Déclaration de M. Henri de Raincourt, ministre de la coopération, sur les efforts français et internationaux en faveur de l'accés à l'eau potable et à l'assainissement dans le monde, à Marseille le 16 mars 2012.

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Circonstance : 6ème Forum mondial de l'eau, session "Des solutions aux engagements", à Marseille (Bouches-du-Rhône) le 16 mars 2012

Texte intégral

Monsieur le Président du Forum mondial de l’eau,
Monsieur le Président du Conseil mondial de l’eau,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
C’est un très grand plaisir pour moi d’ouvrir cette session si importante, cette session si attendue, qui constitue le point d’orgue du Forum de Marseille. Depuis lundi dernier, d’innombrables travaux, rencontres et débats, qui ont mobilisé tous les participants si nombreux de ce 6ème Forum mondial de l’eau, convergent vers la réunion d’aujourd’hui, vers cette session capitale intitulée des « solutions aux engagements ».
Il y a un temps pour le plaidoyer. Il y a un temps aussi pour la discussion. Mais il faut que vienne enfin le temps de l’engagement. Ce temps est venu ! C’est ce qui nous réunit tous ensemble aujourd’hui.
Ces solutions et ces engagements ne viendront pas seulement des États. Le Forum est un processus participatif qui inclut très largement tous les acteurs concernés. Et si le droit de proposition doit être ouvert à tous, car c’est le principe de la démocratie, il doit en être de même du devoir d’engagement, qui ne peut être restreint aux seuls pouvoirs publics.
Ce sont donc les représentants de l’ensemble des processus qui vont se succéder à cette tribune afin de présenter les résultats de cette semaine intense, de cette semaine enthousiasmante, de cette semaine peut-être historique pour la mise ne œuvre du droit à l’accès à l’eau potable et à l’assainissement.
Ce sera bien sûr le cas pour le processus politique. La conférence ministérielle, la conférence parlementaire et la conférence des autorités locales et régionales ont permis d’adopter des déclarations importantes qui marquent des engagements nouveaux et résolus de la part des acteurs politiques.
Le processus «racines et citoyenneté» a, quant à lui, donné toute sa place à la société civile, à tous ces intervenants si actifs depuis tant d’années, mais dont l’action n’était peut-être pas assez reconnue dans les Forums de l’eau. C’est chose à faite à Marseille. C’est une très bonne nouvelle pour le monde associatif, pour les jeunes et pour les femmes, qui dans tous les pays du monde du monde ont tant de choses à dire sur l’eau, et dont la voix va désormais être mieux entendue.
S’agissant du processus thématique, c’est l’essence même du Forum mondial de l’eau que de rendre compte et de partager l’extraordinaire diversité des situations et des solutions qui sont mises en œuvre sur tous les continents, par tous les types d’acteurs, afin d’améliorer l’accès à l’eau potable et à l’assainissement. C’est l’objet de la « plate forme des solutions » qui a été crée dans ce cadre et qui restera, après le forum, un outil d’une très grande utilité.
Enfin, le processus régional a clairement fait ressortir que les solutions et les engagements doivent s’ancrer dans les territoires, en tenant compte des spécificités de chaque pays. L’eau est tout autant un bien public local qu’un bien public mondial. Des solutions qui ne seraient pas élaborées et partagées par les populations sur le terrain auraient peu de chance d’être efficaces dans la durée.
Je viens de citer de nombreux acteurs. Pour autant, je sais que tous ces instrumentistes du grand orchestre de la communauté de l’eau ne jouent qu’une seule et même partition. Car enfin, les buts que nous poursuivons tous sont clairs, ils sont simples, ils sont impérieux ! Il faut tout simplement rendre enfin effectif ce droit à l’eau potable et à l’assainissement, qui a été reconnu comme un droit de l’homme à part entière, grâce aux précédents Forums de l’eau, grâce aux efforts de tous et donc grâce à vous tous ici présents !
Soyez sûrs que la France ne poursuit pas d’autre but. C’est pourquoi, les engagements qu’a annoncés lundi dernier le Premier ministre, François Fillon, concourent tous à cette ambition commune. Qu’il me soit permis de les rappeler brièvement.
Nous nous sommes engagés à accélérer la mise en œuvre la mise en œuvre du droit à l’eau potable et l’assainissement, et à poursuivre, au-delà des Objectifs du Millénaire, l’objectif d’un accès véritablement universel d’ici 2030.
