Déclaration de M. Henri de Raincourt, ministre de la coopération, sur l'accés à l'eau potable en Afrique, à Marseille le 13 mars 2012.

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Circonstance : 6ème Forum Mondial de l'Eau, Table ronde de haut niveau "L'eau pour le développement en Afrique", à Marseille (Bouches-du-Rhône) du 12 au 17 mars 2012

Texte intégral


Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un grand plaisir que je me joins à vous ce matin : ce Forum, que nous avons préparé intensément depuis plusieurs mois, nous donne enfin l’occasion de nous rencontrer. Je veux d’abord remercier les gouvernements d’Afrique du Sud, du Niger, du Bénin, du Burkina Faso, du Sénégal et du Togo et vous-mêmes, Mes Chers Collègues, pour avoir proposé d’organiser cette table ronde.
Pour le ministère français des Affaires étrangères et européennes, à qui a été confiée la lourde responsabilité de conduire le processus politique de ce 6ème Forum, le principe de ces sessions de travail, tel qu’il avait été développé au 5ème Forum d’Istanbul en complément de la déclaration ministérielle, nous a semblé très utile. Il permet aux gouvernements ou groupes de pays qui le désirent d’aller de l’avant et de montrer leurs solutions et leurs engagements aux autres gouvernements, et plus généralement aux autres acteurs du Forum, représentants de la société civile, des organisations internationales et du secteur privé. Aussi, je vous remercie sincèrement de démontrer, au vu de la forte participation dans cette salle, le succès de ce temps de partage et d’approfondissement.
Je vous remercie également pour le thème que vous avez choisi, l’eau pour le développement en Afrique. À l’heure où nous préparons aussi, au-delà du Forum, la conférence des Nations unies pour le Développement durable «Rio+20», dont l’un des thèmes porte sur «l’économie verte dans un contexte d’éradication de la pauvreté», je sais combien les enjeux de l’eau sont considérables pour l’Afrique.
D’abord, les populations africaines sont très affectées par le manque d’accès à l’eau potable et plus encore à l’assainissement, qui sont pourtant aujourd’hui un droit pour chacun. La croissance démographique est plus rapide que le développement des infrastructures, et rend difficile la fourniture des services urbains essentiels. Le retard en matière d’assainissement est particulièrement inquiétant, car il affecte la santé publique, perturbe l’éducation des filles, limite la productivité des familles, en plus de polluer le sous sol et les zones d’habitation. Dans les campagnes, c’est l’accès à l’eau qui est le plus problématique, et touche, à nouveau, les femmes et les enfants.
Je tiens à saluer les réformes nationales engagées dans plusieurs pays, quelquefois avec l’appui de la France, et qui ont permis, grâce à des cadres sectoriels plus efficaces et le renforcement des capacités, des améliorations significatives dans l’accès aux services d’eau et d’assainissement et la traduction de ce droit en réalité tangible. Je salue aussi la tenue, ces derniers mois, dans les cinq pays d’Afrique de l’Ouest qui co-président cette session, de dialogues nationaux «À l’eau l’Afrique» multi-acteurs entre les représentants des États et de tous les acteurs concernés par la gestion de l’eau. Ces dialogues sont une condition de la bonne gouvernance nationale et locale de l’eau ; ils sont aussi un moyen de sensibiliser le grand public : c’est capital pour que chacun comprenne les enjeux et puisse ainsi agir en conséquence.
La France souhaite également, avec les États africains et les autres bailleurs de fonds, améliorer l’efficacité des instruments qui permettront d’accélérer la mise en œuvre du droit à l’eau potable et à l’assainissement pour tous. Elle soutient ainsi vigoureusement la redynamisation des deux initiatives de la Banque africaine de développement, l’Initiative pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement en milieu rural d’une part, la Facilité africaine de l’eau d’autre part, en liaison avec le Conseil des ministres africains de l’eau.
Ces deux instruments ont déjà accumulé une expérience précieuse et produit sur le terrain des résultats indéniables, et ils ont besoin d’un nouveau soutien, à la fois politique et financier. Je ne pourrai malheureusement pas être avec vous demain mercredi, pour la journée que la Banque africaine et le Conseil des ministres africains de l’eau consacrent à ces deux instruments. Mais je veux, d’ores et déjà, annoncer que la France va se réengager pour un montant de 40 millions d’euros dans l’Initiative rurale, en souhaitant que son fonctionnement soit amélioré pour maximiser son effet de levier et son articulation avec la Facilité pour l’eau.
Mais je veux aussi souligner, car on a tendance à parler d’abord de ceux qui n’ont pas d’eau ou d’assainissement, que le potentiel en eau de l’Afrique est important à l’échelle du continent, irrigué par de puissants fleuves qui sont autant de voies navigables et commerciales. Et ce potentiel doit être mis en valeur car il est porteur de croissance : pour produire plus de nourriture et générer des revenus pour les producteurs, il est possible d’augmenter les surfaces irriguées. Le potentiel hydroélectrique est également sous-exploité, alors que l’hydroélectricité pourrait jouer un rôle majeur dans le futur développement économique. C’est un sujet essentiel qui a été abordé par le G20 à l’initiative de la France.
Quand les ressources en eau sont partagées, leur gestion concertée et responsable entre les États riverains est nécessaire, dans la confiance mutuelle. Et les bénéfices produits, notamment les bénéfices économiques, sont bons pour chacun. Les cadres de coopération régionaux sont pour ce faire des outils efficaces, et la France est fière d’accompagner plusieurs des autorités de bassin africaines dans leur développement. Je me suis déjà exprimé à plusieurs reprises à ce sujet, mais je veux redire ici l’importance que la France attache à l’entrée en vigueur prochaine de la Convention des Nations unies de 1997 sur les eaux transfrontalières, qui fournira un cadre incitatif de coopération pour la gouvernance des eaux partagées et, au-delà, un outil au service de la croissance et du développement de l’Afrique.
En octobre dernier, je participais au Forum de Bamako, à l’invitation du gouvernement du Mali et de la fondation Chirac. Nous y avions évoqué ces enjeux, avec un regard particulier sur la région du fleuve Niger, mais avec des propositions de solutions qui allaient bien au-delà. Hier lundi, la session de suivi de ce Forum a montré l’importance d’un portage politique à haut niveau pour que les choses avancent. C’est ainsi que les gouvernements ont une responsabilité particulière à travers ce Forum. Nous aurons à porter les messages que nous avons préparés ici au-delà de Marseille, à Rio en juin, à New York aussi ensuite. Mais chacun de nous doit aussi porter ces messages dans notre propre pays. Je suis persuadé que cette session pourra contribuer à l’atteinte de ces objectifs ambitieux et je félicite tous les participants pour leur engagement et leur mobilisation au service de cette cause si utile pour les populations.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 mars 2012