Texte intégral
FREDERIC RIVIERE Bonjour messieurs.
GERARD LONGUET Bonjour.
HUBERT VEDRINE Bonjour.
FREDERIC RIVIERE Gérard LONGUET, un an après le début de la révolution en Libye, quatre mois après la mort de KADHAFI, quel regard portez-vous sur la Libye daujourdhui ?
GERARD LONGUET Oh, un regard extrêmement attentif. Souhaiter que ce pays retrouve des formes de vie collective qui soient le plus apaisées possibles. La France dailleurs, en tous les cas le Ministère de la Défense continue dêtre présent au travers dune coopération pour le déminage des ports libyens. Il y a eu un empoisonnement de ces ports. Et la liberté de circulation des ports conditionne le développement économique, les exportations pétrolières, et naturellement les importations.
FREDERIC RIVIERE Regard attentif, dites-vous, inquiet aussi ?
GERARD LONGUET Un regard nécessairement attentif et inquiet. Cest une question extraordinairement difficile que de faire émerger un état de droit dans un pays qui en a été privé pendant plus de trente ans.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE, comment voyez-vous la situation évoluer ? Quel regard vous aussi portez-vous sur la Libye telle quelle est aujourdhui, avec les dérives dun certain nombre de milices qui sont pointées par Amnesty International, notamment.
HUBERT VEDRINE Dabord, je continue à penser que le choix qui a été fait à lépoque était le bon, cest-à-dire que cétait impossible après lappel à laide de linsurrection de Benghazi, lappel à laide du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe, lappel à laide de la Ligue arabe, je pense que cétait impossible de ne pas répondre oui, et il fallait le faire non pas au nom de lingérence, qui est un concept dépassé et qui est peu légitime, au nom de la responsabilité de protéger, le concept que Kofi ANNAN avait réussi à faire adopter par les Nations unies. Donc, moi, je pense que ça été le bon choix. La suite, il ne faut pas sétonner tous les matins, cest vrai que cest très compliqué et quil ne sagit même pas de restaurer la démocratie puisque elle na jamais existée en Libye. Jai dit de linstaurer à partir dune situation. Il ny a même pas léquivalent de ce qui a existé en Egypte ou en Syrie à dautres époques, ou dans les pays du Maghreb, une certaine vie politique, une certaine vie parlementaire. Il faut partir de zéro, donc A lépoque de la monarchie en Lybie il y avait deux capitales, donc ça ne veut pas dire que le pays est voué à éclater, mais cest vrai quil y a une situation qui ne peut pas nous stupéfier.
GERARD LONGUET Pardonnez-moi, Hubert VEDRINE, il y a deux capitales et en réalité trois Etats parce que
HUBERT VEDRINE il y a un roi mais plusieurs
GERARD LONGUET Et le Fezzan, la Tripolitaine et la Cyrénaïque avaient leurs organisations séparées. Et cest dailleurs le roi Idris qui a fusionné peu avant larrivé au pouvoir de KADHAFI en un Etat unitaire, la Libye.
HUBERT VEDRINE Mais qui a gardé Tripoli et Benghazi, par exemple.
GERARD LONGUET Exact.
HUBERT VEDRINE Donc, ce nest pas étonnant que ces familles surgissent maintenant.
GERARD LONGUET Oui.
FREDERIC RIVIERE Mais au-delà de la démocratie, est-ce que le problème cest quil ny a pas dEtat à proprement parlé pour linstant ?
GERARD LONGUET Il ny a pas dEtat parce que pour créer un Etat il faut une légitimité. Et le rendez-vous cest le premier rendez-vous, cest juin 2012. Il y aura des élections constituantes en juin 2012. Ces élections seront préparées sous le contrôle dune mission dassistance des Nations unies, et manifestement le calendrier va être tenu. Alors, nous sommes aujourdhui en février.
FREDERIC RIVIERE Malgré les violences, malgré les milices ?
GERARD LONGUET Jai presque envie de dire à cause des violences et à cause des milices, parce que si il y a des violences, Amnesty International dit des choses importantes, et il faut lécouter, si il y a des violences, et il ny en a que plus besoin dun Etat de droit, je me répète, où la sécurité élémentaire, cest-à-dire larbitraire dun contrôle instauré par des gens dont la seule légitimité est davoir une kalachnikov, cela disparaisse. Apparemment, cest semble-t-il le cas. Mais ça reste à être consolidé. Et pour consolider un Etat, il faut dabord une légitimité. Alors, maintenant la légitimité issue du suffrage universel cest quelque chose de nouveau en Libye.
FREDERIC RIVIERE Est-ce quon est suffisamment exigeant avec le CNT ou est-ce quil faut lêtre plus, le Conseil national de transition ».
HUBERT VEDRINE Mais qui cest « on » ?
FREDERIC RIVIERE « On », la communauté internationale, selon la formule consacrée, et notamment les pays qui sont intervenus en premier lieu, la France et la Grande-Bretagne.
