Texte intégral
Je suis heureuse douvrir le 40ème Congrès de la Mutualité Française et davoir ainsi loccasion de mexprimer devant plusieurs milliers de délégués mutualistes. Benoît Hamon, ministre délégué à léconomie sociale et solidaire, sera lui aussi présent cet après-midi, pour rappeler que les valeurs du monde mutualiste sont une réponse à la crise que nous traversons.
Pour lensemble du monde de la protection sociale, votre congrès est un moment important. La présence du président de la République samedi pour sexprimer devant vous atteste de limportance que nous accordons à la Mutualité Française dans notre système de santé.
Je tiens à saluer lengagement de votre président, Etienne Caniard. Sa mobilisation depuis de très nombreuses années au service de la santé des Français est reconnue par tous. Et son parcours est un atout essentiel pour conforter la Mutualité comme force de proposition.
Vous venez de rappeler, monsieur le président, que vos propos sont souvent exigeants. Ils sont à la mesure des ambitions que vous portez. Mais je sais également pouvoir compter, au moment où la crise fragilise notre système de santé, sur votre sens aigu des responsabilités.
Votre congrès revêt une importance particulière dans la période dincertitudes que nous traversons. Les valeurs républicaines sont mises à mal. La pertinence de notre modèle social est contestée par certains. La peur du déclassement, laccroissement des inégalités, le repli sur soi, défient notre pacte social, dont la solidarité est lun des piliers.
Dans ce contexte, les attentes des Français à légard des pouvoirs publics sont immenses. Notre système de santé est un rempart contre le délitement du lien social. Réaffirmer ses valeurs, cest préserver notre cohésion sociale, cest garantir à nos concitoyens quils seront protégés face aux aléas de la vie.
Votre congrès est consacré à une question essentielle, la mère de toutes les batailles pour une ministre de la santé de gauche : la question de laccès aux soins. Au moment où la crise frappe durement nos concitoyens, notre responsabilité collective est de tout mettre en uvre pour lutter contre les inégalités de santé et garantir un accès effectif aux soins.
Grâce à son ancrage territorial, la Mutualité Française est un acteur majeur de loffre sanitaire : 38 millions de français accèdent à notre système de santé grâce à vous et à vos 2 500 services de soins et daccompagnement. Vous êtes un maillon essentiel de notre modèle solidaire de santé publique.
Ces dernières années, la Mutualité a été malmenée. Elle a été la cible de nombreuses attaques, qui visaient les fondements mêmes du mouvement mutualiste. Votre culture, celle de la solidarité par la mutualisation du risque, a été mise à mal. Le rôle historique qui est le vôtre, et auquel les Français, autant que les pouvoirs publics, sont particulièrement attachés, a été ébranlé par les choix politiques de nos prédécesseurs. Par ailleurs, le monde mutualiste connaît de profondes mutations : les regroupements se poursuivent et votre gouvernance doit sadapter pour faire face à de nouveaux enjeux.
Il est donc légitime, dans cet environnement incertain, que les pouvoirs publics fixent un cap clair pour notre système de soins et que nous clarifions la place que vous occuperez à lavenir.
1. Ma priorité, cest de préserver un système de santé solidaire.
Chacun dentre nous peut être confronté un jour ou lautre à la maladie. Cest pour cette raison que notre système de santé publique doit garantir à tous nos concitoyens quils seront soignés, quelle que soit leur condition. Ce principe est lun des piliers de notre protection sociale. Il est aussi la condition de notre cohésion.
La santé, cest notre avenir.
Parce quelle est une marque de progrès. Grâce à ses avancées, nous vivons mieux et plus longtemps.
Parce quelle incarne notre combat pour légalité. Egalité de tous face à la maladie, sans distinction sociale.
