Texte intégral
Monsieur le Président de la Commission Européenne, cher José Manuel Barroso,
Mesdames les Ministres,
Monsieur le Sénateur Maire de Marseille,
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les Présidents, responsables dassociations,
Mesdames et Messieurs,
Le Président de la République devait être présent ici aujourdhui pour présenter ses vux au monde de la culture, à loccasion de louverture de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture.
Vous comprenez les raisons pour lesquelles il ma demandé de le représenter.
Ce moment de vux est bien évidemment teinté dune façon particulière, car nous avons tous à lesprit que nos soldats sont engagés dans laction de soutien au Mali décidée par le Président de la République. Et nous avons une pensée particulière pour le lieutenant Damien Boiteux, et pour sa famille.
Nous voici donc aujourdhui rassemblés au Mucem, musée des civilisations dEurope et de la Méditerranée, magnifiquement réalisé par Rudy Riciotti associé à Roland Carla, qui rassemble dans un geste architectural commun, lhistorique fort Saint Jean et ce « bâtiment deau, de pierre et de vent » où nous sommes aujourdhui. Ce Musée, qui regroupera les collections des arts et traditions populaires, longtemps connues des parisiens, et des collections du Musée de lHomme ambitionne dêtre notre grand musée national sur la Méditerranée. Il ouvrira ses portes au printemps prochain.
Quelle autre ville que Marseille, Monsieur le Sénateur Maire, pouvait accueillir ce Musée de civilisation de référence, qui rendra compte de la diversité, du pluralisme et de la richesse des sociétés méditerranéennes ?
Marseille, ville à lhistoire exceptionnelle. Marseille, ville la plus ancienne de France ! Marseille, ville si intimement liée à lhistoire de la France ! Marseille, façonnée par des apports successifs de populations qui ont construit sa personnalité et son identité. Marseille, grande métropole française, européenne et méditerranéenne.
Marseille connaît le poids des inégalités, subit trop de violences et souffre de cette image injuste, mais aujourdhui cest Marseille qui lutte, qui change et qui gagne !
Marseille et son agglomération possèdent un formidable potentiel de développement dans tous les domaines. Ce potentiel ne peut sexprimer pleinement que si les initiatives sont coordonnées, si les ressources sont rassemblées, si les acteurs sont réunis autour de projets qui fédèrent toutes les énergies. Cest pourquoi le gouvernement porte une grande ambition pour la métropole marseillaise, une ambition qui transcende les appréhensions et qui surmonte les clivages il y en a, et cest normal. Qui peut croire quici, comme ailleurs, on peut soffrir le luxe de la division, alors quun projet métropolitain respectueux de la spécificité et de la parole de chacun est à portée de main, pour donner au grand Marseille tout son rayonnement et lui permettre de donner vie aux projets dont il regorge ?
Vous vous efforcez, Monsieur le Sénateur-Maire, et avant vous dautres sy sont également essayés - je pense bien entendu ici à Gaston Defferre - de donner à Marseille cette unité qui naît de sa diversité. Je noublie pas que notre hymne national, symbole de notre patrie, est La Marseillaise : ce nest pas un hasard ; rassembler les Français au-delà de ce qui semble les diviser, votre ville en est à la fois lillustration et le défi.
Pour réussir ce pari, vous avez choisi, soutenu et accompagné en cela par de nombreuses autres communes, par le département, par la Région de proposer Marseille comme capitale culturelle européenne 2013 et vous avez gagné. Merci, Monsieur le Président de la Commission européenne dêtre là aujourdhui. Capitale européenne de la culture, cette idée, vous vous en souvenez, nous la devons à cette immense figure quétait Melina Mercouri et à Jack, qui réussirent à la faire adopter en 1985 par le conseil des ministres de lUnion européenne. Bien naturellement ce fut alors Athènes qui fut la première capitale.
Lorsquil est réussi, ce pari, qui exige la mobilisation de tous, peut être décisif pour une ville : près de nous, je pense à Lille bien sûr, que son statut de capitale européenne de la culture a profondément transformé depuis 2004 en contribuant à en faire une métropole tournée vers lavenir et qui poursuit depuis lors un projet de manifestations culturelles ambitieuses. Jy vois un symbole : celui de la capacité de notre continent à faire de la culture un élément déterminant de son identité. Celui aussi de notre capacité à parier sur lintelligence collective, la force du rassemblement pour donner à lEurope le souffle dont elle a besoin.
