Déclaration de Mme Dominique Bertinotti ministre de la famille, sur la politique de la famille, notamment pour la petite enfance et la parentalité, Marseille le 23 novembre 2012.

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Circonstance : Rencontre nationale des présidents de CAF à Marseille le 23 novembre 2012

Texte intégral


Je suis heureuse d’être parmi vous aujourd’hui, ici à Marseille, à l’occasion de cette rencontre nationale des présidents de Caf.
Cette rencontre revêt une importance particulière pour moi puisque c’est la première fois que j’ai l’occasion de m’adresser à l’ensemble des présidents de Caf. Elle me permet de prolonger les échanges que j’ai eus avec le président Deroussen et le conseil d’administration de la Cnaf et de connaître le fruit de vos réflexions consacrées à la préparation de la Cog.
Cette rencontre, c’est le moment qui m’est donné pour vous livrer la vision, la volonté et la méthode que je mettrai au service de la politique familiale, celle que je destine à toutes les familles. Cette politique familiale est au coeur des engagements que le Président de la République et le Premier Ministre ont pris en faveur de la jeunesse.
Mais avant toute chose, je souhaiterais saluer le travail remarquable des caisses d’allocations familiales, de leurs conseils d’administration et de leurs agents - au service des allocataires. Leur action quotidienne n’est pas suffisamment connue, pas suffisamment mise en valeur. Nos concitoyens ignorent, ou sous-estiment, encore trop souvent le rôle fondamental joué par les Caf, par leurs agents toujours disponibles.
Il ne s’agit pas d’un propos de circonstance. Vous venez de dire Monsieur le président que les 33 000 salariés de la branche famille ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Oui vous avez raison, je ne peux que reprendre votre expression à mon compte pour saluer leur engagement et leur sens du service public.
Il faut le dire d’autant qu’ils exercent leurs missions dans un environnement de plus en plus difficile, voire dans des circonstances parfois dramatiques comme à Mantes-la-Jolie cet été.
J’ai souhaité rencontrer personnellement ces agents pour leur exprimer mon soutien, pour saluer leur courage, pour partager leur émotion et ainsi leur redire combien il est important de leur permettre de travailler dans des bonnes conditions et sans crainte pour leur sécurité.
Ces questions sont essentielles et ne doivent pas être esquivées dans la prochaine Cog.
Pour évoquer ces points, mon propos sera organisé autour de trois axes : les mesures famille du PLFSS pour 2013 dont l’examen au Parlement s’achève prochainement ; les grandes lignes de la mobilisation pour la petite enfance et la parentalité que j’ai souhaité mettre en oeuvre et qui associera les acteurs nationaux et locaux ainsi que les parents eux-mêmes à travers une consultation citoyenne et enfin ; les contours de la négociation de la prochaine Cog entre l’Etat et la branche famille, thème qui était au coeur de vos travaux et qui constituera le centre de nos préoccupations pour les semaines à venir.
Je le dis avec fermeté, le PLFSS 2013 témoigne de l’attachement du Gouvernement à la politique familiale.
Ce soutien et les mesures prises s’inscrivent en rupture par rapport à la politique menée par le précédent Gouvernement. Elles nous permettent de mettre l’accent sur trois éléments : rétablir l’équilibre financier de la branche famille, agir en faveur des familles les plus modestes, s’engager en faveur de l’égalité entre les familles. Premier élément le retour à l’équilibre financier. Je rappelle d’abord qu’en six mois, entre la loi de finances rectificative pour 2012 et le PLFSS pour 2013, ce sont près d’1 milliard d’euros de ressources nouvelles qui auront été affectés à la branche famille. Le déficit de la branche famille aurait dû s’élever à 3,3 milliards d’euros. Grâce à l’action du Gouvernement, il sera ramené à 2,7 milliards d’euros, ce qui annule l’impact de la crise. Cet effort constitue un signe clair en direction des partenaires sociaux en charge de la branche famille mais aussi de l’ensemble des parents. Nous poursuivrons cet effort sur une trajectoire de retour à l’équilibre pour 2017.