Parce quelle est une composante déterminante de la croissance du 21ème siècle. Investissement dans la recherche, dans linnovation, dans lexcellence : la santé porte les emplois de demain.
a) Laccès aux soins est la première attente des Français. Sans tarder, le gouvernement a déjà entrepris les actions nécessaires pour permettre à nos concitoyens de bénéficier dun système de santé performant et soutenable.
Vous demandez, monsieur le président, à être jugés sur vos actes, et non pas sur des déclarations dintention. Je suis prête, moi aussi, à être jugée sur la cohérence du projet que je porte pour la santé des Français et dont lobjectif est légal accès aux soins. Nous navons pas attendu le PLFSS pour agir.
En quelques mois seulement, jai engagé le pacte de confiance à lhôpital pour garantir lavenir de notre service public hospitalier, pour sécuriser ses financements et renouer le dialogue avec ses personnels. En quelques mois seulement, le chantier de la réorganisation des urgences a été lancé avec le double objectif dun accès aux soins durgence en moins de trente minutes et du désengorgement des services. En quelques mois seulement, jai repositionné le ministère de la santé comme un acteur majeur de la recherche en santé au profit de la qualité et de la sécurité des soins.
Ces choix politiques assumés sont dautant plus décisifs que la situation dont nous avons hérité est particulièrement dégradée. Face à laggravation de létat des comptes sociaux, il aurait été irresponsable de laisser filer les déficits. Les Français en auraient subi les conséquences désastreuses et leur niveau de protection sen serait trouvé durablement affaibli.
Dès les premières semaines, nous avons clairement fait le choix de la responsabilité en prenant les décisions qui simposaient pour engager le redressement de nos comptes. La loi de finances rectificative (LFR) pour 2012 a marqué une première étape. Leffort qui a été engagé durant lété, pour rétablir la trajectoire de nos comptes sociaux, ne sest pas fait au détriment des Français. Il aurait été injuste de leur faire payer le prix de la crise et des choix politiques des dix dernières années. Le cheval de Troie de nos prédécesseurs, cétaient les déremboursements. Leur conception reposait sur la responsabilité individuelle : à chacun de couvrir ses frais de santé selon ses moyens. Inexorablement, la part obligatoire de lassurance maladie sest vue réduite au profit des complémentaires. En agissant ainsi, lidentité même de notre protection sociale a été dévoyée.
Je ne partage rien de la vision de nos prédécesseurs, car elle est tout simplement contraire à nos valeurs.
Lobjectif que jai fixé est clair : à terme, nous réduirons le reste à charge pour les familles. Cest dans cet esprit que nous avons élaboré les grandes orientations du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2013. Le débat débutera la semaine prochaine à lAssemblée nationale. Je sais par avance, et par expérience, quil sera rude et, quau fond, cest la pérennité de notre modèle social qui sera en jeu.
Le PLFSS que nous défendrons est le fruit de choix politiques : il traduit une rupture claire avec la période antérieure. Vous venez de lindiquer, la Mutualité Française à été sensible à plusieurs dispositions contenues dans ce projet de loi.
Cest le cas pour la suppression de loption de coordination renforcée, qui visait à mettre en uvre le secteur optionnel. Le secteur optionnel nétait pas la bonne solution pour encadrer les dépassements dhonoraires. Il faisait peser sur les mutuelles lobligation de rembourser les dépassements dhonoraires sans que ce dispositif soit correctement encadré : cette mesure arbitraire et non négociée a fait la preuve de son inefficacité. Cest pourquoi le PLFSS prévoit dabroger les dispositions votées dans la LFSS pour 2012.
Cest également le cas du report de lobligation de publication des frais de gestion pour les complémentaires dont nous connaissons les difficultés quelle créait pour vous. Cest pourquoi un arrêté a été publié, prévoyant le report dun an de cette obligation. Cette année sera mise à profit pour engager une réflexion sur le périmètre des frais de gestion.
Enfin, je sais que de nombreuses dispositions de ce PLFSS trouveront un écho favorable auprès de la Mutualité Française.
