Déclaration de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre des Français del'étranger, sur les relations économiques franco-marocaines et sur les efforts en faveur des Français de l'étranger, à Casablanca le 28 septembre 2012.

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Circonstance : Déplacement au Maroc (Rabat, Casablanca, Essaouira et Marrakech), du 27 au 30-dîner organisé à Casablanca, le 28 septembre 2012

Texte intégral

Monsieur l’Ambassadeur,
Mesdames et Messieurs les élus à l’AFE,
Monsieur le Président Gérard Pelisson,
Chers Compatriotes,
Chers Amis marocains,
Alors que son paquebot - l’Europe – lancé au Havre quelques semaines auparavant – et frère d’un second navire l’Afrique - croisait au large des côtes marocaines, Philippe Berthelot, secrétaire général de mon ministère et diplomate exceptionnel, écrivit sur l’un des nombreux billets qui encombraient ses poches : « ce paquebot malgré son nom représente un petit coin de France c’est-à-dire un peu plus de beauté et un peu plus de douceur ».
Cette beauté et cette douceur, il est cependant possible de le retrouver à l’étranger sans pour autant être diplomate ou marin.
Vos hôtels et le Groupe Accor, monsieur Pélisson en sont l’exemple. Je suis de ce fait sensible à l’accueil que vous nous réserver ce soir et qui nous permet – entre amis – de nous retrouver « dans ce petit coin de France ».
Nombre d’entre vous êtes des acteurs économiques. C’est à vous que je souhaite m’adresser en premier lieu.
Le Ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a fait de la diplomatie économique une priorité de son action afin qu’elle contribue au redressement économique de notre pays. Ce redressement, vous le ressentez intuitivement, passe par l’international et votre mobilisation à l’étranger. Nos ambassadeurs sont pleinement associés à cette démarche et il leur revient, à mes côtés, de soutenir nos entreprises ainsi que la mobilité économique. Nous devons aussi promouvoir la « destination France » pour les investissements étrangers.
A cet égard, en accord avec Laurent Fabius et Nicole Bricq, j’annoncerai dans les prochaines semaines des mesures concrètes. Elles auront pour objet d’aider nos entreprises et nos compatriotes tant dans leurs projets d’expatriation que lors de leurs retours en France.
Il nous faut en particulier encourager la présence de petits et moyens entrepreneurs. Le Maroc est une destination qui a tous les atouts pour une première expérience à l’international. Je sais pouvoir compter sur le soutien de la Chambre française de commerce et d’industrie. Et pour l’avoir été, je sais que vous pourrez compter aussi sur celui des Conseillers du commerce extérieur.
Au Maroc les opportunités sont multiples. Ce pays enregistre depuis plus de 10 ans des résultats économiques remarquables, avec une croissance moyenne de 5% par an, sans une seule année de récession. Le Maroc est aujourd’hui un pays pleinement intégré dans le marché mondial. Ses infrastructures sont ambitieuses et dotées de pôles d’excellence dans l’industrie et les services.
Cette évolution s’est accompagnée d’une ouverture économique. Les entreprises françaises ont gardé une place privilégiée sur le marché marocain, souvent la première, alors même qu’elles y rencontrent désormais une vive concurrence. En tant que membre du gouvernement, je vous en félicite et me réjouis de ces succès.
Les entreprises françaises sont en effet souvent les mieux à même pour répondre aux priorités de développement fixées par le Maroc. Il s’agit d’aller au-delà de la simple fourniture de produits. Ce sont des méthodes, des technologies qui sont mises en partage. Ce sont des formations et des emplois qui sont apportés. Je me réjouis ainsi que la moitié des investissements directs étrangers au Maroc viennent de France. Avec 750 filiales et 36 entreprises du CAC40, la France demeure le premier client et le premier fournisseur du Maroc.
Cette relation particulière s’illustre par de nombreux projets symboliques. Je me bornerai à en citer quelques-uns. Dans le domaine des transports publics, la France a fait un effort exceptionnel de financement. La ligne à grande vitesse Tanger-Casablanca, les tramways de Rabat-Salé et de Casablanca sont l’illustration de ce partenariat réussi.
