Texte intégral
Je suis heureux que la 50ème assemblée plénière du Conseil supérieur des Français de l'étranger me donne le plaisir de vous accueillir dans une maison que vous connaissez bien et que vous devez considérer comme étant aussi la vôtre.
Et je suis heureux que notre rencontre se situe trois mois à peine après ma prise de fonctions et au lendemain de la traditionnelle Conférence des ambassadeurs.
La Conférence des ambassadeurs, aura été l'occasion pour le président de la République, pour le Premier ministre et pour le ministre des Affaires étrangères d'évoquer fortement deux sujets dont je sais qu'ils vous tiennent à coeur et qui sont également au coeur de mes propres préoccupations : l'adaptation de notre politique africaine et la situation des Français de l'étranger. Mais en premier lieu je voudrais à travers vous, remercier tous les Français de l'étranger, pour ce qu'ils font et pour ce qu'ils sont.
Vous êtes, en effet, les artisans de l'influence et les vecteurs de son rayonnement. Par votre action dans chacun des pays où vous résidez et où vous exercez vos activités, vous contribuez, chaque jour, à rendre la France plus présente, plus charnelle et en un mot plus humaine.
Pour en revenir à cette maison, vous savez que, le dispositif gouvernemental fait de la "Rue Monsieur" un secrétariat d'Etat délégué auprès du ministre des Affaires étrangères pour la Coopération. L'appartenance du secrétariat d'Etat à l'ensemble "Affaires étrangères" traduit la volonté de considérer la politique de Coopération au développement comme partie intégrante de la politique extérieure de la France et comme une composante importante de cette politique, légitimant une organisation spécifique.
Ce nouveau dispositif signifie également que le secrétariat d'Etat à la Coopération n'est plus le "ministère de l'Afrique". Concrètement cela veut dire que si les pays africains continuent d'être ses premiers partenaires, ils se sont plus les seuls. Mais que l'on m'entende bien, l'Afrique demeure et demeurera pour longtemps, en raison des mille et un liens tissés au fil du temps, notre partenaire principal. Cela étant, il convient aujourd'hui de prendre en compte toute l'Afrique et pas seulement celle à laquelle nous sommes liés par l'histoire coloniale, tout simplement parce que ce continent se décloisonne, abolissant les anciennes lignes de clivage.
Ce nouveau dispositif appellera des réformes de structure. Nous n'en sommes pas encore au stade des décisions mais à celui de la réflexion et des concertations.
Le fait même que la réflexion et la recherche du consensus soient privilégiées par rapport aux effets d'annonce reflète la méthode générale de travail adaptée par le gouvernement.
En tout état de cause, les structures sont des outils. Et la nature des outils doit découler des objectifs poursuivis. C'est tout d'abord à cela que s'attache le gouvernement à rénover notre politique de Coopération
J'en viens précisément aux axes prioritaires qui guident mon action La notion de solidarité est le fondement de notre aide au développement. Une attention particulière doit donc être accordée aux pays du Sud qui traversent les difficultés les plus grandes, qui sont engagés dans des politiques exigeantes et qui ont avec nous les liens politiques les plus forts.
Quatre axes méritent d'être privilégiés :
D'abord, la conquête de la souveraineté économique. Dans sa dimension économique, l'appui français doit viser à promouvoir l'insertion des pays du Sud dans l'économie mondiale.
En second lieu, l'enracinement de la citoyenneté dans les institutions démocratiques. En phase de transition, la conscience politique et sociale ne peut venir que de l'utilisation opportune de toutes les situations pour responsabiliser les populations.