HUBERT VEDRINE Ils nont pas tellement de leviers, en fait. Et ils nont pas tellement de légitimité à exiger ceci ou cela, dautant que je pense que le CNT fait ce quil peut en plus.
FREDERIC RIVIERE Vous êtes daccord, Gérard LONGUET, pas de légitimité malgré lintervention de la France qui a été déterminante ?
HUBERT VEDRINE Je ne dis pas quil ny a aucun moyen, je dis que cest trop facile du point de vue occidental de croire quon dicte nos conditions. Le phénomène global de lhistoire du monde actuel cest que les Occidentaux ne sont plus les seuls maîtres du monde et quils doivent partager sur tous les sujets avec les émergents. Tout le monde le sait ça maintenant ! Donc, ça veut dire quon ne peut pas imposer ce quon veut, sinon il y a des tas de problèmes qui seraient réglés depuis belle lurette, à commencer par le Proche Orient, par exemple. Donc, faut avoir le sens du temps, de la construction de lEtat de droit en partant de zéro. Je crois aussi que la situation de désordre et de chaos va créer dans cette population libyenne, quelle que soit la région, un désir dordre, mais pas au sens forcément répressif du terme, un désir dordre normal. Et moi, je pense que le CNT finira par y arriver. On peut aider, encourager, mais on ne peut pas se mettre à dicter, à imposer les conditions, et ça risque de démontrer notre impuissance si on fait ça, vous voyez.
FREDERIC RIVIERE Mais il y a des manières dexprimer des désirs ou des attentes.
HUBERT VEDRINE Moyens de le faire, oui.
GERARD LONGUET Non, mais il y a un indicateur qui est très intéressant pour la Libye, dont la ressource essentielle cest 90 % de ses ressources à lexportation pétrolière. Cette exportation reprend, elle est en train datteindre des niveaux à peu près cohérents avec les capacités de production. Cela veut dire, cest un pays qui a deux atouts considérables : des moyens financiers importants générés par le pétrole, article 1 ; et une diaspora et un encadrement qui se retrouvent pour assumer des responsabilités. Cela étant, tant quil ny aura pas eu élection et pouvoir légitimes issus dune volonté la plus transparente possible, je pense quil y aura faiblesse du pouvoir politique. Un pouvoir politique ne peut imposer son autorité, et nous ne pouvons lui demander daffirmer son autorité que sil a une base légitime. Il y a un rendez-vous, cest juin 2012. Ce rendez-vous sera tenu.
FREDERIC RIVIERE Luniversité de Benghazi a réalisé un sondage, en collaboration avec luniversité britannique dOxford, sur ce que souhaitent les Libyens pour les prochaines années. Il apparait que 12 % seulement souhaitent une démocratie ?? loccidentale. Est-ce que ça vous surprend ?
GERARD LONGUET Non ! Non, ne pense que si on demandait aux Français, « voulez-vous, je ne sais pas moi, une monarchie du Golfe ? », ils répondraient au titre à 2 % oui. Non, je crois que chacun veut son modèle endogène, pour prendre un mot savant, de développement. Une démocratie à loccidentale transposée du modèle anglo-saxon, ce nest pas nécessairement ce quils veulent. Ce quils veulent cest un compromis entre la responsabilité du citoyen de sexprimer, la liberté de sexprimer, et puis une organisation sans doute plus traditionnelle qui fait part au fédéralisme, qui fait part au régionalisme, qui fait part aux pouvoirs locaux. Cest en tous les cas ainsi que je le reprends. Ajoutez à cela, le problème religieux. Ce nest pas tout à fait une découverte de constater que le Maghreb en général, et la Libye en particulier, ce sont des pays enfin, qui ont une religion et pour lesquels le respect de la religion peut apparaître peut apparaître comme incompatible avec la démocratie occidentale, qui, elle, est fait profession dêtre laïque. Donc, si vous voulez, les 12 % auxquels vous faites allusion cest une formidable base pour un courant libéral qui nen a jamais connu dans ce pays.
FREDERIC RIVIERE Les islamistes simposent dans les élections dans tous les pays du printemps arabe où il ya des scrutins. Le soutien aux dictateurs qui étaient présentés comme un rempart face aux extrémistes musulmans navait-il pas finalement une forme de pertinence, Hubert VEDRINE ?
HUBERT VEDRINE Non, on ne peut pas aller jusque-là, et puis cest trop tôt pour le dire, et puis de toute façon on ne peut pas changer danalyse
FREDERIC RIVIERE pourtant les résultats en Egypte ils sont assez marquants.
