Texte intégral
Q - Pourquoi, dès votre arrivée, avez-vous souhaité rencontrer ces détenus libérés ?
R - Parce que nous vivons, je crois, un moment historique, sans galvauder ce mot. Des libérations de prisonniers ont déjà eu lieu depuis quelques semaines mais nous attendions tous la libération complète de tous les prisonniers politiques, comme le demandait depuis fort longtemps Aung San Suu Kyi. Cette libération a eu lieu hier et en arrivant ici, à Rangoun, jai tenu à saluer plusieurs de ces prisonniers qui viennent de rejoindre la ville. Cest évidemment un moment de très grande émotion.
Jai salué leur courage, jai essayé de comprendre comment ils avaient vécu cette détention qui, souvent, a été très longue - plus de dix années pour certains dautres eux. Jai envisagé avec eux lavenir, cest une première étape, et je les ai assurés du soutien de la France dans le combat quils mènent pour la démocratie et la liberté.
Q - À votre avis le compte est bon maintenant, il ne reste plus de prisonniers politiques ?
R - Daprès tout ce que jai entendu depuis mon arrivée, daprès les informations dont lambassadeur sest fait lécho, il semble effectivement que la totalité des prisonniers politiques aient été relâchés.
Jen parlerai demain avec Aung San Suu Kyi bien sûr.
Q - Comment analysez-vous ces changements en Birmanie ?
R - Je crois que le chemin parcouru est déjà long et plusieurs facteurs peuvent expliquer cette évolution.
Dabord, et je crois quil faut le noter parce que le principe-même des sanctions est souvent critiqué, mais le fait dimposer ces sanctions, de faire en sorte que ce pays se soit finalement senti isolé de tout lenvironnement international a fini par faire évoluer les mentalités.
Laspiration populaire est également extrêmement forte et je crois que les principaux responsables du régime ont bien compris quaujourdhui il fallait évoluer. Ce processus est en cours, il est loin dêtre achevé. Il y a cette première étape de la libération des prisonniers mais il y a ensuite le processus électoral. Nous serons très attentifs à ce que les prochaines élections partielles soient des élections transparentes, loyales et libres. La question des relations avec les minorités ethniques est extrêmement sensible, elle nest pas encore résolue.
Nous allons donc accompagner ce processus. LUnion européenne et la France ont toujours été très attentives, nous verrons comment adapter nos relations avec les autorités ici et, notamment comment faire progresser le dispositif de sanctions au fur et à mesure que nous constaterons des progrès dans la démocratisation du régime.
Q - Il semble que lon soit proche de la levée de ces sanctions ?
R - Nous allons y réfléchir en regardant ce qui se passe effectivement. Cette libération quasi complète est un premier pas extrêmement important mais il y en a dautres à franchir.
Q - Quel est le rôle que peut jouer la France dans le soutien à la libéralisation en Birmanie ?
R - Nous avons déjà joué un rôle très important, dabord en étant présents ici sur le terrain par lintermédiaire de notre ambassade. Nous allons continuer à apporter une aide et jannoncerai demain que nous allons tripler cette aide au développement, à léducation, à la santé.
Nous avons également apporté une politique et nous continuerons, avec nos partenaires de lUnion européenne, à accompagner ce mouvement qui est extrêmement prometteur.
Q - Ny a-t-il pas une certaine méfiance qui simpose, compte tenu du fait que les dirigeants actuellement au pouvoir sont les mêmes que ceux qui étaient là il y a deux ans ?
R - Je ne dirai pas méfiance, je dirai vigilance. Bien sûr, il faut regarder comment les choses vont évoluer. Il y a apparemment une volonté de changements qui sexprime au pouvoir. Jessaierai de le vérifier en allant à Nay Pyi Daw lundi prochain. Comme nos partenaires qui se sont déjà rendus ici, nos amis britanniques en particulier, nous regarderons aux actes et aux résultats.
Q - Ici comme ailleurs, la perte du triple A, est-ce mauvais pour limage de la France ?
R - On revient à des considérations non birmanes, mais je my attendais. Vous savez, il y a quelques semaines, javais dit que si nous devions être dégradés, puisque cest le mot, ce ne serait pas une bonne nouvelle mais ce ne serait pas un cataclysme. Jen suis toujours là.
Je voudrais insister sur le fait que cette agence a dégradé, non pas la France, mais elle a pris en considération la situation de la zone euro et sa fragilité actuelle. Dailleurs, ce sont neuf pays de la zone euro qui ont fait lobjet dune décision identique. Ce nest pas un cataclysme et il faut donc réagir avec sang-froid. Ce nest pas en dramatisant que lon servira les intérêts du pays et je regrette que certains saffolent. Je crois que la bonne réponse nest pas dans le changement de cap mais au contraire dans la persévérance dans les réformes.