Concernant laccès aux soins, nous prenons des engagements dès 2013 avec, par exemple, la création de 200 postes de praticiens locaux de médecine générale pour les territoires les plus fragiles.
Sagissant du déficit de lassurance maladie, vous avez été attentifs à trois dispositifs présents dans notre projet. Celui sur les taxes comportementales liées à la bière et au tabac qui, outre la recette de 450 millions quil génère, a un impact positif direct sur la santé des Français. Celui aussi concernant les niches sociales, qui remettaient en cause le caractère solidaire du financement de la protection sociale. Celui, enfin, sur le médicament, à travers lequel nous poursuivons les baisses tarifaires sur les génériques auxquels vous êtes particulièrement attachés.
Les derniers mois auront enfin permis dengager ce qui aurait dû être fait depuis 5 ans : entamer une réflexion de long terme, en vue de réformer le financement de la protection sociale. Cest le sens de linstallation, par le Premier ministre, le 26 septembre dernier, du Haut Conseil pour le Financement de la protection sociale (HCFI) auquel vous participez comme personnalité qualifiée monsieur le président. Je ne fais pas partie de ceux qui considèrent que notre protection sociale est un fardeau dans une économie mondialisée. Nous ne serons pas plus compétitifs en protégeant moins nos salariés. Cest la raison pour laquelle nous devons garantir sa pérennité et réfléchir à un financement plus équilibré de notre modèle social. Cette instance dispose de trois mois pour nous soumettre des pistes dévolution.
Sur ce sujet essentiel, jai dailleurs pris connaissance avec intérêt des propositions formulées par la Fédération Nationale de la Mutualité Française (FNMF). Elles seront étudiées avec attention dans le cadre de cette réforme du financement de la protection sociale.
Le redressement des comptes de lassurance maladie est primordial, mais il nest pas une fin en soi. Il sert un objectif de justice : garantir aux Français une offre de soins de qualité et un haut niveau de protection sociale.
b/ La modernisation de notre système de soins commence par sa réorganisation. Pour gagner en efficience, mais aussi pour maîtriser les dépenses de santé.
Je sais que les pouvoirs publics et les mutuelles partagent cette ambition.
Une réorganisation réussie de notre système de soins passe par la territorialisation de nos politiques. Cest la mission confiée aux Agences Régionales de Santé. Associées au quotidien aux travaux des ARS, les mutuelles sont des acteurs à part entière de la territorialisation.
Mieux que quiconque, vous savez quil est temps de construire le parcours de soins autour des besoins des patients et non plus des structures. Les plus à même didentifier les besoins des populations, ce sont les acteurs de terrain : professionnels de santé, élus locaux, associations dusagers. Votre présence exceptionnelle et votre ancrage dans les territoires font de la Mutualité le premier partenaire des collectivités locales. Cest lancienne présidente dun conseil général qui vous le dit : le travail réalisé au quotidien avec les départements et les régions est décisif pour bâtir une meilleure offre de soins.
Cest dans un cadre territorialisé que nous remédierons au décalage entre lévolution de la médecine et linertie des structures.
Dans un premier temps, il nous faut recentrer lactivité de lhôpital sur son cur de métier, les phases aigües et les pathologies lourdes. Actuellement, le nombre dhospitalisations non-pertinentes est trop élevé et continue daugmenter. Cest inefficace pour les patients et coûteux pour lhôpital.
Les objectifs que nous poursuivons sont clairs : renforcer la qualité des soins et générer des gains defficience. Dès 2013, ce sont ainsi plus de 650 millions qui seront économisés à lhôpital, grâce au développement de la chirurgie ambulatoire, à loptimisation des achats ou à lamélioration de la pertinence des actes.