HUBERT VEDRINE Oui, mais de toute façon ce sont ces peuples qui décident de leur destin. Donc, ce nest pas parce que les Occidentaux ont traité avec eux, comme tout le monde dailleurs, que ils étaient en place. Ca cest une erreur dinterprétation à caractère masochiste qui sétait développée il y a environ un an, en disant « cest affreux, il était là parce que on na pas mis en place les bons », comme si on était encore à lépoque du protectorat. Il y avait un côté, on naurait pas dû nommer le méchant gouverneur Ben ALI, il fallait nommer un gentil démocrate, comme si cétait encore nous qui décidions. Donc, non, ce nest pas nous qui lavions mis en place, nous au sens occidental global. Ce nest pas nous qui avions mis en place ces dirigeants. Ils avaient profité de la crainte énorme créée dans le monde entier et dans le monde arabe en particulier de la révolution iranienne. Donc, ils en avaient profité dans le jeu de politique intérieure, et tout le monde avait traité avec eux parce quils étaient là, point, tout en pensant quun jour ça changerait. Moi, javais écrit un article en 2005 disant que il y avait un bouillonnement dans le monde arabe, quun jour où lautre quand il y aurait des élections je ne sais pas quand ! les islamistes seraient en tête partout pour des raisons identitaires, pour des raisons sociologiques, pour des raisons sociales, etc. Donc, il faut quon analyse ça avec réalisme. Ce que vous citiez il y a un instant, cest-à-dire le sondage, ne métonne pas non plus. Rappelez-vous lénorme popularité que POUTINE a eu pendant très longtemps, qui est en train de fondre maintenant, pendant très très longtemps, parce que les Russes ne supportaient plus le chaos de la fin de lURSS, et le chaos de lère ELTSINE par rapport à ça. Donc, les peuples passent par ces processus. Jajouterais un élément qui est très frappant quand on écoute beaucoup dintellectuels asiatiques, notamment, aujourdhui, ce que jai fais dans le cadre dun documentaire pour ARTE, cest quil disent, mais attention, le rayonnement de votre modèle occidental, les Lumières, sest quand même affaibli parce quon al limpression que la démocratie américaine marche pas bien, dailleurs elle est paralysée aujourdhui, elle est paralysée par les excès notamment du parti républicain, bon, enfin elle est paralysée, et même le système européen, vous narrivez pas à vous mettre daccord sur des sujets apparemment évidents. Donc, cest vrai quil y a une baisse du rayonnement. Donc, moi, ça ne métonne pas du tout quune population libyenne dise ça au début. Ca ne veut pas du tout dire quils veulent un ordre répressif. Je ne crois pas. Je pense quils veulent que lordre soit rétabli, et après ils évolueront à leur façon.
FREDERIC RIVIERE Gérard LONGUET, est-ce que vous craigniez une déstabilisation régionale importante ? On a vu hier quun certain nombre de responsables de la communauté économique des Etats dAfrique de lOuest se sont inquiétés de la circulation importante darmes au Sahel, qui viennent pour une part non négligeable de Libye, justement.
GERARD LONGUET Alors, vous avez oui, il y a une véritable inquiétude, alors cest de nature différente, lAfrique du nord ou sud sahélien. Sud sahélien, la réponse est oui. On sent bien aujourdhui quil y a une tentation, notamment chez les professionnels du commerce de la drogue, daccéder à lEurope par lAfrique. Cest beaucoup plus apparemment, pour eux, cest plus simple quune liaison directe entre lAmérique Latine et lEurope, et manifestement dans des espaces immenses où les autorités des Etats nationaux sont faibles pour des raisons techniques dailleurs, parce que les espaces sont immenses ; parce que les tentations sont également immenses, ce sont des Etats extrêmement pauvres qui font que largent facile a un impact considérable. Il y a un vrai risque de déstabilisation. Ajoutons à cela, vous lavez évoqué à linstant, la fin du régime KADHAFI a généré une circulation darmes dune part, et surtout une circulation dhommes qui étaient mobilisés dans des fonctions de supplétifs, qui se retrouvent disponibles, et ce qui se passe actuellement au Mali en particulier est peut-être, peut-être, je suis prudent, une conséquence indirecte de ce dégel libyen.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE sur ce point, rapidement, parce que je voudrais quon parle après de la Syrie.
HUBERT VEDRINE Non, je nai rien à ajouter. Je crois quil y a une situation au Sahel qui est évidente. Je suis daccord avec Gérard LONGUET. Le cas du Mali, par exemple, cest évident. Ca fait quelques années que les trafiquants de drogue latino-américains préfèrent passer par ces Etats qui ne contrôlent pas leur territoire, oui.
FREDERIC RIVIERE Lassemblée générale de lONU, Gérard LONGUET, a adopté hier soir à une très large majorité, malgré lopposition de la Chine et de la Russie une nouvelle fois, une résolution qui condamne la répression en Syrie. Est-ce que la portée de cette résolution va être plus importante que simplement symbolique, quoi ?