Ce qui est un peu paradoxal, cest que, à la différence des deux autres, Fitch a maintenu le triple A jusquen 2013, sauf faits nouveaux et Moodys na pas non plus modifié sa notation. Je disais donc que ce qui est un peu paradoxal, cest au moment-même où les décisions qui simposent pour redresser la situation sont en train de se mettre en place, que cette décision intervient. Il faut donc continuer à mettre en uvre ce qui a été décidé au niveau européen, conclure dici la fin du mois les deux traités qui sont en cours de négociation et nous allons y parvenir et je crois que cest aussi la confirmation des efforts que fait la France. Nous avons mis en place une trajectoire de réduction de nos déficits que nous tenons. Les résultats de 2011 sont même un peu meilleurs que ce à quoi nous nous attendions, nous allons atteindre nos objectifs en 2012 et en 2013 avec le retour au 3 % de déficit par rapport à la richesse nationale. Cest donc en restant ferme sur nos objectifs et sans perdre notre sang-froid que nous pourrons relever ce qui est un défi il faut bien le dire.
Q - Demain, vous allez rencontrer Aung San Suu Kyi, est-ce la première fois ?
R - Oui, cest la première fois que je la verrai.
Q - Que représente-t-elle pour vous ?
R - Une image de courage, de ténacité tout à fait extraordinaire. Plus de vingt ans dun parcours quelle a consacré tout entier au service de ses idées, de la liberté, de la démocratie en traversant des périodes extrêmement difficiles. Je sais aujourdhui, par ses déclaration et par le contact que notre ambassadeur a avec elle quelle est heureuse de voir ce premier pas franchi, de voir la totalité des prisonniers politiques enfin libres.
Ce sera donc pour moi un moment de grande émotion et un grand honneur de la rencontrer et de lui remettre la Légion dHonneur qui lui a été attribuée par le président de la République. Vous savez que le président lui a parlé hier, me semble-t-il. Nous aurons donc un entretien qui va se dérouler dans un contexte assez extraordinaire.
Beaucoup de visiteurs commençaient ces derniers mois par aller à Nay Pyi Daw dabord et voir Aung San Suu Kyi ensuite.
Q - Vous avez fait un choix différent, faut-il y voir un message politique ?
R - Non, cest une question ditinéraire et dagenda.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 janvier 2012
R - Parce que nous vivons, je crois, un moment historique, sans galvauder ce mot. Des libérations de prisonniers ont déjà eu lieu depuis quelques semaines mais nous attendions tous la libération complète de tous les prisonniers politiques, comme le demandait depuis fort longtemps Aung San Suu Kyi. Cette libération a eu lieu hier et en arrivant ici, à Rangoun, jai tenu à saluer plusieurs de ces prisonniers qui viennent de rejoindre la ville. Cest évidemment un moment de très grande émotion.
Jai salué leur courage, jai essayé de comprendre comment ils avaient vécu cette détention qui, souvent, a été très longue - plus de dix années pour certains dautres eux. Jai envisagé avec eux lavenir, cest une première étape, et je les ai assurés du soutien de la France dans le combat quils mènent pour la démocratie et la liberté.
Q - À votre avis le compte est bon maintenant, il ne reste plus de prisonniers politiques ?
R - Daprès tout ce que jai entendu depuis mon arrivée, daprès les informations dont lambassadeur sest fait lécho, il semble effectivement que la totalité des prisonniers politiques aient été relâchés.
Jen parlerai demain avec Aung San Suu Kyi bien sûr.
Q - Comment analysez-vous ces changements en Birmanie ?
R - Je crois que le chemin parcouru est déjà long et plusieurs facteurs peuvent expliquer cette évolution.
Dabord, et je crois quil faut le noter parce que le principe-même des sanctions est souvent critiqué, mais le fait dimposer ces sanctions, de faire en sorte que ce pays se soit finalement senti isolé de tout lenvironnement international a fini par faire évoluer les mentalités.
Laspiration populaire est également extrêmement forte et je crois que les principaux responsables du régime ont bien compris quaujourdhui il fallait évoluer. Ce processus est en cours, il est loin dêtre achevé. Il y a cette première étape de la libération des prisonniers mais il y a ensuite le processus électoral. Nous serons très attentifs à ce que les prochaines élections partielles soient des élections transparentes, loyales et libres. La question des relations avec les minorités ethniques est extrêmement sensible, elle nest pas encore résolue.
Nous allons donc accompagner ce processus. LUnion européenne et la France ont toujours été très attentives, nous verrons comment adapter nos relations avec les autorités ici et, notamment comment faire progresser le dispositif de sanctions au fur et à mesure que nous constaterons des progrès dans la démocratisation du régime.
