Déclaration de Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux solidarités et à la cohésion sociale, sur le vieillissement, la prévention et la prise en charge des personnes âgées, Paris le 28 février 2012.des

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Circonstance : Lancement de l'année européenne du vieillissement actif à Paris le 28 février 2012

Texte intégral


Je veux saluer l’initiative de la Commission européenne qui est à l’origine de cette désignation de l’année 2012 comme « année européenne du vieillissement actif et de la solidarité entre les générations ». C’est un honneur pour moi d’ouvrir cette conférence de lancement.
Cette désignation vient après une année 2011 qui fût, au niveau européen, consacrée aux thèmes du volontariat et du bénévolat qui ne sont pas sans liens, j’y reviendrai tout à l’heure, avec celui du vieillissement actif.
Dans « vieillissement actif », il y a d’abord vieillissement.
Toute l’Europe est en effet touchée par un processus de vieillissement de sa population, phénomène heureux puisqu’il est la conséquence de la hausse de l’espérance de vie, mais qui est aussi un véritable défi pour nos systèmes de prise en charge et d’accompagnement des personnes âgées, pour nos finances publiques et particulièrement pour nos comptes sociaux.
A l’échelle de l’Union européenne, à partir de 2012, la population européenne en âge de travailler va ainsi commencer à se réduire, alors que les plus de 60 ans vont augmenter de 2 millions de personnes supplémentaires chaque année.
En France, les plus de 60 ans représentaient 23% de la population en 2010, ils en représenteront 31% en 2040. Quant aux plus de 80 ans, ils étaient 3,4 millions en 2010, ils seront 7 millions en 2040, soit un taux de croissance de 107% en 30 ans !
Un doublement du nombre de personnes âgées dépendantes est même prévu à l’horizon 2040.
Enjeux démographiques, financiers et sociétaux se conjuguent donc pour souligner l’importance d’une réflexion sur l’activation du vieillissement et conséquemment des politiques publiques de vieillesse.
Cette réflexion, l’année européenne du vieillissement actif et de la solidarité entre les générations permet d’ores et déjà de l’inscrire sur l’agenda public de tous les pays de notre « vieille Europe », pour reprendre les termes qui se voulaient dépréciatifs d’un ancien responsable américain.
Cette année européenne, elle permettra de sensibiliser tous les décideurs, publics et privés, tous les acteurs du vieillissement, toutes les personnes intéressées, et elles sont nombreuses, à cette question.
Elle ouvrira le débat, stimulera les échanges, nourrira les propositions, non seulement au niveau national, mais à celui de l’ensemble de l’Union, notre Europe qui cherche à construire ensemble son destin.
C’est donc dans toute l’Union européenne que seront organisés des événements et menées des actions sur les 4 thématiques de l’année européenne :
* le vieillissement sur le marché du travail ;
* la participation à la vie sociale ;
* le vieillissement en bonne santé ;
* la solidarité entre les générations.
Dans notre pays, le Comité de pilotage – qui associe aux côtés des institutions européennes, ministères, élus locaux, partenaires sociaux et associations - a d’ores et déjà identifié des actions et événements se rattachant au vieillissement actif et à la solidarité intergénérationnelle. Vous les trouverez sur le site internet que nous lançons pour cette année européenne 2012.
Je profite de ce lancement pour inviter tous les acteurs de terrain à nous faire connaître leurs initiatives, afin qu’elles puissent être valorisées sur ce site internet, qu’elles bénéficient d’une reconnaissance publique par l’attribution du label « année européenne ».
Les meilleures d’entre elles seront sélectionnées par le Gouvernement français, afin qu’elles participent à la remise de prix organisée fin 2012 par la Commission européenne.
Nous voulons ainsi recueillir toutes ces expériences de qualité, en tirer les enseignements, susciter des réflexions et propositions nourries et muries par l’action de terrain. Comme le disait en effet Bergson, « il faut agir en homme de pensée et penser en homme d’action ».
Cette année européenne entre en résonance avec les réflexions et l’action du Gouvernement français.
Je pense d’abord au travail des seniors.
Dans ce domaine, le Gouvernement a tenu à rompre avec l’encouragement, tacite ou explicite, trop longtemps donné au recours massif aux préretraites.
