Conférence de presse de M. Bernard Cazeneuve, ministre des affaires européennes, sur la discussion concernant le budget de l'Union européenne, à Bruxelles le 20 novembre 2012.

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Circonstance : Conseil affaires générales, à Bruxelles (Belgique) le 20 novembre 2012

Texte intégral

Je voudrais profiter de ce point de presse pour expliquer notre position et répondre aux questions que vous voudrez bien nous poser. Tout d'abord, nous sommes dans une approche qui vise, de façon constructive, à essayer de créer les conditions d'un compromis, autour du budget de l'Union européenne dès que cela sera possible, et, de préférence, bien entendu, dès la fin de cette semaine, d'autant que la discussion sur le budget de l'Union européenne est toujours une étape difficile ; ce qui compte, c'est de pouvoir la franchir et si nous pouvons la franchir le plus rapidement possible, cela sera mieux. Nous abordons cette échéance de la semaine prochaine, pour aboutir à cet objectif du compromis, avec une approche que je qualifierai de résolument européenne et de résolument équilibrée, parce qu'il n'est pas possible d'atteindre un compromis si nous ne faisons pas en sorte que les intérêts nationaux et légitimes - nous défendons les nôtres - ne nuisent pas à la volonté de servir l'Europe dans son ensemble. Nous sommes dans une crise et nous n'avons pas besoin de rajouter des désaccords à la crise. Nous avons besoin de faire en sorte que le budget de l'Union européenne renforce l'Europe dans son ensemble et permette de prolonger, à travers les 1 000 milliards d'euros qui seront dépensés, l'ambition de croissance que portait le pacte de croissance de 120 Mds d'euros décidé à l'occasion du Conseil de juin.
Nous ne pourrons atteindre cet objectif que s'il y a une vision et une perspective européennes, dès lors que nous recherchons des équilibres. Ce n'est pas dans la défense dure et unilatérale des intérêts de chacun qu'on trouvera un équilibre pour l'Europe dans son ensemble. En même temps, la France, je le redis, qui est soucieuse d'avoir une démarche équilibrée, n'entend pas être la seule à faire des sacrifices pour que les intérêts de l'Europe puissent aboutir.
Quelle est notre démarche, que souhaitons-nous concrètement, quels sont nos objectifs ? D'abord nous avons, pour le volume du budget, une position équilibrée. Nous considérons que nous ne pourrons mener des politiques pour la croissance, quelles qu'elles soient, que dès lors qu'il y aura un volume de budget qui sera suffisamment significatif pour permettre à ces politiques d'être conduites. Dans le même temps, le volume du budget ne peut pas être déraisonnable, nous sommes liés par des engagements de réduction des déficits budgétaires, nous ne renions pas nos engagements, il faut donc trouver un équilibre, c'est le premier équilibre, entre la nécessité d'avoir un bon budget et la nécessité de respecter nos objectifs de déficit. Deuxièmement, nous devons faire en sorte que ce budget permette de conduire des politiques en faveur de la croissance. Comme l'a dit le président de la République, et il l'a répété hier, on ne peut mener des politiques en faveur de la croissance que dès lors qu'on a créé les conditions d'un bon équilibre entre ces politiques. Les politiques que soutient l'Union européenne contribuent à faire de la croissance, celles de la rubrique 1.A, consacrée à la recherche et à l'innovation, mais aussi la PAC et la politique de cohésion. Il n'y a pas de bon équilibre qui reposerait sur des augmentations très importantes de certaines politiques et des baisses significatives d'autres, c'est la raison pour laquelle nous n'acceptons pas les coupes drastiques qui sont proposées pour la PAC et que nous nous inquiétons aussi du sort réservé à la politique de cohésion, nous souhaitons qu'il y ait un équilibre, dès lors que ce budget doit être optimisé sous contrainte, des différentes rubriques, car toutes contribuent à faire de la croissance.