Q - Il semble que lon soit proche de la levée de ces sanctions ?
R - Nous allons y réfléchir en regardant ce qui se passe effectivement. Cette libération quasi complète est un premier pas extrêmement important mais il y en a dautres à franchir.
Q - Quel est le rôle que peut jouer la France dans le soutien à la libéralisation en Birmanie ?
R - Nous avons déjà joué un rôle très important, dabord en étant présents ici sur le terrain par lintermédiaire de notre ambassade. Nous allons continuer à apporter une aide et jannoncerai demain que nous allons tripler cette aide au développement, à léducation, à la santé.
Nous avons également apporté une politique et nous continuerons, avec nos partenaires de lUnion européenne, à accompagner ce mouvement qui est extrêmement prometteur.
Q - Ny a-t-il pas une certaine méfiance qui simpose, compte tenu du fait que les dirigeants actuellement au pouvoir sont les mêmes que ceux qui étaient là il y a deux ans ?
R - Je ne dirai pas méfiance, je dirai vigilance. Bien sûr, il faut regarder comment les choses vont évoluer. Il y a apparemment une volonté de changements qui sexprime au pouvoir. Jessaierai de le vérifier en allant à Nay Pyi Daw lundi prochain. Comme nos partenaires qui se sont déjà rendus ici, nos amis britanniques en particulier, nous regarderons aux actes et aux résultats.
Q - Ici comme ailleurs, la perte du triple A, est-ce mauvais pour limage de la France ?
R - On revient à des considérations non birmanes, mais je my attendais. Vous savez, il y a quelques semaines, javais dit que si nous devions être dégradés, puisque cest le mot, ce ne serait pas une bonne nouvelle mais ce ne serait pas un cataclysme. Jen suis toujours là.
Je voudrais insister sur le fait que cette agence a dégradé, non pas la France, mais elle a pris en considération la situation de la zone euro et sa fragilité actuelle. Dailleurs, ce sont neuf pays de la zone euro qui ont fait lobjet dune décision identique. Ce nest pas un cataclysme et il faut donc réagir avec sang-froid. Ce nest pas en dramatisant que lon servira les intérêts du pays et je regrette que certains saffolent. Je crois que la bonne réponse nest pas dans le changement de cap mais au contraire dans la persévérance dans les réformes.
Ce qui est un peu paradoxal, cest que, à la différence des deux autres, Fitch a maintenu le triple A jusquen 2013, sauf faits nouveaux et Moodys na pas non plus modifié sa notation. Je disais donc que ce qui est un peu paradoxal, cest au moment-même où les décisions qui simposent pour redresser la situation sont en train de se mettre en place, que cette décision intervient. Il faut donc continuer à mettre en uvre ce qui a été décidé au niveau européen, conclure dici la fin du mois les deux traités qui sont en cours de négociation et nous allons y parvenir et je crois que cest aussi la confirmation des efforts que fait la France. Nous avons mis en place une trajectoire de réduction de nos déficits que nous tenons. Les résultats de 2011 sont même un peu meilleurs que ce à quoi nous nous attendions, nous allons atteindre nos objectifs en 2012 et en 2013 avec le retour au 3 % de déficit par rapport à la richesse nationale. Cest donc en restant ferme sur nos objectifs et sans perdre notre sang-froid que nous pourrons relever ce qui est un défi il faut bien le dire.
Q - Demain, vous allez rencontrer Aung San Suu Kyi, est-ce la première fois ?
R - Oui, cest la première fois que je la verrai.
Q - Que représente-t-elle pour vous ?
R - Une image de courage, de ténacité tout à fait extraordinaire. Plus de vingt ans dun parcours quelle a consacré tout entier au service de ses idées, de la liberté, de la démocratie en traversant des périodes extrêmement difficiles. Je sais aujourdhui, par ses déclaration et par le contact que notre ambassadeur a avec elle quelle est heureuse de voir ce premier pas franchi, de voir la totalité des prisonniers politiques enfin libres.
Ce sera donc pour moi un moment de grande émotion et un grand honneur de la rencontrer et de lui remettre la Légion dHonneur qui lui a été attribuée par le président de la République. Vous savez que le président lui a parlé hier, me semble-t-il. Nous aurons donc un entretien qui va se dérouler dans un contexte assez extraordinaire.
Beaucoup de visiteurs commençaient ces derniers mois par aller à Nay Pyi Daw dabord et voir Aung San Suu Kyi ensuite.
Q - Vous avez fait un choix différent, faut-il y voir un message politique ?
R - Non, cest une question ditinéraire et dagenda.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 janvier 2012