Texte intégral
Je veux saluer linitiative de la Commission européenne qui est à lorigine de cette désignation de lannée 2012 comme « année européenne du vieillissement actif et de la solidarité entre les générations ». Cest un honneur pour moi douvrir cette conférence de lancement.
Cette désignation vient après une année 2011 qui fût, au niveau européen, consacrée aux thèmes du volontariat et du bénévolat qui ne sont pas sans liens, jy reviendrai tout à lheure, avec celui du vieillissement actif.
Dans « vieillissement actif », il y a dabord vieillissement.
Toute lEurope est en effet touchée par un processus de vieillissement de sa population, phénomène heureux puisquil est la conséquence de la hausse de lespérance de vie, mais qui est aussi un véritable défi pour nos systèmes de prise en charge et daccompagnement des personnes âgées, pour nos finances publiques et particulièrement pour nos comptes sociaux.
A léchelle de lUnion européenne, à partir de 2012, la population européenne en âge de travailler va ainsi commencer à se réduire, alors que les plus de 60 ans vont augmenter de 2 millions de personnes supplémentaires chaque année.
En France, les plus de 60 ans représentaient 23% de la population en 2010, ils en représenteront 31% en 2040. Quant aux plus de 80 ans, ils étaient 3,4 millions en 2010, ils seront 7 millions en 2040, soit un taux de croissance de 107% en 30 ans !
Un doublement du nombre de personnes âgées dépendantes est même prévu à lhorizon 2040.
Enjeux démographiques, financiers et sociétaux se conjuguent donc pour souligner limportance dune réflexion sur lactivation du vieillissement et conséquemment des politiques publiques de vieillesse.
Cette réflexion, lannée européenne du vieillissement actif et de la solidarité entre les générations permet dores et déjà de linscrire sur lagenda public de tous les pays de notre « vieille Europe », pour reprendre les termes qui se voulaient dépréciatifs dun ancien responsable américain.
Cette année européenne, elle permettra de sensibiliser tous les décideurs, publics et privés, tous les acteurs du vieillissement, toutes les personnes intéressées, et elles sont nombreuses, à cette question.
Elle ouvrira le débat, stimulera les échanges, nourrira les propositions, non seulement au niveau national, mais à celui de lensemble de lUnion, notre Europe qui cherche à construire ensemble son destin.
Cest donc dans toute lUnion européenne que seront organisés des événements et menées des actions sur les 4 thématiques de lannée européenne :
* le vieillissement sur le marché du travail ;
* la participation à la vie sociale ;
* le vieillissement en bonne santé ;
* la solidarité entre les générations.
Dans notre pays, le Comité de pilotage qui associe aux côtés des institutions européennes, ministères, élus locaux, partenaires sociaux et associations - a dores et déjà identifié des actions et événements se rattachant au vieillissement actif et à la solidarité intergénérationnelle. Vous les trouverez sur le site internet que nous lançons pour cette année européenne 2012.
Je profite de ce lancement pour inviter tous les acteurs de terrain à nous faire connaître leurs initiatives, afin quelles puissent être valorisées sur ce site internet, quelles bénéficient dune reconnaissance publique par lattribution du label « année européenne ».
Les meilleures dentre elles seront sélectionnées par le Gouvernement français, afin quelles participent à la remise de prix organisée fin 2012 par la Commission européenne.
Nous voulons ainsi recueillir toutes ces expériences de qualité, en tirer les enseignements, susciter des réflexions et propositions nourries et muries par laction de terrain. Comme le disait en effet Bergson, « il faut agir en homme de pensée et penser en homme daction ».
Cette année européenne entre en résonance avec les réflexions et laction du Gouvernement français.
Je pense dabord au travail des seniors.
Dans ce domaine, le Gouvernement a tenu à rompre avec lencouragement, tacite ou explicite, trop longtemps donné au recours massif aux préretraites.
Nous avons voulu cette rupture car nous trouvions proprement absurde de sortir du marché de lemploi, arbitrairement, des salariés riches en expérience et en savoir-faire.