Il y a là un immense champ d'action en faveur de la démocratie locale et du développement participatif, ou les opérateurs décentralisés et non gouvernementaux révèlent de grandes capacités et obtiennent des résultats
En troisième lieu, le développement humain. Le développement ne se résume pas à la taille du PIB ; il inclut plus fondamentalement le bien-être du plus grand nombre, un niveau supérieur de connaissances, d'apprentissage et de responsabilités critiques et une densification des relations sociales Il convient de s'interroger sur les moyens d'accroître l'impact de nos actions sur la réduction des disparités sociales. Dans certaines régions du monde, les enfants sont moins scolarisés que l'ont été leurs parents. De grandes disparités persistent dans l'accès aux soins. Il faudra surtout concentrer l'effort dans deux directions : relancer l'enseignement de base et conforter la politique des soins de santé primaires.
Enfin, le développement durable. Les accidents climatiques, les troubles politiques comme les crises économiques se traduisent par une pression plus forte sur les ressources naturelles.
Une stratégie plus clairement affirmée devrait mettre, au cur de la coopération française (et européenne), les principes du développement durable. La politique à préconiser doit articuler les liens entre pauvreté et dégradation du patrimoine naturel et du cadre de vie et s'appuyer sur une approche participative.
Ainsi, l'enjeu est de promouvoir des formes de gestion des ressources qui en assurent la pérennité. Il convient donc de veiller à associer ceux qui vivent de l'exploitation des ressources aux décisions concernant leur espace naturel et, quand cela est possible, d'envisager l'implication des communautés rurales ou du secteur privé dans la revalorisation de cet espace.
Voilà les quatre thèmes à privilégier
S'agissant plus particulièrement de la situation des Français de l'étranger, je voudrais m'attacher plus particulièrement à trois sujets : la sécurité, la scolarisation de nos enfants, le développement de nos entreprises.
M. Védrine a rappelé devant vous qu'il entendait faire de votre sécurité sa priorité. Comment ne pas souscrire à cette priorité à un moment où de nouveaux incendies surgissent en Afrique embrasant des pays que l'on croyait à l'abri de ces accidents de l'Histoire ? Comment ne pas souscrire à cette priorité quand nous constatons que la misère et le déchirement du tissu social engendrent la délinquance et la violence dans des villes qui devraient être le creuset de l'Afrique nouvelle ?
De la sécurité, je crois que nous devons avoir une approche globale fondée sur la coopération.
Bien sûr, on songe immédiatement à la coopération dans le domaine militaire. A cet égard, la présence de nos forces en certains points, leur disponibilité, leurs capacités de projection, comme on dit, sont choses essentielles. On l'a vu il y a quelques semaines à Brazzaville, comme on l'avait vu auparavant à Bangui. Au Congo, nos forces ont, d'une façon reconnue exemplaire par tous, permis l'évacuation non seulement de nos compatriotes mais également de nombre de ressortissants étrangers.
Comme vous le savez, une révision de notre dispositif militaire en Afrique est en cours, conséquence de la profonde transformation de nos armées, voulue par le président de la République et mise en oeuvre par le gouvernement.
Ce processus ne doit pas conduire à un affaiblissement de nos politiques opérationnelles mais à privilégier la mobilité, la capacité de réponse et l'articulation avec les forces armées propres à chaque pays ou inter-africaines.
Mais, la mise en oeuvre de nos forces est et doit rester un recours ultime Au jour le jour nous devons aider nos partenaires à asseoir leur propre dispositif de sécurité extérieure et intérieure. C'est le sens de l'appui multiforme que nous apportons aux armées africaines pour leur permettre, notamment de mettre en place des gendarmeries efficaces conçues d'abord comme des instruments de prévention et soucieuses d'agir dans le cadre de ce que nous appelons l'ordre républicain.
Parallèlement et dans le même esprit, nous menons un effort important de coopération dans le domaine de la police, avec un accent tout particulier mis sur la lutte contre les grands trafics.
C'est ainsi que dans presque tous les pays, nous avons mis en place des projets, financés par le Fonds d'aide et de coopération conjuguant assistance technique en personnel et moyens matériels, associant gendarmerie et police pour recréer les conditions d'une sécurité indispensable à tous, aux étrangers que nous sommes comme aux nationaux dont nous savons bien qu'ils sont les premières victimes de l'insécurité.
