Interview de M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, à "RMC" le 8 juin 2012, sur les enjeux du deuxième tour des élections législatives 2012, sur la préparation d'un projet de loi sur la reprise d'entreprise.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN Merci d’être avec nous Arnaud MONTEBOURG, d’autant plus que c’est l’une de vos premières sorties médiatiques, si je puis dire, sorties médiatiques radio/ télé. Ce n’est pas pour ça que je vais vous épargner, Arnaud MONTEBOURG, ne croyez pas, ne croyez pas.

ARNAUD MONTEBOURG Je vous connais Monsieur BOURDIN, c’est un plaisir.

JEAN-JACQUES BOURDIN C’est un plaisir, bon ! Arnaud MONTEBOURG, les législatives, premier tour dimanche, « campagne nulle. » Qui dit cela ? C’était Daniel COHN-BENDIT qui était à votre place hier matin. Vous êtes d’accord, campagne nulle ?

ARNAUD MONTEBOURG Non, parce que c’est une campagne qui suit celle des présidentielles, où l’essentiel des grandes questions ont déjà été posées, la retraite à 60 ans pour les carrières longues, les grands sujets politiques ont déjà été, d’une certaine manière, tranchés. Néanmoins, les élections législatives, qui désignent les parlementaires, ont une fonction très importante, parce que le Parlement c’est, en quelque sorte, le lieu du débat démocratique. Donc, dans chaque petit morceau de France vous avez des gens qui apportent leur pierre et qui d’ailleurs peuvent avoir des programmes locaux, qui sont différents des grands programmes nationaux.

JEAN-JACQUES BOURDIN On va en parler, oui.

ARNAUD MONTEBOURG Donc c’est… ce sont des scrutins locaux, avec une toile de fond nationale. Voilà.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez voter dimanche ?

ARNAUD MONTEBOURG Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez voter où, en Saône-et-Loire ?

ARNAUD MONTEBOURG Bien sûr, je vote dans mon…

JEAN-JACQUES BOURDIN Dans la deuxième circonscription, non ?

ARNAUD MONTEBOURG C’est la quatrième.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous, vous votez dans la quatrième.

ARNAUD MONTEBOURG C’est ma circonscription, celle dans laquelle j’ai été député pendant 15 ans. Comme vous le savez, je ne me représente pas, mais je soutiendrai Madame UNTERMAIER, qui est une de mes vice-présidentes au Conseil Général, une femme très compétente, qui me succède, et je soutiens sa candidature.

JEAN-JACQUES BOURDIN Et dans la deuxième, vous soutenez la candidature de Madame GUEUGNEAU ?

ARNAUD MONTEBOURG Ah oui. Nous sommes… tous les élus de Saône-et-Loire, n’ont jamais accepté, quels qu’ils soient d’ailleurs, même le président de la Région…

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais c’est une candidate dissidente, dite dissidente.

ARNAUD MONTEBOURG C’est une candidate socialiste, qui d’ailleurs est très implantée dans cette région du Charolais.

JEAN-JACQUES BOURDIN Qui n’est pas la candidate officielle du Parti socialiste.

ARNAUD MONTEBOURG Le candidat officiel du Parti socialiste c’est un Vert. Donc, nous ne sommes pas d’accord que dans le Charolais on ait fait ce choix-là, donc nous l’avons dit, exprimé, nous avons apporté notre soutien, tous, sans… à l’unanimité des élus du département de Saône-et-Loire, à Edith GUEUGNEAU, nous espérons qu’elle l’emportera dimanche.

JEAN-JACQUES BOURDIN Malgré ce que disent les instances du Parti socialiste, mais bon !

ARNAUD MONTEBOURG Mais Monsieur BOURDIN…

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais non, mais… Monsieur MONTEBOURG, oui.

ARNAUD MONTEBOURG J’ai dit que l’accord avait été signé était un accord qui était déséquilibré, voilà, je l’ai dit, je n’ai pas approuvé…

JEAN-JACQUES BOURDIN Exemple à l’appui.

ARNAUD MONTEBOURG Voilà, et je considère que ce choix est une erreur, je n’y reviens pas.

JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. Est-ce que vous approuvez ce qu’a dit Cécile DUFLOT, ici même à votre place mardi matin…

ARNAUD MONTEBOURG Pas du tout.

JEAN-JACQUES BOURDIN Sur la dépénalisation de la consommation du cannabis ?