Le second pilier de cette réorganisation, cest la structuration dune offre de soins ambulatoires de qualité, portée par les professions libérales de santé. Elles joueront un rôle majeur. Leur action est dailleurs pleinement reconnue dans le PLFSS 2013 avec un taux dévolution de lONDAM « soins de ville » équilibré avec celui de lhôpital. Les professionnels libéraux de santé ont vocation à porter les soins ambulatoires. Depuis dix ans, les innovations thérapeutiques et les progrès réalisés permettent de soigner en ville ce qui était autrefois soigné à lhôpital.
Nous devons tenir compte de ces évolutions pour organiser la médecine de proximité. Très concrètement, dès septembre 2013, nous déploierons des équipes de proximité permettant dassocier plus étroitement les professionnels de santé dun territoire. Les actions déducation thérapeutique et de dépistage trouveront là un support efficace de développement.
Ce sera aussi le cas pour les dispositifs de prévention trop souvent laissés de côté. Cest en renforçant nos politiques de prévention que nous améliorerons la santé des Français.
Vous laurez compris, je ne suis ni « hospitalo centrée », ni, comme je lentends désormais, « libéralo centrée ». La politique que je porte ne tend pas à privilégier un secteur aux dépens dun autre : je veux favoriser la complémentarité de lhôpital et de la médecine de ville. En articulant mieux leurs missions et en favorisant leur coordination, nous améliorerons la qualité de notre système de soins, et nous progresserons dans la maîtrise des dépenses de santé.
2) La seconde de mes priorités, cest de développer laccès effectif à une bonne couverture des soins.
a/ Trop de Français ont renoncé à se soigner. Légalité daccès aux soins nest plus une réalité.
Depuis de nombreuses années, le niveau de protection de chaque Français sest affaibli. Nos concitoyens payent plus, pour être moins bien protégés.
Je partage le message de votre campagne de presse lancée le 10 octobre sur laccès aux soins. « Sans mutuelle, la Sécu ne suffit plus ! » : on ne peut pas être plus clair. Jai également été sensible au fait que, sur vos affiches, ce message soit porté par des jeunes. Cela renforce encore les valeurs de solidarité entre générations portées par le mouvement mutualiste.
Les Français ont été les premières victimes de la politique conduite depuis 10 ans. Lannée dernière, près dun quart de nos compatriotes a renoncé à se soigner, faute de moyens. La Mutuelle Des Etudiants (LMDE) estime quant à elle que 34% des étudiants ont reporté la consultation dun médecin dans les douze derniers mois.
Nos prédécesseurs se sont appliqués à faire émerger un système à deux vitesses. Pour cela, ils ont multiplié les déremboursements, et je veux rappeler que le PLFSS 2013 nen comporte aucun ; ils ont augmenté le forfait à lhôpital et ont clairement mis en cause la prise en charge des ALD. Je tiens dailleurs à vous en dire quelques mots.
La remise en cause des affections de longue durée (ALD) était inacceptable. Elle révélait une profonde méconnaissance de létat sanitaire de notre pays et des exigences nouvelles quil impose : de plus en plus de patients ont besoin de soins lourds. Cest la conséquence du développement des pathologies chroniques et du vieillissement de la population. La prise en charge des ALD est lun des piliers du caractère solidaire de notre système de santé : chacun cotise selon ses moyens, et reçoit en fonction de ses besoins. Ce principe, vous le connaissez mieux que quiconque, puisquil est au fondement du mouvement mutualiste.
Agir sur les dépenses de santé et le reste à charge est indispensable pour permettre à chaque Français, quelles que soient ses ressources, de se soigner.
Et je pense dabord aux dépassements dhonoraires, qui ont presque triplé en 20 ans ! Ils coûtent désormais 2,5 milliards deuros par an aux Français.
Vous le savez, une négociation a été engagée cet été par le directeur général de lUNCAM. Les Français ont entendu assez de discours sur cette question des dépassements dhonoraires : ils attendent désormais des résultats tangibles. Cette négociation ne visait pas à accuser ou à stigmatiser certains professionnels, mais simplement à mettre un terme à des abus qui ne sont plus tolérables.