Deuxième élément, le Gouvernement accentue l’aide apportée aux familles les plus modestes, d’abord avec la revalorisation de 25% de l’ARS, une des premières mesures du quinquennat. Ensuite en recherchant des solutions pour favoriser l’accès à la garde des enfants pour les familles modestes qui travaillent avec le versement, dans le cadre d’une expérimentation, du complément de mode de garde en tiers-payant. Une dizaine de Caf pourront être associées à cette expérimentation à compter du début de l’année prochaine et je profite de cette rencontre pour lancer un appel à candidature.
Le Gouvernement a également introduit à l’Assemblée nationale un dispositif qui permettra de prévenir l’expulsion des familles en difficulté, sans léser les bailleurs, en prévoyant un rétablissement automatique de l’allocation logement lorsqu’un dossier de surendettement a été déclaré recevable.
Troisième élément, le Gouvernement s’engage en faveur de l’égalité entre les familles avec la création d’un congé de paternité et d’accueil de l’enfant ouvert au père et au partenaire du parent contribuant à l’éducation de l’enfant. Cette mesure répond aux recommandations émises par la HALDE dès 2007 ainsi qu’à une exigence d’égalité entre les employés des entreprises et les agents des collectivités locales qui offrent ce congé, et ceux de celles qui ne l’offrent pas.
Si cette présentation succincte du PLFSS pour 2013 peut paraître quelque peu détachée des préoccupations qui ont animé vos rencontres, elle me semblait importante pour illustrer l’intérêt du Gouvernement à l’égard de la politique familiale et de la branche famille avant d’évoquer la préparation de la COG.
Ces éléments témoignent de notre engagement en faveur d’une politique familiale plus dynamique, plus moderne, plus efficace.
Efficacité également lorsque nous lançons la mobilisation pour la petite enfance et la parentalité.
L’accueil des jeunes enfants est un sujet qui connaît aujourd’hui une certaine visibilité médiatique. Ces coups de projecteurs ne sont pas de ceux qu’un ministre de la famille accueille favorablement. Que veulent-ils dire ? Qu’il manque des places d’accueil. Oui c’est vrai.
Que la politique du chiffre du précédent gouvernement à montré toutes ses limites, notamment ici à Marseille. Oui, c’est vrai aussi. Sans me livrer devant vous à une bataille de chiffre, je rappellerai qu’il me semble réducteur d’en apprécier le bilan en fonction des seules créations de places nouvelles et non pas au regard du nombre total de places d’accueil disponibles. N’est-ce pas pour le moins paradoxal de consacrer autant de moyens financiers à créer de nouvelles places d’accueil pour les jeunes enfants (120 000 pour un objectif de 200 000 à l’horizon 2012) alors que, dans le même temps, on a réduit drastiquement le nombre de places ouvertes à la préscolarisation des moins de trois ans (- 55 000 places) annulant ainsi le bénéfice d’une partie des créations de places nouvelles ? Pour ces raisons, je le dis, je considère que l’objectif poursuivi dans la précédente Cog n’a été ni conçu, ni atteint de manière satisfaisante.
Ne voyez dans ce constat aucune volonté de ma part de me défausser sur la responsabilité des Caf et de leurs équipes, ou sur les collectivités locales. Je sais combien les unes et les autres ont essayé de faire au mieux dans un cadre imposé.
C’est pourquoi nous allons rompre avec les pratiques du précédent Gouvernement fondées sur une seule politique du chiffre. Nous allons donc vous proposer une autre démarche construite avec l’ensemble des acteurs en amont de la Cog.
Le 10 octobre dernier, j’ai eu l’honneur de présenter en Conseil des ministres une communication proposant les orientations et la méthode de préparation de la nouvelle COG de la branche famille en matière d’accueil de la petite enfance et de soutien à la parentalité.
Il s’agit pour moi d’une politique prioritaire. Cette ambition du Gouvernement se traduira dans les objectifs de la nouvelle COG de la branche famille
Pour cela, la COG sera enrichie de priorités d’une nature nouvelle en matière de réduction des inégalités territoriales. Je le dis, je souhaiterais qu’à la fin du quinquennat, chaque famille puisse se voir proposer un mode d’accueil pour les enfants de 0 à 3 ans.
Nous ne devons pas oublier non plus l’importance des actions en faveur de l’aide à la parentalité. Le dernier rapport du Conseil d’analyse stratégique (aider les parents à être parents) témoigne combien c’est une attente de plus en plus forte des familles. Il faut en finir avec la stigmatisation et privilégier l’aide, le soutien à la fonction de parent, de tous les parents. Le temps viendra où vous verrez apparaître la nécessité d’un service public de la parentalité. Là aussi nous avons besoin de coordination et d’efficacité.