ARNAUD MONTEBOURG Pas du tout. J’ai noté d’ailleurs, c’est ce qu’a rappelé le Premier ministre, qu’il s’agissait d’une déclaration personnelle, en tant que chef de parti, mon opinion est à l’extrême opposé. Je l’avais dit d’ailleurs dans la primaire lorsque nous avons eu ce débat entre les candidats de la primaire, nous avions dit… nous avons eu ce débat, Jean-Michel BAYLET s’était déclaré favorable, et je m’étais exprimé d’ailleurs, et j’étais, sur ce point, d’accord avec Manuel VALLS pour dire qu’il est hors de question sur l’Etat envoie un signal de dépénalisation du cannabis car je n’ai aucune envie que les enfants de France, les miens, comme les vôtres, puissent acheter du cannabis dans les supermarchés, vous voyez ? Ce n’est pas ma vision de la société. Nous consacrons déjà des milliards pour lutter contre les addictions de l’alcool et du tabac, ce n’est pas pour libéraliser l’accès au cannabis.

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, mais vous savez bien qu’avec une majorité plurielle, avec une majorité plurielle, les Verts, les écologistes, vont vous obliger à débattre de tous ces sujets à l’Assemblée, la drogue, le nucléaire, la pollution, l’automobile…

ARNAUD MONTEBOURG Non, mais écoutez, il n’est pas interdit d’en débattre, mais moi je vous donne mon opinion, et je suis prêt…

JEAN-JACQUES BOURDIN Référendum, nous demanderons un référendum disent les mêmes.

ARNAUD MONTEBOURG Je suis prêt – on peut toujours demander des référendums, ce n’est pas interdit dans notre pays, c’est même parfois recommandé, il est parfois nécessaire d’avoir des débats qui, finalement, impliquent les citoyens, néanmoins, moi ma position, comme citoyen, comme homme engagé, comme ministre, est de m’opposer à ce choix. Et d’ailleurs je pense qu’il n’y a pas de majorité, ni dans le pays, ni dans le futur Parlement, pour approuver cette orientation.

JEAN-JACQUES BOURDIN Cécile DUFLOT qui a appelé hier à une nouvelle majorité large et colorée à l’Assemblée, elle a même appelé à ne pas élire des députés godillots qui ont l’esprit de soumission.

ARNAUD MONTEBOURG Je crois qu’un député, dans la Vème République, a toujours besoin, c’est vrai, de faire valoir son choix, ses analyses, un Parlement vivant est nécessaire dans un pays qui doit sortir de la crise. Nous avons besoin de toutes les idées, donc elle a raison, de ce point de vue là, de dire qu’il est nécessaire que les députés ne soient pas soumis, ils doivent être créatifs, engagés, imaginatifs, et nous en aurons besoin.

JEAN-JACQUES BOURDIN Arnaud MONTEBOURG, on va parler de Redressement productif, on va parler d’industrie, on va parler de projet de loi obligeant un industriel qui veut vendre un site rentable à le céder à un repreneur. C’est en préparation ?

ARNAUD MONTEBOURG Exactement.

JEAN-JACQUES BOURDIN On va en parler dans 2 minutes. Vous allez tout nous dire sur ce projet de loi.

[08h45] JEAN-JACQUES BOURDIN Alors ce projet de loi obligeant un industriel qui veut vendre un site rentable à le céder à un repreneur, quand va-t-il voir le jour ?

ARNAUD MONTEBOURG Nous sommes en train – avec mes équipes et en liaison avec le Premier ministre – de préparer un texte. Comprenez bien le sens de ce texte, il s’agit finalement de lutter contre les excès de la finance, lorsque celle-ci a pris possession d’un certain nombre d’entreprises. Vous avez aujourd’hui des usines rentables qui ferment en France, donc des emplois détruits inutilement, parce que la gourmandise des fonds de pension qui ont pris possession… des fonds d’investissement qui ont pris possession des grands groupes et sans limite. On a vu des usines fermer parce qu’elles ne rapportaient que 9 % de retour sur investissement et qu’il en fallait – selon les normes financières du board qui est situé à 5.000 km, 2.000 km – était de 14 ou 15. Notre choix est de dire : il y a des gens qui veulent faire travailler cet outil de travail, qui veulent perpétuer le site industriel et qui veulent continuer à donner du travail qui vivent de leur travail. Vous savez, dans mon petit village de Montret en Saône-et-Loire, l’épicière qui tient le commerce n’a pas des retours sur investissement de 14 ou 15, avec 2 ou 3 ça permet de faire vivre tout le monde, sa famille, un apprenti et elle peut même embaucher si elle gagne un peu d’argent. Donc nous pouvons vivre avec une rentabilité financière moindre… attendez, moindre mais avec plus d’emplois. Donc c’est cet arbitrage, ce choix, cette préférence collective pour la défense de l’outil industriel plutôt que la préférence pour la finance, dont d’ailleurs la cupidité est sans limite.