Limportance de la culture en Europe : je sais, Monsieur le Président Barroso, que vous y êtes attaché comme moi. Les acteurs du monde culturel qui sont là aujourdhui sont parfois inquiets lorsquils ont affaire à des interlocuteurs qui leur parlent concurrence, libre marché, aides dEtat. Loin de moi lidée de freiner le développement dune Europe sans frontières, tout au contraire. Mais vous comme moi savons depuis les combats du GATT que la culture nest pas une marchandise comme une autre, que la concurrence notamment avec nos amis doutre Atlantique ne se fait pas à armes égales et que lEurope doit dabord protéger ses cultures nationales dans leur diversité, leur richesse, leur inventivité. Si nous nous battons, ce nest pas pour le plaisir de bâtir des frontières imaginaires ou illusoires. Le programme de Marseille 2013 en atteste par son ouverture sur les cultures du monde entier. Nous savons ce qui nous a permis de conserver notre cinéma. Cest pour le gouvernement un sujet essentiel, et je sais avoir en vous, Monsieur le Président, un interlocuteur attentif.
Avec tous ceux qui sont là aujourdhui, nous ne relâcherons pas leffort pour convaincre nos amis européens de la justesse de nos thèses.
Les questions sont nombreuses : aides au cinéma, TVA des biens culturels, je pense notamment au livre numérique -, participation des acteurs qui profitent des contenus à la chaîne de valeur. Je souhaite que nous parvenions sur toutes ces questions à des solutions innovantes et équilibrées.
Cest bien entendu le sens de la mission de médiation confiée à Marc Schwartz sagissant de la presse et des moteurs de recherche.
Cest aussi au cur de la mission confiée à Pierre Lescure qui vise à protéger les droits des créateurs en les adaptant à lère numérique.
Ainsi, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus, vous avez fait ce pari : en proposant Marseille comme capitale européenne de la culture, et en bâtissant depuis un ambitieux programme pour lannée à venir et je veux ici rendre notamment hommage à Bernard Latarjet et Jean François Chougnet qui se sont succédés pour le concevoir avec vous et le mettre en uvre - vous avez fait ce pari de donner à votre ville un nouveau dynamisme économique, de fédérer les énergies, de lui donner une unité, non pas malgré, mais grâce à ses différences, avec la culture. Le thème de léchange est au cur de ces manifestations. Chacun peut en mesurer la pertinence. Je tenais aujourdhui en étant parmi vous à cette ouverture à vous en remercier et à vous féliciter.
Puisque sont présents ici de nombreux acteurs du monde culturel, cest à eux aussi que je voudrais madresser : car ce pari que vous avez fait, jai la conviction que nous pouvons le faire à léchelle de la nation toute entière. Permettez-moi maintenant den dire quelques mots.
Le gouvernement comprend, comme il entend, les inquiétudes qui peuvent naître ici ou là, sur le financement de la culture.
Chacun sait que notre pays doit retrouver léquilibre doit retrouver léquilibre de nos comptes publics, car rien ne serait plus dévastateur que de laisser dériver lendettement. Dès lors, nous navons pas dautre choix que de faire des économies.
Mais je tiens à confirmer lengagement du Président, de préserver en 2013 la création et le spectacle vivant.
Mesdames et Messieurs, il me paraît fondamental de dire ici limportance que revêtent à mes yeux les activités que vous représentez et que le ministère de la culture et de la communication suit avec une attention jamais démentie.
Pendant longtemps, il pouvait être mal vu de rappeler que la culture était aussi un élément de croissance économique. La création ne devait pas sembarrasser de ces considérations. Fort heureusement, je crois que ces temps sont révolus : aux yeux du monde entier, notre système français de soutien au cinéma qui permet de produire plus de 200 films par an est un modèle : à la clé figurent aussi des dizaines de milliers demplois, tout un milieu qui vit des tournages et de leurs préparations. Notre industrie du livre, malgré ses difficultés, reste exemplaire par la diversité de sa production et ses développements internationaux. La musique après avoir connu des années dune extrême difficulté, commence à voir émerger de nouveaux modèles économiques. Le Président de la République a inauguré récemment le Louvre Lens : quel plus bel exemple de pari que de faire revivre une zone dévastée par les révolutions industrielles en installant lart au cur des fosses minières ? Chaque Festival et vous savez que notre pays est celui qui en compte le plus est loccasion dune multiplication impressionnante de populations, de stimulation du tourisme et du commerce. Nos musées, nos monuments attirent des visiteurs du monde entier. Et lannonce du départ dHenri Loyrette, auquel je veux rendre hommage aujourdhui pour luvre exceptionnelle qui a été la sienne, est pour moi loccasion de saluer le plus grand musée du monde, conçu par François Mitterrand et Jack Lang, pour accueillir 5 millions de visiteurs et en accueillant aujourdhui 10.