C’est pourquoi j’en appelle à une méthode nouvelle. J’ai souhaité engager une mobilisation des acteurs nationaux et locaux de la politique de la petite enfance et y associer les parents eux-mêmes par le biais d’ateliers citoyens organisés à l’échelle de quatre régions (Bourgogne, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Pays-de-Loire) pour identifier ensemble les objectifs les plus pertinents et les meilleurs modes de coordination.
Les Caf des départements concernées nous ont apporté une aide précieuse dans l’organisation de ces ateliers citoyens et je voudrais ici les en remercier chaleureusement.
Les premiers ateliers se sont réunis le week-end dernier. Les acteurs locaux de la politique familiale vont également être associés à cette consultation ainsi que la branche famille par l’intermédiaire de son conseil d’administration. Cette consultation se poursuivra jusqu’à la mi-janvier, date à laquelle se tiendra une journée de restitution de ces travaux et de ceux que le Haut Conseil de la famille mène en ce moment sur les inégalités dans l’accès aux modes d’accueil. La réforme des rythmes scolaires mobilisera également la branche famille. Cette réforme concerne tous les partenaires déjà associés au ministère de l’Education nationale pour la prise en charge des temps extrascolaires. Les Caf seront donc amenées à participer au financement des heures libérées par la réduction de l’amplitude des heures de classe.
Il s’agit là d’une réforme majeure du quinquennat et nous devons nous mobiliser pour contribuer à sa réussite. Il s’agit pour la branche famille d’une opportunité unique pour faire avancer sa vision de la politique en faveur de la jeunesse.
Je n’ignore pas que les ambitions affichées par le Gouvernement en matière de petite enfance, de jeunesse et de soutien à la parentalité nécessitent des moyens financiers importants. Dans la négociation de la Cog, le ministère de la famille rappellera donc toujours la nécessité de prévoir des moyens financiers compatibles avec les ambitions affichées par le Gouvernement. Je serai donc très attentive aux moyens financiers qui seront accordés au FNAS.
C’est déjà un bon programme, c’est beau de se mobiliser pour de tels objectifs.
Cette mobilisation en faveur de la petite enfance, c’est miser sur notre avenir, celui de la jeunesse. Néanmoins, cela ne doit pas nous conduire à esquiver les autres enjeux de la COG et les défis que la branche famille et ses agents doivent relever dans un contexte de crise. Quels sont-ils ? La qualité du service rendu à l’allocataire, la poursuite de la mutualisation de certaines actions, de nouveaux progrès en matière de gestion des risques et de manière générale les moyens dont disposeront les Caf pour travailler, notamment en matière de ressources humaines. Pour moi ces sujets sont aussi primordiaux et constituent un point fort de la négociation de la Cog.
Ne nous le cachons pas, la contrainte sera forte, car, et cela ne vous surprendra pas, la négociation de la Cog devra s’inscrire dans le cadre des orientations que le Président de la République a assigné à l’ensemble de la sphère publique.
Aussi, la préparation de la prochaine Cog doit être l’occasion de réfléchir aux moyens de retrouver une maitrise durable des charges de travail.
A ce titre, Nous devons explorer toutes les solutions possibles et envisageables en sachant qu’il n’existe pas une solution unique à ces problèmes.
Quelles sont les solutions possibles ? Les effectifs ? nous allons en parler, la mutualisation des moyens ? nous allons l’évoquer.
A ce stade de la négociation de la future Cog, je ne vous apporterai pas une réponse quantifiée mais je peux vous assurer que je suis prête à me battre pour que la branche famille dispose des moyens nécessaires pour assurer ses missions de service public, pour que les moyens accordés à la branche famille soient en adéquation avec les objectifs qui seront inscrits dans la Cog.
Réfléchissez aussi à la possibilité utiliser les emplois d’avenir que propose le Gouvernement.
Je vous ai entendu Monsieur le président quand vous avez dit que si des marges de progrès existaient, vous vous engagiez à les mettre en oeuvre.