JEAN-JACQUES BOURDIN C’est ce que dira le texte ?

ARNAUD MONTEBOURG Le texte va organiser les modalités de la transmission par voie de justice, lorsqu’un site industriel est rentable, qu’un repreneur s’est déclaré acheteur, plutôt qu’on le ferme, qu’on le stérilise et qu’on laisse des grands groupes aller délocaliser leur production dans les pays low cost, eh bien ! Que la production continue sur notre territoire…

JEAN-JACQUES BOURDIN Ce projet de loi…

ARNAUD MONTEBOURG Et j’ai plusieurs exemples sur le territoire.

JEAN-JACQUES BOURDIN Sera présenté avant la fin de l’année, il sera présenté cet été, vite ?

ARNAUD MONTEBOURG Il y a une certaine urgence à ce que nous avancions…

JEAN-JACQUES BOURDIN Après les législatives évidemment puisque les législatives c’est dimanche, oui !

ARNAUD MONTEBOURG Nous avons besoin d’une majorité parlementaire pour l’approuver.

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, évidemment.

ARNAUD MONTEBOURG Ça c’est la condition.

JEAN-JACQUES BOURDIN Evidemment, évidemment. Donc pendant l’été ou…

ARNAUD MONTEBOURG Oui, je crois…

JEAN-JACQUES BOURDIN Il sera présenté pendant l’été ?

ARNAUD MONTEBOURG Je crois que l’ordre du jour… je ne peux pas vous donner les détails car nous n’en sommes pas là…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, pas la date exacte.

ARNAUD MONTEBOURG Mais je présenterai très prochainement, dans les…

JEAN-JACQUES BOURDIN C'est-à-dire ?

ARNAUD MONTEBOURG Je pense que dans les semaines qui viennent, on va le dire comme ça…

JEAN-JACQUES BOURDIN Très prochainement dans les semaines qui viennent…

ARNAUD MONTEBOURG Mais parce que je n’ai pas de calendrier…

JEAN-JACQUES BOURDIN Ça veut dire quoi, ça veut dire avant le mois d’août quoi !

ARNAUD MONTEBOURG Avant le début de l’été oui, c’est ça.

JEAN-JACQUES BOURDIN Avant le début de l’été.

ARNAUD MONTEBOURG Le projet… le projet – en liaison avec le Premier ministre – pour que nous réarmions la puissance publique. Qu’est-ce que c’est…

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais alors…

ARNAUD MONTEBOURG Monsieur BOURDIN le ministère du Redressement productif ? C’est le redressement de l’appareil productif. Ça veut dire que la puissance publique ne peut pas se laisser mener par le bout du nez par la préoccupation exclusivement financière…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui mais Arnaud MONTEBOURG…

ARNAUD MONTEBOURG Et que nous préférons défendre nos outils industriels quand ils sont performants et rentables. Et il y en a plein que nous perdons qui sont pourtant performants et rentables.

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais est-ce à l’Etat ou aux juges de décréter quand une entreprise a le droit de licencier ou de fermer un site, franchement ?

ARNAUD MONTEBOURG Attendez, ça c’est une autre question. Quand vous avez un repreneur qui dit « moi, j’exploiterai cette affaire, je préserve les emplois, je continue » ; et un groupe qui dit « moi je le ferme parce que je ne veux pas continuer à produire en France parce que ça ne me rapporte pas assez », alors qu’il y a quelqu’un qui dit « moi je m’en contenterai », vous voulez qu’on reste les bras croisés, on dit « c’est formidable, continuez comme ça » ? Monsieur BOURDIN, vous ne croyez pas qu’on ait une responsabilité ?

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui. Monsieur MONTEBOURG.