Cest pourquoi investir dans la culture, ce nest pas simplement dépenser, cest au sens propre du terme investir, cest à dire préparer lavenir. Nous veillerons donc, dans le cadre des exigences budgétaires encore plus rigoureuses qui seront les nôtres dans les années qui viennent, à garder en tête cette dimension économique qui est au cur de lactivité culturelle en général et des industries culturelles en particulier.
Mesdames et Messieurs, la culture est certes un secteur avec ses emplois quil nous faut préserver, son attractivité économique quil nous faut renforcer, son dynamisme qui rend vivant un pays comme le nôtre. Elle nest pas que cela. Et je suis sûr, Monsieur le Maire, quen souhaitant que Marseille soit la capitale européenne de la culture vous avez aussi songé que ce choix de lEurope, qui vous honore et vous oblige, était une occasion unique de fédérer les énergies autour dun sens : dans une société en crise, cest bien sûr la vie des idées, la science, la recherche mais cest aussi la capacité dinterrogation du présent par les créateurs qui sont un moyen dêtre en quête et parfois de retrouver du sens. De ce point de vue, il nous faut convaincre ensemble, vous tous acteurs réunis aujourdhui que la culture nest pas un luxe mais un terreau permettant la constitution dune communauté nationale. Cest particulièrement vrai en France pour des raisons historiques, notre pays ayant toujours accordé une place particulière à la culture et fait de lÉtat le garant et lacteur principal du développement culturel. Mais je souhaite vous le dire aujourdhui : compte tenu des difficultés de chacun, ne tenez pas cela pour acquis ; prenons-le collectivement pour une exigence qui nous appelle sans cesse à le dire et à le montrer. Cest pourquoi dans chaque établissement culturel, dans chaque monument, dans chaque lieu de culture, la politique des publics doit être mise au cur de laction : certes, le public doit être conquis pour découvrir la création. Mais la création ne lui est pas toujours spontanément accessible. Elle suppose médiation, effort dexplication. A chacun dentre nous, il revient de dire à celui qui pense que les uvres ne le concernent pas «cest aussi pour vous ». Cest ici quinterviennent à mes yeux la télévision et la radio publiques. Aux dirigeants bien évidemment de définir les programmes. Mais à la France, dont les résidents font leffort régulier de payer une redevance, dexiger en retour que la création soit au service du plus grand nombre. Je suis profondément convaincu que cette conquête du sens est un instrument essentiel de fabrication du lien social.
Cest pourquoi, Mesdames et Messieurs, je terminerai mon propos en vous parlant dun projet essentiel pour le gouvernement : cest celui de léducation artistique et culturelle. Je sais que bien des ministres, et au-delà certains de mes prédécesseurs sy sont attelés. François Mitterrand en avait fait déjà une de ses priorités. Les initiatives existent : elles sont nombreuses et bien des enseignants dans leur classe familiarisent les élèves à lécriture, au théâtre, à lart, au cinéma. De nombreux artistes interviennent dans les classes et permettent à nos élèves de côtoyer la création.
Mais, Mesdames les ministres, nous le savons, il manque une politique globale, une action collective qui permette cela doit être notre objectif essentiel à chaque écolier, chaque collégien, chaque lycéen de rencontrer dans son parcours scolaire deux à trois fois dans sa scolarité de façon systématique, lart en train de se faire. Il faut une grande ambition. Rien ne se fera sans que soient bousculées certaines habitudes et vaincus certains préjugés. Il faut valoriser les exemples : symboliquement, pour mieux distinguer les initiatives individuelles, le Président de la République remettra personnellement chaque année un prix de laudace créative à des élèves et à des enseignants qui se seront singularisés en ce domaine. Il nous faut donner à ce travail un caractère exemplaire, choisir dans chaque discipline des ambassadeurs chargés de proposer des bonnes pratiques, désigner des artistes référents pour laction culturelle en milieu scolaire mais au-delà il faut mettre en uvre des politiques systématiques. Les formes bien sûr peuvent être variées et rien ne serait plus absurde quun modèle unique : sortie des élèves vers la salle de cinéma, la salle de spectacle ; artistes en résidence ; rôle des enseignants en matière artistique. Tout cela doit y contribuer.
