Déclaration de Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur les perspectives de la biomasse et de la filière bois dans le cadre de la politique de l'énergie et de la transition écologique, à Paris le 3 juillet 2012.

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Circonstance : Deuxième édition du colloque national biomasse sur le thème "Bois énergie : une chance pour l'économie française", à Paris le 3 juillet 2012

Texte intégral

Monsieur le Président du Syndicat des Énergies renouvelables,
Merci pour votre accueil,
Je suis heureuse d’être parmi vous ce matin pour l'ouverture de la deuxième édition du colloque national biomasse, consacrée cette année au bois énergie.
Je tenais à être présente à l'ouverture de vos travaux pour saluer cette heureuse initiative consacrée à une filière stratégique pour la France, stratégique pour son autonomie énergétique, stratégique pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de CO2.
Mais une filière stratégique aussi pour limiter le budget énergie de nos concitoyens et pour créer des emplois.
C’est un plaisir pour moi de pouvoir parler aujourd’hui des perspectives offertes par la biomasse et la filière bois devant tous les acteurs du secteur : propriétaires et opérateurs de centrales, bien sûr, mais aussi exploitants forestiers, professionnels de la transformation du bois, sans oublier les investisseurs.
Le Premier ministre prononcera cet après-midi à l’Assemblée nationale la déclaration de politique générale, dans laquelle il présentera notre programme d’action pour les cinq prochaines années. Je sais que l’énergie et la transition écologique feront partie des sujets qu’il évoquera.
Je veux vous dire que les déceptions du sommet de Rio+20 n'ont pas entamé la détermination du gouvernement à faire du développement des énergies renouvelables un axe fondamental de sa politique.
J'ai tenu à être parmi vous ce matin pour une raison simple : la biomasse représente près de 50 % de la production française d'énergies renouvelables, c'est donc la première filière d’énergies renouvelables de notre pays.
Et si j'ai un message ce matin, c'est que je souhaite que cette filière, qui a le potentiel de développement le plus immédiat, le plus important, prenne toute sa place dans le débat national sur la transition énergétique que le Président de la République a annoncé et qui s'ouvrira prochainement.
La filière bois reçoit rarement l’attention qu’elle mérite, vous l'avez souligné. Ce n'est pas une fatalité. Notre objectif doit maintenant être d'en faire une énergie majeure du mix énergétique.
Je voudrais rappeler à quel point le bois est une énergie vertueuse :
- Elle l’est tout d’abord car elle est totalement renouvelable et contribue à la réduction des émissions de CO2. Nous avons en France un potentiel formidable et encore partiellement inexploité, puisque seuls 60 % de l’accroissement des forêts françaises sont aujourd’hui prélevés. Bien sûr, il ne s’agit pas de consacrer la totalité de nos forêts à cet usage. Au-delà des impératifs de biodiversité, il faut veiller à prévenir les conflits d'usage potentiels avec les industries du bois. Nous devons nous inscrire dans une logique de coopération entre les utilisateurs du bois permettant une évolution conjointe et une valorisation de tous les produits et sous-produits. Mais il n’en demeure pas moins que, à l’heure où nos concitoyens s’interrogent sur des énergies renouvelables souvent présentées comme lointaines ou peu réalistes, le bois offre à la France des perspectives très intéressantes.
- Deuxièmement, la biomasse est une énergie vertueuse parce qu'elle est propre, à condition que certaines avancées technologiques permettent de limiter les émissions atmosphériques liées à sa combustion. J'ai bien entendu vos remarques sur la réglementation, je suis consciente des difficultés pour les petites installations existantes. Nous chercherons des solutions et des modalités d'adaptation intelligentes, sans perdre de vue l'objectif puisqu'il y a vous le savez un contentieux européen concernant la qualité de l’air mais aussi un enjeu de santé publique.
- Troisième qualité majeure du bois énergie, il constitue une ressource domestique qui n'est pas soumise aux fluctuations des cours internationaux des monnaies et des hydrocarbures. En cela, la biomasse peut nous aider utilement à maintenir notre sécurité d’approvisionnement et notre indépendance énergétique dans des conditions économiques soutenables.
- Quatrième élément, l’énergie produite à partir de biomasse a d’ores et déjà prouvé son potentiel en termes de retombées économiques et sociales. Je pense au travail qu’elle génère, de la sylviculture en amont aux équipements et services en aval, et qui représentent aujourd’hui près de 60 000 emplois en France.
De la même manière, les activités relatives à l'approvisionnement, qui génèrent aujourd’hui plus de 36 000 emplois, sont un véritable atout non délocalisable, dans les communes rurales notamment. Au-delà de l’emploi, toutes les équations de la filière bois méritent également d’être citées, tant elles tracent les pistes d’une économie vertueuse.
- Enfin, et c’est le dernier avantage que je voudrais mentionner, la production d’énergie à partir de biomasse permet de valoriser pleinement la ressource bois par des circuits intégrés courts. Ces circuits sont au coeur de la transition énergétique et écologique que nous prônons, car ils sont au plus près des gens tout en offrant des solutions durables et responsables.
J'ai d'ailleurs plaisirs à retrouver parmi vous un entrepreneur des Deux-Sèvres dont je connais le travail, Monsieur ARCHIMBAUD, dont on peut dire que l'entreprise donne une nouvelle vie au vieux principe selon lequel « rien ne se perd, tout se transforme ».
Telles sont, Mesdames et Messieurs, les nombreuses qualités de la filière biomasse, qui m’ont fait souhaiter être parmi vous aujourd’hui pour donner à ce secteur tout simplement l’éclairage qu’il mérite.
La filière bois énergie doit être soutenue.
Pour cela, vous tous, acteurs de la filière, avez un rôle déterminant à jouer. Je sais qu’une table ronde est prévue cet après-midi pour débattre des actions prioritaires pour la nouvelle législature. Je me réjouis d’avance de vos contributions. Sachez que le gouvernement est à votre écoute.
Malgré la période de forte contrainte budgétaire, je m’engagerai personnellement pour que les outils de soutien à la filière qui ont fait la preuve de leur efficacité, notamment le fond chaleur, soient sécurisés pour assurer une croissance durable de cette énergie.
Nous allons également travailler avec Stéphane LE FOLL, ministre de l'Agriculture et des Forêts sur le développement de la ressource. Beaucoup de forêts, surtout de propriétés privées, restent aujourd’hui morcelées. Il faut donc accroître la mobilisation de la biomasse forestière dans des conditions de gestion locale et durable.
Mais surtout je suis venue ce matin pour vous donnez un rendez-vous. Car je souhaite que, dans le débat national sur l'énergie, nous puissions établir un programme d'actions précis pour la filière bois. J'attends vos propositions pour organiser la montée en puissance de cette énergie et de son utilisation.
Nous devons établir ensemble une feuille de route, définir des objectifs de substitution de l'énergie bois qu'il s'agisse des usages individuels ou collectifs, des particuliers ou des réseaux de chaleur, du résidentiel ou des bâtiments publics.
Ce travail collectif pour la filière bois énergie pourra alors trouver sa traduction concrète dans la loi de programmation pour la transition énergétique que le gouvernement présentera en 2013.
Voilà la proposition et la perspective de travail que je suis venue vous faire ce matin en espérant que ce colloque pourra en être une première étape.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 10 juillet 2012