ARNAUD MONTEBOURG Je vous rappelle que la France… je continue, je vous rappelle que la France en 10 ans a perdu, a perdu 750.000 emplois industriels, et que 25 % il y a 10 ans c’était l’origine industrielle de la richesse nationale qu’on n’est plus qu’à 14 ; pendant que les Allemands sont passés de 25 à 30. Donc nous avons perdu des capacités de production industrielle d’une grande nation industrielle comme la nôtre, c’est un peu désolant. Et aujourd’hui, l’état de la désindustrialisation nous oblige à prendre des mesures exceptionnelles et d’urgence de réarmement de la puissance publique.

JEAN-JACQUES BOURDIN Alors justement, mesures exceptionnelles, est-ce que vous allez légiférer contre ce qu’on appelle « les licenciements boursiers » ?

ARNAUD MONTEBOURG Alors d’abord, si vous me permettez…

JEAN-JACQUES BOURDIN C’est quoi ça d’ailleurs les licenciements boursiers…

ARNAUD MONTEBOURG Oui, qu’est-ce qu’un licenciement boursier…

JEAN-JACQUES BOURDIN Parce que la bourse finalement… elles aiment les entreprises qui investissent et qui créent de l’emploi, non ?

ARNAUD MONTEBOURG Le débat aura lieu de toute façon dans le sommet social. Pour la première fois Bercy que je représente, nous avons 2 pôles à Bercy, Pierre MOSCOVICI et moi-même, Bercy sera à la table du sommet social où les partenaires sociaux, le patronat, les organisations syndicales vont évoquer la question de notre industrie et du redressement de notre industrie. C’est un point important parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, on est d’accord.

ARNAUD MONTEBOURG Dans les sommets sociaux on parle généralement de social, mais là on va parler aussi d’économie, pourquoi ? Parce que notre pays est menacé dans ses intérêts vitaux. Donc pour le redresser, nous avons besoin de trouver des éléments de consensus national de l’ensemble des partenaires sociaux. Il est possible d’ailleurs qu’on arrive dans ce dialogue à échanger les concessions réciproques autour du redressement de notre appareil productif.

JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous allez légiférer contre ce qu’on appelle « les licenciements boursiers » ?

ARNAUD MONTEBOURG Aujourd’hui les licenciements que vous appelez « boursiers » sont interdits sur le papier.

JEAN-JACQUES BOURDIN Bon ! Sur le papier !

ARNAUD MONTEBOURG Sur le papier, je vous explique ce qui se passe…

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais une entreprise par exemple qui…

ARNAUD MONTEBOURG Attendez Monsieur BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN Attendez Arnaud MONTEBOURG…

ARNAUD MONTEBOURG Je suis en train de vous l’expliquer.

JEAN-JACQUES BOURDIN Attendez, mais vous allez m’expliquer mieux.

ARNAUD MONTEBOURG D’accord.

JEAN-JACQUES BOURDIN Une entreprise qui, aujourd’hui, fait des bénéfices mais voit ses bénéfices diminuer, voit son avenir un peu bouché, se dit : pour préserver l’avenir et pour préserver l’emploi, la majorité des emplois, il faut que je licencie ou que je me sépare de certains salariés, n’est-ce pas compréhensible ?

ARNAUD MONTEBOURG Ça dépend, c’est au cas par cas. Aujourd’hui tout le monde reconnaît – et y compris dans une partie du…

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais l’entreprise prépare l’avenir aussi…

ARNAUD MONTEBOURG Laissez-moi terminer Monsieur BOURDIN parce que c’est un su… si vous parlez seul…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, alors allez-y.

ARNAUD MONTEBOURG Vous faites l’émission seul.

JEAN-JACQUES BOURDIN Non, non, allez-y, allez-y, allez-y/

ARNAUD MONTEBOURG Il faut quand même que je puisse expliquer ce qu’on est en train de faire.

JEAN-JACQUES BOURDIN Non, non mais moi, j’explique quelle est ma question.

ARNAUD MONTEBOURG Mais votre question je l’ai comprise, mais si vous ne me laissez pas répondre je ne sais pas comment je vais faire.

JEAN-JACQUES BOURDIN Bon alors allez-y.

ARNAUD MONTEBOURG Le problème est le suivant, c’est du cas par cas. Il y a aujourd’hui – et tout le monde le reconnaît – des plans sociaux abusifs, il y a un abus de l’usage du plan social. Notre responsabilité est d’amener les entreprises à respecter davantage le travail et ne pas toujours servir les intérêts de la rémunération de l’investissement et du capital. C’est trop de gourmandise d’un côté, pas assez de respect de l’autre, notre choix est de rééquilibrer cela. Donc nous allons en discuter avec les partenaires sociaux dans le sommet social. Moi, mon choix est de trouver les instruments qui permettent de dissuader les entreprises de mener ces plans sociaux abusifs. Aujourd’hui les licenciements boursiers, ils sont interdits sur le papier, c’est ce que j’étais en train de vous expliquer…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, bien sûr.