Javais fixé deux objectifs.
Dabord, lutter contre les dépassements excessifs en fixant des règles claires sur les sanctions qui seront appliquées.
Ensuite, la mise en place dun contrat daccès aux soins avec les médecins pour faire baisser les frais de santé à la charge des Français.
Cette négociation sest prolongée toute la nuit. Je sais quun certain nombre dentre vous ont peu dormi.
Le texte qui est sur la table suite à ces discussions me semble équilibré. Les abus seront sanctionnés efficacement. Le projet prend en compte les attentes des patients davoir accès à des consultations au tarif de la sécurité sociale ou avec des restes à charge en diminution. Il permet aux médecins qui ont fait le choix de tarifs opposables et raisonnables dêtre mieux reconnus et valorisés, sans pour autant entrer dans une logique de stigmatisation.
Les représentants des médecins ont souhaité retourner devant leurs instances. Comme toujours dans une négociation de ce type, chacun a dû faire un pas vers lautre. Il faut maintenant que ces bonnes intentions se concrétisent. Pour ma part, comme je lai toujours dit, je souhaite vivement un accord lundi soir, en nabandonnant rien de mes objectifs.
Mais je ne veux pas réduire la question du reste à charge aux seuls dépassements. Dans certains secteurs, les dépenses de santé ne sont pas régulées. De nombreuses difficultés, auxquelles je suis attentive, viennent entraver laccès des Français à notre système de soins.
Je veux citer deux exemples que vous connaissez bien.
Je pense au secteur dentaire. Le cas des personnes âgées est emblématique : le prix des prothèses dentaires est un obstacle majeur pour beaucoup de nos concitoyens. Labsence de prise en charge dans ce domaine a des conséquences graves sur leur état de santé, pouvant aller jusquà la dénutrition. Elle a aussi pour conséquence, et je ne veux pas la minimiser, la perte destime de soi.
Je songe également au secteur de loptique. Dans ce domaine, jai conscience que nous nous heurtons à des difficultés qui ont une double origine : dune part, la démographie et lorganisation des professionnels compliquent beaucoup les délais daccès à un ophtalmologiste. Nombreuses ont été les personnes qui mont interpelée sur des délais dattente considérables, allant parfois jusquà une année ! Cest pourquoi le développement des délégations de tâche aux orthoptistes est une piste quil nous faut privilégier. Dautre part, le secteur des opticiens est trop concentré et ne permet donc pas davoir des prix accessibles.
b/ Un accès effectif aux soins passe également par une plus grande transparence de loffre de santé.
Notre rôle est de permettre aux Français daccéder à une information claire et lisible sur notre système de santé.
Les pouvoirs publics ont mis en place des dispositifs grâce auxquels les Français peuvent accéder à des informations de qualité.
Je pense à linitiative de lAgence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM), qui est en train de mettre en uvre un site internet consacré au médicament. Un répertoire en ligne vient dêtre créé pour recenser les centres anti-douleur. Jai également à lesprit le site ameli-direct.fr, créé par lassurance maladie, et dont le grand public ne sest pas encore suffisamment emparé. Il permet pourtant de connaître les tarifs et les dépassements dhonoraires pratiqués par chaque médecin, ainsi que des informations sur lactivité des hôpitaux. Nous devons poursuivre leffort engagé et mettre en place un observatoire public des dépassements dhonoraires.
Il est nécessaire que les Français puissent bénéficier dune information publique transparente sur notre système de santé.
Le manque de lisibilité pour les patients et leur mauvaise orientation sont de puissants facteurs de renoncement aux soins. Lensemble des informations dont nous disposons mérite donc dêtre objectivé. Aujourdhui, la transparence est principalement assurée par des acteurs privés. Je suis convaincue quil revient aux pouvoirs publics de rassembler ces informations sur les hôpitaux, pour les rendre plus accessibles et plus transparentes. Cela permettra aux Français, par exemple, de mieux appréhender le coût dune prise en charge ou la qualité dun établissement.
