelle qui servira de référence pour la CJE, non la loi organique. Il est donc prématuré, je le répète, de se prononcer sur la nécessité, ou non, de modifier le texte adopté en France.
Q - (à propos de la notion de loi de programmation pluriannuelle)
R - Jai eu un échange sur le sujet avec Mme Élisabeth Guigou. La loi de programmation pluriannuelle ne suffira probablement pas. La Commission fera des propositions dans le courant du mois de janvier. Il faudra, à mon sens, fixer un cadre constitutionnel à la règle dor. Sagissant du MES, il sera doté de 80 milliards deuros, la part française sélevant à 20 %, soit à 16 milliards. Largent sera probablement versé en plusieurs fois. Un collectif budgétaire sera nécessaire en janvier 2012, non tant pour le décaissement que pour adapter le cadre juridique. Ce sont les circonstances qui lexigent.
La France souhaitait cumuler le montant du FESF - 280 milliards deuros - à celui du MES, pour augmenter leffet de levier, sans oublier la part additionnelle du FMI, ce qui nous aurait permis datteindre sans difficulté les 1 000 milliards deuros prévus dans le précédent accord des chefs dÉtat et de gouvernement. Les Allemands ne lont pas souhaité : le MES disposera donc dune dotation en capital de 80 milliards deuros pour un plafond de 500 milliards, avec une contribution supplémentaire au FMI de 200 milliards deuros, sous la forme de prêts bilatéraux, afin dinciter dautres pays à contribuer, via le FMI, à leffet de levier et donc à participer à ce fonds.
Q - (à propos du plafond des 500 milliards deuros du MES)
R - Cest la raison pour laquelle nous souhaitions que le MES puisse fonctionner comme une banque. La question de la licence bancaire pour le fonds européen se pose de la même manière. La BCE a elle-même proposé de le gérer - cest important de le souligner.
Q - (à propos du rôle de la BCE)
R - Cest un geste de la part de la BCE vis-à-vis du MES en vue de lui donner de la crédibilité. La BCE aura un rôle technique de conseil auprès des dirigeants du mécanisme pour le rendre efficace sur les marchés.
Sagissant de la BCE, on saligne sur la jurisprudence de Strasbourg et laccord Monti-Merkel-Sarkozy. On laisse le soin à la Banque centrale européenne de mener sa politique en toute indépendance, sans livrer ses décisions au débat public.
Jobserve quen décidant détendre à trois ans la maturité maximale de ses opérations de liquidité, la BCE a fait un geste en direction des banques qui devrait, conformément à notre souhait, alléger la pression de manière significative. Je souhaite évidemment que les banques continuent dacheter des obligations de dette françaises.
Je me suis battu pour que la Grèce soit un élément prioritaire de la négociation. Le virus sest immiscé dans le cadre de laccord de Deauville, sous la forme de la participation du secteur privé, qui est à lorigine de la défiance progressive et profonde vis-à-vis de leuro. Les Allemands en général, le ministre allemand des finances, Wolfgang Schäuble, et la Bundesbank en particulier, souhaitaient maintenir cette implication. La bataille a été rude mais cest une vraie victoire qui permettra de rassurer les marchés sur le long terme.
Est-ce à dire que seuls les États, cest-à-dire les contribuables, participeront aux efforts ? Le message, cest que les États, quel que soit leur niveau dendettement, rembourseront leurs dettes. Les banques, du reste, participeront à ce remboursement au travers des dispositifs qui les relient aux États. Il importait avant tout de garantir aux épargnants et aux investisseurs le remboursement, à plus ou moins long terme - cinq, dix ou vingt ans - de largent quils ont placé dans la zone euro. La fin de limplication du secteur privé est le début de la renaissance dun processus vertueux de confiance.
Q - (à propos dune défaillance possible de la Grèce, du dossier Dexia, de la compatibilité de la règle dor allemande avec laccord de Bruxelles, des conditions de prêt du système bancaire aux États, de la compatibilité du calendrier de laccord avec lévolution des marchés et du lien entre FESF et MES)
R - Monsieur Bouvard, le dispositif est conçu pour éviter le scénario que vous évoquez ! Le texte se réfère au traitement traditionnel des problèmes de dette par le FMI, sur le modèle argentin.
En ce qui concerne Dexia, la Belgique, comme nous lavions fait, a notifié sa participation à la Commission européenne hier - plus tard que prévu en raison du changement de gouvernement et du drame de Liège. Le montant est de 45 milliards deuros conformément à laccord conclu. Nous attendons la réponse de la Commission.