ARNAUD MONTEBOURG Ça veut dire que finalement, un licencié qui aurait été privé de son travail sans qu’il y ait de cause économique réelle, sérieuse de ce licenciement, peut obtenir une indemnité. Mais l’entreprise, quand il obtient l’indemnité après un plan social abusif, elle est octroyée après le licenciement et quand l’entreprise a déménagé et que la personne est déjà à Pôle Emploi. Donc franchement ça n’est pas dissuasif, donc…

JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous…

ARNAUD MONTEBOURG La demande aujourd’hui est celle de savoir s’il est possible – dans les cas les plus excessifs, abusifs – de suspendre, c'est-à-dire de permettre à un juge d’intervenir et de suspendre. Cette question pour moi est posée, nous allons en débattre dans la collégialité du gouvernement…

JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous allez revenir sur le licenciement à l’amiable, vous savez, qui a été mis en place par le gouvernement SARKOZY ?

ARNAUD MONTEBOURG Oui, c'est-à-dire ce qu’on appelle…

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez y revenir ?

ARNAUD MONTEBOURG Ce qu’on appelle les ruptures…

JEAN-JACQUES BOURDIN Voilà, conventionnelles.

ARNAUD MONTEBOURG Conventionnelles, contractuelles.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez revenir là-dessus ?

ARNAUD MONTEBOURG Les syndicats le demandent parce que là aussi, ils considèrent…

JEAN-JACQUES BOURDIN Et est-ce que le gouvernement va revenir là-dessus ?

ARNAUD MONTEBOURG Nous n’avons pas pris de décision parce que cela fait partie de la…

JEAN-JACQUES BOURDIN Et quelle est votre opinion ?

ARNAUD MONTEBOURG Je crois qu’il y a… le patronat s’en félicite, les syndicats regrettent les excès de l’usage de cet instrument. Donc il y a certainement un point d’équilibre à trouver entre les deux, cela fait partie…

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez aménager, vous allez aménager ?

ARNAUD MONTEBOURG Cela fait partie de la discussion des partenaires sociaux et au sommet social.

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais vous à titre personnel ?

ARNAUD MONTEBOURG Ecoutez, l’opinion doit être affinée et nous devons écouter ce que disent les partenaires sociaux parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN Ça oui, l’opinion doit être affinée…

ARNAUD MONTEBOURG Non, écoutez cher monsieur, cher monsieur BOURDIN…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui.

ARNAUD MONTEBOURG Moi je ne suis pas là pour faire des annonces quand je n’en ai pas à faire. Vous venez de me dire « quelle est votre opinion », mon opinion elle est celle qu’aujourd’hui, nous cherchions ensemble des solutions qui arrangent tout le monde, c'est-à-dire de passer des compromis nationaux autour de notre appareil industriel. Donc quand moi je vous dis : le sommet social va en débattre, ce n’est pas une clause de style. Vous, ça ne vous intéresse pas parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN Non, si ça m’intéresse…

ARNAUD MONTEBOURG Vous ne croyez pas que c’est intéressant…

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous savez ce qui m’intéresse…

ARNAUD MONTEBOURG Vous ne croyez pas que c’est intéressant…

JEAN-JACQUES BOURDIN Ce qui intéresse les salariés. Les salariés, la rupture conventionnelle, ils s’en servent ou pas ; les chefs d’entreprise s’en servent ou pas, ce qui m’intéresse c’est de savoir si cette formule va être prolongée ou pas.

ARNAUD MONTEBOURG Eh bien ! C’est trop tôt pour le dire parce qu’aujourd’hui, il y a un débat qui est ouvert entre le patronat et les organisations syndicales. Et que ce dialogue…

JEAN-JACQUES BOURDIN Bon, très bien. Alors j’ai une autre question…

ARNAUD MONTEBOURG Ce dialogue peut être productif, il et possible qu’eux-mêmes préconisent un certain nombre d’ajustements, comme il est possible qu’ils ne trouvent pas d’accord. Et auquel cas, le gouvernement prendra une décision à ce moment-là.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous savez qu’aux Etats-Unis, il y a un système sur l’emploi, les entreprises qui licencient beaucoup paient des cotisations chômage plus importantes ; et celles qui licencient peu paient des cotisations chômage moins importantes. Ce n’est pas idiot comme idée, non ?