GERARD LONGUET Alors, je veux dire, elle est considérable. Elle est considérable parce quil y a un moment où la Russie et la Chine seront confrontées, sont confrontées dès maintenant, à leur isolement politique. Ne pas accepter ce principe positif dune sorte de conscience internationale, bon, ce nest pas ma culture dorigine, mais je la vois apparaître et je la trouve plutôt bonne, cest-à-dire cette espèce de pression du milieu où finalement on naccepte plus de fermer les yeux sur des choses qui sont impardonnables, inqualifiables, injustifiables. Nous allons maintenant la parole est presque dans les opinions. Alors, lopinion chinoise, je crains quelle est du mal à sexprimer ; lopinion russe va pouvoir sexprimer. Aujourdhui, cette opinion russe est certainement extrêmement partagée parce que la Russie fait figure de défenseur des catholiques grecs qui sont sous lautorité du patriarche de Moscou. Et cest une des raisons, plus linquiétude des Russes à légard des régimes islamistes, qui peuvent les concerner directement au travers de toute leur frange sud, toutes les républiques issues de lancienne Union soviétique et qui ont des cultures musulmanes. Cela nest pas tenable. Et la décision, le vote des Nations unies dans sa clarté est un indicateur très fort pour ces deux grands pays.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE, vous croyez que ça peut peser vraiment sur Bachar EL-ASSAD ce vote ?
HUBERT VEDRINE Je pense quà la longue ça peut peser, notamment en effet sur les Russes, à condition quil y ait une stratégie densemble. Je crois quil faut récuser deux extrêmes. Un extrême cest laction purement unilatérale, genre BUSH en Irak, ou les actions israéliennes souvent ; ou alors la paralysie, donc on ny arrive pas, on présente des textes, il y a un veto, donc on sarrête, on ne fait rien. Non ! Il ne faut pas faire ça. Je pense quil faut faire monter la pression, il faut rendre pour les Russes quand même politiquement de plus en plus coûteux la position quils ont, parce que même en Chine je crois avoir lu que sur les blogs il y avait quand même quelques interrogations. Donc, il faut rendre coûteux pour eux ce veto. Et il faut trouver des portes de sortie. Par exemple, pour les Russes il faut quil y ait quelque part une négociation montant aux Russes que après, dans les situations daprès, leur lien traditionnel avec les orthodoxes, la base de Tartous pourquoi pas, les liens avec le régime Shivan (phon), il y a une possibilité saccrocher à ce régime tel quil est. Donc, la pression globale, y compris par lAssemblée générale, un groupe, des amis disons du peuple syrien qui agirait avec au premier plan des Arabes, notamment le Qatar qui est très actif, mais dautres.
GERARD LONGUET La Ligue.
HUBERT VEDRINE La Ligue arabe, la Russie, mais il ne faut pas complètement écarter la Chine, dautres pays, la Turquie naturellement. On est mal placé, nous, France, parce quon sest mis hors jeux par des votes absurdes, mais dautres pays peuvent le faire par rapport
FREDERIC RIVIERE des votes absurdes, Gérard LONGUET, vous êtes daccord ?
GERARD LONGUET Cest un vote.
HUBERT VEDRINE Mais, enfin, ce nest pas le coeur du sujet. Voilà, donc je pense que, oui, il faut se servir, il faut avoir une stratégie que le vote de lAssemblée générale est un élément précieux, et il ne faut pas le lâcher.
FREDERIC RIVIERE Rapidement, le ministre danois des Affaires étrangères, dont le pays occupe actuellement la présidence tournante de lUnion européenne.
GERARD LONGUET Cest exact.
FREDERIC RIVIERE A indiqué, hier, que certains Etats membres de lUnion pourraient fournir du matériel aux insurgés syriens, notamment du matériel de communication. Est-ce que cest une option qui est à létude ?
GERARD LONGUET Non ! Non, non ! Je pense quil y a vraiment une solidarité il y a dabord une décision des Nations unies. La France a fait des choses importantes en 2011. Elle est toujours intervenue dans le cadre de résolutions des Nations unies. Nous ne sommes pas ceux qui décrétons le bien et le mal. Nous contribuons à faire émerger une prise de conscience internationale, nous contribuons à faire prendre des décisions par le Conseil de sécurité des Nations unies. Nous ne sommes pas ceux qui décidons dune façon unilatérale. On construit une diplomatie européenne, une diplomatie mondiale. Nous sommes actifs. Nous ne remplaçons pas lordre international.
FREDERIC RIVIERE Bachar EL-ASSAD a encore un peu de temps devant lui, donc !
GERARD LONGUET Le sablier est renversé, très clairement.
HUBERT VEDRINE Ce nest pas à souhaiter, le temps travaille contre lui, mais il faut que petit à petit les derniers pays qui soutiennent ce régime comprennent que ça nest plus leur intérêt, quils ont intérêt à imaginer la suite et à trouver une solution pour la transition. Il faut aussi faire un travail politique dont on na pas parlé par rapport à tous les opposants qui sont en rivalité entre eux, quil faut organiser mieux, voilà. Il ne faut pas lâcher là-dessus, mais il ne faut pas arriver à des extrêmes dinterventions unilatérales, irréfléchies, etc.
FREDERIC RIVIERE Merci Hubert VEDRINE, merci Gérard LONGUET.