La scolarisation de nos enfants est également au coeur des préoccupations du gouvernement, comme vous l'a indiqué M. Védrine. Elle est en effet la garante de l'égalité des chances entre enfants français vivant à l'étranger et enfants vivant sur le territoire national ; elle offre la possibilité d'une vie familiale équilibrée, en évitant les séparations entre parents et enfants ; elle est en même temps le soutien indispensable à la marche en avant de nos entreprises.
Comme vous le savez le secrétariat d'Etat partage avec le ministère des Affaires étrangères la tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. On peut considérer aujourd'hui que cette Agence dispose d'un réseau complet en Afrique au sud du Sahara : 68 établissements en Afrique francophone accueillent 31 298 enfants dont 18 562 français ; 16 établissements dans les autres pays accueillent 5 618 enfants dont 1 505 français.
Les résultats aux examens sont là pour attester que cet enseignement se compare à celui qui est dispensé en France, y compris dans les lycées les plus réputés
En même temps et sans que sa spécificité d'enseignement conçu d'abord pour nos
compatriotes ait à en souffrir, il contribue à la promotion de nombre de ressortissants des pays où nos établissements sont implantés constituant ainsi l'un des meilleurs sinon le meilleur de nos investissements à long terme.
Je n'ignore pas cependant, et vous l'avez vous-mêmes souligné lors de vos travaux d'hier, qu'un problème de bourses se pose au moins dans certains pays. J'espère qu'en liaison avec Hubert Védrine et avec le secrétaire d'Etat au Budget, nous parviendrons à répondre à vos préoccupations dans ce domaine. lI s'agit là, en effet, d'un problème de principe qui touche au fondement même de ce nouveau pacte républicain auquel le Premier ministre nous a conviés dans sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale le 19 juin dernier.
Troisième préoccupation enfin, le rôle du secteur privé La stratégie du développement de nombre de pays du Sud, en Afrique notamment, a longtemps été une stratégie du développement du secteur public aboutissant parfois à une étatisation de fait de l'économie.
Le moins que je puisse dire c'est que cette politique est loin d'avoir réussi. Et du coup, il est de bon ton aujourd'hui, notamment sur les rives du Potomac, de rejeter l'Etat au risque de jeter le bébé avec l'eau du bain.
Ce que je crois, c'est qu'il faut recenser l'Etat sur ses fonctions régaliennes et sur sa fonction d'arbitre du jeu économique et en même temps, permettre aux entreprises, permettre au secteur privé, de jouer pleinement leur rôle dans le processus du développement des pays africains.
A cet égard, l'appui au secteur privé et à l'environnement des entreprises doit être effectivement une priorité pour la Coopération française. Je dis bien "l'appui" et "l'environnement", car il ne s'agit pas de se tromper de rôle et de croire qu'on pourrait faire à la place de ceux dont c'est la vocation et le métier d'entreprendre.
C'est pourquoi, je m'attacherai à favoriser la relance et l'investissement privé en direction bien sûr des firmes déjà en place, dont la connaissance des marchés locaux est remplaçable, mais en espérant aussi que des entreprises nouvelles viendront s'ajouter aux précédentes, défricher d'autres champs d'activité et créer d'autres richesses.
En matière d'amélioration de l'environnement des entreprises, le secrétariat d'Etat poursuivra son appui à la mise en oeuvre des réformes structurelles et à la modernisation du cadre macro-économique. Il veillera à la poursuite des programmes de libéralisation progressive des économies, conduite de façon ordonnée et maîtrisée, notamment en ce qui concerne les modalités de privatisation.
Il portera une attention particulière à tout ce qui a trait à la sécurité juridique et judiciaire des entreprises ; c'est l'ambition du Traité sur l'harmonisation du droit des affaires ; c'est également l'ambition des réformes fiscales et douanières entreprises dans le cadre de l'Union économique et monétaire ouest-africaines.