Mais je compte sur la ministre de la culture et le ministre de léducation pour permettre à chaque enfant dans son parcours scolaire de rencontrer dans sa scolarité lactivité artistique : cest la démocratisation culturelle. La question de la culture comme moyen démancipation vis-à-vis des quartiers, celle de laccessibilité des lieux culturels à ceux qui pensent quils ny ont pas droit est un immense projet. Nous savons que cela passe par lécole, par la rencontre du monde des enseignants et celui des artistes. Cela doit figurer au cur du nouveau modèle français que nous sommes en train de construire.
Mesdames et Messieurs,
Lévénement qui nous réunit ici symbolise à lui seul les principes que jai tentés dénoncer.
Un pays qui fait de la culture une valeur comme, Monsieur le Président, un continent qui porte haut son patrimoine, doit croire en sa capacité à mobiliser autour dun projet culturel les énergies les plus diverses, à dynamiser de façon exceptionnelle une ville, et au-delà une Région mais surtout à fédérer, à unifier en donnant du sens. Dans cette période si difficile pour lEurope, si dure pour nos concitoyens, la culture nest pas un luxe, elle est un sens, un vecteur dunité et de réconciliation. Dans cette ville chargée dhistoire, dans cette Région si riche de son patrimoine, de ses paysages et de son ouverture sur le monde, vous avez fait le pari de lavenir. Soyez en félicités.
Mesdames et Messieurs, par votre intermédiaire, jadresse à tous les acteurs du monde culturel, au nom du Président de la République, pour lannée à venir, de sincères vux de bonheur personnel bien sûr mais au-delà des vux de succès. Puissions-nous ensemble fédérer nos énergies pour faire de lannée 2013, qui sera difficile, une année où nous trouverons un sens à notre action. Jen forme le vu ardent.
Très bonne année.
Source http://www.gouvernement.fr, le 14 janvier 2013
Mesdames les Ministres,
Monsieur le Sénateur Maire de Marseille,
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les Présidents, responsables dassociations,
Mesdames et Messieurs,
Le Président de la République devait être présent ici aujourdhui pour présenter ses vux au monde de la culture, à loccasion de louverture de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture.
Vous comprenez les raisons pour lesquelles il ma demandé de le représenter.
Ce moment de vux est bien évidemment teinté dune façon particulière, car nous avons tous à lesprit que nos soldats sont engagés dans laction de soutien au Mali décidée par le Président de la République. Et nous avons une pensée particulière pour le lieutenant Damien Boiteux, et pour sa famille.
Nous voici donc aujourdhui rassemblés au Mucem, musée des civilisations dEurope et de la Méditerranée, magnifiquement réalisé par Rudy Riciotti associé à Roland Carla, qui rassemble dans un geste architectural commun, lhistorique fort Saint Jean et ce « bâtiment deau, de pierre et de vent » où nous sommes aujourdhui. Ce Musée, qui regroupera les collections des arts et traditions populaires, longtemps connues des parisiens, et des collections du Musée de lHomme ambitionne dêtre notre grand musée national sur la Méditerranée. Il ouvrira ses portes au printemps prochain.
Quelle autre ville que Marseille, Monsieur le Sénateur Maire, pouvait accueillir ce Musée de civilisation de référence, qui rendra compte de la diversité, du pluralisme et de la richesse des sociétés méditerranéennes ?
Marseille, ville à lhistoire exceptionnelle. Marseille, ville la plus ancienne de France ! Marseille, ville si intimement liée à lhistoire de la France ! Marseille, façonnée par des apports successifs de populations qui ont construit sa personnalité et son identité. Marseille, grande métropole française, européenne et méditerranéenne.
Marseille connaît le poids des inégalités, subit trop de violences et souffre de cette image injuste, mais aujourdhui cest Marseille qui lutte, qui change et qui gagne !