Le troisième point sur lequel je voudrais insister, c'est qu'il faut que le dispositif de ressources soit lisible. C'est parce que nous sommes résolument européens que nous considérons que le budget de l'Union européenne ne peut pas continuer à encourager des systèmes de correction ou de rabais qui sont à la fois illisibles, peu transparents et de nature à empêcher le budget de l'Union européenne de mener des politiques en faveur de la croissance. La France donc souhaite que le budget de l'Union européenne manifeste la volonté de l'Union européenne de faire de la croissance et de se doter d'un budget qui permette d'avoir, en matière de recettes et de ressources propres, de la visibilité. L'objectif en matière de recettes ne peut pas être de rechercher d'abord des coupes et des rabais, ou des chèques pour soi même, sans se préoccuper de savoir comment nous menons ensemble des politiques en faveur de la croissance. C'est la raison pour laquelle nous pensons que les logiques plus européennes, plus intégrées, concernant notamment la lisibilité du dispositif de ressources, doivent être discutées à l'occasion de ce Conseil européen. Voilà quels sont les principes qui nous guident, voilà ce que nous avons exprimé hier soir, voilà ce que nous avons exprimé ce matin. Les choses progressent, malgré les points de vues différents qui ont pu se faire entendre, elles ont progressé hier soir, la qualité d'écoute du Président Van Rompuy, le respect mutuel des uns à l'égard des autres doivent permettre de continuer à avancer. En tous cas la France sera dans une démarche constructive. Avez-vous des questions ?
Q - Quelle peut être la variable d'ajustement puisque la France est prise en étau, vous estimez que la proposition d' H. Van Rompuy sur la PAC est insuffisante, deuxièmement vous demandez que la proposition d'H. Van Rompuy soit revue à la baisse, faut il faire un compromis pour revoir la proposition de la Commission, on nous citait tout à l'heure un chiffre entre 10 et 20 Mds d'euros, alors où sont les variables d'ajustement sachant que pour vous la cohésion est aussi à protéger ?
R - Je vous laisse lire le budget et vous verrez qu'il y a des rubriques qui augmentent de 400 %, d'autres de 40 % et d'autres qui baissent de 7 %, d'autres qui n'évoluent pas du tout, je pense notamment à la rubrique 5, donc il faut que dans la négociation collective nous parvenions à trouver un équilibre entre ces rubriques, qui conduise certaines à beaucoup augmenter car nous en avons besoin sur la recherche, sur l'innovation, sur le programme d'interconnexion pour l'Europe. Il y a des moyens qui sont mobilisés pour qu'il y ait de la croissance, mais nous pouvons les faire augmenter de façon significative tout en les faisant augmenter moins que proposé, de manière à faire en sorte que d'autres politiques, qui font aussi de la croissance, diminuent moins, c'est la dynamique de la négociation qui peut permettre d'atteindre cet équilibre. C'est cet équilibre que nous recherchons et nous considérons, lorsque nous disons que nous ne souhaitons pas que les négociations se réduisent à une discussion sur les coupes et sur les rabais, c'est précisément parce qu'on veut atteindre cet équilibre entre les rubriques. Et il faut aussi que nous ayons deux objectifs à l'esprit, la dimension européenne du budget, qui implique sa lisibilité, que nous ayons des dispositifs de correction revus et puis qui implique qu'on ait un bon équilibre pour faire de la croissance et pour rendre le compromis possible, il faut donc chercher l'équilibre et le compromis, c'est ce que nous demandons.
Q - Et pas la cohésion ?
R - Non je ne vous ai pas indiqué la cohésion, je vous ai indiqué qu'il y avait des rubriques qui augmentaient fortement et d'autres qui diminuaient, parmi les rubriques qui diminuent, il y a la PAC et la politique de cohésion, et puis il y a des rubriques qui ne bougent pas du tout et qui pourraient faire des efforts, et puis il y a des rubriques qui augmentent fortement. Le fait que nous soyons favorables à une hausse de la PAC, qui est pour nous une ligne rouge, ne signifie pas que nous soyons hostiles à la politique de cohésion. Il y a une possibilité aujourd'hui de trouver des solutions pour rééquilibrer, qui ne se réduisent pas à la rubrique 1B et à la rubrique 2.
Q - Mais on dit exactement la même chose depuis un an !