Nous avons voulu cette rupture car nous trouvions proprement absurde de sortir du marché de l’emploi, arbitrairement, des salariés riches en expérience et en savoir-faire.
Absurde, le mot n’est pas trop fort quand on pense aussi à la réduction du nombre d’actifs par rapport à celui de retraités. Absurde enfin, car le travail, loin d’être une aliénation, est une condition de l’estime de soi, un moteur de l’autonomie des personnes.
Pour toutes ces raisons, nous avons décidé d’agir.
Depuis 2007, nous avons ainsi libéré les possibilités de cumul d’un emploi avec une retraite, limité le recours aux préretraites, supprimé la mise à la retraite d’office avant 70 ans, obligé les entreprises à se doter de plans d’action pour leur recrutement ou leur maintien dans l’emploi.
Grâce à ces mesures et malgré la crise, le taux d’emploi des seniors de 55 à 59 ans a augmenté en France, nous permettant de dépasser la moyenne européenne, autour de 63%.
Je m’en félicite, mais je sais que beaucoup reste à faire. Je ne doute pas que cette « année européenne » va nous permettre, dans ce domaine comme dans d’autres, de diffuser de nouvelles idées et bonnes pratiques.
Comme dans d’autres, disais-je, car je pense également au bénévolat.
Thème retenu pour l’année européenne 2011, il n’est pas sans rapport avec celui du vieillissement actif.
Chez les seniors, en effet, les bénévoles auraient un taux de mortalité et de dépression plus faible et de meilleurs capacités fonctionnelles. Une étude du Centre d’étude et de recherche sur la philanthropie, réalisée avec le groupe de prévoyance Malakoff Médéric, publiée le 29 octobre 2011, estime ainsi que les bénévoles actifs ont 1,8 fois plus de chances de se sentir en bonne santé que les non-bénévoles, on monte même à 2,4 fois pour les femmes bénévoles. Comme quoi, l’activité c’est la santé, pour paraphraser une célèbre chanson dont les conclusions n’étaient pourtant pas les mêmes !
Je tiens aussi à souligner que près de la moitié des responsables de nos 1 350 000 associations sont des retraités.
L’engagement bénévole des seniors favorise donc leur santé et le maintien de leur autonomie, accomplit de véritables missions de service public. Si ce n’est pas cela que l’on appelle le gagnant-gagnant…
Mesdames et Messieurs, vous le savez, j’ai animé avec Roselyne Bachelot le grand débat sur la dépendance. Pour moi, la grande leçon de ce débat, c’est la priorité qu’il nous faudra accorder à la prévention de la perte d’autonomie. Vieillissement actif et solidarité entre les générations y contribuent.
Pour permettre à notre pays de faire face au pic du vieillissement à horizon 2025-2030, nous devons entendre la préoccupation de nos concitoyens. Ceux-ci attendent des réponses en matière de lien social et d’activité, là où nous nous contentons trop souvent, de réponses en termes de soins.
Face au vieillissement et à la dépendance, nous avons tendance à agir comme s’il s’agissait d’une crise sanitaire, alors qu’il s’agit avant tout d’une crise sociale ou plus précisément d’une crise sociétale.
Il est aujourd’hui urgence de prévenir la « disqualification sociale » de tous nos compatriotes qui, du fait de la cessation d’activité, disparaissent en quelque sorte des “écrans radars” du discours politique et social.
En sachant promouvoir le rôle déterminant des personnes âgées sur le bien-être collectif, en étant capable d’entretenir la citoyenneté active de nos aînés, et leur participation sociale, nous pouvons agir sur l’un des déterminants importants du glissement vers la dépendance et le prévenir.
Cette approche de prévention, elle doit donc irriguer toutes nos politiques publiques afin de lutter efficacement contre l’isolement, l’immobilité, la désinsertion sociale, facteurs de fragilité des personnes âgées. Il s’agit d’une politique du lien social. Il s’agit d’une politique du vieillissement actif.
Mesdames, Messieurs,
A l’heure du défi du vieillissement, des tensions sur les finances sociales, de la crise économique et financière sans précédent que nous connaissons, l’activation du vieillissement et des politiques de vieillesse est un impératif incontournable pour le maintien de la solidarité intergénérationnelle, clef du vivre ensemble et condition même de la cohésion sociale de nos nations européennes.
Je vous remercie.
Source http://www.solidarite.gouv.fr, le 28 février 2012