Ainsi, les entreprises pourront-elles avoir une meilleure visibilité de leur avenir.
Le dispositif d'appui direct aux entreprises s'est également renforcé. De nouveaux instruments financiers notamment sa filiale PROPARCO afin de mieux répondre aux besoins du financement du secteur privé. Je pense en particulier, à côté des opérations de prêts à moyen et long terme aux entreprises, aux participations en fonds propres, ainsi qu'à la garantie des emprunts en francs CFA émis par banques locales ou certaines grandes entreprises.
Outre le développement de ces instruments juridiques ou financiers, le secrétariat d'Etat s'attache à développer le système d'information des investisseurs sur les opportunités d'investissement en Afrique, en liaison avec la CFCE, de même qu'il apporte son appui aux organismes consulaires et aux collectivités locales qui mènent des actions de coopération décentralisée au bénéfice des PME.
Toutes ces actions visent à favoriser l'initiative des entrepreneurs et à leur donner la visibilité et la sécurité nécessaires à toute opération d'investissement. Ainsi peut-on espérer que des flux nouveaux de capitaux permettront de promouvoir la croissance et l'emploi au bénéfice commun des pays hôtes et de notre propre pays.
J'ai voulu ce soir m'attacher à quelques sujets importants. J'ai conscience de n'avoir pas été exhaustif et je n'ignore pas que certaines questions sont toujours d'actualité comme celle des retraites exprimées en CFA ou celles des préjudices subis par nombre de vos mandants en RCA ou au Congo
Je mesurerai dès la semaine prochaine, en prenant connaissance du compte-rendu de vos débats ainsi que des vux que vous aurez exprimés, tous les sujets que j'aurais pu ou que j'aurais dû évoquer.
Laissez-moi en conclusion vous redire combien je vous suis reconnaissant de l'action que vous menez, tant individuellement et que collectivement, pour que la France soit plus présente dans le monde.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 octobre 2001)
Et je suis heureux que notre rencontre se situe trois mois à peine après ma prise de fonctions et au lendemain de la traditionnelle Conférence des ambassadeurs.
La Conférence des ambassadeurs, aura été l'occasion pour le président de la République, pour le Premier ministre et pour le ministre des Affaires étrangères d'évoquer fortement deux sujets dont je sais qu'ils vous tiennent à coeur et qui sont également au coeur de mes propres préoccupations : l'adaptation de notre politique africaine et la situation des Français de l'étranger. Mais en premier lieu je voudrais à travers vous, remercier tous les Français de l'étranger, pour ce qu'ils font et pour ce qu'ils sont.
Vous êtes, en effet, les artisans de l'influence et les vecteurs de son rayonnement. Par votre action dans chacun des pays où vous résidez et où vous exercez vos activités, vous contribuez, chaque jour, à rendre la France plus présente, plus charnelle et en un mot plus humaine.
Pour en revenir à cette maison, vous savez que, le dispositif gouvernemental fait de la "Rue Monsieur" un secrétariat d'Etat délégué auprès du ministre des Affaires étrangères pour la Coopération. L'appartenance du secrétariat d'Etat à l'ensemble "Affaires étrangères" traduit la volonté de considérer la politique de Coopération au développement comme partie intégrante de la politique extérieure de la France et comme une composante importante de cette politique, légitimant une organisation spécifique.
Ce nouveau dispositif signifie également que le secrétariat d'Etat à la Coopération n'est plus le "ministère de l'Afrique". Concrètement cela veut dire que si les pays africains continuent d'être ses premiers partenaires, ils se sont plus les seuls. Mais que l'on m'entende bien, l'Afrique demeure et demeurera pour longtemps, en raison des mille et un liens tissés au fil du temps, notre partenaire principal. Cela étant, il convient aujourd'hui de prendre en compte toute l'Afrique et pas seulement celle à laquelle nous sommes liés par l'histoire coloniale, tout simplement parce que ce continent se décloisonne, abolissant les anciennes lignes de clivage.
