Texte intégral
Q - Quest-ce qui vous surprend ou vous choque le plus dans ce sondage [attachement des Européens à la monnaie unique] ?
R - Ce qui me surprend, cest la contradiction des réponses apportées. Dun côté, les sondés se montrent dubitatifs sur la capacité de la Grèce à rester dans la zone euro et sur lefficacité des réponses apportées par lUnion européenne, mais de lautre, ils manifestent à une large majorité leur foi dans leuro. Or, on ne peut à la fois croire en leuro et récuser les mécanismes de solidarité qui garantissent la stabilité financière et monétaire.
Q - Nêtes-vous pas inquiet du fort sentiment de scepticisme exprimé, au-delà de la France, par les Européens sondés par lIfop ?
R - On peut effectivement sinquiéter de la résurgence dune forme de repli nationaliste. Mais ce qui me préoccupe davantage, cest lincapacité dans laquelle lUnion européenne sest trouvée jusquà présent de répondre dans lurgence aux défis auxquels lEurope est confrontée. Cela se trouve à lorigine de la défiance des peuples. Face à ces crises, nous avons besoin de réponses urgentes, de plus de solidarité et, à terme, de plus dunité pour rendre lEurope plus efficiente.
Q - Navez-vous pas limpression que le repli tient aussi au langage des dirigeants et des élus européens, si éloignés des préoccupations des gens ?
R - François Hollande a souhaité réorienter la politique européenne pour que la croissance soit possible sans remettre en cause les disciplines budgétaires. Il sagit déviter que les peuples dEurope soient condamnés à laustérité à perpétuité. Pour faire de la croissance, il faut notamment des projets dinvestissements autour de la transition énergétique, des transports, des technologies et de linnovation. Tout cela doit permettre aux jeunes générations de voir dans lEurope une chance, lopportunité dune nouvelle frontière. Il faut démontrer aux peuples dEurope quil existe un projet fédérateur qui redonne du sens, qui fasse naître un nouvel espoir. Cest le sens du pacte de croissance proposé par le président de la République. Cest cela qui recréera de la confiance.
Q - Mais est-ce que vos divergences avec lAllemagne et les querelles entre Européens ne contribuent pas à désespérer davantage les opinions publiques en Europe ?
R - Vous avez raison. Cest pour cela que François Hollande est mobilisé pour un bon compromis qui engage durablement lEurope sur le chemin de la croissance. Certes, des divergences sexpriment mais aucun compromis ne se construit sur des ambiguïtés. Il faut des orientations clairement exprimées. Depuis le début de la construction européenne, les divergences ont été le moteur des compromis. Il faut être capable de se dire les choses. Cela dit, les divergences sont moins nombreuses que ce qui nous rassemble.
Q - Est-ce que le Sommet à quatre à Rome et le Conseil européen à Bruxelles jeudi et vendredi va permettre de redonner confiance aux Européens ?
R - On a beaucoup progressé cette semaine. La croissance est désormais considérée comme une priorité absolue. On travaille tous ensemble pour donner à cette ambition un contenu concret. Cest la perspective des 120 milliards deuros pour les investissements davenir. Mais dans le même temps, nous avons tous besoin dune feuille de route, dun calendrier précis, si lon veut que les mesures de redressement financier et monétaire aillent de pair avec davantage dintégration politique. Lun ne peut être le préalable de lautre, mais lun peut être le moteur de lautre.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 juin 2012