Absurde, le mot nest pas trop fort quand on pense aussi à la réduction du nombre dactifs par rapport à celui de retraités. Absurde enfin, car le travail, loin dêtre une aliénation, est une condition de lestime de soi, un moteur de lautonomie des personnes.
Pour toutes ces raisons, nous avons décidé dagir.
Depuis 2007, nous avons ainsi libéré les possibilités de cumul dun emploi avec une retraite, limité le recours aux préretraites, supprimé la mise à la retraite doffice avant 70 ans, obligé les entreprises à se doter de plans daction pour leur recrutement ou leur maintien dans lemploi.
Grâce à ces mesures et malgré la crise, le taux demploi des seniors de 55 à 59 ans a augmenté en France, nous permettant de dépasser la moyenne européenne, autour de 63%.
Je men félicite, mais je sais que beaucoup reste à faire. Je ne doute pas que cette « année européenne » va nous permettre, dans ce domaine comme dans dautres, de diffuser de nouvelles idées et bonnes pratiques.
Comme dans dautres, disais-je, car je pense également au bénévolat.
Thème retenu pour lannée européenne 2011, il nest pas sans rapport avec celui du vieillissement actif.
Chez les seniors, en effet, les bénévoles auraient un taux de mortalité et de dépression plus faible et de meilleurs capacités fonctionnelles. Une étude du Centre détude et de recherche sur la philanthropie, réalisée avec le groupe de prévoyance Malakoff Médéric, publiée le 29 octobre 2011, estime ainsi que les bénévoles actifs ont 1,8 fois plus de chances de se sentir en bonne santé que les non-bénévoles, on monte même à 2,4 fois pour les femmes bénévoles. Comme quoi, lactivité cest la santé, pour paraphraser une célèbre chanson dont les conclusions nétaient pourtant pas les mêmes !
Je tiens aussi à souligner que près de la moitié des responsables de nos 1 350 000 associations sont des retraités.
Lengagement bénévole des seniors favorise donc leur santé et le maintien de leur autonomie, accomplit de véritables missions de service public. Si ce nest pas cela que lon appelle le gagnant-gagnant
Mesdames et Messieurs, vous le savez, jai animé avec Roselyne Bachelot le grand débat sur la dépendance. Pour moi, la grande leçon de ce débat, cest la priorité quil nous faudra accorder à la prévention de la perte dautonomie. Vieillissement actif et solidarité entre les générations y contribuent.
Pour permettre à notre pays de faire face au pic du vieillissement à horizon 2025-2030, nous devons entendre la préoccupation de nos concitoyens. Ceux-ci attendent des réponses en matière de lien social et dactivité, là où nous nous contentons trop souvent, de réponses en termes de soins.
Face au vieillissement et à la dépendance, nous avons tendance à agir comme sil sagissait dune crise sanitaire, alors quil sagit avant tout dune crise sociale ou plus précisément dune crise sociétale.
Il est aujourdhui urgence de prévenir la « disqualification sociale » de tous nos compatriotes qui, du fait de la cessation dactivité, disparaissent en quelque sorte des écrans radars du discours politique et social.
En sachant promouvoir le rôle déterminant des personnes âgées sur le bien-être collectif, en étant capable dentretenir la citoyenneté active de nos aînés, et leur participation sociale, nous pouvons agir sur lun des déterminants importants du glissement vers la dépendance et le prévenir.
Cette approche de prévention, elle doit donc irriguer toutes nos politiques publiques afin de lutter efficacement contre lisolement, limmobilité, la désinsertion sociale, facteurs de fragilité des personnes âgées. Il sagit dune politique du lien social. Il sagit dune politique du vieillissement actif.
Mesdames, Messieurs,
A lheure du défi du vieillissement, des tensions sur les finances sociales, de la crise économique et financière sans précédent que nous connaissons, lactivation du vieillissement et des politiques de vieillesse est un impératif incontournable pour le maintien de la solidarité intergénérationnelle, clef du vivre ensemble et condition même de la cohésion sociale de nos nations européennes.
Je vous remercie.
Source http://www.solidarite.gouv.fr, le 28 février 2012