Marseille et son agglomération possèdent un formidable potentiel de développement dans tous les domaines. Ce potentiel ne peut sexprimer pleinement que si les initiatives sont coordonnées, si les ressources sont rassemblées, si les acteurs sont réunis autour de projets qui fédèrent toutes les énergies. Cest pourquoi le gouvernement porte une grande ambition pour la métropole marseillaise, une ambition qui transcende les appréhensions et qui surmonte les clivages il y en a, et cest normal. Qui peut croire quici, comme ailleurs, on peut soffrir le luxe de la division, alors quun projet métropolitain respectueux de la spécificité et de la parole de chacun est à portée de main, pour donner au grand Marseille tout son rayonnement et lui permettre de donner vie aux projets dont il regorge ?
Vous vous efforcez, Monsieur le Sénateur-Maire, et avant vous dautres sy sont également essayés - je pense bien entendu ici à Gaston Defferre - de donner à Marseille cette unité qui naît de sa diversité. Je noublie pas que notre hymne national, symbole de notre patrie, est La Marseillaise : ce nest pas un hasard ; rassembler les Français au-delà de ce qui semble les diviser, votre ville en est à la fois lillustration et le défi.
Pour réussir ce pari, vous avez choisi, soutenu et accompagné en cela par de nombreuses autres communes, par le département, par la Région de proposer Marseille comme capitale culturelle européenne 2013 et vous avez gagné. Merci, Monsieur le Président de la Commission européenne dêtre là aujourdhui. Capitale européenne de la culture, cette idée, vous vous en souvenez, nous la devons à cette immense figure quétait Melina Mercouri et à Jack, qui réussirent à la faire adopter en 1985 par le conseil des ministres de lUnion européenne. Bien naturellement ce fut alors Athènes qui fut la première capitale.
Lorsquil est réussi, ce pari, qui exige la mobilisation de tous, peut être décisif pour une ville : près de nous, je pense à Lille bien sûr, que son statut de capitale européenne de la culture a profondément transformé depuis 2004 en contribuant à en faire une métropole tournée vers lavenir et qui poursuit depuis lors un projet de manifestations culturelles ambitieuses. Jy vois un symbole : celui de la capacité de notre continent à faire de la culture un élément déterminant de son identité. Celui aussi de notre capacité à parier sur lintelligence collective, la force du rassemblement pour donner à lEurope le souffle dont elle a besoin.
Limportance de la culture en Europe : je sais, Monsieur le Président Barroso, que vous y êtes attaché comme moi. Les acteurs du monde culturel qui sont là aujourdhui sont parfois inquiets lorsquils ont affaire à des interlocuteurs qui leur parlent concurrence, libre marché, aides dEtat. Loin de moi lidée de freiner le développement dune Europe sans frontières, tout au contraire. Mais vous comme moi savons depuis les combats du GATT que la culture nest pas une marchandise comme une autre, que la concurrence notamment avec nos amis doutre Atlantique ne se fait pas à armes égales et que lEurope doit dabord protéger ses cultures nationales dans leur diversité, leur richesse, leur inventivité. Si nous nous battons, ce nest pas pour le plaisir de bâtir des frontières imaginaires ou illusoires. Le programme de Marseille 2013 en atteste par son ouverture sur les cultures du monde entier. Nous savons ce qui nous a permis de conserver notre cinéma. Cest pour le gouvernement un sujet essentiel, et je sais avoir en vous, Monsieur le Président, un interlocuteur attentif.
Avec tous ceux qui sont là aujourdhui, nous ne relâcherons pas leffort pour convaincre nos amis européens de la justesse de nos thèses.
Les questions sont nombreuses : aides au cinéma, TVA des biens culturels, je pense notamment au livre numérique -, participation des acteurs qui profitent des contenus à la chaîne de valeur. Je souhaite que nous parvenions sur toutes ces questions à des solutions innovantes et équilibrées.
Cest bien entendu le sens de la mission de médiation confiée à Marc Schwartz sagissant de la presse et des moteurs de recherche.
Cest aussi au cur de la mission confiée à Pierre Lescure qui vise à protéger les droits des créateurs en les adaptant à lère numérique.
Ainsi, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les élus, vous avez fait ce pari : en proposant Marseille comme capitale européenne de la culture, et en bâtissant depuis un ambitieux programme pour lannée à venir et je veux ici rendre notamment hommage à Bernard Latarjet et Jean François Chougnet qui se sont succédés pour le concevoir avec vous et le mettre en uvre - vous avez fait ce pari de donner à votre ville un nouveau dynamisme économique, de fédérer les énergies, de lui donner une unité, non pas malgré, mais grâce à ses différences, avec la culture. Le thème de léchange est au cur de ces manifestations. Chacun peut en mesurer la pertinence. Je tenais aujourdhui en étant parmi vous à cette ouverture à vous en remercier et à vous féliciter.