Les entreprises françaises ont joué par ailleurs un rôle de premier plan dans la construction du port de Tanger Med, symbole du développement du Nord du Maroc.
Leurs investissements dans les secteurs de l’aéronautique et de l’automobile ont permis l’apparition de filières marocaines qui exportent aujourd’hui à l’international. Dans le domaine de l’énergie, nos entreprises occupent la place de fournisseurs historiques. Elles se sont adaptées à la nouvelle donne, marquée par la généralisation des partenariats publics-privés et les énergies renouvelables : EDF Energies Nouvelles est ainsi en négociation exclusive pour le champ éolien de Taza, ce qui préfigure, je l’espère, d’autres réussites.
J’arrête ici cette énumération, en reprenant le sentiment exprimé par ma collègue Nicole Bricq, qui était parmi vous en juillet. Comme elle, je me réjouis que la co-localisation et le partenariat gagnant-gagnant recouvrent, entre la France et le Maroc, une réalité bien vivante. Tout échange est une source d’enrichissement.
Ce rapprochement signe une meilleure intégration économique entre les deux rives de la Méditerranée. Je sais que le Maroc a fait de son arrimage à l’Union européenne une orientation stratégique de sa diplomatie.
A un moment où les opinions publiques doutent des capacités de l’Union européenne à faire face à la crise, il nous revient collectivement de défendre ce futur commun dont la monnaie unique est l‘expression la plus aboutie et la plus symbolique.
Mesdames, Messieurs
Ma nomination témoigne de toute l’importance qu’attachent le Président de la République et le Premier Ministre aux deux millions de Français établis hors de nos frontières.
Au Maroc, mes chers compatriotes, vous êtes près de 45.000 inscrits et probablement le double en réalité. L’accroissement continu et rapide de votre communauté donne la mesure de l’excellence de nos relations et de la confiance que vous témoignez en l’avenir de ce pays. Ce n’est donc pas un hasard si la France dispose ici de l’un des réseaux consulaires les plus développés du monde. Nos six consulats généraux sont là pour répondre à vos sollicitations.
Je remercie leur personnel pour le travail remarquable qu’ils accomplissent, sous l’autorité de l’ambassadeur, M. Charles Fries.
C’est ici, à Casablanca, que notre communauté est la plus nombreuse avec plus de vingt mille compatriotes. Une communauté jeune, puisque 30% ont moins de 18 ans et une communauté active puisque les deux tiers occupent un emploi.
C’est une communauté structurée autour de nombreuses associations dynamiques. Je sais aussi la qualité des élus qui vous représentent tant à l’Assemblée des Français de l’Etranger qu’à l’Assemblée nationale.
Je ne saurais parler de vos représentants sans avoir une pensée émue pour Wladimir Chostakoff et saluer son engagement en faveur de ses compatriotes expatriés. Conseiller à l’Assemblée des Français de l’Etranger, il présidait l’une de vos associations. Je tiens aussi à rendre hommage à Madame Paulette Brisepierre de la Fontaine, Sénatrice des Français de l’étranger, femme de convictions, connue pour son énergie et son dynamisme, et qui a tant oeuvré pour l’amitié franco-marocaine.
Votre expatriation s’accompagne cependant parfois de difficultés. A travers notre ambassade et nos consulats généraux, nous sommes là pour vous aider à les surmonter :
- Pour assurer votre sécurité en premier lieu, en liaison avec les autorités du Royaume. J’y suis particulièrement attentive.
- Pour vous venir en aide, ensuite, en cas de besoin à travers notre dispositif d’action sociale. La France est le seul pays à mettre en oeuvre une assistance consulaire de cette envergure. Nous pouvons en être fiers. Les Français du Maroc bénéficient ainsi d’une aide d’1.8 million d’euros par an. C’est là aussi l’expression de la solidarité d’une Nation à laquelle vous continuez à appartenir.
J’ai obtenu avec Laurent Fabius que les crédits d’aide sociale ne soient pas soumis, dans le prochain triennum budgétaire aux réductions qui étaient programmées par le gouvernement précédent.