GERARD LONGUET Merci.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 17 février 2012
GERARD LONGUET Bonjour.
HUBERT VEDRINE Bonjour.
FREDERIC RIVIERE Gérard LONGUET, un an après le début de la révolution en Libye, quatre mois après la mort de KADHAFI, quel regard portez-vous sur la Libye daujourdhui ?
GERARD LONGUET Oh, un regard extrêmement attentif. Souhaiter que ce pays retrouve des formes de vie collective qui soient le plus apaisées possibles. La France dailleurs, en tous les cas le Ministère de la Défense continue dêtre présent au travers dune coopération pour le déminage des ports libyens. Il y a eu un empoisonnement de ces ports. Et la liberté de circulation des ports conditionne le développement économique, les exportations pétrolières, et naturellement les importations.
FREDERIC RIVIERE Regard attentif, dites-vous, inquiet aussi ?
GERARD LONGUET Un regard nécessairement attentif et inquiet. Cest une question extraordinairement difficile que de faire émerger un état de droit dans un pays qui en a été privé pendant plus de trente ans.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE, comment voyez-vous la situation évoluer ? Quel regard vous aussi portez-vous sur la Libye telle quelle est aujourdhui, avec les dérives dun certain nombre de milices qui sont pointées par Amnesty International, notamment.
HUBERT VEDRINE Dabord, je continue à penser que le choix qui a été fait à lépoque était le bon, cest-à-dire que cétait impossible après lappel à laide de linsurrection de Benghazi, lappel à laide du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe, lappel à laide de la Ligue arabe, je pense que cétait impossible de ne pas répondre oui, et il fallait le faire non pas au nom de lingérence, qui est un concept dépassé et qui est peu légitime, au nom de la responsabilité de protéger, le concept que Kofi ANNAN avait réussi à faire adopter par les Nations unies. Donc, moi, je pense que ça été le bon choix. La suite, il ne faut pas sétonner tous les matins, cest vrai que cest très compliqué et quil ne sagit même pas de restaurer la démocratie puisque elle na jamais existée en Libye. Jai dit de linstaurer à partir dune situation. Il ny a même pas léquivalent de ce qui a existé en Egypte ou en Syrie à dautres époques, ou dans les pays du Maghreb, une certaine vie politique, une certaine vie parlementaire. Il faut partir de zéro, donc A lépoque de la monarchie en Lybie il y avait deux capitales, donc ça ne veut pas dire que le pays est voué à éclater, mais cest vrai quil y a une situation qui ne peut pas nous stupéfier.
GERARD LONGUET Pardonnez-moi, Hubert VEDRINE, il y a deux capitales et en réalité trois Etats parce que
HUBERT VEDRINE il y a un roi mais plusieurs
GERARD LONGUET Et le Fezzan, la Tripolitaine et la Cyrénaïque avaient leurs organisations séparées. Et cest dailleurs le roi Idris qui a fusionné peu avant larrivé au pouvoir de KADHAFI en un Etat unitaire, la Libye.
HUBERT VEDRINE Mais qui a gardé Tripoli et Benghazi, par exemple.
GERARD LONGUET Exact.
HUBERT VEDRINE Donc, ce nest pas étonnant que ces familles surgissent maintenant.
GERARD LONGUET Oui.
FREDERIC RIVIERE Mais au-delà de la démocratie, est-ce que le problème cest quil ny a pas dEtat à proprement parlé pour linstant ?
GERARD LONGUET Il ny a pas dEtat parce que pour créer un Etat il faut une légitimité. Et le rendez-vous cest le premier rendez-vous, cest juin 2012. Il y aura des élections constituantes en juin 2012. Ces élections seront préparées sous le contrôle dune mission dassistance des Nations unies, et manifestement le calendrier va être tenu. Alors, nous sommes aujourdhui en février.
FREDERIC RIVIERE Malgré les violences, malgré les milices ?
GERARD LONGUET Jai presque envie de dire à cause des violences et à cause des milices, parce que si il y a des violences, Amnesty International dit des choses importantes, et il faut lécouter, si il y a des violences, et il ny en a que plus besoin dun Etat de droit, je me répète, où la sécurité élémentaire, cest-à-dire larbitraire dun contrôle instauré par des gens dont la seule légitimité est davoir une kalachnikov, cela disparaisse. Apparemment, cest semble-t-il le cas. Mais ça reste à être consolidé. Et pour consolider un Etat, il faut dabord une légitimité. Alors, maintenant la légitimité issue du suffrage universel cest quelque chose de nouveau en Libye.
FREDERIC RIVIERE Est-ce quon est suffisamment exigeant avec le CNT ou est-ce quil faut lêtre plus, le Conseil national de transition ».
HUBERT VEDRINE Mais qui cest « on » ?
FREDERIC RIVIERE « On », la communauté internationale, selon la formule consacrée, et notamment les pays qui sont intervenus en premier lieu, la France et la Grande-Bretagne.