Ce nouveau dispositif appellera des réformes de structure. Nous n'en sommes pas encore au stade des décisions mais à celui de la réflexion et des concertations.
Le fait même que la réflexion et la recherche du consensus soient privilégiées par rapport aux effets d'annonce reflète la méthode générale de travail adaptée par le gouvernement.
En tout état de cause, les structures sont des outils. Et la nature des outils doit découler des objectifs poursuivis. C'est tout d'abord à cela que s'attache le gouvernement à rénover notre politique de Coopération
J'en viens précisément aux axes prioritaires qui guident mon action La notion de solidarité est le fondement de notre aide au développement. Une attention particulière doit donc être accordée aux pays du Sud qui traversent les difficultés les plus grandes, qui sont engagés dans des politiques exigeantes et qui ont avec nous les liens politiques les plus forts.
Quatre axes méritent d'être privilégiés :
D'abord, la conquête de la souveraineté économique. Dans sa dimension économique, l'appui français doit viser à promouvoir l'insertion des pays du Sud dans l'économie mondiale.
En second lieu, l'enracinement de la citoyenneté dans les institutions démocratiques. En phase de transition, la conscience politique et sociale ne peut venir que de l'utilisation opportune de toutes les situations pour responsabiliser les populations.
Il y a là un immense champ d'action en faveur de la démocratie locale et du développement participatif, ou les opérateurs décentralisés et non gouvernementaux révèlent de grandes capacités et obtiennent des résultats
En troisième lieu, le développement humain. Le développement ne se résume pas à la taille du PIB ; il inclut plus fondamentalement le bien-être du plus grand nombre, un niveau supérieur de connaissances, d'apprentissage et de responsabilités critiques et une densification des relations sociales Il convient de s'interroger sur les moyens d'accroître l'impact de nos actions sur la réduction des disparités sociales. Dans certaines régions du monde, les enfants sont moins scolarisés que l'ont été leurs parents. De grandes disparités persistent dans l'accès aux soins. Il faudra surtout concentrer l'effort dans deux directions : relancer l'enseignement de base et conforter la politique des soins de santé primaires.
Enfin, le développement durable. Les accidents climatiques, les troubles politiques comme les crises économiques se traduisent par une pression plus forte sur les ressources naturelles.
Une stratégie plus clairement affirmée devrait mettre, au cur de la coopération française (et européenne), les principes du développement durable. La politique à préconiser doit articuler les liens entre pauvreté et dégradation du patrimoine naturel et du cadre de vie et s'appuyer sur une approche participative.
Ainsi, l'enjeu est de promouvoir des formes de gestion des ressources qui en assurent la pérennité. Il convient donc de veiller à associer ceux qui vivent de l'exploitation des ressources aux décisions concernant leur espace naturel et, quand cela est possible, d'envisager l'implication des communautés rurales ou du secteur privé dans la revalorisation de cet espace.
Voilà les quatre thèmes à privilégier
S'agissant plus particulièrement de la situation des Français de l'étranger, je voudrais m'attacher plus particulièrement à trois sujets : la sécurité, la scolarisation de nos enfants, le développement de nos entreprises.
M. Védrine a rappelé devant vous qu'il entendait faire de votre sécurité sa priorité. Comment ne pas souscrire à cette priorité à un moment où de nouveaux incendies surgissent en Afrique embrasant des pays que l'on croyait à l'abri de ces accidents de l'Histoire ? Comment ne pas souscrire à cette priorité quand nous constatons que la misère et le déchirement du tissu social engendrent la délinquance et la violence dans des villes qui devraient être le creuset de l'Afrique nouvelle ?
