Texte intégral
Je suis heureuse, moi aussi, de vous accueillir ici dans cette région, à l'occasion de ces journées d'été des Verts.
Le Jura est une terre rude, dont les habitants ne se payent pas de mots, mais où l'amitié, une fois donnée, vous sera difficilement reprise. Je souhaite, dans ces quelques journées, que les Verts s'imprègnent de cet esprit du lieu, et que nous placions nos travaux sous le signe du sérieux, de la responsabilité, et de l'unité de notre mouvement.
Les précédentes journées d'été de Lamoura, celles de 1998, avaient ouvert pour les écologistes un cycle d'avancées électorales et politiques considérables. Après un an de majorité plurielle, nous allions commencer à engranger les bénéfices d'un choix stratégique qui modifiait profondément le paysage politique français. Quelques mois plus tard, nos amis allemands puis nos amis belges choisissaient d'emprunter la même voie.
La campagne des Européennes, animée par Dany qui reprenait ainsi contact avec les Verts français, nous permit d'engager un dialogue fructueux avec l'opinion publique sur des enjeux de fond, couronné par un résultat excellent. "Effet dioxine", avaient déclaré certains commentateurs, démentis plus d'une année plus tard par des résultats sans précédent des Verts aux municipales et aux cantonales.
Notre mouvement est désormais inscrit au coeur des enjeux et de l'avenir politique de notre pays. Selon que les Verts continueront ou non leur marche en avant, et selon leur capacité à prendre à bras le corps les questions nouvelles posées par la société, notre pays s'engagera dans une voie différente, celle de la transition vers un modèle de développement soutenable et solidaire, ou celle de l'alignement sur des modèles régressifs et conservateurs dont l'Italie de Berlusconi nous a donné à Gênes un avant-goût amer et malheureusement mêlé de sang.
C'est que le contexte a changé depuis quelque temps, et l'actualité de cet été bruisse des incertitudes de ce nouveau contexte.
Pour la première fois depuis longtemps, l'Amérique, le Japon et l'Europe, s'interrogent au même moment sur la solidité de leur devenir économique. Les journaux sont remplis de listes de plans de licenciements qui s'annoncent dans ce que l'on nous désignait il y a peu comme les fleurons de la nouvelle économie, elle-même fer de lance d'un plein emploi que d'aucuns décrivaient à portée de main.
Dans cette situation, que vont devenir les acquis réels mais malheureusement fragiles de la majorité plurielle ? Même si nos résultats nous placent du point de vue de l'emploi dans le peloton de tête européen, résisteront-ils aux suppressions de postes et aux stratégies des multinationales qui sont partout à l'offensive ?
Comment ferons-nous face au cumul des menaces écologiques de mieux en mieux identifiées par l'opinion, et des menaces sociales qui se profilent ? Comment résisterons-nous au chantage à l'emploi dans les entreprises de la " vieille " économie productiviste et polluante.
La droite sent bien l'opportunité de redresser la tête. Engluée dans les affaires, tous les faux-pas de son chef étant guettés par la multitude des candidats de son propre camp, en mal de programme, elle se lance dans une démagogie effrénée. Elle tente de faire aux Français, après le coup de la fracture sociale, le coup de la fracture environnementale.
Plaçant le débat politique à un niveau où la caricature le dispute à la mauvaise foi voire à la calomnie, elle se saisit de tous les prétextes : la sécurité, problème bien réel, est ainsi devenue le terrain démagogique de surenchère tous azimuts dont le couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans dans les quartiers pauvres traduit la dernière et impudente dérive.
Mais cette offensive de la droite s'alimente aussi des faiblesses de la gauche ; de ses ambiguïtés, de ses hésitations, de ses contradictions, et aussi de ses divisions. L'été n'a pas été avare d'exemples en la matière. La rentrée illustre hélas au bout de quelques jours des cafouillages sur des sujets qui auraient dû être traités par nous, ensemble, depuis longtemps.
Nous en discuterons mercredi avec François Hollande, Robert Hue, Jean-Michel Baylet et Christian Proust. Ainsi qu'entre nous pendant toutes ces journées : des acquis, des avancées, mais aussi de ce qui doit être impérativement débloqué pour porter plus loin et plus solidement l'alliance de 1997.
Mais notre conception de la politique, si elle suppose le droit au débat et à la critique au sein de cette alliance, implique aussi que nous autres Verts nous examinions notre propre façon d'agir, notre propre capacité à incarner non seulement l'avenir mais aussi la stabilité et la crédibilité d'une autre politique.
Ce qui était concevable pour une force politique jouant un rôle mineur un rôle d'appoint dans la vie publique n'est plus forcément adapté quand il s'agit d'un parti dont les prises de position, les propositions, et jusqu'à la manière de faire de la politique engagent l'avenir de dizaines de millions de personnes.