R - D'abord on ne dit pas exactement la même chose depuis un an parce que la différence entre ce qui se passe depuis un mois et depuis un an c'est que depuis un mois nous avons des chiffres, ce n'est pas tout à fait la même chose de parler des principes ... D'abord, notre approche n'est pas aussi sommaire que vous l'indiquiez à l'instant, nous ne sommes pas dans une position où nous répétons la même chose, car je vous rappelle, quand même, que le précédent gouvernement avait une position quasiment alignée sur celle du gouvernement britannique, 200 Mds de coupes en maintenant la totalité des crédits (pour la PAC). Nous n'avons pas ce talent qui consiste à faire des coupes aussi importantes en maintenant la totalité des crédits, nous ne savons pas faire cela. Parce que nous ne savons pas faire cela, nous avons changé de position, nous souhaitons qu'il y ait un budget raisonnable, parce que nous sommes liés dans le cadre du semestre européen - et pas seulement, parce que nous nous sommes fixés l'objectif budgétaire de réduire notre déficit - et en même temps, nous considérons qu'il faut un bon niveau de dépenses pour faire une politique de croissance, donc les coupes ne sont pas l'objectif de la France. L'objectif de la France, c'est l'équilibre entre la nécessité de tenir les objectifs de déficit et la nécessité d'avoir un bon budget, ce qui a complètement changé la donne de la négociation pour nous et y compris la négociation dans son ensemble.
Le deuxième élément c'est que la France est au centre de la négociation, parce que la France a une position résolument européenne. Lorsque nous disons que nous souhaitons des changements sur les rabais, lorsque nous souhaitons que le budget de l'Union européenne soit doté de ressources propres, lorsque nous agissons de façon volontariste comme depuis le mois de juin dernier pour qu'il y ait la taxe sur les transactions financières, et que nous agissons avec nos partenaires allemands pour qu'elle puisse advenir sous la forme d'une coopération renforcée avec la perspective à terme que cette ressource, comme d'autres, puisse être affectée au budget de l'Union européenne, nous ne sommes pas dans une position figée, nous sommes dans le mouvement et nous essayons de convaincre nos partenaires d'aller dans cette direction. Et lorsque nous disons que nous souhaitons un bon budget à la fois pour la PAC en considérant que les 25 Mds de coupes sont inacceptables, sans pour autant que cela se fasse au détriment de la cohésion, parce que nous considérons qu'elle peut faire de la croissance dans des pays qui ne peuvent pas faire de l'innovation et du développement économique parce qu'ils n'ont pas accès aux crédits de la rubrique 1A à cause des contreparties ... Et d'ailleurs des partenaires comme le Portugal, certains pays de l'est, l'Italie etc. le sentent très bien. Ca c'est la première partie de la réponse, nous ne sommes pas dans une position figée, nous sommes dans une dynamique, et autour des sujets que je viens d'évoquer notre position a évolué.
Deuxième point : qu'y a-t-il de nouveau dans le dîner d'hier, y a-t-il un effet cacatoès, l'on répète indéfiniment la même chose, ou à un moment donné nous avançons ? Nous voyons bien que, et c'est ce qui a fait progresser les choses hier et notamment aux termes de la conclusion d'Hermann Van Rompuy, il n'y a pas de compromis possible s'il n'y a pas de flexibilité dans la discussion. Le compromis ne peut pas se faire si les positions se rigidifient, donc il faut qu'il y ait des éléments de flexibilité, elle se construit à travers de la discussion. Elle aboutira - ou pas - cette fin de semaine, mais nous sommes plutôt dans une phase d'atterrissage que dans une phase de crispation, en tous cas c'est ce que nous souhaitons et à quoi nous contribuons, en sachant que pour ce qui concerne la France, comme l'a rappelé le président de la République hier et comme il l'avait rappelé à Varsovie, notre position est très claire :
1 - nous considérons que le dispositif de rabais est opaque, il ne correspond pas aux dynamiques européennes que nous appelons de nos voeux et qu'il doit être révisé parce que la négociation européenne ne peut pas consister à négocier des coupes et des rabais ;
2 - nous voulons de bonnes politiques pour la croissance à la fois pour l'agriculture et pour la cohésion et ;
3 - nous considérons que le sort réservé à l'agriculture, compte tenu de la volonté d'équilibre qui est la nôtre, est inacceptable.