De la sécurité, je crois que nous devons avoir une approche globale fondée sur la coopération.
Bien sûr, on songe immédiatement à la coopération dans le domaine militaire. A cet égard, la présence de nos forces en certains points, leur disponibilité, leurs capacités de projection, comme on dit, sont choses essentielles. On l'a vu il y a quelques semaines à Brazzaville, comme on l'avait vu auparavant à Bangui. Au Congo, nos forces ont, d'une façon reconnue exemplaire par tous, permis l'évacuation non seulement de nos compatriotes mais également de nombre de ressortissants étrangers.
Comme vous le savez, une révision de notre dispositif militaire en Afrique est en cours, conséquence de la profonde transformation de nos armées, voulue par le président de la République et mise en oeuvre par le gouvernement.
Ce processus ne doit pas conduire à un affaiblissement de nos politiques opérationnelles mais à privilégier la mobilité, la capacité de réponse et l'articulation avec les forces armées propres à chaque pays ou inter-africaines.
Mais, la mise en oeuvre de nos forces est et doit rester un recours ultime Au jour le jour nous devons aider nos partenaires à asseoir leur propre dispositif de sécurité extérieure et intérieure. C'est le sens de l'appui multiforme que nous apportons aux armées africaines pour leur permettre, notamment de mettre en place des gendarmeries efficaces conçues d'abord comme des instruments de prévention et soucieuses d'agir dans le cadre de ce que nous appelons l'ordre républicain.
Parallèlement et dans le même esprit, nous menons un effort important de coopération dans le domaine de la police, avec un accent tout particulier mis sur la lutte contre les grands trafics.
C'est ainsi que dans presque tous les pays, nous avons mis en place des projets, financés par le Fonds d'aide et de coopération conjuguant assistance technique en personnel et moyens matériels, associant gendarmerie et police pour recréer les conditions d'une sécurité indispensable à tous, aux étrangers que nous sommes comme aux nationaux dont nous savons bien qu'ils sont les premières victimes de l'insécurité.
La scolarisation de nos enfants est également au coeur des préoccupations du gouvernement, comme vous l'a indiqué M. Védrine. Elle est en effet la garante de l'égalité des chances entre enfants français vivant à l'étranger et enfants vivant sur le territoire national ; elle offre la possibilité d'une vie familiale équilibrée, en évitant les séparations entre parents et enfants ; elle est en même temps le soutien indispensable à la marche en avant de nos entreprises.
Comme vous le savez le secrétariat d'Etat partage avec le ministère des Affaires étrangères la tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. On peut considérer aujourd'hui que cette Agence dispose d'un réseau complet en Afrique au sud du Sahara : 68 établissements en Afrique francophone accueillent 31 298 enfants dont 18 562 français ; 16 établissements dans les autres pays accueillent 5 618 enfants dont 1 505 français.
Les résultats aux examens sont là pour attester que cet enseignement se compare à celui qui est dispensé en France, y compris dans les lycées les plus réputés
En même temps et sans que sa spécificité d'enseignement conçu d'abord pour nos
compatriotes ait à en souffrir, il contribue à la promotion de nombre de ressortissants des pays où nos établissements sont implantés constituant ainsi l'un des meilleurs sinon le meilleur de nos investissements à long terme.
Je n'ignore pas cependant, et vous l'avez vous-mêmes souligné lors de vos travaux d'hier, qu'un problème de bourses se pose au moins dans certains pays. J'espère qu'en liaison avec Hubert Védrine et avec le secrétaire d'Etat au Budget, nous parviendrons à répondre à vos préoccupations dans ce domaine. lI s'agit là, en effet, d'un problème de principe qui touche au fondement même de ce nouveau pacte républicain auquel le Premier ministre nous a conviés dans sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale le 19 juin dernier.
Troisième préoccupation enfin, le rôle du secteur privé La stratégie du développement de nombre de pays du Sud, en Afrique notamment, a longtemps été une stratégie du développement du secteur public aboutissant parfois à une étatisation de fait de l'économie.