Le mouvement mutualiste doit prendre toute sa part dans cette démarche de transparence. Je veux dailleurs saluer lengagement de la Mutualité Française sur cette question, avec la mise en place dun dispositif, qui aide les adhérents à choisir les établissements, en leur fournissant une information transparente sur les coûts des soins, ainsi que sur leur qualité.
3) La politique que je conduis a vocation à conforter le rôle essentiel du secteur mutualiste dans notre système de soins.
Face à lampleur de la crise qui frappe nos concitoyens, le monde mutualiste joue un rôle essentiel dans leur protection.
Vous connaissez notre attachement au dialogue social. Certains nous reprochent de prendre notre temps. Les mêmes qui considèrent que la négociation est superflue et que cest uniquement dans lurgence que se bâtissent des compromis solides. Nous avons rompu avec cette conception parce que nous croyons quil est primordial que le monde mutualiste puisse exercer ses responsabilités. Pour ce gouvernement, vous êtes un interlocuteur institutionnel incontournable. Cest en travaillant de concert que nous assurerons ensemble la protection des Français.
a) Les pouvoirs publics doivent réinvestir le champ de la complémentaire santé.
Je crois aux vertus de la régulation. Et je suis consciente de lérosion continue de sa position sur le marché que doit affronter le secteur mutualiste. La concurrence à laquelle vous êtes confrontés est celle des sociétés dassurance et des bancassureurs. Je crois que les spécificités du secteur mutualiste doivent être pleinement reconnues, en particulier votre statut doffreurs de soins, qui constitue un élément de différenciation et un atout concurrentiel sur ce marché en forte expansion.
Sans régulation globale du système de santé, les valeurs de solidarité resteront lettre morte. En effet, la priorité du courant mutualiste, cest laccès aux soins et la protection de vos adhérents. Depuis dix ans, les pouvoirs publics ont renoncé à intervenir, sacrifiant au dogme de la dérégulation. Ce laisser-faire coupable a eu de graves conséquences pour votre secteur. Labsence de règles vous désavantage, parce que le principe même qui fonde votre gestion du risque, cest lintérêt général.
Cest donc en réintroduisant des règles que les pouvoirs publics fixeront le cadre de lintervention des complémentaires.
b) Nous sécuriserons le financement de vos structures de soins.
Les centres de santé mutualiste sont fortement ancrés dans certains de nos territoires dont ils constituent un élément structurant de laccès aux soins. Pour de nombreux Français, ils représentent dailleurs une alternative aux dépassements dhonoraires.
Toutefois, ces structures connaissent aujourdhui dimportantes difficultés financières. Parce quelles garantissent un accès effectif aux soins pour des millions de nos concitoyens, il nous faut sécuriser leur financement.
Dans ce cadre, jai diligenté une mission, confiée à lInspection Générale des Affaires Sociales, sur le modèle économique des centres de santé : elle me remettra ses propositions pour assurer leur pérennité. Cest également en renforçant le contrôle de ces centres que nous conforterons leur place dans le paysage sanitaire français.
A mes yeux, les centres de santé mutualistes sinscrivent pleinement dans la démarché que je porte dune prise en charge globale du patient.
c) Le développement des réseaux de soins mutualistes permettra daméliorer la qualité de notre système de santé :
La mission assurée par les mutuelles au travers de leurs réseaux de soins est primordiale. Ils permettent à de très nombreux Français de se soigner. En particulier lorsquils concernent des activités dont les prix ne sont pas encadrés, et pour lesquelles la part prise en charge par les mutuelles est majoritaire.