Puisque sont présents ici de nombreux acteurs du monde culturel, cest à eux aussi que je voudrais madresser : car ce pari que vous avez fait, jai la conviction que nous pouvons le faire à léchelle de la nation toute entière. Permettez-moi maintenant den dire quelques mots.
Le gouvernement comprend, comme il entend, les inquiétudes qui peuvent naître ici ou là, sur le financement de la culture.
Chacun sait que notre pays doit retrouver léquilibre doit retrouver léquilibre de nos comptes publics, car rien ne serait plus dévastateur que de laisser dériver lendettement. Dès lors, nous navons pas dautre choix que de faire des économies.
Mais je tiens à confirmer lengagement du Président, de préserver en 2013 la création et le spectacle vivant.
Mesdames et Messieurs, il me paraît fondamental de dire ici limportance que revêtent à mes yeux les activités que vous représentez et que le ministère de la culture et de la communication suit avec une attention jamais démentie.
Pendant longtemps, il pouvait être mal vu de rappeler que la culture était aussi un élément de croissance économique. La création ne devait pas sembarrasser de ces considérations. Fort heureusement, je crois que ces temps sont révolus : aux yeux du monde entier, notre système français de soutien au cinéma qui permet de produire plus de 200 films par an est un modèle : à la clé figurent aussi des dizaines de milliers demplois, tout un milieu qui vit des tournages et de leurs préparations. Notre industrie du livre, malgré ses difficultés, reste exemplaire par la diversité de sa production et ses développements internationaux. La musique après avoir connu des années dune extrême difficulté, commence à voir émerger de nouveaux modèles économiques. Le Président de la République a inauguré récemment le Louvre Lens : quel plus bel exemple de pari que de faire revivre une zone dévastée par les révolutions industrielles en installant lart au cur des fosses minières ? Chaque Festival et vous savez que notre pays est celui qui en compte le plus est loccasion dune multiplication impressionnante de populations, de stimulation du tourisme et du commerce. Nos musées, nos monuments attirent des visiteurs du monde entier. Et lannonce du départ dHenri Loyrette, auquel je veux rendre hommage aujourdhui pour luvre exceptionnelle qui a été la sienne, est pour moi loccasion de saluer le plus grand musée du monde, conçu par François Mitterrand et Jack Lang, pour accueillir 5 millions de visiteurs et en accueillant aujourdhui 10.
Cest pourquoi investir dans la culture, ce nest pas simplement dépenser, cest au sens propre du terme investir, cest à dire préparer lavenir. Nous veillerons donc, dans le cadre des exigences budgétaires encore plus rigoureuses qui seront les nôtres dans les années qui viennent, à garder en tête cette dimension économique qui est au cur de lactivité culturelle en général et des industries culturelles en particulier.
Mesdames et Messieurs, la culture est certes un secteur avec ses emplois quil nous faut préserver, son attractivité économique quil nous faut renforcer, son dynamisme qui rend vivant un pays comme le nôtre. Elle nest pas que cela. Et je suis sûr, Monsieur le Maire, quen souhaitant que Marseille soit la capitale européenne de la culture vous avez aussi songé que ce choix de lEurope, qui vous honore et vous oblige, était une occasion unique de fédérer les énergies autour dun sens : dans une société en crise, cest bien sûr la vie des idées, la science, la recherche mais cest aussi la capacité dinterrogation du présent par les créateurs qui sont un moyen dêtre en quête et parfois de retrouver du sens. De ce point de vue, il nous faut convaincre ensemble, vous tous acteurs réunis aujourdhui que la culture nest pas un luxe mais un terreau permettant la constitution dune communauté nationale. Cest particulièrement vrai en France pour des raisons historiques, notre pays ayant toujours accordé une place particulière à la culture et fait de lÉtat le garant et lacteur principal du développement culturel. Mais je souhaite vous le dire aujourdhui : compte tenu des difficultés de chacun, ne tenez pas cela pour acquis ; prenons-le collectivement pour une exigence qui nous appelle sans cesse à le dire et à le montrer. Cest pourquoi dans chaque établissement culturel, dans chaque monument, dans chaque lieu de culture, la politique des publics doit être mise au cur de laction : certes, le public doit être conquis pour découvrir la création. Mais la création ne lui est pas toujours spontanément accessible. Elle suppose médiation, effort dexplication. A chacun dentre nous, il revient de dire à celui qui pense que les uvres ne le concernent pas «cest aussi pour vous ». Cest ici quinterviennent à mes yeux la télévision et la radio publiques. Aux dirigeants bien évidemment de définir les programmes. Mais à la France, dont les résidents font leffort régulier de payer une redevance, dexiger en retour que la création soit au service du plus grand nombre. Je suis profondément convaincu que cette conquête du sens est un instrument essentiel de fabrication du lien social.