HUBERT VEDRINE Ils nont pas tellement de leviers, en fait. Et ils nont pas tellement de légitimité à exiger ceci ou cela, dautant que je pense que le CNT fait ce quil peut en plus.
FREDERIC RIVIERE Vous êtes daccord, Gérard LONGUET, pas de légitimité malgré lintervention de la France qui a été déterminante ?
HUBERT VEDRINE Je ne dis pas quil ny a aucun moyen, je dis que cest trop facile du point de vue occidental de croire quon dicte nos conditions. Le phénomène global de lhistoire du monde actuel cest que les Occidentaux ne sont plus les seuls maîtres du monde et quils doivent partager sur tous les sujets avec les émergents. Tout le monde le sait ça maintenant ! Donc, ça veut dire quon ne peut pas imposer ce quon veut, sinon il y a des tas de problèmes qui seraient réglés depuis belle lurette, à commencer par le Proche Orient, par exemple. Donc, faut avoir le sens du temps, de la construction de lEtat de droit en partant de zéro. Je crois aussi que la situation de désordre et de chaos va créer dans cette population libyenne, quelle que soit la région, un désir dordre, mais pas au sens forcément répressif du terme, un désir dordre normal. Et moi, je pense que le CNT finira par y arriver. On peut aider, encourager, mais on ne peut pas se mettre à dicter, à imposer les conditions, et ça risque de démontrer notre impuissance si on fait ça, vous voyez.
FREDERIC RIVIERE Mais il y a des manières dexprimer des désirs ou des attentes.
HUBERT VEDRINE Moyens de le faire, oui.
GERARD LONGUET Non, mais il y a un indicateur qui est très intéressant pour la Libye, dont la ressource essentielle cest 90 % de ses ressources à lexportation pétrolière. Cette exportation reprend, elle est en train datteindre des niveaux à peu près cohérents avec les capacités de production. Cela veut dire, cest un pays qui a deux atouts considérables : des moyens financiers importants générés par le pétrole, article 1 ; et une diaspora et un encadrement qui se retrouvent pour assumer des responsabilités. Cela étant, tant quil ny aura pas eu élection et pouvoir légitimes issus dune volonté la plus transparente possible, je pense quil y aura faiblesse du pouvoir politique. Un pouvoir politique ne peut imposer son autorité, et nous ne pouvons lui demander daffirmer son autorité que sil a une base légitime. Il y a un rendez-vous, cest juin 2012. Ce rendez-vous sera tenu.
FREDERIC RIVIERE Luniversité de Benghazi a réalisé un sondage, en collaboration avec luniversité britannique dOxford, sur ce que souhaitent les Libyens pour les prochaines années. Il apparait que 12 % seulement souhaitent une démocratie ?? loccidentale. Est-ce que ça vous surprend ?
GERARD LONGUET Non ! Non, ne pense que si on demandait aux Français, « voulez-vous, je ne sais pas moi, une monarchie du Golfe ? », ils répondraient au titre à 2 % oui. Non, je crois que chacun veut son modèle endogène, pour prendre un mot savant, de développement. Une démocratie à loccidentale transposée du modèle anglo-saxon, ce nest pas nécessairement ce quils veulent. Ce quils veulent cest un compromis entre la responsabilité du citoyen de sexprimer, la liberté de sexprimer, et puis une organisation sans doute plus traditionnelle qui fait part au fédéralisme, qui fait part au régionalisme, qui fait part aux pouvoirs locaux. Cest en tous les cas ainsi que je le reprends. Ajoutez à cela, le problème religieux. Ce nest pas tout à fait une découverte de constater que le Maghreb en général, et la Libye en particulier, ce sont des pays enfin, qui ont une religion et pour lesquels le respect de la religion peut apparaître peut apparaître comme incompatible avec la démocratie occidentale, qui, elle, est fait profession dêtre laïque. Donc, si vous voulez, les 12 % auxquels vous faites allusion cest une formidable base pour un courant libéral qui nen a jamais connu dans ce pays.
FREDERIC RIVIERE Les islamistes simposent dans les élections dans tous les pays du printemps arabe où il ya des scrutins. Le soutien aux dictateurs qui étaient présentés comme un rempart face aux extrémistes musulmans navait-il pas finalement une forme de pertinence, Hubert VEDRINE ?
HUBERT VEDRINE Non, on ne peut pas aller jusque-là, et puis cest trop tôt pour le dire, et puis de toute façon on ne peut pas changer danalyse
FREDERIC RIVIERE pourtant les résultats en Egypte ils sont assez marquants.