Je sais, mieux que quiconque, la façon dont les commentateurs plus ou moins bien intentionnés et surtout nos adversaires, saisissent une phrase au vol, isolent un mot de son contexte, s'appuient sur une maladresse ou même sur une erreur pour mettre tous les Verts en difficulté, réduire à néant leur image, nous faire passer pour d'incorrigibles rêveurs quand ce n'est pas d'incroyables hurluberlus.
Ce qui vient de se passer cet été, d'abord avec la question de la fermeture des voies sur berges à Paris, puis à l'occasion des évènements de Corse, enfin à propos du débat sur la réouverture du tunnel du Mont Blanc illustrent pour nous la nécessité de porter sur les sujets, grands ou petits, une parole collective, qui dans ces conditions pourra être une parole solidaire.
Les dirigeants du parti, ceux qui le représentent dans les compétitions électorales, les députés, les élus ne sont pas une collection d'individus, si brillants soient-ils, qui jettent ici ou là des réflexions au gré de leur inspiration, mais des représentants d'une équipe qui doit être soudée et dont les membres avant de tacler leurs partenaires doivent jouer contre leurs adversaires.
Comme secrétaire nationale, je suis garante de cette règle du jeu élémentaire et je la ferai respecter sans état d'âme dans les semaines à venir. Je vous appelle vous aussi, vous les militant(e)s, à porter cette exigence auprès de ceux qui sont en situation de responsabilité.
Cher(e)s ami(e)s,
aucun autre parti politique ne réunit pour de vrais échanges, et avec un tel esprit d'ouverture autant de militants, de responsables et d'invités, autant d'expériences et de compétences dans ses journées d'été. Mais il ne s'agit pas seulement de se former, d'échanger, de rencontrer d'autres Verts. Il s'agit pour chacune et chacun, d'où qu'elle ou il vienne, d'alimenter le projet politique des Verts, de nourrir les propositions programmatiques que nous porterons aux présidentielles et aux législatives.
Je demande à chaque animateur, à chaque participant aux pleinières, aux commissions, aux ateliers d'y veiller. C'est ainsi que ce projet, ce programme seront celui de chacune et chacun d'entre nous. Cette année, je crois que nous ferons mieux encore que les années précédentes. La richesse des sujets qui seront traités, avec comme préoccupation essentielle nos propositions et notre dialogue avec la société, nous incitent comme je le disais au début de mon propos, au sérieux, à la responsabilité et au rassemblement. Je suis sûre que nous saurons y rajouter le sens des rencontres et de la fête.
Bonnes journées d'été.
(source http://lipietz2002.net, le 31 août 2001)
Le Jura est une terre rude, dont les habitants ne se payent pas de mots, mais où l'amitié, une fois donnée, vous sera difficilement reprise. Je souhaite, dans ces quelques journées, que les Verts s'imprègnent de cet esprit du lieu, et que nous placions nos travaux sous le signe du sérieux, de la responsabilité, et de l'unité de notre mouvement.
Les précédentes journées d'été de Lamoura, celles de 1998, avaient ouvert pour les écologistes un cycle d'avancées électorales et politiques considérables. Après un an de majorité plurielle, nous allions commencer à engranger les bénéfices d'un choix stratégique qui modifiait profondément le paysage politique français. Quelques mois plus tard, nos amis allemands puis nos amis belges choisissaient d'emprunter la même voie.
La campagne des Européennes, animée par Dany qui reprenait ainsi contact avec les Verts français, nous permit d'engager un dialogue fructueux avec l'opinion publique sur des enjeux de fond, couronné par un résultat excellent. "Effet dioxine", avaient déclaré certains commentateurs, démentis plus d'une année plus tard par des résultats sans précédent des Verts aux municipales et aux cantonales.
Notre mouvement est désormais inscrit au coeur des enjeux et de l'avenir politique de notre pays. Selon que les Verts continueront ou non leur marche en avant, et selon leur capacité à prendre à bras le corps les questions nouvelles posées par la société, notre pays s'engagera dans une voie différente, celle de la transition vers un modèle de développement soutenable et solidaire, ou celle de l'alignement sur des modèles régressifs et conservateurs dont l'Italie de Berlusconi nous a donné à Gênes un avant-goût amer et malheureusement mêlé de sang.
C'est que le contexte a changé depuis quelque temps, et l'actualité de cet été bruisse des incertitudes de ce nouveau contexte.
Pour la première fois depuis longtemps, l'Amérique, le Japon et l'Europe, s'interrogent au même moment sur la solidité de leur devenir économique. Les journaux sont remplis de listes de plans de licenciements qui s'annoncent dans ce que l'on nous désignait il y a peu comme les fleurons de la nouvelle économie, elle-même fer de lance d'un plein emploi que d'aucuns décrivaient à portée de main.
Dans cette situation, que vont devenir les acquis réels mais malheureusement fragiles de la majorité plurielle ? Même si nos résultats nous placent du point de vue de l'emploi dans le peloton de tête européen, résisteront-ils aux suppressions de postes et aux stratégies des multinationales qui sont partout à l'offensive ?