Pour ce faire, la France ne relâchera pas son effort d’aide au développement, elle qui consacre chaque année 600 millions d’euros au secteur de l’eau et de l’assainissement. Bien au contraire. Plusieurs engagements forts ont été pris cette semaine à Marseille par notre pays : une contribution de 40 millions d’euros pour l’accès à l’eau et l’assainissement des populations rurales en Afrique ; un engagement à soutenir l’implantation d’une station de dessalement à Gaza, à hauteur de 10 millions d’euros et le financement d’un premier projet pour la sauvegarde du Lac Tchad. Ces nouveaux engagements, vous le voyez, portent sur des régions, l’Afrique et la Méditerranée, où les besoins sont les plus criants, où les populations souffrent, et où le «temps des solutions» ne peut plus se conjuguer au futur mais bien au présent, et même au mode impératif. Nous espérons que nous serons rejoints par de nombreux partenaires pour soutenir ces initiatives.
Mais l’urgence à agir ne doit pas nous inciter à privilégier seulement les solutions de court terme. Le Premier ministre l’a souligné, l’eau doit devenir une composante essentielle de cette économie durable que nous appelons de nos vœux. Il est temps de placer l’eau au cœur de la «croissance verte» que nous souhaitons voir prospérer au Nord comme au Sud. Il faut sortir de ces logiques cloisonnées où l’énergie, la sécurité alimentaire, le changement climatique, l’environnement, l’emploi et la recherche, sont autant de sujets traités de façon séparée. Ce n’est pas la réalité du nouveau monde dans lequel nous sommes entrés. La France s’est ainsi engagée dans une politique d’innovation ambitieuse, qui permettra d’améliorer ce que l’on appelle l’efficacité hydrique, en élimant tout gaspillage. Mais cette politique permettra aussi de créer des emplois très qualifiés, dans un secteur économique promis à un bel avenir.
Ce nouveau modèle de croissance et de développement n’est pas l’apanage des pays riches. Ce doit être un modèle partagé, un modèle qui assure la prospérité et l’équité pour l’ensemble des peuples du monde, dans le respect de la planète. Aussi souhaitons-nous, avec de nombreux partenaires, que les avancées de cette semaine se retrouvent dans les discussions qui auront lieu au Sommet de Rio en juin prochain, 20 ans après le Sommet de la Terre.
Mesdames et Messieurs,
Ce Forum est un forum mondial car l’eau ne connaît de frontières. Les solutions que chacun mettra en œuvre ne seront pas sans conséquences sur son voisin, qu’il s’agisse du voisin au sein d’un village, d’une ville, d’un bassin, d’un pays, ou même d’un continent. Pour gérer l’eau de manière partagée, il faut se concerter et coopérer à tous les niveaux. C’est pourquoi la gouvernance internationale de l’eau est un sujet si essentiel. Les conventions internationales qui proposent des principes communs pour cette coopération devraient être largement adoptées. Je pense en particulier à la convention des Nations unies de 1997 sur les cours d’eau internationaux, que nous souhaitons voir entrer en vigueur rapidement. Je salue tous les pays qui ont indiqué lors de ce Forum qu’ils allaient accélérer le processus de ratification dans lequel ils sont engagés, afin de parvenir à cet objectif. Et pour compléter la gouvernance mondiale sur ces questions, nous sommes persuadés qu’une Organisation mondiale de l??Environnement est plus que jamais nécessaire.
Mesdames et Messieurs,
Chaque goutte d’eau en ce monde est un bien commun de l’humanité. C’est pourquoi d’ici 2030 nous espérons voir advenir le droit à l’accès universel à l’eau potable. Mais pour chaque homme et femme de cette planète puisse bénéficier de ce droit fondamental, ne nous y trompons pas, il faudra un changement d’échelle en matière de financement du développement. C’est tout le sens de notre plaidoyer en faveur des financements innovants, auxquels de plus en plus de pays se rallient, car ce n’est pas une utopie, c’est déjà une réalité. Le secteur de l’eau est précisément un secteur, avec la santé, où ces mécanismes existent déjà, sont efficaces, et rapportent d’ores et déjà des montants importants. Ces dispositifs, qui financent des projets de coopération décentralisées, existent en France comme dans plusieurs pays européens. Il faut les étendre et les renforcer, car les financements innovants sont à la fois une nécessité économique et un impératif moral. C’est la condition indispensable d’une mondialisation mieux régulée, plus juste, plus respectueuse de la planète et des populations, en un mot d’une mondialisation plus humaine qu’il y a urgence à voir advenir.
Mesdames et Messieurs,
Au moment de laisser la place aux intervenants qui vont nous présenter l’ensemble des engagements pris dans tous les processus du Forum, je voudrais vous dire combien la France a été fière d’accueillir cet événement de portée planétaire, combien elle a été fière d’accueillir chacune et chacun d’entre vous, et, à travers vous, tant de passion, tant d’engagement, tant de mobilisation pour cette grande cause du droit de l’Homme à l’eau potable et à l’assainissement. J’adresse aussi tous mes vœux de succès à la Corée qui accueillera le prochain forum à Daegu en 2015. Et je déclare maintenant solennellement ouverte cette session des engagements.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 mars 2012