Nous devons ensemble rechercher les moyens d’optimiser le fonctionnement du réseau. Mais là aussi les solutions devront être apportées au regard de la situation de chaque Caf, en fonction de la situation de chaque territoire.
La crise nous oblige à être plus inventifs pour maintenir la qualité du service, rigoureux dans la réflexion sur les moyens, dans le respect de l’intérêt des allocataires et des personnels.
A la question de la mutualisation il faut ajouter la réflexion sur les moyens de renforcer la qualité du service rendu à l’allocataire.
C’est une nécessité, malgré une amélioration de la situation, les objectifs fixés ne sont pas atteints. Ce constat met en exergue une dégradation de la qualité du service rendu aux allocataires. Il attire surtout notre attention sur l’accroissement de la charge de travail qui pèse sur les Caf depuis le début de la crise économique.
Quels que soient les points de contact étudiés : nombre de pièces traitées, appels téléphoniques, contacts physiques, les demandes adressées à la branche famille sont en hausse. Conséquence directe de cet accroissement des demandes, le stock de dossiers à traiter s’accroit et les fermetures d’accueil dans les Caf se sont multipliées. Cette situation n’est pas acceptable, ni pour les allocataires, ni pour le Gouvernement, ni pour les Caf et leurs agents, ni pour les collectivités locales. Ces solutions constituent un pis-aller auquel nous devons ensemble apporter une réponse.
Il faut trouver les moyens d’améliorer la relation entre les Caf et leurs allocataires.
La dématérialisation de la gestion de certains dossiers est une solution et le développement des sites caf.fr et monenfant.fr constitue une première réponse mais vous voyez bien que ces éléments ne sont pas à la hauteur de la situation. C’est pourquoi, je le dis avec fermeté la piste d’une simplification de la réglementation et de l’instruction des dossiers devra être explorée de façon approfondie et rigoureuse. J’attends des propositions. Mes services sont bien évidemment à votre disposition pour y travailler avec vous. Mais, je le redis, j’attends des propositions.
Nous devrons également à un moment ou à un autre évoquer les écarts de productivité entre les caisses. Je ne suis pas là pour stigmatiser, je suis là pour faire en sorte que les bonnes pratiques soient généralisées. Je sais pouvoir compter sur l’engagement et le professionnalisme de tous les agents pour avancer dans ce sens et rechercher les moyens de réduire ces écarts et donc améliorer le service rendu aux allocataires. Je mettrai en valeur les bonnes pratiques que j’ai vues sur le terrain. Elles devront inspirer les autres Caf et je compte sur vous Monsieur le président pour aider à leur diffusion.
Ces efforts contribueront également à améliorer le processus de maitrise des risques. Sur ce sujet comme sur les autres vous pouvez être assuré de mon soutien, je sais que dans ce domaine tout ne repose pas sur les épaules de la branche famille et de ses agents, je n’esquive pas le fait que le sujet de la lutte contre les indus a un lien direct et fort avec celui de la simplification.
Une nouvelle Cog est toujours source d’interrogations, de doute, de questionnement. Réduira-t-on les moyens financiers ? Les effectifs ? Va-t-on constater une nouvelle dégradation des moyens de travail ?
Ces interrogations sont normales et elles sont d’autant plus légitimes que nous sommes en période de crise économique, que nous sommes contraints de maitriser nos dépenses et que, durant le même temps, les demandes des allocataires ne font que croitre. Alors oui si nous voulons mettre en oeuvre les objectifs fixés dans la Cog il nous faut des moyens. Je suis convaincue de la pertinence de ce que j’appelle la politique du gagnant-gagnant.
A moi de plaider pour des crédits du FNAS toujours à la hauteur des enjeux ;
A moi d’être l’aiguillon d’une réforme de la simplification ;
A moi d’inciter les directeurs de Caf à assurer des conditions de travail et de sécurité satisfaisante.
A vous de poursuivre les actions de mutualisation des tâches ;
A vous de persévérer dans vos efforts pour une plus grande efficience de la politique de maitrise des risques ;
A vous de continuer votre engagement sans faille en faveur de la qualité d’accueil de l’allocataire.
C’est cette politique qui permettra de conduire une politique familiale qui répond aux nouvelles attentes des familles dans leur grande diversité d’aujourd’hui. Vous pouvez compter sur mon entière détermination et mon engagement à vos côtés.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 30 novembre 2012