Q - Au regard des différentes interventions, il est évident qu'H Van Rompuy va devoir formuler une nouvelle proposition, première question qu'est ce que vous voulez 75 Mds de coupes présentées d'une nouvelle manière, est ce que vous voulez plus, 100 Mds ventilées d'une autre manière ou est ce que vous voulez moins que 75 Mds, c'est-à-dire grosso modo est ce qu'on retourne à la proposition de la Commission ? Ma deuxième question, comment interpréter deux déclarations, celle de votre collègue suédoise qui a dit nous on sera intransigeant sur notre rabais - elle n'a pas beaucoup de tendresse pour la position française sur le rabais - deux il y a de l'espace pour continuer à couper dans la PAC et dans la cohésion et trois on est modérément optimistes. Le ministre finlandais dit qu'il faut plus de coupes que ce qui est sur la table, et lui aussi c'est un faucon. Va-t-on avancer sur les ressources propres à part la TTF qui, vous l'avez dit vous-même, rapporterait 10 Mds seulement ?
R - Tout d'abord pour ce qui concerne H Van Rompuy, je ne peux pas vous l'annoncer moi-même puisque c'est lui qui le fera. Sa proposition à venir sera élaborée et formulée au terme du dîner d'hier soir et d'autres discussions avec l'ensemble des pays de l'Union européenne dans le cadre du dialogue normal, multilatéral et bilatéral, qui se poursuit d'ailleurs avec la Commission également. Notre objectif, à nous, c'est l'équilibre dont je vous ai parlé, et la transparence des ressources, voilà ce que nous demandons concrètement, qu'il y ait un rehaussement des crédits alloués à la PAC sans préjudice des politiques de cohésion et que ce soit au terme de cet équilibre que l'on détermine le bon niveau de dépenses et qu'on fasse en sorte d'avoir à la fois de la croissance et de la rigueur budgétaire au sens où il faut respecter nos engagements dans le cadre du semestre européen, c'est la dynamique de discussion qui doit permettre de déterminer les coupes avec des principes qui doivent déterminer le niveau du budget et pour le faire de façon transparente, il faut une bonne méthode et la bonne méthode c'est celle de l'équilibre dont je vous parlais tout à l'heure.
Deuxième question que vous me posez : la tendresse n'est pas le moteur traditionnel de la négociation sur le budget, le fait qu'il n'y ait pas de tendresse aujourd'hui, pas davantage qu'il n'y en avait hier, ne signifie pas que l'exercice sera plus difficile qu'il pouvait l'être hier - je n'étais pas là pour les dernières négociations, mais pour m'y être intéressé par votre truchement, je n'y ai pas vu beaucoup de tendresse, donc c'est la dynamique de la négociation qui permet d'aboutir à l'équilibre. Dans les interventions que vous citez, vous citez des pays qui ne sont pas nécessairement dans la même situation que la nôtre concernant les rabais et la dynamique de négociation, ce n'est pas en effet la position française, mais vous auriez pu en entendre d'autres intervenir dont les points de vue auraient pu se rapprocher davantage des nôtres, sans donner l'impression que la tendresse avait subitement envahi l'espace de la négociation cela vous aurait donné le sentiment en revanche que le compromis était, quelque part, au milieu des positions exprimées par l'ensemble des acteurs. Nous sommes au centre, nous souhaitons nous maintenir au centre de cette discussion dans l'intérêt de l'Europe parce que nous voulons de la croissance, au moment où il y a de la crise.
Troisièmement, nous savons que les ressources propres sont un combat, comme beaucoup de sujet qui sont sur le métier au sein de l'Union européenne et qui sont de nature à faire progresser l'Union européenne vers davantage d'intégration. La France est dans cette négociation résolument européenne, nous pensons que face à la crise il faut faire prévaloir les logiques européennes dans l'intérêt des États et de l'Union européenne dans son ensemble et la position qui est la nôtre sur les ressources propres, sur la transparence du budget, sur les rabais est une position européenne qui nous met à l'avant-garde et nous défendons cette position. Comme elle est à l'avant-garde, elle sera peut être moins immédiatement susceptible que d'autres de faire compromis mais elle fera compromis à terme, parce qu'elle est dans le sens de ce dont l'Union a besoin pour intégrer davantage ses politiques et se doter d'un budget dynamique dont on a besoin dans l'Union européenne pour faire de la croissance.