Mesdames, Messieurs,
Si l’économie est essentielle, l’universitaire que je suis est également intimement attachée à la préservation de notre réseau scolaire ainsi qu’à la permanence de sa double mission :
- scolariser les enfants de nos compatriotes ;
- et l’ouvrir à la société marocaine.
C’est cette double mission qui consacre la qualité d’un réseau en forte croissance (720 élèves supplémentaires accueillis à cette rentrée). Il compte aujourd'hui 31 000 élèves et la croissance du nombre d'élèves français me semble être l’un des signes de l’existence d’échanges économiques et culturels exceptionnel entre nos deux pays.
Afin de tenir compte de cette évolution, un programme de rénovation, d'agrandissement et de restructuration de nos établissements est actuellement en cours.
A Agadir par exemple et afin de répondre aux attentes des parents et des enseignants j’ai demandé à la Directrice de l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Etranger et au Directeur général de la Mission Laïque Française de réfléchir aux conditions d’une mutualisation bien pensée de leurs atouts respectifs. Il n’est pas de raison de maintenir épars ce qui peut être réuni dans l’intérêt du plus grand nombre.
Plus généralement, la pérennité de notre réseau suppose son adaptation à une société en constante évolution. Le Ministre des Affaires étrangères m’a confié une mission de réflexion dans ce sens. Les élus, les parents d’élèves ainsi que les organisations syndicales y seront associées. Je proposerai au Ministre, au Premier Ministre et au Président de la République des mesures concrètes qui seront mises en oeuvre à partir de 2014.
Une réforme du système des aides à la scolarité sur critères sociaux est également en cours. Elle s’appliquera dès la rentrée prochaine. Cette réforme a pour objectif d’aider davantage de familles dans un souci de justice sociale.
Nous souhaitons agir vite, mais sans précipitation et dans la concertation avec vos élus, qu’ils soient parlementaires ou conseillers à l’Assemblée des Français de l’Etranger. L’enjeu est d’importance : il s’agit de garantir dans le temps l’accès démocratique à nos écoles.
Chers amis du Maroc, je sais combien votre communauté qui plonge ses racines à la fois en France et dans ce pays, est dynamique parce que féconde de sa diversité et de son histoire.
Par votre présence, vos liens avec ce très beau pays, vous participez au dialogue entre les cultures de part et d’autre de la Méditerranée. Votre communauté est un pont entre nos deux rives, l’illustration d’un enrichissement mutuel par la connaissance de l’autre. Comme l’a rappelé le Président de la République la semaine passée en inaugurant le nouveau département des Arts de l’Islam au Musée du Louvre, « les civilisations progressent par leurs rencontres, leurs dialogues ».
Pour terminer, je souhaite vous conter avec émotion le témoignage de la mère de l’un des jeunes militaires français assassinés par Mohamed Merah en mars dernier. Cette femme, cette mère, d’origine marocaine, d’une dignité et d’un courage exemplaires nous a donné une leçon dont je me souviendrai le restant de mes jours, le 19 septembre lors de la cérémonie en hommage aux victimes du terrorisme présidée par le Chef de l’Etat. Elle nous a dit combien son fils était fier de servir la France tout en étant fier de ses origines marocaines. Elle nous a exhortés, en mémoire de son fils et pour que sa mort ne soit pas inutile, à ne rien céder au terrorisme. Elle a crié sa foi religieuse tout en appelant la France à ne rien céder sur les valeurs du pacte républicain qui unit la nation et sur le principe de laïcité qui garantit à tout citoyen de pratiquer sa religion dans le respect des croyances de tous.
Les liens qui unissent le Maroc et la France c’est aussi cela. Au delà des gouvernements et des relations diplomatiques ce sont des destinées communes, des histoires individuelles, des valeurs partagées.
Vous pourrez compter sur mon appui, et celui des représentants de l’Etat pour faire vivre ces valeurs et vous accompagner au service de notre pays.
Vive la France
Vive le Maroc
Vive l’amitié franco-marocaine.
Source http://www.ambafrance-ma.org, le 11 octobre 20121