HUBERT VEDRINE Oui, mais de toute façon ce sont ces peuples qui décident de leur destin. Donc, ce nest pas parce que les Occidentaux ont traité avec eux, comme tout le monde dailleurs, que ils étaient en place. Ca cest une erreur dinterprétation à caractère masochiste qui sétait développée il y a environ un an, en disant « cest affreux, il était là parce que on na pas mis en place les bons », comme si on était encore à lépoque du protectorat. Il y avait un côté, on naurait pas dû nommer le méchant gouverneur Ben ALI, il fallait nommer un gentil démocrate, comme si cétait encore nous qui décidions. Donc, non, ce nest pas nous qui lavions mis en place, nous au sens occidental global. Ce nest pas nous qui avions mis en place ces dirigeants. Ils avaient profité de la crainte énorme créée dans le monde entier et dans le monde arabe en particulier de la révolution iranienne. Donc, ils en avaient profité dans le jeu de politique intérieure, et tout le monde avait traité avec eux parce quils étaient là, point, tout en pensant quun jour ça changerait. Moi, javais écrit un article en 2005 disant que il y avait un bouillonnement dans le monde arabe, quun jour où lautre quand il y aurait des élections je ne sais pas quand ! les islamistes seraient en tête partout pour des raisons identitaires, pour des raisons sociologiques, pour des raisons sociales, etc. Donc, il faut quon analyse ça avec réalisme. Ce que vous citiez il y a un instant, cest-à-dire le sondage, ne métonne pas non plus. Rappelez-vous lénorme popularité que POUTINE a eu pendant très longtemps, qui est en train de fondre maintenant, pendant très très longtemps, parce que les Russes ne supportaient plus le chaos de la fin de lURSS, et le chaos de lère ELTSINE par rapport à ça. Donc, les peuples passent par ces processus. Jajouterais un élément qui est très frappant quand on écoute beaucoup dintellectuels asiatiques, notamment, aujourdhui, ce que jai fais dans le cadre dun documentaire pour ARTE, cest quil disent, mais attention, le rayonnement de votre modèle occidental, les Lumières, sest quand même affaibli parce quon al limpression que la démocratie américaine marche pas bien, dailleurs elle est paralysée aujourdhui, elle est paralysée par les excès notamment du parti républicain, bon, enfin elle est paralysée, et même le système européen, vous narrivez pas à vous mettre daccord sur des sujets apparemment évidents. Donc, cest vrai quil y a une baisse du rayonnement. Donc, moi, ça ne métonne pas du tout quune population libyenne dise ça au début. Ca ne veut pas du tout dire quils veulent un ordre répressif. Je ne crois pas. Je pense quils veulent que lordre soit rétabli, et après ils évolueront à leur façon.
FREDERIC RIVIERE Gérard LONGUET, est-ce que vous craigniez une déstabilisation régionale importante ? On a vu hier quun certain nombre de responsables de la communauté économique des Etats dAfrique de lOuest se sont inquiétés de la circulation importante darmes au Sahel, qui viennent pour une part non négligeable de Libye, justement.
GERARD LONGUET Alors, vous avez oui, il y a une véritable inquiétude, alors cest de nature différente, lAfrique du nord ou sud sahélien. Sud sahélien, la réponse est oui. On sent bien aujourdhui quil y a une tentation, notamment chez les professionnels du commerce de la drogue, daccéder à lEurope par lAfrique. Cest beaucoup plus apparemment, pour eux, cest plus simple quune liaison directe entre lAmérique Latine et lEurope, et manifestement dans des espaces immenses où les autorités des Etats nationaux sont faibles pour des raisons techniques dailleurs, parce que les espaces sont immenses ; parce que les tentations sont également immenses, ce sont des Etats extrêmement pauvres qui font que largent facile a un impact considérable. Il y a un vrai risque de déstabilisation. Ajoutons à cela, vous lavez évoqué à linstant, la fin du régime KADHAFI a généré une circulation darmes dune part, et surtout une circulation dhommes qui étaient mobilisés dans des fonctions de supplétifs, qui se retrouvent disponibles, et ce qui se passe actuellement au Mali en particulier est peut-être, peut-être, je suis prudent, une conséquence indirecte de ce dégel libyen.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE sur ce point, rapidement, parce que je voudrais quon parle après de la Syrie.
HUBERT VEDRINE Non, je nai rien à ajouter. Je crois quil y a une situation au Sahel qui est évidente. Je suis daccord avec Gérard LONGUET. Le cas du Mali, par exemple, cest évident. Ca fait quelques années que les trafiquants de drogue latino-américains préfèrent passer par ces Etats qui ne contrôlent pas leur territoire, oui.
FREDERIC RIVIERE Lassemblée générale de lONU, Gérard LONGUET, a adopté hier soir à une très large majorité, malgré lopposition de la Chine et de la Russie une nouvelle fois, une résolution qui condamne la répression en Syrie. Est-ce que la portée de cette résolution va être plus importante que simplement symbolique, quoi ?