Q - Êtes vous arrivés à un deal franco allemand comme le président Chirac et le chancelier Schröder ou est ce que vous allez vous retrouver à penser que la solution pour la France ce serait plutôt l'échec, de garder ce que l'on a actuellement, plutôt que de négocier sur une position de la Commission sur laquelle vous êtes déjà perdants sur la PAC ?
R - Je ne vous dirais pas cela, non pas parce que, si je le pensais, ce ne serait pas convenable de vous le dire, mais je ne vous le dirais pas surtout parce que je ne le pense pas. Ce n'est pas la position française. La position française, comme je vous l'ai indiqué est résolument européenne, elle ne peut pas consister à jouer l'échec d'un compromis européen pour la défense de ses seuls intérêts. Mais la démarche française ne peut pas non plus consister à vouloir un compromis européen à tout prix au détriment des seuls intérêts de la France. Je le dis très clairement. Le compromis que nous souhaitons, nous y travaillerons de façon constructive mais il ne peut pas signifier que la France pourrait, parmi les 27 pays, être la seule à sacrifier tous ses intérêts. Elle est légitime elle aussi, dès lors qu'elle est désireuse d'un compromis européen fort, à faire en sorte que ce compromis européen ne soit pas totalement orthogonal à ses intérêts. Mais c'est déjà une position différente de celle d'autres pays. Il n'est pas question pour nous de jouer cette carte de l'échec, nous voulons un succès et un compromis qui ne soit pas, encore une fois, de nature à sacrifier nos intérêts, c'est ce que nous pensons possible à condition que les logiques européennes que nous portons l'emportent. Le fait qu'un pays comme la France, qui n'est pas le moindre, plaide une ambition européenne dans un contexte où des tensions peuvent exister, n'est pas neutre pour cristalliser à un moment donné une dynamique européenne positive qui nous fasse dépasser une partie des propositions qui ne visent que les chèques et les rabais.
Q - Sur les budgets qui augmentent, vous disiez regardez ceux qui augmentent de 400 %, il y a les infrastructures, la recherche ...
R - Non ce n'est pas l'innovation et la recherche qui augmentent de 400 %, ce qui augmente de 400 % c'est le «mécanisme d'interconnexion pour l'Europe» et le reste augmente de 40 % je crois, mais avec des sommes très significatives (question mais pas par rapport à la PAC ou à la cohésion ?) ... elles sont bien inférieures en volume global, mais la progression est très importante et nos besoins de réajustement ne correspondent pas non plus à une marge spectaculaire. Les conditions d'un compromis sont là, il faut les construire, la France a une position centrale, raisonnable responsable et résolument européenne et je pense que sa voix dans les négociations, celle que portera le président de la République - précisément parce qu'elle a ces caractéristiques dans un contexte de crise et qu'elle peut cristalliser et rassembler, est une position qui peut faciliter l'avènement d'un compromis.
Je rajoute un point, qui est important : il n'y a pas deux Europes et deux croissances, les politiques de croissance chic et celles qui ne le sont pas, la cohésion, la PAC, «connecting Europe», la recherche et l'innovation, tout ca, compte tenu des différences qui peuvent exister entre les pays et les régions, contribue, à condition que l'on articule bien toutes ces politiques, à faire de la croissance partout en Europe, c'est la raison pour laquelle nous devons essayer de faire un équilibre entre ces politiques parce que si ces politiques sont sacrifiées pour certaines d'entre elles au bénéfice d'autres, nous aurons des phénomènes de décrochage, dans un moment où l'Europe dans son ensemble doit progresser.
Q - (Inaudible - fin y a-t-il des éléments de la politique de cohésion auxquels vous pourriez renoncer, notamment les régions en transition ?)