Le moins que je puisse dire c'est que cette politique est loin d'avoir réussi. Et du coup, il est de bon ton aujourd'hui, notamment sur les rives du Potomac, de rejeter l'Etat au risque de jeter le bébé avec l'eau du bain.
Ce que je crois, c'est qu'il faut recenser l'Etat sur ses fonctions régaliennes et sur sa fonction d'arbitre du jeu économique et en même temps, permettre aux entreprises, permettre au secteur privé, de jouer pleinement leur rôle dans le processus du développement des pays africains.
A cet égard, l'appui au secteur privé et à l'environnement des entreprises doit être effectivement une priorité pour la Coopération française. Je dis bien "l'appui" et "l'environnement", car il ne s'agit pas de se tromper de rôle et de croire qu'on pourrait faire à la place de ceux dont c'est la vocation et le métier d'entreprendre.
C'est pourquoi, je m'attacherai à favoriser la relance et l'investissement privé en direction bien sûr des firmes déjà en place, dont la connaissance des marchés locaux est remplaçable, mais en espérant aussi que des entreprises nouvelles viendront s'ajouter aux précédentes, défricher d'autres champs d'activité et créer d'autres richesses.
En matière d'amélioration de l'environnement des entreprises, le secrétariat d'Etat poursuivra son appui à la mise en oeuvre des réformes structurelles et à la modernisation du cadre macro-économique. Il veillera à la poursuite des programmes de libéralisation progressive des économies, conduite de façon ordonnée et maîtrisée, notamment en ce qui concerne les modalités de privatisation.
Il portera une attention particulière à tout ce qui a trait à la sécurité juridique et judiciaire des entreprises ; c'est l'ambition du Traité sur l'harmonisation du droit des affaires ; c'est également l'ambition des réformes fiscales et douanières entreprises dans le cadre de l'Union économique et monétaire ouest-africaines.
Ainsi, les entreprises pourront-elles avoir une meilleure visibilité de leur avenir.
Le dispositif d'appui direct aux entreprises s'est également renforcé. De nouveaux instruments financiers notamment sa filiale PROPARCO afin de mieux répondre aux besoins du financement du secteur privé. Je pense en particulier, à côté des opérations de prêts à moyen et long terme aux entreprises, aux participations en fonds propres, ainsi qu'à la garantie des emprunts en francs CFA émis par banques locales ou certaines grandes entreprises.
Outre le développement de ces instruments juridiques ou financiers, le secrétariat d'Etat s'attache à développer le système d'information des investisseurs sur les opportunités d'investissement en Afrique, en liaison avec la CFCE, de même qu'il apporte son appui aux organismes consulaires et aux collectivités locales qui mènent des actions de coopération décentralisée au bénéfice des PME.
Toutes ces actions visent à favoriser l'initiative des entrepreneurs et à leur donner la visibilité et la sécurité nécessaires à toute opération d'investissement. Ainsi peut-on espérer que des flux nouveaux de capitaux permettront de promouvoir la croissance et l'emploi au bénéfice commun des pays hôtes et de notre propre pays.
J'ai voulu ce soir m'attacher à quelques sujets importants. J'ai conscience de n'avoir pas été exhaustif et je n'ignore pas que certaines questions sont toujours d'actualité comme celle des retraites exprimées en CFA ou celles des préjudices subis par nombre de vos mandants en RCA ou au Congo
Je mesurerai dès la semaine prochaine, en prenant connaissance du compte-rendu de vos débats ainsi que des vux que vous aurez exprimés, tous les sujets que j'aurais pu ou que j'aurais dû évoquer.
Laissez-moi en conclusion vous redire combien je vous suis reconnaissant de l'action que vous menez, tant individuellement et que collectivement, pour que la France soit plus présente dans le monde.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 octobre 2001)