Comment ferons-nous face au cumul des menaces écologiques de mieux en mieux identifiées par l'opinion, et des menaces sociales qui se profilent ? Comment résisterons-nous au chantage à l'emploi dans les entreprises de la " vieille " économie productiviste et polluante.
La droite sent bien l'opportunité de redresser la tête. Engluée dans les affaires, tous les faux-pas de son chef étant guettés par la multitude des candidats de son propre camp, en mal de programme, elle se lance dans une démagogie effrénée. Elle tente de faire aux Français, après le coup de la fracture sociale, le coup de la fracture environnementale.
Plaçant le débat politique à un niveau où la caricature le dispute à la mauvaise foi voire à la calomnie, elle se saisit de tous les prétextes : la sécurité, problème bien réel, est ainsi devenue le terrain démagogique de surenchère tous azimuts dont le couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans dans les quartiers pauvres traduit la dernière et impudente dérive.
Mais cette offensive de la droite s'alimente aussi des faiblesses de la gauche ; de ses ambiguïtés, de ses hésitations, de ses contradictions, et aussi de ses divisions. L'été n'a pas été avare d'exemples en la matière. La rentrée illustre hélas au bout de quelques jours des cafouillages sur des sujets qui auraient dû être traités par nous, ensemble, depuis longtemps.
Nous en discuterons mercredi avec François Hollande, Robert Hue, Jean-Michel Baylet et Christian Proust. Ainsi qu'entre nous pendant toutes ces journées : des acquis, des avancées, mais aussi de ce qui doit être impérativement débloqué pour porter plus loin et plus solidement l'alliance de 1997.
Mais notre conception de la politique, si elle suppose le droit au débat et à la critique au sein de cette alliance, implique aussi que nous autres Verts nous examinions notre propre façon d'agir, notre propre capacité à incarner non seulement l'avenir mais aussi la stabilité et la crédibilité d'une autre politique.
Ce qui était concevable pour une force politique jouant un rôle mineur un rôle d'appoint dans la vie publique n'est plus forcément adapté quand il s'agit d'un parti dont les prises de position, les propositions, et jusqu'à la manière de faire de la politique engagent l'avenir de dizaines de millions de personnes.
Je sais, mieux que quiconque, la façon dont les commentateurs plus ou moins bien intentionnés et surtout nos adversaires, saisissent une phrase au vol, isolent un mot de son contexte, s'appuient sur une maladresse ou même sur une erreur pour mettre tous les Verts en difficulté, réduire à néant leur image, nous faire passer pour d'incorrigibles rêveurs quand ce n'est pas d'incroyables hurluberlus.
Ce qui vient de se passer cet été, d'abord avec la question de la fermeture des voies sur berges à Paris, puis à l'occasion des évènements de Corse, enfin à propos du débat sur la réouverture du tunnel du Mont Blanc illustrent pour nous la nécessité de porter sur les sujets, grands ou petits, une parole collective, qui dans ces conditions pourra être une parole solidaire.
Les dirigeants du parti, ceux qui le représentent dans les compétitions électorales, les députés, les élus ne sont pas une collection d'individus, si brillants soient-ils, qui jettent ici ou là des réflexions au gré de leur inspiration, mais des représentants d'une équipe qui doit être soudée et dont les membres avant de tacler leurs partenaires doivent jouer contre leurs adversaires.
Comme secrétaire nationale, je suis garante de cette règle du jeu élémentaire et je la ferai respecter sans état d'âme dans les semaines à venir. Je vous appelle vous aussi, vous les militant(e)s, à porter cette exigence auprès de ceux qui sont en situation de responsabilité.
Cher(e)s ami(e)s,
aucun autre parti politique ne réunit pour de vrais échanges, et avec un tel esprit d'ouverture autant de militants, de responsables et d'invités, autant d'expériences et de compétences dans ses journées d'été. Mais il ne s'agit pas seulement de se former, d'échanger, de rencontrer d'autres Verts. Il s'agit pour chacune et chacun, d'où qu'elle ou il vienne, d'alimenter le projet politique des Verts, de nourrir les propositions programmatiques que nous porterons aux présidentielles et aux législatives.
Je demande à chaque animateur, à chaque participant aux pleinières, aux commissions, aux ateliers d'y veiller. C'est ainsi que ce projet, ce programme seront celui de chacune et chacun d'entre nous. Cette année, je crois que nous ferons mieux encore que les années précédentes. La richesse des sujets qui seront traités, avec comme préoccupation essentielle nos propositions et notre dialogue avec la société, nous incitent comme je le disais au début de mon propos, au sérieux, à la responsabilité et au rassemblement. Je suis sûre que nous saurons y rajouter le sens des rencontres et de la fête.
Bonnes journées d'été.
(source http://lipietz2002.net, le 31 août 2001)