GERARD LONGUET Alors, je veux dire, elle est considérable. Elle est considérable parce quil y a un moment où la Russie et la Chine seront confrontées, sont confrontées dès maintenant, à leur isolement politique. Ne pas accepter ce principe positif dune sorte de conscience internationale, bon, ce nest pas ma culture dorigine, mais je la vois apparaître et je la trouve plutôt bonne, cest-à-dire cette espèce de pression du milieu où finalement on naccepte plus de fermer les yeux sur des choses qui sont impardonnables, inqualifiables, injustifiables. Nous allons maintenant la parole est presque dans les opinions. Alors, lopinion chinoise, je crains quelle est du mal à sexprimer ; lopinion russe va pouvoir sexprimer. Aujourdhui, cette opinion russe est certainement extrêmement partagée parce que la Russie fait figure de défenseur des catholiques grecs qui sont sous lautorité du patriarche de Moscou. Et cest une des raisons, plus linquiétude des Russes à légard des régimes islamistes, qui peuvent les concerner directement au travers de toute leur frange sud, toutes les républiques issues de lancienne Union soviétique et qui ont des cultures musulmanes. Cela nest pas tenable. Et la décision, le vote des Nations unies dans sa clarté est un indicateur très fort pour ces deux grands pays.
FREDERIC RIVIERE Hubert VEDRINE, vous croyez que ça peut peser vraiment sur Bachar EL-ASSAD ce vote ?
HUBERT VEDRINE Je pense quà la longue ça peut peser, notamment en effet sur les Russes, à condition quil y ait une stratégie densemble. Je crois quil faut récuser deux extrêmes. Un extrême cest laction purement unilatérale, genre BUSH en Irak, ou les actions israéliennes souvent ; ou alors la paralysie, donc on ny arrive pas, on présente des textes, il y a un veto, donc on sarrête, on ne fait rien. Non ! Il ne faut pas faire ça. Je pense quil faut faire monter la pression, il faut rendre pour les Russes quand même politiquement de plus en plus coûteux la position quils ont, parce que même en Chine je crois avoir lu que sur les blogs il y avait quand même quelques interrogations. Donc, il faut rendre coûteux pour eux ce veto. Et il faut trouver des portes de sortie. Par exemple, pour les Russes il faut quil y ait quelque part une négociation montant aux Russes que après, dans les situations daprès, leur lien traditionnel avec les orthodoxes, la base de Tartous pourquoi pas, les liens avec le régime Shivan (phon), il y a une possibilité saccrocher à ce régime tel quil est. Donc, la pression globale, y compris par lAssemblée générale, un groupe, des amis disons du peuple syrien qui agirait avec au premier plan des Arabes, notamment le Qatar qui est très actif, mais dautres.
GERARD LONGUET La Ligue.
HUBERT VEDRINE La Ligue arabe, la Russie, mais il ne faut pas complètement écarter la Chine, dautres pays, la Turquie naturellement. On est mal placé, nous, France, parce quon sest mis hors jeux par des votes absurdes, mais dautres pays peuvent le faire par rapport
FREDERIC RIVIERE des votes absurdes, Gérard LONGUET, vous êtes daccord ?
GERARD LONGUET Cest un vote.
HUBERT VEDRINE Mais, enfin, ce nest pas le coeur du sujet. Voilà, donc je pense que, oui, il faut se servir, il faut avoir une stratégie que le vote de lAssemblée générale est un élément précieux, et il ne faut pas le lâcher.
FREDERIC RIVIERE Rapidement, le ministre danois des Affaires étrangères, dont le pays occupe actuellement la présidence tournante de lUnion européenne.
GERARD LONGUET Cest exact.
FREDERIC RIVIERE A indiqué, hier, que certains Etats membres de lUnion pourraient fournir du matériel aux insurgés syriens, notamment du matériel de communication. Est-ce que cest une option qui est à létude ?
GERARD LONGUET Non ! Non, non ! Je pense quil y a vraiment une solidarité il y a dabord une décision des Nations unies. La France a fait des choses importantes en 2011. Elle est toujours intervenue dans le cadre de résolutions des Nations unies. Nous ne sommes pas ceux qui décrétons le bien et le mal. Nous contribuons à faire émerger une prise de conscience internationale, nous contribuons à faire prendre des décisions par le Conseil de sécurité des Nations unies. Nous ne sommes pas ceux qui décidons dune façon unilatérale. On construit une diplomatie européenne, une diplomatie mondiale. Nous sommes actifs. Nous ne remplaçons pas lordre international.
FREDERIC RIVIERE Bachar EL-ASSAD a encore un peu de temps devant lui, donc !
GERARD LONGUET Le sablier est renversé, très clairement.
HUBERT VEDRINE Ce nest pas à souhaiter, le temps travaille contre lui, mais il faut que petit à petit les derniers pays qui soutiennent ce régime comprennent que ça nest plus leur intérêt, quils ont intérêt à imaginer la suite et à trouver une solution pour la transition. Il faut aussi faire un travail politique dont on na pas parlé par rapport à tous les opposants qui sont en rivalité entre eux, quil faut organiser mieux, voilà. Il ne faut pas lâcher là-dessus, mais il ne faut pas arriver à des extrêmes dinterventions unilatérales, irréfléchies, etc.
FREDERIC RIVIERE Merci Hubert VEDRINE, merci Gérard LONGUET.
GERARD LONGUET Merci.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 17 février 2012