Texte intégral
Q - Venons-en maintenant aux Assises de la Coopération décentralisée franco-palestinienne qui se sont ouvertes aujourdhui à Hébron en Cisjordanie, deux jours de réunion pour mettre en évidence limportance de laction des collectivités locales françaises dans les Territoires palestiniens. En ligne, avec nous, le ministre français de la Coopération. Vous avez assisté à louverture des travaux à Hébron. Vous êtes en ligne de Jérusalem. En quelques mots, en quoi consiste cette coopération décentralisée ?
R - La coopération décentralisée, ce sont des collectivités locales françaises qui passent des accords de partenariat avec dautres collectivités locales dans dautres pays. Cela existe dans la plupart des pays. Pour ce qui concerne les Territoires palestiniens, il y a aujourdhui 90 partenariats qui sont établis entre des collectivités françaises et des localités palestiniennes, notamment avec des villes telles que Paris, Lyon, Toulouse ou Bordeaux, mais aussi avec des Conseils régionaux et des Conseils généraux. Cest donc un ensemble important de collectivités territoriales qui permet de financer des projets substantiels déquipement et de développement pour les Territoires palestiniens.
Q - Plus important, Henri de Raincourt, que la coopération au niveau national, au niveau de lÉtat français ?
R - Ce nest pas tout à fait la même chose parce que la coopération nationale au niveau de lÉtat français avoisine les 70 millions deuros par an alors que les collectivités territoriales tournent autour de 2 millions deuros. On nest donc pas à la même échelle, mais je crois que ce quil faut bien voir cest la complémentarité entre laction de lÉtat et laction conduite par les collectivités territoriales. Cest très important parce que cest un message qui existe, des liens qui se créent directement entre les peuples. Ce qui veut dire que quand on travaille pour le développement, quand on travaille pour létablissement de la paix, dune plus grande liberté dans les pays, et pour une meilleure vie démocratique, ce ne sont pas seulement des décisions qui sont prises par les dirigeants - même si elles sont évidemment nécessaires. Tout cela ne peut fonctionner et bien marcher que dans la mesure où les peuples sapproprient eux-mêmes ces politiques. La coopération décentralisée est, je crois, maintenant considérée comme indispensable pour créer une véritable synergie entre les peuples et entre les politiques de développement qui sont menées.
Q - Vous avez vous-même signé une convention ce matin avec le Premier ministre palestinien Salam Fayyad, sur quoi porte-t-elle ?
R - Cette convention porte sur un projet dalimentation en eau potable - de distribution et de traitement de leau potable à Jénine dans le nord de la Cisjordanie. Cest un projet de 10,5 millions deuros qui concerne 125.000 habitants. Cest donc un projet très important qui est mené par lopérateur du gouvernement français, lAgence française de développement, en liaison avec les autorités locales. Lopération se déroulera sur deux années. Quand on sait limportance de leau pour tous les habitants, et ceux de cette région en particulier, je crois que cest une action extrêmement positive.
Q - À propos des ressources en eau précisément, Henri de Raincourt, vous avez vu ce récent rapport parlementaire français, le rapport Glavany, qui parlait de la gestion des ressources en eau et qui utilisait à ce propos le mot «apartheid» pour décrire la façon dont Israël se comportait vis-à-vis des Territoires palestiniens. Reprenez-vous à votre compte ce terme ?
R - Dabord, je veux vous dire quil ne faut pas confondre les pouvoirs. Le pouvoir exécutif na pas de commentaire direct à faire sur les travaux du pouvoir législatif.
Q - Non, ce nest pas le rapport que je vous demandais de juger, cest le terme qui était employé dans ce dernier.
R - Je vous dis quen tant que tel le gouvernement français na pas de jugement à porter sur un mot qui est utilisé par un auteur dun rapport parlementaire.
Q - Donc, vous ne le reprenez pas à votre compte ?
R - En revanche, je crois que les questions posées dans ce rapport sont tout à fait essentielles, tout à fait sensibles. À la place qui est la mienne, en pareilles circonstances, je pense quil vaut mieux essayer dutiliser des mots qui ne sont blessants pour personne, car quand on cherche la concorde, quand on cherche la réunion des bonnes volontés, cela ne se fait pas en blessant les uns ou les autres. Il faut faire attention aux mots que lon utilise parce cela crée des dégâts collatéraux qui parfois mettent en danger lobjet même de laction que lon entend mener.
Q - Alors précisément, Henri de Raincourt, la France soutient le processus de paix. Ce processus de paix israélo-palestinien, il est enlisé, il navance plus. Dans le même temps, la France à travers la coopération dont on parlait, contribue finalement à subventionner une situation qui ne convient à personne. Est-ce quil ny a pas là un problème de stratégie ?
R - La stratégie de la France en la matière est très simple. Nous militons pour deux États dans ce secteur, libres, indépendants, démocratiques qui établissent en eux les conditions dune cohabitation réussie : la sécurité pour lÉtat dIsraël, que naturellement personne ne saurait remettre en question, lÉtat dIsraël reconnu par ses voisins, et deuxièmement la création dun authentique État palestinien parce quaujourdhui, je crois que les progrès qui ont été faits sur les Territoires palestiniens vont permettre denvisager la création de cet État palestinien. Cest une aspiration légitime des habitants de la région à laquelle la communauté internationale doit pouvoir répondre et dans lintérêt, bien compris, des uns et des autres.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 janvier 2012