Texte intégral
Il y a 10 ans, Sohane était assassinée ici, dans sa ville. Brulée vive. Brulée vive parce quelle avait refusée de se soumettre.
A 17 ans, elle voulait tenir tête. Tenir tête à la loi du plus fort, qui, encore aujourdhui en France, est fréquemment la loi des hommes.
A 17 ans, elle voulait être libre. Libre daller et de venir, libre de vivre sa vie comme elle en avait décidé.
10 ans après, je pense à ses proches. Kahina et Waïba, ses surs, qui sont là ce soir. Je pense à son à son père. Je salue le courage de cet homme qui le premier a dit « Ma fille est morte parce quelle était une fille ».
Morte parce que femme.
Je souhaite que notre pays puisse entendre ces mots « Morte parce que femme ». Pourquoi avons-nous tant de mal à nommer les choses ? A chaque fois que quelquun dit le mot « querelle » au lieu de « crime », ou le mot « dispute » ou lieu de « délit », il ou elle, volontairement ou non, cache la réalité. Amoindrit la gravité des faits.
Cest grâce à la mobilisation de la famille de Sohane et à la Ligue du Droit International des Femmes que pour la première fois dans lhistoire de notre République, nous avons qualifié un crime de « sexiste ». On a mis un mot sur lhorreur. On a reconnu quêtre femme, en France, au XXIème siècle, pouvait encore couter la vie.
Il y a des milliers de Sohane dans notre pays comme dans le monde. Des femmes de tous les âges, blanches ou noires, grandes ou petites, ouvrières ou cheffe dentreprises, habitant à Neuilly ou à Vitry, à New York ou à Brazzaville, à Pekin ou à Mexico. Les violences faites aux femmes traversent le monde et traversent toutes nos sociétés. Et depuis des millénaires, le monde reste sourd et muet devant le massacre.
Je fais ce soir un rêve. Celui que, comme le dit la plaque posée ici, « les garçons et filles vivent mieux ensemble dans légalité et le respect ». Ce rêve nest pas inaccessible. Il dépend de nous, de notre volonté de faire changer les mentalités, pour faire changer la réalité.
Sohane, nous ne toublions pas. Tu restes dans nos esprits, comme une invitation à la révolte contre les violences sexistes et comme une exhortation permanente à défendre, partout et tout le temps, la liberté des femmes.
source http://femmes.gouv.fr, le 9 octobre 2012