Je sais que, sur ce sujet, vous souhaitez bénéficier des mêmes dispositions que les autres complémentaires. Je connais votre engagement pour faciliter laccès à des soins de qualité en maîtrisant les tarifs pour vos adhérents. Vous avez dit dans votre intervention, monsieur le président, que vous attendiez une position claire du gouvernement sur cette question. Je vous réponds très directement que jai soutenu linscription à lordre du jour du parlement dune proposition de loi permettant aux mutuelles, comme aux autres organismes complémentaires, de conventionner avec des réseaux de prestataires médicaux ou paramédicaux.
Je souhaite dailleurs que soit confiée au HCCAM une réflexion sur les réseaux de soins : il faut que ces réseaux puissent sétendre, tout en respectant les principes fondamentaux de notre système de santé. Cette réflexion pourrait déboucher, avant la fin du premier trimestre 2013, sur des propositions visant à garantir laccès à des soins de qualité, notamment dans le champ du dentaire et de loptique. Ces orientations, je le rappelle, avaient été portées par le président de la République pendant sa campagne.
d) Nous transformerons les contrats solidaires et responsables pour améliorer la couverture complémentaire.
La règle de départ, nous la partageons : la situation financière dun malade ne doit en aucun cas lempêcher de se soigner.
Or, de nombreuses études démontrent que labsence de complémentaire, ou quune complémentaire de mauvaise qualité, sont des facteurs de renoncement aux soins. Vous lavez très bien dit, monsieur le président, « les Français ne sont pas égaux devant la protection sociale complémentaire ». Malgré la mise en place de lACS, plus de 4 millions dentre eux sont encore sans complémentaire à ce jour.
Lobjectif que le gouvernement a fixé, vous le connaissez et le partagez : cest celui de laccès de tous au droit dêtre soigné. Pour y parvenir, vos organismes doivent offrir à nos concitoyens des contrats de qualité accessibles à tous.
Or, les différences entre les contrats responsables et les autres se sont estompées. Elles étaient pourtant essentielles pour permettre de répondre le plus efficacement et le plus justement possible à lexigence daccès aux soins.
Vous avez un rôle décisif à jouer dans la redéfinition de ces contrats. Leur contenu doit être amélioré pour garantir de meilleurs remboursements. Je pense notamment aux prothèses et à lorthodontie, ainsi quà une amélioration de la prise en charge des maladies chroniques et des actions de prévention. Une fois rénovés, ces contrats devront conduire à une limitation du reste à charge en cas de dépassement. Cette évolution pourrait être accompagnée par une plus grande différenciation de la fiscalité entre les contrats responsables et les autres.
Cest dans ce cadre que nous engagerons dans les prochaines semaines la discussion sur lavenir de la TSCA.
Le combat que vous avez conduit contre la taxation des contrats responsables na pas été lexpression de la défense de privilèges corporatistes. En vous battant sur cette question, ce sont dabord les intérêts des Français que vous avez défendus.
Jai compris quà travers ce débat, ce sont des questions plus larges que vous souhaitez voir abordées. Celle de la place des complémentaires dans notre protection sociale. Mais aussi celle, déterminante, de votre relation sur le long terme avec les pouvoirs publics. Une relation que je souhaite durable, fondée sur la confiance, la réciprocité et le partage dobjectifs.
Les chantiers qui nous attendent, vous le savez, sont immenses. Ils prendront place dans un contexte de crise qui frappe durement des millions de Français. Dans le domaine de la santé, sans doute encore plus quailleurs, nous ne pouvons laisser faire les forces du marché et renvoyer les individus à leur propre responsabilité.
Il y va de la pérennité, à terme, de notre modèle de protection sociale. Le mouvement mutualiste a toujours été à lavant-garde des grandes conquêtes de notre histoire sociale, en accompagnant les pouvoirs publics dans la mise en place de mécanismes de couverture des risques. Ces derniers ont beaucoup évolué en quelques décennies. Je sais pouvoir compter sur vos propositions et votre engagement, pour quensemble nous puissions garantir à tous les Français le meilleur niveau de protection possible.
Je vous remercie
source http://www.social-sante.gouv.fr, le 19 octobre 2012