Monsieur Eckert, la règle dor allemande est sans doute la plus conforme à ce que peut souhaiter la Commission puisquelle chiffre le déficit structurel autorisé et est assortie dun calendrier. En outre, cest une norme de niveau constitutionnel.
La BCE ouvre des liquidités à trois ans en prêtant à 1 %, mais noublions pas que ce faible taux est compensé par dimportants dépôts de collatéral. Les banques ne dégageront donc certainement pas 1,5 ou 2 % de marge. Il sagit simplement de leur permettre de fonctionner, de racheter des dettes dÉtat et de jouer leur rôle institutionnel. En outre, la BCE prête à court terme alors que les banques prêtent à long terme. Lessentiel est que les banques puissent faire leur travail au cours des trois ans à venir, mais ce ne sera pas gratuit !
( ) Monsieur Chartier, je lai dit, le MES ne sajoutera pas au FESF comme nous le souhaitions, mais va sy substituer le moment venu. Le FESF était temporaire, le MES sera permanent.
Q - (à propos des montants financiers engagés dans les fonds)
R - Le montant correspond à leffet de levier, qui varierait entre 3 et 5 selon lévolution escomptée des marchés, sur une base de 280 milliards deuros. Ira-t-on assez loin avec un potentiel de 500 milliards ? Il faudrait atteindre au moins 1 000 milliards deuros, mais tout dépendra de létat des marchés. Les ressources additionnelles de 200 milliards deuros du FMI viendront prendre le relais des 500 milliards deuros de capacité initiale et nous espérons que lapport de fonds souverains, voire de fonds privés, renforcera leffet de levier.
Q - (à propos dun engagement de 1 000 milliards deuros et de la participation éventuelle de la Chine)
R - Par effet de levier, non par dotation en capital.
Q - (à propos du rôle du Parlement dans les choix budgétaires présents et à venir)
R - En effet, les nouvelles dispositions vont entraîner dimportantes modifications. Je précise que le contrôle ne portera pas sur les choix budgétaires, mais sur la trajectoire ; nous en avions longuement parlé à propos de la règle dor. Cela étant, le gouvernement va être obligé de travailler différemment. Nous devrions donc créer un groupe de travail commun pour déterminer ensemble - Bercy et la commission des Finances - la méthode la plus efficace de préparation du budget. Peut-être cela passera-t-il par une association en amont. En tout cas, on ne pourra en rester au statu quo. Il suffit de voir la peine que nous avons eue à avancer assez vite en Conseil des ministres pour vous permettre de travailler ne serait-ce que quinze jours sur le texte ! Surtout juste après lété : le Parlement européen, qui siège en session unique, sera tenté de nous demander à tout moment où nous en sommes, ce que ne pourra faire le Parlement français. Nous devrons commencer à réfléchir à la méthode dès la rentrée des vacances de Noël, car ensuite, tout va aller très vite. Cela nous permettra dadresser un message collectif sur le rôle de la représentation nationale dans le nouveau dispositif de surveillance budgétaire.
Q - (à propos du contrôle supranational des choix budgétaires nationaux)
R - Cest ce quauraient voulu les Allemands, qui souhaitaient confier à la Cour de justice européenne la surveillance des budgets et de léquilibre. Nous avons obtenu laccord des Vingt-Six pour limiter le contrôle de la Cour à la transposition de la règle dor. Il est désormais entendu que la France nentend pas dépasser cette ligne rouge.
Cela étant, la Commission entre déjà dans le détail des mesures. Elle ne dit jamais aux États ce quils doivent faire ou ne pas faire, mais les prévient quand ce quils proposent ne lui paraît pas compatible avec ses expertises, ses analyses et ses prévisions de croissance. À nous de revoir alors notre copie. Mais la tentation de pousser le contrôle plus loin sera grande. Voilà pourquoi je serais heureux den parler avec vous en janvier, après le collectif. Nous allons vers la convergence. Il faut donc sentendre sur la méthode, le calendrier et les objectifs.
Q - (à propos du degré de souveraineté conservé)
R - Par définition, la convergence limite les choix de politique publique en matière budgétaire. Rappelons quen Allemagne, le taux de limpôt sur les sociétés, au sujet duquel M. Schäuble et moi-même présenterons le 23 janvier nos propositions, est de 14 % pour la part fédérale, de 30 % en comptant les Länder. Encore la comparaison est-elle ici à notre avantage, ce qui nest pas le cas dans tous les domaines.
( )
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 décembre 2011