Déclaration de M. Henri de Raincourt, ministre de la coopération, sur la coopération décentralisée entre la France et les Territoires palestiniens, à Hébron (Territoires palestiniens) le 23 janvier 2012.

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Circonstance : Déplacement en Israël et dans les Territoires palestiniens, du 22 au 24 janvier 2012

Texte intégral

Monsieur le Premier Ministre,
Messieurs les Ministres,
Monsieur le Maire d’Hébron,
Mesdames et Messieurs,
C’est pour moi un honneur et une joie que d’ouvrir avec vous cette réunion.
Je voudrais d’abord remercier notre hôte, le maire d’Hébron, ainsi que les organisateurs, Cités Unies France, le Réseau de Coopération Décentralisée pour la Palestine et l’Association des pouvoirs locaux palestiniens, ainsi que tous ceux qui ont travaillé pour rendre cette rencontre.
Ces Assises interviennent à un moment important pour la Palestine.
Depuis la Conférence pour l’État palestinien, qui s’est tenue à Paris en 2007 à l’initiative de la France, la construction des institutions palestiniennes, les réformes, la modernisation se sont poursuivies sans relâche sous votre conduite, Monsieur le Premier Ministre.
Il existe aujourd’hui un consensus au sein de la communauté internationale pour dire que la Palestine est prête à devenir un État. Cet État, les Palestiniens le méritent. Et leurs aspirations, alors que le monde arabe est en pleine mutation, ne sont pas moins légitimes que celles de leurs frères tunisiens, égyptiens, libyens ou syriens.
Comme l’a dit le président de la République française aux Nations unies le 23 septembre dernier : «Le Printemps arabe nous impose une obligation morale, une obligation politique de résoudre enfin le conflit du Moyen-Orient. Nous ne pouvons plus attendre !»
C’est parce que la Palestine est prête, c’est aussi parce qu’il y a urgence que la France a voté pour l’adhésion de la Palestine à l’UNESCO, en novembre dernier à Paris.
La position de la France sur le processus de paix est connue. Nous la répétons partout. Elle n’a jamais changé : nous considérons que la paix ne viendra que si elle est le fruit de la volonté des deux parties.
Aujourd’hui, cette volonté n’est pas suffisante et il faut rétablir la confiance entre les partenaires : nous espérons que les réunions qui se tiennent à Amman depuis le début du mois sous l’égide du Quartet et de nos amis jordaniens permettront de progresser sur cette voie. Mais seul un changement de méthode, comme appelé de ses vœux par le président de la République, est de nature à sortir de l’impasse dans laquelle nous nous trouvons : il faut en effet que ceux qui sont intéressés à la paix unissent leurs efforts.
Ce changement de méthode est indispensable mais il ne doit pas nous faire oublier l’essentiel : aucune intervention, aucun engagement extérieur ne pourra se substituer au choix de la paix, ce choix difficile et nécessaire qui n’appartient qu’aux Israéliens et aux Palestiniens.
Le retour de la confiance passe également par l’arrêt des mesures unilatérales qui non seulement sapent la crédibilité des négociations mais mettent également en danger, à court terme, la solution des deux États. Je le redis ici sans ambigüité : il est impératif que la colonisation, les démolitions de maisons, les expulsions cessent. Il en va de l’avenir du processus de paix.
Les relations de coopération décentralisée entre la France et les Territoires palestiniens ont connu un essor considérable depuis la création de l’Autorité palestinienne en 1994. Elles constituent aujourd’hui un réseau particulièrement dense, avec pas moins de 90 partenariats initiés.
Cette coopération, vaste et vivante, est à l’image des liens forts qui unissent la France et la Palestine. Elle est d’abord l’incarnation d’un esprit de solidarité : la France, par l’intermédiaire de ses différents intervenants, consacre 7 millions d’euros par an aux collectivités territoriales palestiniennes ; 2 millions d’euros sont mobilisés annuellement par les collectivités françaises et l’État pour financer des projets. S’y ajoutent les financements de l’Agence française de Développement dont une partie va au Fonds municipal de développement palestinien lequel subventionne vos entités territoriales. Mais ce qui est le plus important est aussi ce qui est le moins quantifiable : la richesse des relations humaines, l’engagement des personnes qui dépassent le cycle des projets et rapprochent les populations et les sociétés civiles des deux pays.