R - Non, ni les régions en transition ni les régions ultrapériphériques. Notre position est lisible sur les rabais, elle est lisible sur la PAC, nous sommes favorables à une convergence de la PAC dès lors que le niveau de l'enveloppe le permet et nous considérons pour ce qui est de la politique de cohésion, que les régions qui ont connu une évolution de leur PIB comparable peuvent bénéficier d'un dispositif d'enveloppes comparables, ce sont des critères lisibles qui rendent la négociation équitable et parce qu'ils sont lisibles, équitables et incontestables ils catalysent la négociation et permettent, à un moment donné, un compromis. C'est cela que nous essayons de faire, ce sont des principes forts qui doivent guider une négociation lisible pour faire en sorte qu'un compromis équitable soit possible et qui ne reposent pas simplement sur la volonté de garder son acquis, de faire en sorte que des régions bénéficiant d'un même niveau de PIB bénéficient du même niveau d'aide, de faire en sorte que des agricultures qui justifient de mêmes caractéristiques puissent bénéficier d'un même niveau d'aide, donc la convergence n'est possible que dès lors qu'il y a une enveloppe, sinon on bloque tout, comme le verdissement n'est possible que dès lors qu'il y a une enveloppe, c'est cet équilibre là que nous voulons atteindre.
Comme vous l'avez remarqué nous ne sommes pas arrivés hier avec un grand ciseau, nous ne cherchons pas des coupes drastiques là pour faire des augmentations là, non nous ne sommes pas venus avec un grand ciseau nous sommes arrivés avec un niveau, c'est un outil plus doux, ce n'est pas un outil de tendresse mais cela fait moins mal, pour faire en sorte que la bulle soit au bon endroit, que l'équilibre soit bon. Nous sommes soucieux d'équilibre parce que dans une négociation difficile la sagesse commence par la recherche de l'équilibre.
Q - M. Van Rompuy va présenter une nouvelle proposition jeudi soir, ou même avant ?
R - C'est ce que nous attendons. Normalement au terme de ce dîner d'hier qui a servi à quelque chose nous devrions avoir une nouvelle proposition, ce qui témoignera d'ailleurs du fait que ce dîner aura servi à quelque chose, et à partir de cette nouvelle proposition le Conseil s'engagera.
Q - Mais n'est ce pas trop tard ? Mme Merkel est allée partout et a rencontré tout le monde, François Hollande lui seulement en Pologne ....
R - Vous avez totalement tort. Je vais vous expliquer pourquoi. Cela me ferait de la peine que vous ayez raison, de surcroît. Vous avez totalement tort parce que j'ai passé tout mon lundi dernier avec Michael Link, mon collègue allemand, à travailler, ce qui n'empêche pas de voir les autres, j'ai aussi vu mon collègue italien, mon collègue polonais parce qu'une négociation de ce type est nécessaire en multilatéral, même si le moteur franco allemand doit jouer son rôle. Le Premier ministre s'est rendu à Berlin, j'étais avec lui, a rencontré la chancelière, la question des perspectives financières a été évoquée, c'était il y a quatre jours, et le président de la République s'est longuement entretenu avec la chancelière à plusieurs reprises sur ce sujet, y compris récemment, donc nous parler plus reviendrait à vivre ensemble, nous nous voyons tout le temps, nous nous parlons tout le temps, entre Français et Allemands et avec nos autres partenaires, parce que la France et l'Allemagne ont conscience du rôle particulier qu'elles peuvent jouer dans ces négociations, que la relation franco allemande est quand même sur ces questions là très articulées - ce qui ne veut pas dire que nous soyons d'accord sur tout, ce qui compte c'est d'avoir le bon compromis à la fin et nous le faisons en très étroite liaison avec l'ensemble de nos partenaires de l'Union européenne. Je vous remercie.
Q - Inaudible, en substance sur le point de savoir s'il y a une chance que le Royaume Uni puisse accepter un compromis.
R - Si je vous dis non, vous allez dire rien ne progresse, si je vous dis oui, ils pourraient avoir tendance à faire la démonstration du contraire, donc je ne répondrai pas à cette question, comme disait Pompidou, nous verrons.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 novembre 2012