ARNAUD MONTEBOURG Oui, d’ailleurs c’est dans les cartons du gouvernement que d’examiner ce qu’on appelle « les bonus malus ».

JEAN-JACQUES BOURDIN Bonus malus oui.

ARNAUD MONTEBOURG Les bonus malus, cela peut faire partie de l’arsenal sur lequel nous travaillons. Nous n’avons pas pris de décision parce que nous prenons le temps de ne pas nous tromper. Cela est assez nécessaire je crois, la précipitation peut parfois…

JEAN-JACQUES BOURDIN On est d’accord…

ARNAUD MONTEBOURG Etre nuisible monsieur BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN Bon, alors Arnaud MONTEBOURG, est-il vrai qu’AMAZON va venir s’installer en Saône-et-Loire ?

ARNAUD MONTEBOURG Nous n’avons pas confirmation de cette décision…

JEAN-JACQUES BOURDIN Combien, 1.000 emplois dit-on ?

ARNAUD MONTEBOURG Oui, 1.000 emplois avec des extensions futures. C’est une des grandes… c’est un des grands projets pour le pays, d’ailleurs ce n’est pas le seul endroit où…

JEAN-JACQUES BOURDIN Ce n’est pas encore signé ?

ARNAUD MONTEBOURG Ce n’est pas décidé de la part d’AMAZON.

JEAN-JACQUES BOURDIN Ce n’est pas décidé.

ARNAUD MONTEBOURG Donc ce sera à décider. C’est un projet… si vous voulez que je réponde à vos interrogations, c’est un projet qui est en discussion depuis plusieurs mois, il n’est pas tombé de la dernière pluie…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, ça j’imagine, j’imagine.

ARNAUD MONTEBOURG C’est un long processus, d’ailleurs cela fait partie des investissements aujourd’hui importants.

JEAN-JACQUES BOURDIN Ce serait où en Saône-et-Loire, ce serait où ?

ARNAUD MONTEBOURG Il y a une discussion entre Beaune qui est en Côte d’Or et Châlons-sur-Saône qui est en Saône-et-Loire, voilà. Donc c’est à 25 km l’un de l’autre…

JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, je sais.

ARNAUD MONTEBOURG Une chose est sûre c’est qu’ils ont fait le choix…

JEAN-JACQUES BOURDIN De la Bourgogne.

ARNAUD MONTEBOURG De la Bourgogne, mais nous ne savons pas encore quelle est leur décision.

JEAN-JACQUES BOURDIN Mais le choix de la Bourgogne est fait ?

ARNAUD MONTEBOURG Oui, ils n’ont décidé.

JEAN-JACQUES BOURDIN Ils l’ont décidé, ça c’est…

ARNAUD MONTEBOURG Pourquoi ? Parce que la Bourgogne, c’est le centre de l’Europe géographiquement, et que nous avons des infrastructures extraordinaires qui amènent beaucoup d’activités et d’investissements. Et c’est une des raisons pour lesquelles, c’est vrai, parfois nous rencontrons le succès en Bourgogne monsieur BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN Vous allez sauver DOUX ?

ARNAUD MONTEBOURG DOUX est un dossier très difficile parce que c’est une entreprise surendettée, avec un dirigeant qui a mené cette entreprise là où elle est, et avec des banquiers qui finalement ont accepté de remettre de l’argent dans le fonctionnement de cette entreprise. Mais voilà que le dirigeant a préféré ses intérêts personnels car il ne voulait pas être placé sur la touche, et a préféré défendre ses intérêts personnels plutôt que – dans un accord à l’amiable avec les créanciers – éviter la procédure judiciaire de redressement. Pourquoi ? A Bercy, nous travaillons à trouver des accords entre l’Etat, qui parfois abandonne ses créances, les créanciers, c'est-à-dire les banquiers parfois à qui nous tordons le bras pour préserver les outils de travail industriels et éviter les procédures collectives de début de faillite devant les tribunaux de commerce. C’est toujours mieux de trouver un accord plutôt que de se retrouver devant un tribunal, avec un administrateur judiciaire, et une perte de confiance de la part des salariés qui s’inquiètent à jute titre et des créanciers qui se disent : cette affaire est perdue. Donc notre choix est toujours l’accord préalable plutôt que d’aller devant les tribunaux.

Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 22 juin 2012