Cette coopération est aussi marquée du sceau de la diversité, une valeur essentielle de nos deux sociétés. Ainsi la coopération décentralisée franco-palestinienne implique, des deux côtés, des collectivités locales de tous niveaux : en France, des communes, des départements et des régions ; en Palestine, des municipalités et des conseils de village, des gouvernorats mais aussi des camps de réfugiés.
L’intervention des collectivités françaises est, dans une large mesure (60 %), concentrée sur les zones centrales de Cisjordanie, notamment sur les districts de Bethléem, Ramallah et Jéricho. Le sud de la Cisjordanie devient aussi un partenaire privilégié. En revanche, les zones difficiles, Gaza, la zone C et Jérusalem-Est restent encore peu présentes sur la carte des relations de coopération décentralisée. J’invite donc les participants à ces assises à réfléchir aux moyens de développer des relations dans ces zones, difficiles d’accès sans doute mais incontournables pour le développement de la Palestine et la création de son État.
Les domaines d’intervention sont eux aussi variés, reflétant la richesse de cette coopération décentralisée mais aussi les besoins des collectivités palestiniennes et les compétences disponibles du côté français. La majorité des partenariats engagés concerne les secteurs socioculturel et sportif, mais l’essentiel des moyens financiers est concentré sur le secteur de l’eau. L’eau c’est la vie, mais l’eau ce doit être aussi la paix. C’est dans cet esprit que la France accueillera au mois de mars prochain le forum mondial de l’eau à Marseille.
Le tourisme et le patrimoine, le développement économique et la coopération universitaire sont également présents dans nos coopérations. Dans ce dernier domaine en particulier, les collectivités et le gouvernement français, à travers le consulat général de France à Jérusalem, financent un nombre important de bourses, qui permettent à plusieurs dizaines d’étudiants palestiniens d’être accueillis en France chaque année.
La coopération décentralisée entre la France et la Palestine est enfin l’incarnation d’un esprit de coordination ; coordination entre les niveaux local et central d’abord. Ainsi je salue la collaboration croissante entre les collectivités françaises et le gouvernement français, notamment à travers le consulat général de France, au service de la coopération avec les collectivités palestiniennes.
De même, l’expertise des collectivités locales françaises est souvent mise à contribution dans les projets de l’Agence française de Développement.
Mais je me félicite également que les représentants des collectivités françaises développent leurs relations avec le ministère palestinien du gouvernement local pour connaître ses priorités. Car il est très important que l’effort de la coopération décentralisée soit aligné sur les priorités sectorielles et géographiques de l’Autorité palestinienne, ce qui garantira un maximum d’efficacité dans l’aide qu’ils pourront apporter à la population.
Soucieux de renforcer cette efficacité, notre ministère et sa délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales, a, quant à lui, décidé de compléter son dispositif de soutien à la coopération décentralisée. Nous espérons ainsi qu’à compter de 2013 un système de financement franco-palestinien pourra être mis en place pour venir en appui aux actions de coopération décentralisée. Cela permettra de définir plus clairement les priorités et de contribuer ainsi au renforcement des capacités du futur État palestinien.
Je suis sûr que ces Assises permettront de créer de nouveaux liens et de lancer de nouveaux projets entre collectivités françaises et palestiniennes. Il est important qu’une table ronde de ces réunions soit consacrée à la coopération décentralisée mise en œuvre entre l’Europe et la Palestine. Il y a là un potentiel considérable, qui ne pourra être actualisé que si nous parvenons à unir nos efforts sur le plan européen.
Mais je ne doute pas que nous y arrivions avec le temps, car nous partageons tous le même attachement pour la Palestine et à la paix.
Sur cette note d’espoir, je vous souhaite pleine réussite dans vos travaux et vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 janvier 2012