Cest pourquoi, Mesdames et Messieurs, je terminerai mon propos en vous parlant dun projet essentiel pour le gouvernement : cest celui de léducation artistique et culturelle. Je sais que bien des ministres, et au-delà certains de mes prédécesseurs sy sont attelés. François Mitterrand en avait fait déjà une de ses priorités. Les initiatives existent : elles sont nombreuses et bien des enseignants dans leur classe familiarisent les élèves à lécriture, au théâtre, à lart, au cinéma. De nombreux artistes interviennent dans les classes et permettent à nos élèves de côtoyer la création.
Mais, Mesdames les ministres, nous le savons, il manque une politique globale, une action collective qui permette cela doit être notre objectif essentiel à chaque écolier, chaque collégien, chaque lycéen de rencontrer dans son parcours scolaire deux à trois fois dans sa scolarité de façon systématique, lart en train de se faire. Il faut une grande ambition. Rien ne se fera sans que soient bousculées certaines habitudes et vaincus certains préjugés. Il faut valoriser les exemples : symboliquement, pour mieux distinguer les initiatives individuelles, le Président de la République remettra personnellement chaque année un prix de laudace créative à des élèves et à des enseignants qui se seront singularisés en ce domaine. Il nous faut donner à ce travail un caractère exemplaire, choisir dans chaque discipline des ambassadeurs chargés de proposer des bonnes pratiques, désigner des artistes référents pour laction culturelle en milieu scolaire mais au-delà il faut mettre en uvre des politiques systématiques. Les formes bien sûr peuvent être variées et rien ne serait plus absurde quun modèle unique : sortie des élèves vers la salle de cinéma, la salle de spectacle ; artistes en résidence ; rôle des enseignants en matière artistique. Tout cela doit y contribuer.
Mais je compte sur la ministre de la culture et le ministre de léducation pour permettre à chaque enfant dans son parcours scolaire de rencontrer dans sa scolarité lactivité artistique : cest la démocratisation culturelle. La question de la culture comme moyen démancipation vis-à-vis des quartiers, celle de laccessibilité des lieux culturels à ceux qui pensent quils ny ont pas droit est un immense projet. Nous savons que cela passe par lécole, par la rencontre du monde des enseignants et celui des artistes. Cela doit figurer au cur du nouveau modèle français que nous sommes en train de construire.
Mesdames et Messieurs,
Lévénement qui nous réunit ici symbolise à lui seul les principes que jai tentés dénoncer.
Un pays qui fait de la culture une valeur comme, Monsieur le Président, un continent qui porte haut son patrimoine, doit croire en sa capacité à mobiliser autour dun projet culturel les énergies les plus diverses, à dynamiser de façon exceptionnelle une ville, et au-delà une Région mais surtout à fédérer, à unifier en donnant du sens. Dans cette période si difficile pour lEurope, si dure pour nos concitoyens, la culture nest pas un luxe, elle est un sens, un vecteur dunité et de réconciliation. Dans cette ville chargée dhistoire, dans cette Région si riche de son patrimoine, de ses paysages et de son ouverture sur le monde, vous avez fait le pari de lavenir. Soyez en félicités.
Mesdames et Messieurs, par votre intermédiaire, jadresse à tous les acteurs du monde culturel, au nom du Président de la République, pour lannée à venir, de sincères vux de bonheur personnel bien sûr mais au-delà des vux de succès. Puissions-nous ensemble fédérer nos énergies pour faire de lannée 2013, qui sera difficile, une année où nous trouverons un sens à notre action. Jen forme le vu ardent.
Très bonne année.
Source http://www.gouvernement.fr, le 14 janvier 2013